2. Les " tuyauteries " masquent mal un financement des trente-cinq heures par la sécurité sociale
La loi de financement de la sécurité sociale pour 200 avait affecté au FOREC 47 % des " droits 403 " sur les alcools, privant le FSV de 5,6 milliards de francs. Les branches du régime général (CNAMTS, CNAF et CNAVTS) avaient en outre perdu une partie du prélèvement social de 2 % (5,6 milliards de francs 37 ( * ) ), au profit du fonds de réserve des retraites.
Le présent projet de loi propose toute une série de " tuyauteries " pour financer le FOREC.
Le fonds de solidarité vieillesse perd, dès 2000, l'intégralité des droits sur les alcools au profit du FOREC. De manière concomitante, la CNAF prend en charge une partie des majorations pour âge, allégeant les dépenses du FSV de 3 milliards de francs.
La CNAMTS perd une grande partie des droits sur les tabacs qui lui étaient affectés. En " compensation ", elle obtient une augmentation du taux de la CSG qui lui était affectée. Mais cette augmentation du taux de la CSG est elle-même " compensée " par une diminution du taux de CSG affecté au fonds de solidarité vieillesse.
Il aurait été plus simple de conserver à la CNAMTS ses droits tabacs et d'affecter une fraction de la CSG au FOREC. Le mécanisme serait alors apparu beaucoup plus clairement : le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 " siphonne " les excédents de la branche famille et du fonds de solidarité vieillesse pour financer le FOREC.
Au total, si le FOREC n'avait pas existé, le régime général et le FSV auraient bénéficié de 18,6 milliards de francs de recettes supplémentaires (11,5 milliards de droits alcools et 7,1 milliards de francs de droits tabacs) en 2001.
Le FOREC bénéficie par ailleurs de la TGAP et de la contribution sociale sur les bénéfices (CSB), qui lui apportent 13 milliards de francs de recettes.
Compte tenu du coût des allégements de charge décidés par la première loi Aubry 38 ( * ) , le " coût budgétaire " des trente-cinq heures, imputable à l'actuel Gouvernement, peut être évalué pour 2001 à 40 milliards de francs.
En d'autres termes, si le FOREC n'existait pas, le projet de loi de finances pour 2001 afficherait une quarantaine de milliards de francs de dépenses supplémentaires. La dérive est de 13 milliards de francs en une seule année.
Ce coût peut être établi de la manière suivante :
Coût des deux lois Aubry en 2001
(en millions de francs)
Dépenses du FOREC |
85.000 |
Ristourne Juppé |
- 41.000 |
Allégement de Robien |
- 3.500 |
Exonération cotisations d'allocations familiales |
- 130 |
Dépenses du FOREC hors exonérations antérieures aux lois Aubry |
40.370 |
Cette constatation ne signifie pas pour autant qu'il y aurait quarante milliards de francs de dépenses " déguisées " de l'Etat. La réalité est plus complexe.
En effet, l'origine de ces 40,4 milliards de francs est la suivante :
- 18,6 milliards de francs de recettes affectés jusqu'à maintenant à la sécurité sociale (11,5 milliards de francs de droits alcools et 7,1 milliards de francs de droits tabacs) ;
- 9,9 milliards de francs de recettes jusqu'à maintenant à l'Etat (1,9 milliard de TGAP, 4 milliards de taxe sur les véhicules des sociétés et 4 milliards de taxe sur les conventions d'assurance) ;
- 11,1 milliards de francs de prélèvements supplémentaires (6 milliards de CSB et 5,1 milliards des 7 milliards de francs de la TGAP)
D'où vient le financement des dépenses
supplémentaires
engendrées par le FOREC en
2001?
Ce graphique des origines de ressources laisserait croire que l'Etat conserve une participation de l'ordre d'un quart aux dépenses du FOREC.
Or, les " tuyauteries " du projet de loi de financement ont justement pour objet que l'Etat ne dépense plus grand chose pour les trente-cinq heures, pour ne pas dire rien du tout.
* 37 Compte tenu du relèvement du seuil de mise en recouvrement, la perte aurait été légèrement moins élevée que prévu : entre 5,4 et 5,5 milliards de francs.
* 38 Une aide incitative à la réduction du temps de travail, déduction forfaitaire et dégressive (9.000 francs par an et par salarié en moyenne).