EXAMEN DES ARTICLES

Article 2
Développement de l'enseignement
et de la recherche sur la traite négrière et l'esclavage

Cet article prévoit que les manuels scolaires et les programmes de recherche en histoire et en sciences humaines accorderont à la traite négrière et à l'esclavage la place conséquente qu'ils méritent. Il prévoit en outre que " la coopération qui permettra de mettre en articulation les archives écrites disponibles en Europe avec les sources orales et les connaissances archéologiques accumulées en Afrique, dans les Amériques, aux Caraïbes et dans tous les autres territoires ayant connu l'esclavage sera encouragée et favorisée ".

En première lecture, le Sénat a décidé la disjonction de cet article en constatant que le contenu des programmes scolaires relevait sans équivoque possible du domaine réglementaire . Afin de prendre en compte les préoccupations légitimes des auteurs de la proposition de loi, il a revanche proposé que le comité de personnalités instauré par la proposition de loi puisse formuler des propositions relatives au contenu des programmes scolaires.

Examinant en deuxième lecture la proposition de loi, l'Assemblée nationale a refusé ces modifications et a rétabli l'article 2.

Mme Christiane Taubira-Delannon, qui rapportait la proposition de loi au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, s'est ainsi exprimée au cours du débat en séance publique : " Le caractère réglementaire de cette disposition ne nous avait pas échappé et, déjà, en première lecture, nous avions débattu du strict partage de la loi et du règlement, tel qu'il est défini par les articles 34 et 37 de la Constitution. Mais l'inscription de dispositions réglementaires dans la loi peut être justifiée par des motivations extra-juridiques : souhait d'explicitation philosophique ou volonté d'affichage politique. C'est bien dans le champ éthique et politique que se situe le choix de transformer en dispositions législatives une urgence et une nécessité qui ont été trop longtemps négligées ".

Si votre rapporteur n'est pas persuadé qu'une " volonté d'affichage politique " justifie la violation des règles posées par la Constitution, il n'estime pas indispensable pour autant de prolonger la discussion parlementaire d'une proposition de loi dont les objectifs sont approuvés par les deux assemblées.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 3 bis
(Loi n° 83-550 du 30 juin 1983)
Fixation d'une date pour la commémoration de l'abolition de l'esclavage
en métropole et création d'un comité de personnalités

Cet article tend à modifier la loi n° 83-550 du 30 juin 1983 relative à la commémoration de l'abolition de l'esclavage . Dans sa rédaction actuelle, cette loi prévoit que la commémoration de l'abolition de l'esclavage fait l'objet d'une journée fériée dans les départements de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de la Réunion, ainsi que dans la collectivité territoriale de Mayotte.

L'article 3 bis de la proposition de loi tend à compléter la loi de 1983 pour prévoir la fixation d'une date de commémoration annuelle de l'abolition de l'esclavage sur le territoire métropolitain . La proposition de loi initiale de Mme Christiane Taubira-Delannon proposait de retenir le 8 février, date de la condamnation par le Congrès de Vienne en 1815 de la traite négrière transatlantique.

L'Assemblée nationale, en première lecture, a préféré que le Gouvernement fixe lui-même la date de commémoration après la consultation la plus large.

Le Sénat, à l'initiative de notre excellente collègue Mme Lucette Michaux-Chevry, a décidé de fixer au 23 août la date de commémoration en métropole de l'abolition de l'esclavage. Le 23 août est la date à laquelle commença, en 1791, une révolte d'esclaves conduite notamment par Toussaint-Louverture dans l'île de Saint-Domingue.

Pour justifier son amendement, Mme Michaux-Chevry a notamment fait valoir : " (...) M. le Secrétaire d'Etat sait très bien qu'il ne pourra retenir ni la date de la Martinique -la Guadeloupe ne serait pas contente- ni la date de la Guadeloupe - la Martinique ne serait pas contente ".

L'Assemblée nationale a supprimé la référence à cette date et rétabli la rédaction précisant que le Gouvernement arrêterait une date de commémoration après la consultation la plus large.

Mme Christiane Taubira-Delannon, rapporteur

de la commission des Lois de l'Assemblée nationale, a notamment indiqué au cours des débats : " (...) Le 23 août, malgré sa grande force symbolique (...) ne nous semble pas une date propice à la mobilisation des communautés scientifique, scolaire, artistique et culturelle ".

A ce stade de la discussion parlementaire, votre commission ne propose pas de réintroduire dans la proposition de loi la référence à une date pour la commémoration. Elle souhaite en revanche que le Gouvernement conduise la consultation prévue afin de pouvoir rapidement arrêter une date.

Cet article prévoit par ailleurs la création d'un comité de personnalités qualifiées chargé de proposer des lieux et des actions qui garantissent la pérennité de la mémoire de l'esclavage à travers les générations.

En première lecture, le Sénat avait inséré cette disposition, qui figurait dans un autre article, dans le présent article, afin qu'elle soit intégrée dans la loi de 1983 relative à la commémoration de l'abolition de l'esclavage. Il avait également souhaité que ce comité puisse formuler des propositions relatives au contenu des programmes scolaires.

En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a logiquement supprimé les dispositions relatives au contenu des programmes scolaires, ayant décidé de rétablir l'article 2 de la proposition de loi supprimé par le Sénat.

Elle a en outre précisé que le décret définissant la composition, les compétences et les missions du comité devrait être pris dans un délai de six mois après la publication de la loi.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 5
(art. 48-1 de la loi du 29 juillet 1881)
Possibilité pour les associations défendant la mémoire des esclaves
d'exercer les droits reconnus à la partie civile

Cet article tend à modifier l'article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 permettant à certaines associations d'exercer les droits reconnus à la partie civile.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 48-1 permet aux associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits et se proposant de combattre le racisme ou d'assister les victimes de discriminations fondées sur leur origine nationale, ethnique, sociale ou religieuse d'exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les délits de provocation à certains crimes, de diffamation à raison de l'origine ou de l'appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion, enfin d'injures envers une personne ou un groupe de personnes à raison de l'origine ou de l'appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion.

En première lecture, le Sénat a supprimé cet article, votre rapporteur observant qu'il ne paraissait avoir qu'une portée extrêmement réduite, les associations de descendants d'esclaves pouvant faire figurer la lutte contre le racisme ou l'aide aux victimes de discriminations fondées sur l'origine parmi leurs objectifs pour bénéficier des dispositions de l'article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881.

L'Assemblée nationale n'a pas été sensible à cet argument et a rétabli l'article 5. Votre rapporteur n'est pas convaincu de l'intérêt de modifier les règles posées par la loi de 1881 en matière d'exercice par les associations des droits reconnus à la partie civile. Il n'estime cependant pas indispensable de poursuivre la discussion parlementaire sur une proposition de loi dont les objectifs sont partagés par les deux assemblées.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

*

* *

Au bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter sans modifications la proposition de loi.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page