ARTICLE 33
Les conditions du transfert d'une ressource de l'Etat
vers
une autre personne morale
Commentaire : le présent article prévoit que l'affectation d'une ressource de l'Etat à une autre personne morale doit faire l'objet d'une disposition de loi de finances.
La discussion des projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2000 et pour 2001 furent l'occasion de discussions multiples liées aux transferts d'impositions de toutes natures établies au profit de l'Etat vers les organismes de sécurité sociale. L'insistance du Parlement à voir figurer ces transferts dans des dispositions de loi de finances autorisant de telles affectations, et à ce que ces transferts soient pris en compte par le biais des évaluations de recettes, en loi de financement, a ainsi recueilli un écho favorable du gouvernement.
Le présent article introduit dans le texte de la loi organique cet usage extrêmement cohérent avec l'habilitation constitutionnelle donnée au législateur organique. La loi organique relative aux lois de finances ayant à préciser les conditions et les réserves dans lesquelles sont déterminées les ressources et les charges de l'Etat, il paraît naturel qu'elle puisse comprendre une disposition prévoyant que le transfert d'une ressource, totale ou partielle, de l'Etat vers une autre personne morale soit décidé par les lois de finances.
En revanche, et même si cela aurait permis utilement de gagner en clarté, donner aux lois de finances un monopole dans l'affectation des impositions de toute nature, y compris celles affectées à des personnes morales autres que l'Etat, pourrait contredire l'article 34 de la Constitution en ce qu'il fait entrer dans le champ de la compétence du législateur ordinaire le régime des impositions de toute nature.
Votre rapporteur considère que cet article est de nature à apporter une certaine lisibilité et à simplifier les transferts de ressources entre les deux textes de nature financière examinés simultanément par le Parlement.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 34
Le contenu de
la loi de règlement
Commentaire : Le présent article définit le contenu de la loi de règlement.
La loi de règlement constitue le moment où les comptes de l'Etat pour un exercice sont approuvés par le Parlement. La pratique parlementaire actuelle donne peu d'importance à la discussion des projets de loi de règlement, qui constitue un exercice particulièrement formel. La présente proposition de loi organique tendra, à travers une budgétisation fondée sur une logique d'objectifs et de résultats, mais également du fait de l'enrichissement des informations comptables demandées au gouvernement, à renforcer considérablement le rôle de la loi de règlement, qui devrait devenir -votre rapporteur l'appelle de ses voeux- un moment fort de la vie parlementaire.
I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le I du présent article indique que la loi de règlement arrête définitivement le montant des recettes et des dépenses du budget auquel elle se rapporte.
Il détaille également le mode d'établissement du résultat budgétaire de l'année, qui est défini comme la somme du déficit ou de l'excédent du budget général et du déficit ou de l'excédent des comptes annexes.
Le II du présent article énumère les dispositions qui figurent, le cas échéant, dans la loi de règlement.
Le 1° indique que la loi de règlement ratifie les modifications apportées par décrets d'avances aux crédits ouverts par la dernière loi de finances de l'année.
Le 2° prévoit que la loi de règlement approuve les dépassements de crédits résultant de circonstances de force majeure dûment justifiées, et procède à l'annulation des crédits disponibles à la fin de l'année et n'étant pas reportés sur l'année suivante.
Le 3° prévoit que la loi de règlement apure les pertes constatées sur les prêts et avances accordés par l'Etat.
Le III du présent article dispose que la loi de règlement établit le résultat comptable de l'exercice, détermine son affectation et approuve l'ensemble des comptes de l'exercice permettant d'appréhender l'évolution de la situation financière et patrimoniale de l'Etat.
Le IV du présent article prévoit que la loi de règlement peut, comme les autres lois de finances, comporter des dispositions relatives à l'information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques.
II. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION
Votre rapporteur vous propose de reprendre certaines des dispositions du texte de l'article 34 adopté par l'Assemblée nationale. Il considère en revanche que certains alinéas doivent être supprimés, compte tenu de leur caractère imprécis et de la modification de l'organisation de la proposition de loi organique qui vous est proposée.
Votre rapporteur souhaite, au premier alinéa du I du présent article, introduire la notion de résultat budgétaire, qui découle de l'arrêté définitif des montants des recettes et des dépenses budgétaires de l'année. En revanche, votre rapporteur ne souhaite pas conserver la définition du mode de construction du résultat budgétaire de l'année qui figure dans la suite du I. Il considère en effet que cette description ne tient pas compte des éventuels besoins de consolidation entre les recettes et les dépenses du budget général, d'une part, et les recettes et les dépenses des budgets annexes et des comptes spéciaux, d'autre part. Votre rapporteur attire l'attention sur le fait qu'il est délicat de préciser le mode de construction du résultat budgétaire au sein de la loi organique, dès lors qu'une définition peut s'avérer imparfaite et inexacte, en dépit de ses vertus pédagogiques. Il insiste sur la nécessité de consolider les dépenses et les recettes du budget général et des procédures d'affectation spéciales détaillées à l'article 17 du texte adopté par l'Assemblée nationale, comme de celui qu'il vous propose.
Votre rapporteur souhaite insérer, après le I de cet article, un paragraphe additionnel prévoyant que la loi de règlement arrête le montant définitif des ressources et des emplois de trésorerie ayant concouru à la réalisation de l'équilibre financier de l'exercice, présenté dans un tableau de financement. Une telle disposition permettra au Parlement, au moment de la discussion du projet de loi de règlement, d'effectuer des comparaisons avec le tableau de financement présenté dans la loi de finances initiale afférente à la même année 94 ( * ) . Il s'agit en effet de permettre au Parlement de connaître et de voter les opérations de trésorerie qui assurent le financement de l'Etat à la fois en prévision et en exécution.
Votre rapporteur vous propose de supprimer la possibilité explicitement prévue par le présent article, pour les lois de règlement, de ratifier les modifications de crédits apportées par les décrets d'avances. En effet, votre rapporteur vous proposera d'insérer un article additionnel après le présent article prévoyant de manière générale que toutes les modifications de crédits opérées par voie administrative (y compris les décrets d'avances visés au 1° du II du présent article) sont soumises à la ratification du Parlement dans le plus prochain projet de loi de finances afférent à l'année concernée. Cette disposition s'appliquant à l'ensemble des projets de loi de finances, elle rend inutile le maintien de l'alinéa prévoyant la ratification des modifications apportées par décrets d'avances par la loi de règlement.
Au 2° du II du présent article, votre rapporteur vous propose de mentionner de manière explicite que le Parlement approuve non pas les dépassements de crédits, mais les ouvertures de crédits correspondant à ces dépassements, ce qui semble plus conforme à l'autorisation de dépenser donnée par le Parlement.
Aux 3° et au 4° de cet article, votre rapporteur vous proposera également quelques modification de nature rédactionnelle et visant à prendre en compte le maintien des budgets annexes et des comptes spéciaux qu'il vous a proposé.
S'agissant des dispositions comptables mentionnées au III du présent article, il souhaite supprimer la mention de l'affectation du résultat comptable, dont les contours lui paraissent flous, et inscrire dans un paragraphe additionnel le fait que la loi de règlement approuve le compte de résultat de l'Etat, son bilan et ses annexes, qui comportent notamment une évaluation des engagements hors bilan de l'Etat. La rédaction qu'il vous propose mentionne ainsi de manière explicite les notions de compte de résultat et de bilan, alors que le texte adopté par l'Assemblée nationale ne vise que le résultat comptable de l'exercice, déterminé par la différence entre les produits et les charges constatés.
Il convient de mentionner le fait que figureront désormais, dans la loi de règlement, deux soldes : le solde budgétaire, issu de la comptabilité budgétaire, et le résultat comptable, issu de la comptabilité générale de l'Etat. La Cour des comptes indiquait, dans l'une des contributions réalisée à la demande de la commission spéciale de l'Assemblée nationale 95 ( * ) , que « le maintien de deux comptabilités établies selon des principes différents, et donc, presque impossibles à comparer, ne peut qu'entretenir des débats stériles sur les indicateurs les plus pertinents pour décrire la situation financière de l'Etat ». De fait, les deux soldes figurant dans la loi de règlement divergeront sensiblement. Jean-Jacques François, responsable de l'Agence comptable centrale du Trésor, estimait ainsi à 200 milliards de francs les droits constatés non pris en compte dans la méthode actuelle de comptabilisation du budget de l'Etat. Votre rapporteur considère que, loin d'être un facteur de mauvaise compréhension ou de mauvaise interprétation, la différence entre le solde budgétaire et le résultat comptable de l'exercice sera l'occasion d'un examen fort instructif, permettant notamment d'évaluer précisément les charges certaines nées au cours de l'exercice et dont le financement est reporté sur les années futures.
Enfin, votre rapporteur vous propose de supprimer le IV, compte tenu de l'insertion d'un article additionnel avant l'article premier qui prévoit que « les lois de finances peuvent comporter toutes dispositions relatives à l'information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques, ainsi qu'à la comptabilité de l'Etat et au régime de la responsabilité pécuniaire des agents des services publics ». Cette disposition générale rend inutile la précision d'une telle possibilité -au demeurant plus restreinte dans son champ d'application, puisqu'elle ne mentionne ni la comptabilité de l'Etat, ni le régime de la responsabilité pécuniaire des agents des services publics- dans le cadre spécifique de la loi de règlement.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
* 94 Le 7° du I de l'article 31 du texte adopté par l'Assemblée nationale prévoit que la loi de finances initiale « évalue les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l'équilibre financier présentées dans un tableau de financement ».
* 95 Contribution de la Cour des comptes n° 14 : « l'avenir de la comptabilité budgétaire », 22 janvier 2001.