CHAPITRE II -
LE COMMISSARIAT GÉNÉRAL DU PLAN
ET
L'ÉVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES
L'évaluation des politiques publiques a pour objet
d'apprécier l'efficacité de l'action publique en comparant les
résultats aux objectifs poursuivis et aux moyens mis en oeuvre pour les
atteindre. Son développement permet d'affiner les critères de
choix et de renforcer la pertinence des décisions politiques.
Le Commissariat général du plan occupe une place centrale dans le
dispositif français d'évaluation, qu'un décret du
18 novembre 1998 a modifié. Le CGP exerce, en outre, des
compétences spécifiques s'agissant de l'évaluation des
contrats de plan Etat-régions, sur lesquelles votre rapporteur pour avis
a décidé de faire le point à l'occasion de l'examen du
budget pour l'an 2000 et de la conclusion des nouveaux contrats de plan.
I. LA RÉFORME DU DISPOSITIF D'ÉVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES PAR LE DÉCRET DU 18 NOVEMBRE 1998
Depuis
plusieurs années, la Commission des Affaires économiques
souhaitait une réforme du décret n° 90-82 du
22 janvier 1990 relatif à l'évaluation des politiques
publiques. Aussi se félicite-t-elle de la publication du décret
n° 98-1048 du 18 novembre 1998 et de la circulaire du
28 décembre 1998, relatifs à l'évaluation des
politiques publiques.
Le décret précité a supprimé le " Conseil
scientifique de l'évaluation ", qu'il a remplacé par un
" Conseil national de l'évaluation " (CNE). Installé le
16 février 1999 et présidé par M. Yves
Cousquer, le CNE est composé de
quatorze membres
, dont :
- six personnalités choisies en raison de leurs compétences
en matière d'évaluation et dans le domaine des sciences
économiques, sociales ou administratives ;
- un membre du Conseil d'Etat ;
- un membre de la Cour des comptes ;
- trois membres du Conseil économique et social ;
- un maire, un conseiller général et un conseiller
régional, respectivement désignés au vu des propositions
faites par une association représentative des maires, des
présidents de conseils généraux et des présidents
de conseils régionaux.
Votre Commission des Affaires économiques déplore qu'aucun
membre de l'Assemblée nationale et du Sénat ne figure parmi les
membres de droit du Conseil national de l'évaluation, aux termes du
décret n° 98-1048 précité.
Le Conseil national de l'évaluation reçoit des projets
d'évaluation
transmis par le Premier ministre, les ministres, le
Conseil d'Etat, la Cour des comptes, le Conseil économique et social, le
Médiateur de la République, les collectivités
territoriales et les associations d'élus représentées en
son sein. Sur cette base,
il propose chaque année au
Premier ministre un programme d'évaluation
destiné
à être mis en oeuvre l'année suivante. Ce programme fixe,
pour chaque projet d'évaluation, la composition de l'instance
chargée de réaliser l'évaluation, les modalités et
les délais de sa réalisation.
Concrètement, le secrétariat du CNE est tenu par le Commissariat
général du Plan. Dans le futur, selon les informations
communiquées à votre rapporteur, la durée des travaux
d'évaluation ne devra pas excéder un an. Elle pourra
cependant être portée à dix-huit mois dans des cas
exceptionnels. Cette innovation est particulièrement utile :
l'évaluation de la politique de la montagne n'a-t-elle pas duré
six ans ? Décidée en 1993, ses résultats ne
seront rendus publics qu'à la fin 1999 !
Les travaux de chacune des instances d'évaluation seront, aux termes du
décret précité, publiés. Le CGP pourra, en outre,
proposer les suites à donner aux évaluations qui concernent des
politiques relevant de l'Etat.
Sous la présidence du Premier ministre, le comité
interministériel pour la réforme l'Etat a d'ores et
déjà arrêté, le 13 juillet 1999,
une
liste de cinq thèmes qui feront l'objet d'une évaluation
dans l'année à venir
. Il s'agit :
- de la prévention et le traitement du SIDA ;
- du logement social dans les DOM ;
- des dispositifs d'aide à l'emploi dans le secteur non
marchand ;
- de l'effet du programme nouveaux services-emplois jeunes dans le secteur
de la jeunesse et des sports ;
- enfin, de la préservation des ressources destinées
à la production d'eau potable.
Le montant total des crédits destinés au financement de ces
évaluations s'élève à
5,3 millions de
francs
.
Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis,
aucune collectivité locale n'a, pour le moment, saisi le CGP d'une
demande d'évaluation dans les conditions fixées par
l'article 4 du décret n° 98-1048 précité.
Votre Commission des Affaires économiques souhaite que les
dispositions du décret n° 98-1048 fassent l'objet d'une mise en
oeuvre rapide et que les résultats des évaluations soient
publiés dès que possible.
II. LA CONTRIBUTION DU CGP À L'ÉVALUATION DES CONTRATS DE PLAN ETAT-RÉGIONS
Lors de la signature des derniers contrats de plan, le Premier ministre a décidé par une circulaire du 31 mars 1992, d'instituer une procédure d'évaluation de l'exécution de ces contrats, à laquelle le Commissariat général du Plan prend une part importante.
A. PRINCIPES ET MISE EN oeUVRE DE LA PROCÉDURE FIXÉE PAR LA CIRCULAIRE DU 31 MARS 1992
La
procédure prescrite par la circulaire du 31 mars 1992
s'articule en deux volets, l'un national, l'autre régional.
Cette procédure est à la fois sélective (elle
n'intéresse qu'un échantillon de projets) et approfondie,
puisqu'elle consiste en une étude systématique d'une batterie de
critères qualitatifs et quantitatifs.
Le volet régional
Dans chacune des régions, un
comité de pilotage,
co-présidé par le Préfet de région et le
président du conseil régional, est créé.
Composé selon des modalités qui varient selon les régions,
il comprend cependant toujours le président du Conseil économique
et social régional (CESR), le Trésorier payeur
général, le président de la Chambre régionale des
comptes, ainsi que des experts. Dans certaines régions, les
préfets de département, le directeur des services de l'INSEE et
celui de la Banque de France participent à ses travaux.
Ce comité est chargé de choisir les programmes
d'évaluation, de fixer la composition de l'instance technique
chargée de réaliser l'évaluation (cf. ci-après) de
décider d'en publier les conclusions et de déterminer les suites
qu'il convient d'y donner.
Pour chaque programme d'évaluation, une
instance technique
est
désignée au niveau régional. Elle est composée, le
plus souvent, d'experts et d'universitaires ainsi que d'un membre du CESR.
Chaque instance propose le cahier des charges du projet d'évaluation
qu'elle doit réaliser au comité de pilotage, conduit les travaux
d'évaluation et soumet ses conclusions au même comité.
Le volet national
Une
instance nationale d'évaluation
a été
créée. Présidée par le Commissaire
général du Plan, elle est composée de représentants
des principales administrations centrales intéressées par
l'exécution des CPER (délégation à
l'aménagement du territoire et à l'action régionale ;
délégation interministérielle à la ville ;
direction générale de l'administration ; direction
générale des collectivités locales ; direction des
affaires économiques, sociales et culturelles d'outre-mer, direction de
la comptabilité publique, direction du budget, ainsi que d'un membre du
Conseil scientifique de l'évaluation).
Son secrétariat est tenu par les services du Commissariat
général du Plan. Elle s'est réunie vingt fois depuis
sa création.
L'instance nationale d'évaluation reçoit des projets
d'évaluation transmis par les préfets de région et
décide, le cas échéant, de leur déléguer
les crédits d'Etat nécessaires à la réalisation
des évaluations
. Le montant de ces crédits est calculé
sur la base
d'un prélèvement de 6/10.000
e
de
l'enveloppe globale des contrats de plan. S'y ajoutent les crédits, d'un
montant équivalent, consacrés par les régions aux
évaluations.
De 1995 à 1999, cent cinquante trois dossiers ont été
soumis à l'instance nationale, correspondant à un montant total
de crédits délégués de plus de 35 millions de
francs
, dont 34 millions au titre des régions
métropolitaines et 1,6 million au titre des régions
d'outre-mer.
On retiendra, à tire d'exemple, que les projets d'évaluation
soumis à l'instance nationale ont concerné, en 1999 :
- la politique de la ville ; les politiques agricoles relatives aux
productions animales et les politiques agricoles relatives aux productions
végétales (pour la région Alsace) ;
- le système d'accompagnement du transfert de technologie et les
missions locales (pour la Bourgogne) ;
- le fonds régional d'aide au conseil et la prime d'orientation
agricole (pour la région Centre) ;
- les actions de transport et d'environnement et la politique de la ville
en Seine-Saint-Denis (pour l'Ile-de-France) ;
- la politique de transmission-reprise dans l'artisanat et les documents
uniques de programmation (DOCUP) 5b (pour le Limousin) ;
- le suivi des aides à l'investissement matériel des PMI
(pour Midi-Pyrénées) ;
- le soutien aux projets d'agglomération (pour le
Nord-Pas-de-Calais) ;
- la politique du tourisme (pour Poitou-Charentes) ;
- les aides à l'industrie (pour la Martinique).
B. PERSPECTIVES D'ÉVALUATION DE LA NOUVELLE GÉNÉRATION DE CONTRATS DE PLAN
Dans la
circulaire du 31 juillet 1998 relative aux prochains contrats de plan
Etat-régions et aux principes relatifs à leur architecture, le
Premier ministre indique : "
L'amélioration du suivi de
l'évaluation des contrats de plan figure parmi les mesures à
mettre en oeuvre pour la prochaine génération. Le suivi et
l'évaluation des opérations financées au titre de chaque
CPER par l'Etat, la région et chaque financement feront partie des
clauses du contrat
".
Ce texte prévoit, en outre, qu'au terme des quatre premières
années du contrat, une synthèse du suivi des évaluation
sera établie par les préfets de région et le Commissariat
général du Plan, et qu'elle fera l'objet d'un rapport au
Parlement.
Selon les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, une
actualisation de la circulaire du 31 mars 1992, qui fixe les
règles applicables à l'évaluation des CPER, serait
actuellement en cours d'élaboration. Cette modernisation est souhaitable
et doit tenir compte des spécificités des nouveaux contrats de
plan.
Votre Commission des Affaires économiques souhaite que la
procédure mise en place demeure légère :
l'expérience prouve l'intérêt d'évaluations
ciblées réalisées à la demande des
régions.
Il est cependant regrettable que les résultats des évaluations
demeurent totalement confidentiels puisqu'ils sont, en pratique,
adressés uniquement aux préfets de région, au Commissariat
général du plan et aux exécutifs régionaux. Certes,
il convient de prendre garde à ne pas décourager les initiatives
en donnant une publicité systématique aux résultats de ces
évaluations. Mais il est dommage que l'expérience tirée de
ces travaux sur des sujets d'intérêt général ne
puisse être diffusée.
C'est pourquoi la Commission des Affaires économiques recommande que
le Commissariat général du plan élabore, sur la base des
études ponctuelles qui lui sont adressées, des synthèses
permettant de comparer les résultats obtenus dans les diverses
régions.
*
* *
Suivant les conclusions de son rapporteur pour avis, la Commission des Affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du Plan inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000.