II. OBSERVATIONS SUR L'EFFORT DE SOUTIEN PUBLIC

A. DES DOTATIONS SUFFISANTES ?

La réduction des crédits de recherche amont atténue un peu les effets favorables, cette année, de la progression des crédits d'avances remboursables.

Les dotations inscrites au budget pour 2000 pouvaient apparaître rétrospectivement comme essentiellement provisionnelles puisque la décision de lancement de l'A3 XX n'avait pas été prise. De fait, la consommation des 192 millions de francs ouverts à ce titre dans le budget 2000 paraît hypothétique. Il ne devrait pas en aller de même de la dotation de 642 millions de francs prévue pour 2001.

Votre rapporteur spécial se félicite du lancement annoncé le 23 juin dernier.

Cet appareil est indispensable à Airbus pour réunir les conditions d'une vraie compétitivité face à Boeing. Cette entreprise dispose en effet, avec le B747, du monopole de l'offre sur le segment haut du marché de l'aviation commerciale qui lui permet de livrer une guerre des prix sur les autres catégories d'appareils où Airbus oppose une concurrence.

Le coût de développement de la famille A3XX étant estimé à 10,7 milliards de dollars, le montant des avances qui seraient nécessaires pour un financement à hauteur de 33 % de la part française serait d'environ 6 milliards de francs. L'échéancier prévisionnel, dans l'hypothèse du calendrier initialement retenu par Airbus (lancement industriel à mi-2000) et sur la base des estimations provisoires de coût disponibles actuellement, s'établit de la façon suivante

2000

2001

2002

2003

2004 et au-delà

Total (MF)

240

700

1.250

1.250

2.560

6.000

La dotation inscrite pour 2001 ne couvrira pas les besoins estimés par l'industriel pour les deux premières années de développement et, a fortiori, représente une infime partie des soutiens publics qu'il faudra prévoir.

Votre rapporteur spécial remarque que l'Allemagne a annoncé un soutien dynamique de 1 milliard d'euros. Il souhaiterait que la France s'associe à cette démarche et qu'elle vérifie les intentions des gouvernements britannique et espagnol qui sont également concernés.

B. UN SYSTÈME DE SOUTIEN PERFECTIBLE

En comparaison des soutiens publics dont bénéficie l'aviation commerciale aux Etats-Unis, l'Europe reste à la traîne.

L'unification de l'industrie aéronautique européenne invite à rappeler les principales conclusions du rapport adopté par la commission des finances sur ce thème le 24 juin 1997.

Un réexamen des règles internationales qui encadrent la politique de soutien public s'impose qu'il s'agisse de l'accord euro-américain du 17 juillet 1992 ou de l'adaptation des règles européennes relatives aux aides publiques.

Le soutien public à la construction aéronautique civile doit être augmenté et mis à niveau afin de contrer les effets sur notre compétitivité des soutiens publics accordés par nos concurrents et de permettre à nos constructeurs de poursuivre un développement sans lequel les acquis seraient perdus.

En effet, l'avenir de nos entreprises aéronautiques est certes conditionné par des efforts de maîtrise des coûts mais aussi par leur capacité à développer leurs chiffres d'affaires, ce qui suppose de diversifier une offre encore insuffisante.

Il apparaît prioritaire de développer l'A3XX et de mettre la SNECMA en mesure de suivre l'offre mondiale.

La panoplie de notre soutien public doit être diversifiée.

Une mise à niveau des fonds propres des entreprises s'impose , qui doit s'accompagner, si les entreprises concernées devaient rester, pour l'essentiel publiques, d'une clarification des rapports entre l'Etat et ces entreprises et, en particulier, d'une réforme des modalités de contrôle de l'Etat passant par l'affirmation d'un " chef de file " qui devrait être le ministre chargé de la conception de la politique dans le domaine de l'aéronautique civile.

La proportion des aides indirectes doit être accrue puisque les avances remboursables sont, en l'état, soumises à de stricts plafonds. Mais, cela suppose une meilleure programmation des soutiens à la recherche au niveau national et européen.

L'environnement des entreprises de construction aéronautique doit être amélioré.

L'environnement européen doit être fortifié.

- Il est nécessaire de construire de vrais ensembles européens sans que les difficultés rencontrées par ce processus obèrent les développements industriels nécessaires.

- Une diplomatie aéronautique doit émerge à l'échelle européenne sur le modèle de la diplomatie Boeing.

- Une plus grande harmonisation en Europe doit marquer différentes procédures qui constituent l'environnement du transport aérien : la certification, mais aussi les procédés de navigation aérienne et la promotion à l'exportation des normes et procédés européens.

Au plan national, certaines mesures s'imposent. Nous devons nous doter d'un pôle permanent d'expertise et d'animation de notre politique de soutien à l'industrie aéronautique civile, les processus de décision en ce domaine n'apparaissant pas pleinement satisfaisants. L'administration principalement chargée de la conception de notre politique en ce domaine, la Direction des programmes aéronautiques civils du ministère des transports, doit se voir reconnaître une responsabilité éminente et ses moyens propres doivent être renforcés sans accroissement net des fonctionnaires publics.

Il faut rappeler, pour combattre l'image complaisamment répandue selon laquelle notre système de soutien " distordrait " la concurrence en octroyant un avantage indû à nos entreprises que si notre système offre un avantage ponctuel aux entreprises, il n'est pas un mécanisme systématique de financement public de la construction aéronautique civile comme c'est le cas aux Etats-Unis. Il convient donc de compléter les avances remboursables et de rééquilibrer les interventions de l'Etat.

C'est d'autant plus nécessaire qu'actuellement le montant des avances remboursables est significativement inférieur à celui des remboursements dûs sur les avances remboursables antérieurement concédées, si bien que le bilan du mécanisme est défavorable à nos industriels.

Cette charge, si elle est la rançon des avantages octroyés dans le passé et si elle traduit en outre les succès commerciaux des programmes alors soutenus, n'en est pas moins considérable au moment où la concurrence fait rage.

On a exposé plus haut les conséquences de cette situation sur la valorisation d'Aérospatiale lors de l'opération de fusion avec MHT. Il convient de prolonger les réflexions sur un réaménagement de nos soutiens publics qui devra de plus tenir compte des conditions industrielles nouvellement apparues.

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