II. ENCOURAGER LA FRÉQUENTATION TOURISTIQUE FRANÇAISE ET ÉTRANGÈRE
A. L'ACTION DU GOUVERNEMENT ORIENTÉE VERS LE DROIT AUX VACANCES POUR TOUS
En
organisant à Paris, les 6 et 7 mai 1999, les premiers Etats
généraux du tourisme social, le Gouvernement a
réaffirmé sa volonté de permettre à des populations
qui en sont aujourd'hui exclues de partir en vacances.
Cet axe majeur de la politique du Secrétariat d'Etat au tourisme
s'appuie essentiellement sur le secteur du tourisme social, qui, après
son essor des années 1980, doit aujourd'hui se rénover en
profondeur.
1. L'encouragement au tourisme associatif
La
quantification du secteur social et associatif est a priori simple puisqu'il se
définit, d'une part, par une réglementation spécifique -la
loi 1901 régissant les associations permet de définir le tourisme
social associatif-, d'autre part, par la présence d'intervenants sociaux
publics et para-publics (CAF, mutuelles, caisses de retraites) et privés
(comités d'entreprise) constituant le tourisme social corporatif.
En réalité, l'analyse de ce secteur est très difficile car
à la multiplicité des intervenants, s'ajoute celle des types
d'installations (allant du village de vacances au gîte familial en
passant par les centres de vacances), des modes de fonctionnement
(propriétaire ou gestionnaire ou les deux), des catégories de
clientèles de produits (enfants, jeunes, familles, cas sociaux... pour
des séjours collectifs et individuels organisés ou non). Par
ailleurs, les critères d'identification du tourisme social
énoncés par la Déclaration de Montréal ne
simplifient pas les choses.
Les associations de tourisme totalisent plus de 250.000 lits. Les
comités d'entreprise, les comités d'oeuvres sociales, d'actions
sociales, d'entreprises publiques et para-publiques rassemblent
240.000 lits.
Au total, le tourisme social et associatif
représente ainsi une capacité d'hébergement de
500.000 lits, soit 10 % de l'offre nationale d'hébergement
touristique, répartie ainsi :
-
le tourisme associatif a une capacité d'accueil
de
217.931 lits auxquels s'ajoutent environ 72.000 lits dans les
campings. On distingue quatre catégories d'équipements :
ceux destinés aux familles, comme les villages de vacances et les
gîtes (157.486 lits) ; ceux destinés aux jeunes, tels
les auberges de jeunesse (22.346 lits) ; les centres de vacances,
tant pour les jeunes que pour les familles (20.368 lits), et les centres
sportifs, comme les refuges et les chalets (17.683 lits).
-
2.204 comités d'entreprise
possèdent ou exploitent
8.404 hébergements touristiques offrant une capacité totale
de 239.500 lits.
-
le tourisme social
gère donc environ 500.000 lits et
emploie 78.000 personnes, dont 85 % de saisonniers.
-
Plus de 1,3 million de salariés
(5 millions de
personnes avec les ayants droit) bénéficient du
chèque-vacances. Le cap du million de salariés a
été franchi en 1993.
Contrairement au secteur commercial, dont les équipements sont
principalement localisés dans des zones attractives très
touristiques, en zone urbaine ou littorale notamment, ceux du secteur
associatif sont répartis de façon plus diffuse sur l'ensemble du
territoire et plus particulièrement en milieu rural (campagne et moyenne
montagne).
C'est pourquoi le tourisme associatif est appelé à
jouer un rôle important en matière d'aménagement du
territoire et de développement local. Il faut pour cela qu'il
redéfinisse ses missions pour s'adapter à l'évolution des
besoins exprimés par les consommateurs.
2. La progression des crédits dans le projet de loi de finances pour 2000
La
dotation inscrite au chapitre 44-01 est portée à
11,8 millions de francs, soit une augmentation de 7,27 %. Ces
crédits doivent financier :
- les conventions d'objectifs signées par l'Etat avec les
associations du secteur pour relayer son action en faveur du
développement local, de l'insertion sociale des jeunes et des familles
en difficulté, de l'emploi et de la formation ;
- la mise en oeuvre de la bourse " solidarité vacances "
dans le cadre de la loi d'orientation n° 98-657 du
29 juillet 1998 relative à la lutte contre l'exclusion.
Dès l'été 1999, près de 6.000 offres ont
été collectées et ont permis à plus de
1.200 familles de partir en vacances pour la première fois.
Pour
2000, il est prévu de consacrer 2,8 millions de francs au
financement de ce dispositif ;
- le financement d'actions spécifiques pour favoriser les
séjours à l'étranger et les échanges
bilatéraux pour les jeunes en difficulté.
Selon une étude récente du CREDOC réalisée
à la demande du secrétariat d'Etat au tourisme, il apparaît
que 27 % des enfants âgés de 5 à 18 ans ne sont
pas partis en vacances. Par ailleurs, 75 % des parents souhaiteraient voir
leurs enfants partir seuls avec des organismes spécialisés
pendant une partie des vacances, mais jugent le prix des séjours
proposés trop élevé.
En 1999, 500 jeunes appartenant à des milieux
défavorisés ont pu partir dans le cadre d'échanges
bilatéraux et ce dispositif était doté de 1,5 million
de francs.
Enfin, pour mettre en oeuvre les recommandations du rapport de M. Michel
Geney sur les obstacles au développement des vacances des jeunes,
plusieurs mesures sont à l'étude qui nécessitent une
étroite concertation interministérielle. Il en est ainsi de la
révision des textes relatifs à la protection des mineurs hors du
domicile familial à l'occasion de séjours collectifs de vacances
entreprise par le ministère de la jeunesse et des sports.
3. La réhabilitation du parc immobilier
Le
programme en faveur des hébergements touristiques à
caractère social et familial a été engagé en 1990
avec comme objectif d'assurer la rénovation de la moitié de la
capacité d'accueil en villages et maisons familiales de vacances
gérés par les associations agréées.
Depuis 1990, 88.000 lits ont bénéficié de ce
programme (à raison d'environ 10.000 lits par an) pour un montant
d'intervention du ministère chargé du Tourisme de
276 millions de francs représentant un montant total de travaux
d'environ 1,7 milliard de francs, et la programmation de
485 opérations. 41 % des villages de vacances financés
sur cette ligne se trouvent en zone rurale, alors que ceux situés sur le
littoral et en montagne représentent respectivement 35 % et
24 %. Sur la période 1990/1998, le ministère chargé
du tourisme est intervenu en moyenne à hauteur de 16 %, les
régions de 10 %, les départements de 9 % auxquels il
convient d'ajouter différents financements dont les crédits
européens (5 %). L'apport des fonds propres s'est
élevé à 44 %.
En 1996, en raison des régulations budgétaires
opérées en cours d'année, seules deux opérations de
rénovation avaient pu être engagées pour un montant de
2,2 millions de francs ; en 1998, 17 opérations ont
été engagées, pour un total de 8 millions de francs.
Le Gouvernement a nettement affiché sa volonté de relancer ce
programme " Plan-Patrimoine ", notamment à travers la
circulaire du 25 mars 1998, dont les objectifs rappelaient
la
priorité donnée au renforcement de la fonction sociale des
équipements aidés, la contribution de cette politique, par ses
effets sur l'économie locale, aux politiques d'aménagement du
territoire
et de développement local, ainsi que le renforcement de
la concertation avec les associations et fédérations nationales
au plan central et déconcentré.
Ainsi, s'agissant des clientèles accueillies, les aides ont
été étendues aux hébergements à destination
de clientèles jeunes ou très sociales (auberges de jeunesse,
maisons d'accueil AFMA) avec la possibilité de déroger à
la condition relative à la capacité d'accueil minimale lorsqu'il
s'agit de maisons d'accueil à objectif d'insertion.
Pour 1998
, 24,3 millions de francs ont été ouverts en
autorisation de programme en loi de finances initiale (19 millions de
francs de crédits de paiement), ce qui a permis la programmation de
33 opérations de rénovation de villages de vacances et
maisons familiales de vacances, représentant 10.000 lits
touristiques et 155 millions de francs de travaux.
Pour 1999
, 24,3 millions de francs d'autorisations de programme
nouvelles et 13,4 millions de francs de crédits de paiement en
mesures nouvelles et services votés ont été ouverts en loi
de finances, afin de poursuivre et consolider la politique engagée en
matière de rénovation des hébergements touristiques
à caractère social et familial (45 opérations
aidées représentant 13.000 lits).
Dans le projet de loi de finances pour 2000,
les crédits
inscrits
au chapitre 66-03,
au titre du programme de rénovation
des hébergements à caractère associatif sont reconduits au
même niveau que l'an dernier, à savoir 13,4 millions de
francs au titre des crédits de paiement et 24,3 millions de francs
pour les autorisations de programme.
4. L'élargissement des conditions d'accès au chèque-vacances.
L'accent mis sur le tourisme social s'est traduit en dernier lieu par
l'adoption de la loi n° 99-584 du 12 juillet 1999, modifiant l'ordonnance
du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances.
- La nouvelle loi conforte la vocation sociale du dispositif du
chèque-vacances, en maintenant
la prise en compte du niveau de
ressources des bénéficiaires. Celle-ci se fait désormais
à travers l'appréciation du revenu du foyer fiscal
, pour
appréhender la situation des familles. Le revenu du foyer fiscal ne doit
pas, pour l'année 1999, excéder 87.680 francs pour la
première part de quotient familial, majoré de 19.900 francs
par demi-part supplémentaire.
- Le chèque-vacances demeure un
dispositif d'épargne
,
mais la baisse du
pourcentage minimum que doit apporter l'employé
sur son salaire en facilite les conditions d'accès
. Fixé
jusqu'à présent à 4 % du salaire minimum
interprofessionnel de croissance apprécié sur une base mensuelle,
le pourcentage
a été diminué de moitié
, ce
qui permet aux salariés les plus en difficultés de pouvoir se
créer une épargne.
- Enfin,
la contribution de l'employeur est exonérée des
cotisations et contributions sociales, dans la limite de 30 % du SMIC
(à l'exception de la CSG et du RDS),
à condition qu'une part
plus importante de cette contribution soit attribuée aux salariés
les plus modestes. Pour les employeurs non assujettis à la TVA, la
contribution est exonérée de la taxe sur les salaires.
Les PME de moins de cinquante salariés, dépourvues de
comité d'entreprise, pourront désormais accéder au
dispositif des chèques-vacances, si l'employeur le souhaite.
Celui-ci
devra définir le système d'épargne qu'il prévoit
avec le ou les délégués du personnel
. Dans les petites
entreprises, l'employeur peut signer un accord
avec un ou plusieurs
salariés mandatés
par une ou plusieurs organisations
syndicales. Il peut également établir une convention dans le
cadre de la branche professionnelle, ou par un regroupement d'entreprises.
La contribution de l'employeur bénéficiera alors d'une
exonération des cotisations et contributions sociales, sous
réserve d'être attribuée essentiellement aux
salariés dont les rémunérations sont les plus faibles, et
de ne pas se substituer à une rémunération.
La loi prévoit également que
les chèques-vacances
pourront être remis en paiement des dépenses effectuées sur
le territoire des Etats membres de la Communauté européenne aux
prestataires qui auront signé une convention avec l'Agence nationale
pour les chèques-vacances
. L'objectif est ainsi de favoriser la mise
en place de systèmes similaires, dans les pays membres de l'Union
européenne, qui pourraient être utilisés en France et
renforcer les échanges.
Tout en appréciant à sa juste valeur la portée de cette
loi,
votre rapporteur pour avis regrette que les positions défendues
au Sénat par M. Paul Blanc, au nom de la Commission des Affaires
sociales, n'aient pas été prises en compte et qu'une
démarche plus consensuelle n'ait pas prévalu lors des
débats
, alors que l'ensemble des parlementaires est convaincu de
l'intérêt des chèques-vacances pour mettre en oeuvre le
droit aux vacances pour tous.
La Commission des Affaires sociales défendait une position à
la fois pragmatique et plus ambitieuse
, soulignant que les dispositions du
texte n'allaient concerner que 150.000 bénéficiaires
supplémentaires, soit l'équivalent au rythme actuel de croissance
du chèque-vacances et elle s'interrogeait également sur
l'intérêt pour l'industrie touristique française de
prévoir l'extension du chèque-vacances aux autres pays de l'Union
européenne.
Le Sénat a donc cherché à
mieux prendre en compte les
familles
en relevant la majoration du critère de ressources par
demi-part supplémentaire et en modulant la contribution de l'employeur
en fonction des charges de famille.
Il est regrettable que
l'Assemblée nationale ne l'ait pas suivi, manifestant par là un
manque d'intérêt pour les familles, assez paradoxal,
au moment
où Mme Michelle Demessine, Secrétaire d'Etat au tourisme, fait le
constat de leurs difficultés d'accès aux vacances, en mettant en
place un groupe de travail interministériel " Vacances et politique
familiale " chargé justement de faire des propositions en ce
domaine.
Dans une seconde série de mesures,
le Sénat a voulu rendre les
chèques-vacances plus attractifs pour les entreprises
et a
ainsi
proposé d'étendre l'exonération de charges à la
CSG
et de faciliter la mise en place du chèque-vacances dans les PME
grâce
à un élargissement des procédures
et ce
dans le respect du dialogue social, quoi qu'on ait pu entendre.
Enfin, la troisième voie était
la recherche d'une
amélioration du système actuel de distribution des
chèques-vacances
. A cet égard, le Sénat avait
suggéré la possibilité pour l'ANCV, dans le respect de son
monopole d'émission, de sous-traiter leur distribution auprès
d'organismes bien implantés dans le réseau des PME.
S'agissant du bilan d'activité de
l'Agence nationale pour les
chèques-vacances
(ANCV), le chiffre d'affaires atteint
3,67 milliards de francs en 1998
contre 3,01 milliards de francs
en 1997, en progression de 22 %.
4 millions de personnes en ont bénéficié et
l'utilisation des chèques a généré
13 milliards de francs de consommation touristique. Les excédents
de gestion de l'exercice de 1997, distribuables sous forme de subventions aux
équipements de tourisme et de loisirs à vocation sociale ainsi
qu'aux actions contribuant à l'application des politiques sociales du
tourisme et des vacances ont fait l'objet d'une première
répartition par le Conseil d'administration du 8 juin 1999 :
24,3 millions de francs ont été attribués à
des équipements de tourisme et 1,3 million de francs à des
actions de solidarité.
En outre, en application de l'ordonnance de 1982, qui prévoit que la
contre valeur des chèques-vacances périmés est
affectée au bénéfice de catégories sociales
défavorisées, l'ANCV a attribué en 1998 à
18 organismes sociaux ou associations caritatives une dotation de
6,7 millions de francs sous forme de bourses vacances. Près de
15.000 personnes ont bénéficié ainsi de
chèques-vacances sous cette forme.