II. L'ÉVOLUTION DE L'EFFORT FINANCIER GLOBAL EN FAVEUR DE LA VILLE
L'effort
financier en faveur de la ville qui figure dans le
« jaune » budgétaire pour 2002 est
résumé dans le
gr aphique ci-après
. Le montant
total dépasse
7 milliards d'euros.
Cet effort ne provient pas seulement de l'Etat, puisque les
collectivités territoriales y contribuent à hauteur de 1 100
milliards d'euros en 2002, contre 975 en 2001. Les versements communautaires et
les prêts de la Caisse des dépôts et consignations sont
également comptabilisés. Concernant les prêts consentis
à des taux favorables, la prise en compte du montant total des dotations
gonfle l'effort financier total, puisque la subvention ne correspond en fait
qu'au différentiel entre le taux préférentiel du
prêt et celui des prêts du marché.
Enfin, contrairement à ce que fait le « jaune », les
crédits de solidarité urbaine ne devraient pas être
comptabilisés dans l'effort financier de l'Etat.
L'effort financier de l'Etat stricto sensu
correspond donc seulement aux
crédits budgétaires des ministères et à
l'évaluation de la dépense fiscale, soit
un montant global de
4 363,11 millions d'euros, en hausse de 1,3 % par rapport à
2001.
Etat récapitulatif de l'effort financier en faveur de la politique de la
ville
(en millions d'euros)
Source : jaunes « état récapitulatif de l'effort
financier consacré
à la politique des villes et du développement social
urbain »
Il convient de souligner que l'état récapitulatif de l'effort
budgétaire consacré à la politique de la ville ne fournit
que des données en «
dépenses ordinaires et
autorisations de programme
» et ne donne aucune indication
relative aux montants des «
dépenses ordinaires et
crédits de paiement
» qui représentent
le
montant réel des dépenses que le gouvernement est autorisé
à engager au cours de l'exercice
.
Cette présentation ne permet pas une appréciation
véritablement exacte de l'effort financier global, car elle conduit
à un
gonflement artificiel des montants inscrits au
« jaune ».
A. LA CONTRIBUTION DES AUTRES MINISTÈRES
La
contribution des différents ministères à la politique de
la ville est récapitulée à l'intérieur de trois
agrégats distincts.
1.
L'agrégat A1 «
crédits
spécifiques ville
» a déjà été
analysé dans la première partie de ce rapport.
2.
L'agrégat A2 ("
crédits contractualisés
relevant de divers ministères
") retrace les crédits
contractualisés au sein des engagements "politique de la ville" de
chaque contrat de plan Etat-Région et le financement des contrats de
ville du XIIème plan. Les crédits de cet agrégat
présentent un lien étroit avec les instruments de la politique de
la ville, et s'élèvent à 67,4 millions d'euros en
2002, comme en 2001.
3.
Les
crédits relevant de divers ministères
contribuant à la politique de la ville
(agrégat A3) sont
en hausse de 0,76 %, à 2,37 milliards d'euros.
Ces crédits
représentent la majeure partie des dépenses de l'Etat en faveur
de la politique de la ville
.
Crédits relevant de divers ministères concourant à la politique de la ville
en millions d'euros
Source : jaunes « état
récapitulatif de
l'effort financier consacré à la politique des villes et du
développement social urbain »
Les autres sections du ministère de l'emploi et de la solidarité
(en particulier les programmes « emplois jeunes » et
« TRACE ») contribuent massivement à la politique de
la ville, puisque leur contribution s'établit à 815,61 millions
d'euros, en progression de 0,6 %, et représentera donc, en 2002,
plus de deux fois le montant des crédits inscrits au bleu
« Ville » (372,204 millions d'euros).
B. LA CONTRIBUTION DE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS
La
Caisse des dépôts et consignations joue un rôle important
dans financement de la politique de la ville à travers une série
de prêts, attribués dans le cadre de programmations
concertées établies avec la Délégation
Interministérielle à la Ville :
- les prêts projets urbains (PPU) sont destinés au
financement de l'ensemble des investissements (hors logement) liés
à la politique de la ville. Les estimations de consommation pour 2002
s'élèvent à 503,08 millions d'euros, soit exactement le
même montant qu'en 2001 (contre 489,51 millions en 1999).
- les prévisions de consommation des prêts renouvellement
urbain (PRU), dont les prêts démolition-reconstruction,
s'élèvent pour 2002 à 503,08 millions d'euros, soit
une légère progression par rapport à 2001 (491,42 millions
d'euros), ce qui marque un infléchissement de leur croissance (en l'an
2000, la dépense a été de 327,61 millions d'euros).
La participation de la Caisse des dépôts et consignations au
financement de la politique de la ville est estimée en l'an 2002
à 1,16 milliard d'euros (soit 350,63 millions d'euros en
équivalent subventions), contre 1,11 milliard d'euros (soit 297, 58
millions d'euros en équivalent subventions) en 2001.
C. LES DÉPENSES FISCALES ET COMPENSATIONS
Selon le
« jaune », les exonérations fiscales et sociales et
les compensations seraient de 788,86 millions d'euros en l'an 2001 et de
788,94 millions d'euros
en l'an
2002.
Il s'agit en quasi-totalité des régimes de zones franches
urbaines (ZFU) et de zones de redynamisation urbaine (ZRU), que le
présent projet de loi de finances, dans ses articles 8 et 71, et le
projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002,
dans son article 7, proposent de fusionner en un régime unique.
1. Les zones de redynamisation urbaine et les zones franches urbaines
Les
zones de redynamisation urbaine (ZRU)
et les
zones franches urbaines
(ZFU)
, qui
en font partie
,
ont été
instaurées par la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative
à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville.
Ces zones sont incluses dans l'ensemble, plus vaste, des
zones urbaines
sensibles (ZUS)
, caractérisées par la présence de
grands ensembles ou de quartiers d'habitat dégradé et par un
déséquilibre accentué entre l'habitat et l'emploi
5(
*
)
.
- • Les zones de redynamisation urbaine (ZRU) correspondent à celles des zones urbaines sensibles qui sont confrontées à des difficultés particulières, appréciées en fonction notamment d'un indice synthétique, établi dans des conditions fixées par décret. La liste de ces zones est également fixée par décret.
Les zones de redynamisation urbaine (ZRU)
Exonérations fiscales et sociales et compensations,
en millions d'euros
Source : Ministère délégué à la
ville, Bilan des zones franches urbaines, rapport au Parlement, juillet
2001
- • Les zones franches urbaines (ZFU) ont été créées, au sein des ZRU, dans des quartiers de plus de 10 000 habitants particulièrement défavorisés au regard des critères pris en compte pour la détermination des zones de redynamisation urbaine. La liste des 44 ZFU est annexée à la loi relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, leur délimitation étant opérée par décret en Conseil d'Etat 7( * ) . La principale exonération dans les ZFU est celle des cotisations patronales , qui concerne les entreprises qu'elles soient nouvelles ou non , seulement pour les 50 premiers salariés, et dure 5 ans (pour un coût de l'ordre de 150 millions d'euros par an de 1998 à 2001). Le coût total du dispositif est de l'ordre de 300 millions d'euros par an. Le graphique ci-après indique les évolutions des différentes composantes du dispositif depuis 1997.
Les zones franches urbaines (ZFU)
Exonérations fiscales et sociales et compensations,
en millions d'euros
Source : Ministère délégué à la ville,
Bilan des zones franches urbaines,
Rapport au Parlement, juillet 2001
Il convient en outre d'indiquer l'existence d'une
clause d'embauches
locales
, ces dernières devant s'élever à au moins
20 %
des embauches totales.
2. La « moralisation » du dispositif des ZFU
S'appuyant sur les conclusions et recommandations des deux
rapports
d'inspection administrative (IGA-IGF, IGAS) remis au Gouvernement début
1999 et sur des expertises complémentaires menées sous
l'égide de la Délégation interministérielle
à la Ville, le Gouvernement a proposé un certain nombre de
mesures dites de « moralisation » du dispositif des zones
franches urbaines.
Ces dispositions ont été adoptées dans la loi n°
2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et
au renouvellement urbains (loi SRU), dans ses articles 86 à 92, et
portent sur :
- la suppression du régime d'exonérations fiscales en cas de
transfert de l'entreprise d'une zone franche urbaine vers une autre zone
franche urbaine ;
- le maintien d'une exonération totale des charges patronales pour les
créations nettes d'emploi et sa réduction de moitié pour
les emplois transférés ;
- la suppression du régime d'exonérations sociales en cas de
transfert de l'entreprise d'une zone franche urbaine vers une autre zone
franche urbaine sans accroissement de l'effectif ;
- la suppression du droit à exonération des charges sociales
patronales pour les embauches nouvelles si l'entreprise a procédé
à un licenciement dans les 12 mois précédents ;
- la fixation d'un nombre d'heures minimum de travail hebdomadaire pour la
comptabilisation des embauches de résidents des ZFU ouvrant droit
à l'application de la clause d'embauche locale de 20% ;
- l'instauration d'une déclaration préalable aux embauches
exonérées - à l'instar de ce qui existe pour d'autres
dispositifs d'aides à l'emploi ;
- l'instauration d'une déclaration récapitulative annuelle des
mouvements de main d'oeuvre pour les établissements implantés
dans une zone franche urbaine.
3. Un dispositif qui a favorisé l'emploi dans les zones franches urbaines
La dernière évaluation du dispositif présentée par le gouvernement est le Bilan des zones franches urbaines , remis au Parlement au mois de juillet de l'année 2001.
a) Les lacunes de l'évaluation
Il
convient tout d'abord de souligner les lacunes de l'évaluation.
Ainsi, selon ce rapport, en l'absence d'un système d'information
destiné à faciliter le suivi du dispositif, «
il
n'est pas aisé de dresser un bilan exact de ces régimes
dérogatoires en termes d'implantation et de développement des
entreprises, d'évolution de l'emploi salarié et non
salarié, d'impact sur les quartiers et les villes
concernées
».
En particulier,
ce rapport n'indique pas d'estimation du nombre d'emplois
créés grâce aux deux dispositifs.
Si, de l'avis
général,
la création d'emplois dans les ZRU semble
avoir été «
très faible
»
8(
*
)
,
la situation est
plus nuancée
dans le cas des
ZFU.
b) Le doublement du nombre d'emplois depuis 1997 dans les zones franches urbaines
Les
informations essentielles du rapport s'agissant des
ZFU
sont les
suivantes :
- 49 000 salariés bénéficiaient des exonérations en
1999 ;
- le nombre de salariés et d'entreprises aurait doublé dans les
ZFU depuis 1997. Ainsi, dans les 15 ZFU étudiées (sur un total de
44), 5.076 emplois supplémentaires auraient été
créés depuis 1997. De même, selon ce rapport, l'ACOSS
évalue le nombre total de salariés dans les ZFU à 31.000
en 1997 et 57.000 en 1999. Il convient cependant de souligner que, selon les
informations fournies par la délégation interministérielle
à la ville à votre commission des finances, ces chiffres ont
depuis été légèrement revus à la baisse,
comme l'indique le tableau ci-après.
Nombre total de salariés dans les zones franches urbaines (effectif reconstitué ACOSS)
Source |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Emplois créés entre 1997 et 1999 |
Emplois créés entre 1997 et 2000 |
Rapport au Parlement (1) |
31 000 |
44 000 |
57 000 |
- |
26 000 |
- |
Réponse de la DIV à votre commission des finances |
31 000 |
42 635 |
50 131 |
54 706 |
19 131 |
23 706 |
(1)
Ministère délégué à la ville, Bilan des
zones franches urbaines, rapport au Parlement, juillet 2001
- 30 % de ces emplois concerneraient les habitants des ZFU (la loi imposant un
taux de 20 %) ;
- les transferts d'entreprises en ZFU seraient peu nombreux (seulement
21,8 % des entreprises créées dans les ZFU). 78,8 % des nouvelles
entreprises en ZFU seraient des créations (le solde consistant en
des reprises) ;
- la clause d'emploi d'au moins 20 % d'habitants des ZFU aurait
été respectée, le pourcentage moyen étant de 31,9 %.
Autres informations du rapport au Parlement
80 % des
entreprises implantées en ZFU ont moins de 5 salariés.
Les secteurs dont le nombre d'entreprises a le plus augmenté sont le BTP
et les services aux entreprises (en particulier les services de nettoyage et de
gardiennage). Le commerce de détail a en revanche vu son nombre
d'entreprises diminuer.
4. La réforme proposée par le gouvernement
La
réforme proposée par le gouvernement poursuit un double
objectif :
- éviter une sortie brutale des dispositifs d'exonérations
fiscales et sociales pour les entreprises implantées en zones franches
urbaines, par un mécanisme de sortie dégressive sur 3 ans ;
- instaurer un régime fiscal et social unique à compter du
1
er
janvier 2002 dans les zones de redynamisation urbaine (qui
comprennent les actuelles ZFU).
Il convient de souligner que cette réforme serait mise en oeuvre par
plusieurs textes :
- la
sortie dégressive
du dispositif ZFU le serait, dans le cas
des
cotisations sociales
, par
l'article 71
du projet de loi de
finances pour 2002, rattaché au budget de la ville (
cf.
commentaire page
28
du présent
rapport
) ;
- l'instauration du régime unique est proposée, pour son volet
social, par l'article 7 du projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 2002 ;
- le volet fiscal de la réforme (sortie dégressive et nouveau
régime unique) est proposé par l'article 8 du projet de loi de
finances pour 2002.
Le tableau ci-après synthétise les principaux
éléments du dispositif actuel et du dispositif proposé.
Nouveau régime envisagé et prolongation dégressive
Mesures fiscales et sociales |
Zones
franches urbaines
|
Zones
de redynamisation urbaine
|
« Nouveau régime unique » au 1 er janvier 2002 |
Dispositions de sortie ZFU et ZRU |
Exonérations de cotisations sociales |
|
|||
Texte réformant le dispositif |
|
|
Article 7 du PLFSS pour 2002 + décret |
Article 71 du PLF 2002 (rattaché au budget de la Ville) (1) |
Cotisations sociales |
- 5 ans
d'exonération à 100 %*, dans la limite de 50 salariés
et de 1,5 fois le SMIC.
|
- 1 an
d'exonération pour les créations d'emploi dans la limite de
50 salariés et de 1,5 fois le SMIC.
|
Pour les
entreprises appliquant une durée de travail de 35 heures
hebdomadaires au plus :
|
Uniquement en ZFU :
|
Cotisations sociales personnelles maladie-maternité des artisans et commerçants |
- 5 ans d'exonération dans la limite de 1,5 fois le SMIC |
- |
(2)
|
(2)
|
(1)
cf. commentaire page
28
du présent rapport.
(2) Amendement du gouvernement adopté par l'Assemblée nationale
en première lecture.
Mesures fiscales et sociales |
Zones
franches urbaines
|
Zones
de redynamisation urbaine
|
« Nouveau régime unique » au 1 er janvier 2002 |
Dispositions de sortie ZFU et ZRU |
|
Modifications prévues par l'article 8 du présent projet de loi de finances |
|||||
Impôt sur les bénéfices (impôt sur les sociétés, impôt sur le revenu : BIC-BNC) |
5 ans
d'exonération
|
5 ans
d'exonération
|
Uniquement en ZFU :
|
||
|
|
|
Ouverture des droits limitée à fin 2004 |
|
|
Taxe professionnelle |
5 ans d'exonération
- réservée aux entreprises de moins de
50 salariés à la date de leur
création.
|
5 ans
d'exonération
|
En ZFU
et ZRU :
|
||
|
|
|
Ouverture des droits limitée à fin 2004 |
|
|
Taxe foncière sur les propriétés bâties |
5 ans d'exonération totale |
- |
- |
||
Mesures fiscales et sociales |
Zones
franches urbaines
|
Zones
de redynamisation urbaine
|
« Nouveau régime unique » au 1 er janvier 2002 |
Dispositions de sortie ZFU et ZRU |
|
Modification de nature réglementaire, annoncée dans l'exposé des motifs de l'article 68 du présent projet de loi de finances |
|||||
Prime à l'embauche |
- |
- |
L'employeur bénéficiera de la prime maximum afférente au CIE pour tout demandeur d'emploi résident en ZUS qui a cumulé 12 mois de chômage dans les 18 derniers mois précédant son recrutement. |
- |
Sources :
Ministère délégué à la ville, Bilan des
zones franches urbaines, rapport au Parlement, juillet 2001
Projet de loi de finances pour 2002
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002
D. LA SOLIDARITÉ URBAINE
La
dotation de solidarité urbaine
(DSU), instituée par la loi
d'orientation pour la ville de 1991, a pour but d'améliorer les
conditions de vie dans les communes confrontées à une
insuffisance de ressources et à des charges sociales
élevées. Elle est répartie entre les communes de 5.000
à 9.999 habitants d'une part, et les communes de plus de 10.000
habitants d'autre part, en fonction de critères
d'éligibilité tels que le pourcentage de
bénéficiaires d'aides au logement dans la commune, le potentiel
fiscal, le parc de logements sociaux et le revenu moyen par habitant.
Les crédits alloués à la DSU en 2002 devraient
s'élever à 606,9 millions d'euros, soit une
progression
de
6 %.
En Ile-de-France, les crédits du
Fonds de solidarité des
communes de la région Ile-de-France
, alimenté par un
prélèvement sur les ressources fiscales des communes de la
région, sont
stables
en 2002.
Pour 2002, les dotations de la DSU et du FSRIF sont estimées , au
total, à 745,01 millions d'euros, ce qui représente une
augmentation de 4,3 %.