TRAVAUX DE LA COMMISSION

AUDITION DE MME NICOLE PRUD'HOMME,
PRÉSIDENTE DU CONSEIL D'ADMINISTRATION
DE LA CAISSE NATIONALE DES ALLOCATIONS FAMILIALES (CNAF)

Réunie le mercredi 17 octobre 2001, sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'audition de Mme Nicole Prud'homme, présidente du conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF), sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 .

Accueillant Mme Nicole Prud'homme, M. Nicolas About, président , l'a félicitée pour sa réélection à la tête du conseil d'administration de la CNAF.

Mme Nicole Prud'homme s'est réjouie que le Sénat reçoive successivement deux présidentes de caisse nationale de sécurité sociale.

Elle a rendu hommage à M. Claude Huriet, ancien président du conseil de surveillance de la CNAF, pour le travail accompli ainsi que pour ses qualités humaines exceptionnelles.

Elle a ensuite indiqué qu'un conseil extraordinaire s'était réuni et avait adopté, à la quasi-unanimité, un avis négatif à l'encontre du projet de loi de financement de sécurité sociale pour 2002.

Elle a affirmé, à ce titre, l'attachement du conseil d'administration aux principes fondateurs de la sécurité sociale qui impliquent la transparence des comptes et la responsabilité des partenaires sociaux.

Elle a considéré que cette transparence et la vérité des comptes interdisaient que le coût des 35 heures soit financé par la sécurité sociale. A ce titre, elle a rappelé que l'annulation des créances de la branche sur le FOREC coûterait, à cette dernière, 2,8 milliards de francs et provoquerait la mise en déficit du régime général en 2000.

Elle a ensuite souhaité noter le succès de la convention d'objectif et de gestion nouvellement signée. Elle a déclaré, à ce titre, que le conseil d'administration avait cherché à rappeler, par cette signature, le rôle joué par la branche dans le maintien de la cohésion sociale.

Elle a, en outre, rappelé que le conseil d'administration s'était prononcé contre l'affectation de la moitié des excédents de la CNAF au fonds de réserve des retraites.

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur , s'est associé aux félicitations adressées par le président à Mme Nicole Prud'homme. Il lui a demandé tout d'abord si la CNAF disposait d'une estimation du coût, en termes de prestations, du renouveau démographique et si la croissance économique, en raison de l'évolution du plafond de ressources déterminant l'accès à certaines prestations, avait eu pour effet d'exclure des familles du bénéfice de ces mêmes prestations.

Mme Nicole Prud'homme a déclaré ne pas disposer d'une évaluation suffisamment précise pour répondre à la première question du rapporteur, mais elle s'est engagée à lui fournir cette réponse par écrit dans les prochains jours.

Elle a toutefois noté que ce renouveau des naissances s'était nettement affirmé en 2000, provoquant apparemment une accélération des dépenses d'allocations pour jeune enfant et d'allocations parentales d'éducation, même si, dans le même temps, le complément familial confirmait sa décroissance tendancielle liée à la diminution du nombre des familles nombreuses.

S'agissant du second point soulevé par le rapporteur, elle a indiqué que les services de la CNAF travaillaient sur cette question mais ne pouvaient pas fournir dans l'immédiat une réponse suffisamment précise.

Puis M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur , a demandé à Mme Nicole Prud'homme si la CNAF avait dès aujourd'hui recensé les projets susceptibles d'être financés par les crédits du fonds d'investissement pour la petite enfance (FIPE II).

En réponse, Mme Nicole Prud'homme a précisé que la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle constituait un enjeu de première importance pour la CNAF. Elle a rappelé qu'en 2000 le Gouvernement avait décidé de doter un fonds d'investissement pour aider les collectivités territoriales à construire des structures d'accueil pour la petite enfance.

Elle a constaté que la première tranche de 1,5 milliard de francs s'était révélée insuffisante puisqu'aujourd'hui 500 millions de francs restaient nécessaires pour faire face aux demandes.

Elle a noté que certains dossiers étaient gelés car les règles régissant le FIPE II pouvaient faire l'objet d'une inflexion par rapport au fonds précédent. Elle a néanmoins déclaré que 430 projets étaient en attente pour un montant de 394 millions de francs.

Enfin, M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur , a demandé à Mme Nicole Prud'homme si, au regard de sa progression des dernières années, le conseil d'administration de la CNAF ne craignait pas que le fonds national d'action sociale (FNAS) devienne un substitut et non un complément aux prestations légales.

En réponse, Mme Nicole Prud'homme a rappelé que le FNAS était passé, en 1997, d'un montant de 11,3 milliards de francs à 13,5 milliards de francs en 2000 et que ce dernier finançait essentiellement les contrats enfance, destinés à l'accueil des jeunes enfants, et les contrats temps libre, créés en 1998, destinés aux adolescents.

Elle a reconnu que le fait que ces prestations de service soient versées à « guichet ouvert » avait fait l'objet d'un débat au sein du conseil d'administration qui n'avait pas choisi de trancher.

Elle a ensuite noté que la convention d'objectif et de gestion pour 2001-2004 prévoyait une augmentation très importante des crédits du FNAS qui passeraient de 13,1 milliards de francs en 2000 à 19,4 milliards de francs en 2004.

Elle a déclaré enfin que la taille du FNAS, encore modeste par rapport au fonds national des prestations familiales, ne devait pas faire craindre à un effet de substitution.

Elle a souhaité enfin que les prestations de service demeurent du ressort de l'action sociale.

M. Alain Vasselle, rapporteur , a demandé à Mme Nicole Prud'homme si les résultats de l'exercice 2000 permettaient le prélèvement de 5 milliards de francs au profit du fonds de réserve des retraites et de 1,5 milliard de francs au profit du FIPE II, compte tenu de l'annulation des créances liées à la compensation des exonérations de cotisations sociales.

Il a également demandé selon quelles modalités juridiques et comptables le conseil d'administration de la CNAF entendait rectifier les comptes de cet exercice.

En réponse à M. Alain Vasselle, rapporteur, M. Philippe Frigeri a déclaré que le résultat 2000 de la CNAF, tel qu'arrêté par son conseil d'administration, s'élevait à 9,4 milliards de francs.

Il a souhaité distinguer l'annulation de créance de la CNAF sur le FOREC qui entraîne une modification du résultat pour 2000 des mesures procédant à l'affectation de ce résultat sans rouvrir les comptes de cet exercice.

Il a rappelé à la commission que l'annulation rétroactive de créances posait un problème considérable à tout comptable public, puisqu'elle rendait nécessaire de modifier des comptes déjà approuvés par les conseils d'administration et transmis à la Cour des comptes depuis plusieurs mois.

Outre ces problèmes juridiques et comptables, il a également fait part d'importantes difficultés techniques, et notamment informatiques, entravant une telle opération.

Toujours en réponse à M. Alain Vasselle, rapporteur, il a déclaré n'être pas en mesure d'assurer que le résultat 2000, tel que diminué de 2,773 milliards de francs au titre de l'annulation des créances, permettait les prélèvements envisagés par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

Il a en effet souligné que le résultat de l'exercice devait encore être diminué d'une somme de 185 millions de francs au titre du régime des prestations familiales agricoles.

Il a précisé que cette prévision était susceptible d'être réévaluée de 3 millions de francs, réduisant l'excédent de l'exercice à 6,499 milliards de francs, niveau d'excédent alors insuffisant pour permettre le versement de 6,5 milliards de francs prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a demandé si les dépenses susmentionnées, exécutées en 2002, devaient figurer, du point de vue de la CNAF, dans l'objectif des dépenses de la branche famille, tel que voté par le Parlement dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

En réponse, M. Philippe Frigeri a considéré que ces mesures étaient financées par une affectation du résultat 2000 et n'avaient pas, à ce titre, à figurer dans cet objectif des dépenses.

M. Alain Gournac a considéré que le leitmotiv de la commission des affaires sociales était que les ressources de la CNAF devaient profiter aux familles. Il a, en outre, souhaité souligner le problème lié à la prolifération des normes de sécurité sanitaire dans le domaine des crèches. Il a enfin fait part de la responsabilité des parlementaires qui doivent, selon lui, expliquer le fonctionnement de la CNAF aux citoyens.

M. Guy Fischer s'est déclaré, en premier lieu, très attaché à l'attribution des allocations familiales dès le premier enfant, et a ensuite jugé primordiale une politique de présence des caisses dans les quartiers difficiles.

M. Alain Vasselle, rapporteur, a rappelé que le principe de l'étanchéité financière des branches de la sécurité sociale n'avait été respecté par aucun gouvernement. Il a ensuite demandé à Mme Nicole Prud'homme si le conseil d'administration de la CNAF s'était prononcé sur une évolution possible du quotient familial.

M. Jean-Pierre Fourcade s'est interrogé sur le coût, pour la CNAF, du passage aux 35 heures ainsi que sur les raisons pour lesquelles le renouveau démographique se traduisait par une hausse de la demande de places en crèche et une stagnation de l'allocation pour la garde d'enfant à domicile (AGED).

M. Gilbert Chabroux a déclaré avoir suivi avec intérêt l'exposé de Mme Nicole Prud'homme. Il s'est interrogé sur les raisons du renouveau des naissances qu'il a attribué, pour sa part, à la politique familiale menée par le Gouvernement. Il a ensuite fait référence au congé de paternité qu'il a considéré comme une avancée sociale des plus importantes. Il a toutefois regretté que rien n'ait été fait en faveur de l'autonomie des jeunes adultes qui restait, selon lui, un secteur de la politique familiale à investir.

Mme Nelly Olin a félicité Mme Nicole Prud'homme pour son élection et a souhaité attirer son attention sur la nécessité d'une présence des caisses d'allocations familiales au plus près des usagers.

En réponse aux différents intervenants, Mme Nicole Prud'homme a souligné, en premier lieu, que le départ du MEDEF rendait nécessairement moins aisé le dialogue entre les différents partenaires du conseil d'administration.

Elle a constaté ensuite que les manipulations comptables exercées au détriment de la CNAF posaient des difficultés juridiques, comptables et informatiques considérables.

En réponse à M. Guy Fischer, elle a observé que l'attribution des allocations familiales dès le premier enfant coûterait une somme trop importante pour être envisagée, au moins dans un premier temps, sans introduire de clauses restrictives.

En réponse à M. Gilbert Chabroux, elle a attribué le regain de natalité aux effets de la croissance économique. Elle a constaté que la femme française était la femme qui travaillait le plus en Europe, tout en ayant le plus d'enfants. Elle a considéré, à ce titre, que, malgré ses carences, la politique familiale permettait aux femmes de travailler, tout en faisant garder leurs enfants.

Elle a toutefois mentionné que l'ensemble des enquêtes prouvait que les foyers français avaient, en définitive, un enfant de moins qu'ils le souhaitaient.

Elle a enfin rendu hommage aux personnels des caisses d'allocations familiales (CAF) qui sont souvent les premiers représentants des services publics à s'installer dans des zones difficiles.

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