III. L'ENVELOPPE NORMÉE ET SA VARIABLE D'AJUSTEMENT
A. LA PROLONGATION DU CONTRAT DE CROISSANCE ET DE SOLIDARITÉ
L'article 21 du présent projet de loi de finances
prolonge
pour un an l'application des dispositions de l'article 57 de la loi de finances
pour 1999, qui fixe le taux d'évolution du contrat de croissance et de
solidarité.
Il conserve en 2002 le mode de calcul applicable en 2001, c'est-à-dire
un indice comprenant l'évolution des prix pour l'année à
venir et 33 % du taux d'évolution du PIB pour l'année en cours.
Ce choix constitue une déception à un double titre :
- la rupture avec le principe d'une enveloppe triennale est regrettable car
elle empêche la tenue d'un débat d'ensemble sur le financement des
collectivités locales. Ainsi, la loi sur l'intercommunalité du 12
juillet 1999 avait limité aux années 2000 et 2001 la
possibilité de financer les communautés d'agglomération
par la DCTP, de manière à ce qu'un débat global sur le
rôle de la DCTP, qui est aussi la variable d'ajustement du contrat de
croissance, puisse être tenu. En repoussant la négociation du
nouveau contrat, le gouvernement interdit un débat de type ;
- la reconduction de la fraction du PIB de 33 % est contraire à la
logique du contrat de croissance et de solidarité, qui avait depuis 1999
retenu chaque année une part croissante de l'évolution du PIB
(20 % en 1999, 25 % en 2000 et 33 % en 2001).
Plus globalement, il faudra mettre l'année à venir à
profit pour
s'interroger sur la finalité de l'existence d'une
enveloppe normée
. Présentée par la secrétaire
d'Etat chargée du budget, lors de la discussion à
l'Assemblée nationale de la première du présent projet de
loi de finances, comme une disposition permettant «
l'association
des collectivités locales aux fruits de la
croissance
»
7(
*
)
, l'enveloppe normée est en
réalité, du fait du taux d'indexation retenu pour son
évolution, un mécanisme uniquement destiné à
réduire le montant de la DCTP d'une année sur l'autre.
Si le contrat de croissance et de solidarité n'existait pas, les
concours financiers de l'Etat aux collectivités locales augmenteraient
plus vite qu'ils ne le font aujourd'hui. Il est donc difficile d'y voir une
association des collectivités locales aux fruits de la croissance.
B. L'INDEXATION DE L'ENVELOPPE NORMÉE EN 2002
Contrairement à la rhétorique fréquemment
employée,
le contrat de croissance et de solidarité
qui,
en application de l'article 57 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266
du 30 décembre 1998), fixe le taux d'indexation de
« l'enveloppe normée » des concours de l'Etat aux
collectivités locales
ne constitue pas un outil destiné
à associer les collectivités locales aux fruits de la croissance
mais un mécanisme permettant de déterminer le taux
d'évolution de la dotation de compensation de la taxe professionnelle
(DCTP) d'une année sur l'autre
.
Le montant total de l'enveloppe est déterminé en appliquant
à son montant au titre d'une année un indice comprenant d'une
part l'évolution prévisionnelle des prix pour l'année
à venir et une fraction du taux de croissance du produit
intérieur brut (PIB) pour l'année en cours.
L'enveloppe est composée de treize dotations, dont douze évoluent
en fonction de taux d'évolution fixés par la loi. La
treizième, la DCTP (hors REI), joue le rôle de variable
d'ajustement. Son montant résulte de la différence entre le
montant total de l'enveloppe et la somme du montant des douze autres dotations.
Pour les douze autres dotations, l'existence d'une enveloppe normée
ne change rien au mode de calcul de leur montant.
Il convient de noter que, pour le calcul de l'enveloppe normée, donc
pour le calcul de l'évolution du montant de la DCTP résultant de
l'existence de l'enveloppe normée :
- le montant de l'enveloppe normée au titre de l'année
n
auquel est appliqué le taux d'indexation pour déterminer le
montant de l'enveloppe en
n+1
tient compte du montant
« recalé » de la DGF, c'est-à-dire le montant
de la DGF de l'année
n
recalculé en fonction des derniers
indices économiques connus en application de dispositions de l'article
L. 1613-1 du code général des collectivités
territoriales ;
- les montants retenus pour calculer l'enveloppe normée peuvent
différer des montants inscrits dans le projet de loi de finances. Tout
d'abord, les « abondements exceptionnels » dont peuvent
faire l'objet, dans le cadre des lois de finances, les dotations comprises dans
l'enveloppe normée ne sont pas prises en compte dans le calcul de
l'enveloppe, afin que ces mesures ne pèsent pas sur le montant de la
variable d'ajustement.
La différence entre les montants retenus pour calculer l'enveloppe et
les montants inscrits dans les lois de finances a parfois d'autres
explications. Pour la dotation générale de
décentralisation (DGD), les montants retenus sont ceux qui permettent
une comparaison à périmètre constant, et tiennent compte
des crédits de la « DGD culture », qui est
virée en cours d'exercice au budget du ministère de
l'intérieur. Pour les dotations d'équipement, les montants pris
en compte sont les autorisations de programme. Pour le fonds national de
péréquation de la taxe professionnelle, le montant pris en compte
englobe le produit de la cotisation de péréquation qui alimente
le fonds, tandis que le montant du prélèvement sur les recettes
de l'Etat ne le comprend pas.
Les écarts entre les montants inscrits dans les lois de finances et les
montants retenus pour calculer l'enveloppe normée ont tous une
explication justifiée. Il n'en reste pas moins qu'ils contribuent
à illustrer le
caractère virtuel de cette enveloppe, dont la
seule composante à être véritablement affectée par
son existence est la variable d'ajustement
.
Ecart entre le montant des dotations inscrit dans le projet de loi de finances pour 2002 et les montants utilisés pour calculer le montant de l'enveloppe normée
(en millions d'euros)
Pour
2002, l'article 21 du présent projet de loi de finances propose de
reconduire le mode de calcul de l'enveloppe normée applicable en 2001,
c'est-à-dire d'appliquer au montant de 2001 un indice composé de
la prévision d'évolution des prix de l'année à
venir et 33 % du taux de croissance du PIB en 2001.
L'indice ainsi obtenu est le suivant :
1,5 (prix) + 0,76 (33 % de la prévision de croissance du PIB en 2001, soit 2,3 %) = 2,26 %
En 2001, cet indice s'établissait à 2,32 %.
Evolution de l'enveloppe normée en 2002
Source : documents remis au comité des finances locales par le gouvernement
C. L'ÉVOLUTION DE LA DCTP EN 2002
Le
montant de la DCTP qui résulte de l'application de l'indexation de
l'enveloppe normée en 2002 s'établit à 1.589,6 millions
d'euros. Il est inférieur de 6,94 % à son montant de 2001.
Toutefois, en application des dispositions de l'article 21 du présent
projet de loi de finances relatives au financement des communautés
d'agglomération qui prévoient un prélèvement de
126 millions d'euros,
la baisse de la DCTP entre 2001 et 2002
s'établit à 7,5 %.
Evolution de la DCTP entre 2001 et 2002
(en millions d'euros)
|
2001 |
2002 |
Evolution en % |
DCTP issue de l'application du contrat de croissance et de solidarité |
1.708,04 |
1.589,59 |
- 6,94 % |
DCTP issue du contrat, minorée du prélèvement au profit des communautés d'agglomération |
1.708,04-126,08= 1.581,96 |
1.589,59-126,08 =1.463,51 |
- 7,5 % |
DCTP minorée du financement des communautés d'agglomération, mais majorée des sommes destinées en prendre en compte l'arrêt Pantin |
1.581,96 |
1.463,51 + 80,04 = 1.543,55 |
- 2,4 % |
Il
convient de souligner que les collectivités et établissements
publics de coopération intercommunale qui perçoivent des
attributions au titre de cette dotation verront leur baisse réduite en
raison de l'abondement de la DCTP en application des dispositions de l'article
11 du présent projet de loi de finances. Cet abondement, dont le montant
s'élève à 80,04 millions d'euros, est destiné
à financer les sommes qui seront reversées aux
collectivités locales en compensation de la validation
législative proposée par cet article et destiné à
couper court aux contentieux liés à la non prise en compte des
rôles supplémentaires de taxe professionnelle pour le calcul des
attributions de DCTP. Ces contentieux se développent depuis qu'est
intervenu l'arrêt du Conseil d'Etat du 18 octobre 2000
Commune de
Pantin
.
Avec cet abondement, la baisse de la DCTP est ramenée à
2,4 %. Ces sommes constituent pour les collectivités locales une
ressource exceptionnelle, qu'il n'est pas intellectuellement satisfaisant de
prendre en compte pour apprécier l'évolution de la DCTP entre
2001 et 2002.