3. Une application médiocre de la loi de financement pour 2000
MM. Alfred Recours et Jérôme Cahuzac, rapporteurs respectivement des commissions des Affaires culturelles, familiales et sociales et des Finances de l'Assemblée nationale, ont effectué dans leurs rapports un bilan instructif de l'application des mesures de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.
Votre rapporteur ne peut qu'approuver les propos de M. Jérôme Cahuzac, relevant " le paradoxe de dispositions adoptées dans le cadre d'une procédure d'urgence encadrée dans des délais constitutionnels et organiques, mais dont les textes d'application tardent systématiquement à paraître " 16 ( * ) .
Lors de la discussion de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, votre commission avait fustigé le retard pris par le Gouvernement pour " concrétiser " la création du fonds de réserve des retraites, le décret n'étant paru qu'au Journal officiel du 24 octobre 1999. Votre rapporteur est désormais en mesure de " chiffrer " les conséquences de ce retard : les 2 milliards versés début novembre 1999 ayant rapporté 7 millions de francs de produits financiers, le retard correspond -selon un calcul grossier- à une perte de 35 millions de francs 17 ( * ) pour ce fonds de réserve dont les produits financiers doivent représenter en 2020, selon les hypothèses du Gouvernement, près du tiers des sommes disponibles.
En ce qui concerne l'application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, il souhaite formuler deux observations.
a) Le FOREC n'est pas constitué
" Mesure phare " de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, qui devait disposer d'un conseil de surveillance, et qui devait signer des conventions de trésorerie avec les organismes de sécurité sociale, n'existe toujours que sur le papier.
Cette absence de parution du décret, alors même que la " visibilité " budgétaire défaillante du FOREC devait être contrebalancée par la présence de parlementaires au Conseil de surveillance, est pour le moins choquante.
Le ministère de l'Economie et des Finances avait pourtant appelé en mai dernier l'attention du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sur la nécessité de constituer le FOREC :
" Le décret relatif au FOREC n'est toujours pas publié, ni le directeur ni les membres du conseil d'administration n'ont été nommés et les conventions financières régissant les relations Etat/FOREC et FOREC/sécurité sociale restent à rédiger. Il paraît indispensable de lancer la procédure en Conseil d'Etat au plus tard courant juillet et nommer un directeur en septembre dernier délai pour lui laisser trois mois pour préparer le budget 2001 et les conventions " 18 ( * ) .
Le mois de juillet est venu et le texte n'a pas été examiné par le Conseil d'Etat. Le mois de septembre est arrivé et le directeur n'a pas été nommé. Le " budget " 2001 n'était pas " prêt " pour la Commission des comptes de la sécurité sociale du 21 septembre 2000. Faute de directeur, les conventions de trésorerie ne sont toujours pas signées.
En comparaison, les Assemblées ont été quasiment " sommées " de nommer leurs représentants au Conseil d'orientation des retraites, organe créé, sans base législative, par le décret n° 2000-393 du 10 mai 2000, paru au Journal officiel du 11 mai dernier. Un arrêté du 26 mai 2000 portant nomination des membres est paru au JO du 27 mai 2000. La lecture du Journal officiel du 23 septembre permettait de prendre connaissance d'un arrêté instructif, fixant le montant des indemnités susceptibles d'être allouées au président, aux membres (non parlementaires) et aux collaborateurs dudit Conseil.
Votre rapporteur a demandé les raisons de la " création retardée " du FOREC. Cette question, dépourvue de toute malice, a reçu une " réponse " qui mérite d'être citée :
" Les éléments de réponse à la question posée... " Question : Quelles sont les raisons de la création retardée du " fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale " ? Réponse : Conformément aux dispositions de l'article LO 111-4 du code de la sécurité sociale, les éléments de réponse à la question posée, et notamment le compte prévisionnel du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC) pour les exercices 2000 et 2001, seront présentés en annexe (annexe f ) au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 |
Naturellement, l'annexe f) -si elle présente effectivement les comptes d'un FOREC qui n'existe pas encore- n'explique en aucune façon les raisons du retard à le créer effectivement.
Votre rapporteur en déduit que sa question n'appelait pas de réponse.
* 16 Avis A.N. n° 2631, p. 11.
* 17 A raison de 3,5 millions de francs de produits financiers " perdus " par mois de retard.
* 18 Réponse du ministère de l'économie et des finances au questionnaire de M. Didier Migaud, rapporteur général, AN, n°2387, p. 51.