2. L'ONDAM 2001 : + 5,32 %, + 3,25 % ou + 3,5 % ?

L'article 44 du projet de loi prévoit que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie de l'ensemble des régimes obligatoires de base est fixé à 693,3 milliards de francs pour l'année 2001.

L'exposé des motifs précise que cet ONDAM est " en progression de 3,5 % par rapport aux dépenses attendues de 2000. "

Pour la deuxième année consécutive, le taux de progression de l'ONDAM de l'année (n+1) est donc calculé à partir d'une prévision de réalisation de l'ONDAM et non par rapport à celui voté.

En 2001, l'opération de rebasage est cependant plus complexe.

En effet, il serait plus exact de dire que cet objectif est fondé sur une hypothèse de croissance des dépenses d'assurance maladie de 3,5 % s'appliquant à une réalisation 2000 corrigée des reports de dépenses de 1999 à 2000 consécutifs aux retards de liquidation enregistrés à la fin de l'année 1999 et de " la marge de manoeuvre " fixée pour 2000.

La Commission des comptes de la sécurité sociale évalue le dépassement " brut " de l'objectif 2000 à 13,2 milliards de francs, soit une progression des dépenses de 4,9 % pour un objectif de 2,5 %.

L'ONDAM réalisé en 2000 serait donc de 671,5 milliards de francs.

Le Gouvernement n'a cependant pas choisi ce chiffre pour son ONDAM rebasé. Il a souhaité retirer à ce chiffre l'effet des reports de liquidation, évalué à 2,4 milliards de francs, et lui ajouter 600 millions de francs correspondant à " la marge de manoeuvre " prévue pour 2000.

L'ONDAM rebasé pour 2000 s'élève donc à 669,7 milliards de francs. C'est en appliquant à cette base un taux de 3,52 %, que l'on obtient l'ONDAM 2001, soit 693,3 milliards de francs.

Ce taux de 3,5 % a donc un caractère très virtuel et vise surtout à frapper l'opinion publique et les professionnels de santé. L'expérience des quatre premières lois de financement montre en effet que le débat porte surtout sur le taux de progression affiché par le Gouvernement alors même que le seul chiffre ayant une existence juridique est celui de l'ONDAM voté, en l'occurrence 693,3 milliards de francs cette année.

Or, de quel taux parle-t-on lorsqu'on évoque le taux de progression de l'ONDAM ?

Il y a en réalité au moins six taux différents d'ONDAM, si ce n'est davantage.

Le premier est le taux de 3,5 % qui résulte d'une comparaison entre l'ONDAM 2001 voté et l'ONDAM 2000 réalisé prévisionnel puis retraité.

Le deuxième est le taux de 3,25 %, calculé en comparant l'ONDAM 2001 voté et l'ONDAM 2000 réalisé prévisionnel non retraité (671,5 milliards de francs).

Le troisième est de 5,32 %, qui résulte d'une comparaison entre l'ONDAM 2001 voté et l'ONDAM 2000 voté. Ce chiffre témoigne à lui seul de la forte dérive des dépenses d'assurance maladie.

Les deux derniers taux ne sont pas encore connus.

Le quatrième pourra être calculé en comparant l'ONDAM 2001 voté et l'ONDAM 2000 effectivement réalisé puis retraité. Ce taux sera vraisemblablement inférieur à 3,5 %.

En effet, compte tenu de l'évolution des dépenses à la fin septembre 2000, le chiffre de 671,5 milliards de francs sera très probablement dépassé. Le taux d'évolution " brut " de 4,9 % pour les dépenses sur le champ de l'ONDAM, calculé par la Commission des comptes, est en effet sous-tendu par un taux d'évolution des soins de ville de 6,6 % pour l'ensemble des régimes (7 % pour le régime général).

Cette hypothèse est minimale : si le taux d'évolution des dépenses déléguées estimé à 4,7 % est vraisemblable, le taux d'évolution des autres soins de ville, notamment 8,7 % pour le médicament, semble plutôt faible et serait de l'ordre de 10 % (à fin août, le taux observé pour le médicament est de 12,1 % pour le régime général).

Dans ces conditions, si les dépenses de l'année 2000 s'avéraient plus élevées que ce qu'a prévu la Commission des comptes, ce quatrième taux de progression de l'ONDAM en serait naturellement réduit d'autant.

Le cinquième taux sera calculé en comparant l'ONDAM 2001 voté et l'ONDAM 2000 effectivement réalisé non retraité. En suivant le même raisonnement que précédemment, ce taux sera vraisemblablement inférieur à 3,25 %.

Enfin, comme on l'a vu plus haut, l'ONDAM tient compte d'une diminution de dépenses correspondant aux remises conventionnelles versées par les entreprises pharmaceutiques au titre du dépassement de l'objectif conventionnel d'évolution de leur chiffre d'affaires, dans le cadre des accords signés avec le comité économique des produits du santé.

L'ONDAM rebasé 2000 intègre ainsi une diminution de dépenses de 900 millions de francs correspondant aux remises négociées pour 2000 au titre des dépenses de 1999. Pour mesurer l'évolution réelle de l'ONDAM en 2001, il conviendrait donc de réintégrer, pour chacun des deux exercices, les remises escomptées, évaluées entre 2 et 2,8 milliards de francs en 2001 au titre de 2000.

On aboutit alors à un sixième taux de progression de l'ONDAM, compris entre 3,7 et 3,8 % si l'on compare l'ONDAM 2001 voté et retraité à l'ONDAM 2000 rebasé en intégrant les remises.

Ces éléments suffisent à démontrer que le taux affiché de 3,5 % pour la progression de l'ONDAM résulte autant d'un choix politique que d'un calcul arithmétique.

Comme l'année passée, les données communiquées par le Gouvernement sur la répartition de l'ONDAM pour 2001 en quatre sous-objectifs ne sont pas homogènes.

Deux taux d'évolution, dans les secteurs qui ont donné lieu à des dépassements importants cette année, sont calculés par rapport à une base 2000 révisée : + 3 % pour les soins de ville et + 3,4 % pour les hôpitaux. Les deux autres taux ont été établis, plus traditionnellement, d'objectif à objectif : + 5,8 % pour le médico-social et + 3,3 % pour les cliniques privées.

Résultats provisoires sur les dépenses à fin septembre 2000

Tous régimes
(en millions de francs)

Objectif 2001

Evolution 2001/2000

Rappel évolution 1999/2000

Soins de ville

312,7

3,0 % (1)

2,0 %

Hôpitaux publics

270,6

3,4 % (1)

2,4 %

Cliniques privées

43,4

3,3 % (2)

2,2 %

Établissements médico-sociaux

49,9

5,8 % (2)

4,9 %

Objectif national

693,3

3,5 %

2,5 %

(1) par rapport à l'objectif rebasé

(2) par rapport à l'objectif initial

Expliquer, dans ces conditions, comme le fait le Gouvernement, que les cliniques privées sont aussi bien traitées que les hôpitaux publics sous prétexte que les taux accordés seraient quasiment identiques, est dès lors pour le moins abusif.

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