c) La médiocre qualité de la budgétisation initiale des crédits
Les
annulations de crédits demandées peuvent également
résulter de
la médiocre qualité de la
budgétisation initiale des dotations
, qui
amène, en fin
d'exercice, à procéder à la révision du niveau de
ces dernières.
Il n'est dès lors pas possible de parler d'économies, puisqu'un
meilleur calibrage de ces dotations aurait permis d'inscrire un montant moins
élevé de dépenses en loi de finances initiale.
Ce phénomène est d'ailleurs reconnu par l'Assemblée
nationale. Dans son rapport précité sur le présent projet
de loi de finances, le rapporteur général du budget écrit,
à propos des économies réalisées par le
gouvernement, qu'elles «
sont incontestablement facilitées
par les contrats de gestion avec les ministères, associés
à un souci de rigueur qui commande de résorber les
« trésoreries dormantes » et de réduire les
crédits non consommés qui ne correspondent manifestement à
aucun besoin
». Il reconnaît ainsi que sont inscrits au
budget de l'Etat «
des crédits qui ne correspondent
manifestement à aucun besoin
».
Les incertitudes des méthodes de prévision et de calcul du
montant des dotations budgétaires peuvent également expliquer
l'existence de crédits non consommés.
La question se pose avec d'autant plus d'acuité lorsque les annulations
sont récurrentes comme c'est le cas, par exemple, des
aides au
logement.
Les aides au logement font l'objet d'annulations de crédits récurrentes
Les
annulations de crédits réalisées sur le budget de
l'urbanisme et du logement sont élevées puisqu'elles atteignent
926 millions de francs, dont 404 millions de francs pour les aides
personnelles et 497 millions de francs pour le chapitre construction et
amélioration de l'habitat.
Il s'agit de chapitres qui font l'objet d'annulations récurrentes depuis
quelques années. Les crédits nécessaires pour les aides
personnelles diminuent du fait de l'amélioration de la conjoncture
économique et de la baisse des allocataires et les crédits
destinés à la construction sociale sont annulés du fait
des mauvais résultats de la construction sociale.
Tel serait également le cas, si l'on en croit le gouvernement, de
certains crédits militaires.
En effet, dans son rapport précité, M. Didier Migaud rappelle une
réponse apportée par le ministère de l'économie,
des finances et de l'industrie concernant les annulations intervenues sur les
crédits de paiement du budget de la défense. La réponse du
ministère permet de tirer deux conclusions des annulations
réalisées :
- il est notamment indiqué que «
le niveau des annulations
décidé par le gouvernement constitue une condition de
l'équilibre de la loi de finances rectificative
», ce qui
signifie non seulement que l'amputation des crédits militaires est une
nécessité, mais aussi que le niveau desdits crédits est
surévalué en loi de finances initiale de façon à
pouvoir gager des ouvertures de crédits traduisant l'apparition, presque
inévitable en collectif, de besoins à financer ;
- cette hypothèse est du reste confirmée par la suite de la
réponse du ministère, qui précise que «
la
répartition par chapitre de ces annulations a été
déterminée
[...]
en fonction des besoins réels en
moyens de paiement au titre des actions et programmes financés
[...]
.
Les annulations opérées sur les chapitres 51-61,
53-81 et 55-11 ne remettent pas en cause le bon déroulement de ces
programmes
».
Si cette dernière assertion est
exacte, pourquoi, dès lors, avoir inscrit ce montant de crédits
en loi de finances initiale ?
Les dotations initiales sont ainsi souvent éloignées de la
réalité des besoins.
Il est d'ailleurs possible de citer d'autres exemples, concernant certes des
montants plus faibles, mais illustrant tout aussi bien ce
phénomène, tel le budget de l'éducation nationale.
Budget de l'enseignement scolaire
L'annulation de 74,5 millions de francs sur le chapitre 43-71 « Bourses, secours d'études » et le virement de 32,5 millions de francs de ce chapitre vers d'autres chapitres confirment les observations du rapporteur spécial de la commission des finances, selon lesquelles ces crédits sont sous-consommés, faute notamment de modalités d'allocation efficaces pour les fonds sociaux (fonds social collégien, fonds social lycéen, fonds cantines).
Budget de l'enseignement supérieur
L'annulation de 100 millions de francs sur le chapitre
43-71
« Bourses, secours d'études » témoigne de la
sous-consommation de certaines bourses, en raison notamment d'un défaut
d'information des étudiants, comme l'avait relevé le rapporteur
spécial de la commission des finances. Par exemple, seules 5.368
allocations d'études ont été allouées en 1999-2000,
alors que 7.000 étaient prévues.
Enfin, l'annulation de 56,1 millions de francs d'autorisations de
programme et de crédits de paiement au chapitre 56-11 est
préoccupante pour la mise en place du plan Université du
troisième millénaire (U3M), puisque les investissements de
construction sous maîtrise d'ouvrage Etat se trouvent ainsi
amputés de 12 %.