EXPOSÉ GÉNÉRAL

Les conclusions de la Commission des affaires sociales, sur lesquelles la Commission des finances est appelée à rendre un avis, ont pour objet de consolider les régimes obligatoires de retraite par répartition en instaurant un régime de retraite facultatif par capitalisation pour les salariés du secteur privé.

Cette initiative est motivée par la situation difficile dans laquelle risquent de se retrouver les régimes obligatoires d'ici moins de dix ans.

I. LE CONSTAT D'UNE NÉCESSAIRE RÉFORME

A. LES PRÉVISIBLES DIFFICULTÉS DES RÉGIMES OBLIGATOIRES

Depuis la fin de la deuxième Guerre mondiale, les régimes par répartition en France ont connu un grand succès. Ce système a rempli l'essentiel de sa mission et a notamment répondu au problème de la pauvreté des personnes âgées ; mais sa période la plus faste semble aujourd'hui révolue. Ses évolutions financières prévisibles vont imposer à notre système de retraite de profondes réformes.

Les principales données du problème sont connues : la conjugaison de l'allongement de la durée de vie moyenne et du vieillissement des générations nombreuses du " Baby-boom " va entraîner, selon le Commissariat général au Plan 4 ( * ) , une augmentation de dix millions de personnes de la population de plus de soixante ans d'ici à 2040, alors que la population ayant entre vingt et soixante ans va probablement diminuer d'environ un million de personnes.

En 2040, il est prévisible qu'un Français sur trois aura plus de 60 ans 5 ( * ) .

Les principales évolutions vont être perceptibles dès 2006 : à cette date, la population active commencera à baisser avec le départ à la retraite des " Papy-boomers " qui ne pourra pas être compensé par les entrées sur le marché du travail de générations plus jeunes.

Evolution de la population des 20-59 ans et de la population des plus de 60 ans
(base 100 en 1995)

Années

1995

2000

2005

2010

2015

2020

Population des 20-59 ans

100

103

105

104

103

102

Population des 60 ans et plus

100

104

109

122

135

146

Source : INSEE, rapport Conseil des Impôt 1999.

Les rapports démographique 6 ( * ) et de dépendance 7 ( * ) vont donc se dégrader et entraîner une augmentation très rapide des besoins de financement des régimes de retraite. Le Commissariat général au Plan résume la situation d'une phrase : " le choc financier sur notre système de retraite est inéluctable ".

Les dépenses de retraite représentent en France 12,1 % du PIB en 1998. Selon les scenarii du Commissariat général au Plan, elles pourraient tripler à l'horizon 2040 ( entre 15,1 % et 16,7 % du PIB ) alors que le PIB et la masse salariale ne feraient que doubler.

Besoin de financement de l'ensemble du système de retraite en 2020 *

Scenarii

Scénario 1

Scénario 2

Scénario 3

en milliards de francs 1998

380

290

220

en points de PIB

3,0

2,2

1,5

* ASF, FSV et les régimes suivants : AGIRC, ARRCO, Banque de France, CRPCEN, CANCAVA (base et complémentaire), CARCD, CARMF, CARPIMKO, CAVP, CNAVPL, CNAVTS, CNRACL, ENIM, IEG, IRCANTEC, Non-salariés agricoles, ORGANIC (base), RATP, Régimes des mines, Régimes des ouvriers de l'Etat, Retraites des fonctionnaires de l'Etat, Salariés agricoles, SNCF.

Note : Dans le scénario 1, le taux de chômage structurel est fixé à 9 % ; dans le scénario 2, à 6 % à partir de 2010 ; dans le scénario 3, à 3 %.

Source : Commissariat général au Plan, rapport Conseil des impôts 1999.

Une évolution à l'échelle européenne

La plupart des pays européens connaissent une évolution comparable à celle que l'on observe en France.

Une communication de la Commission européenne 8 ( * ) indique que " les prestations de retraite sont une composante essentielle des systèmes de protection sociale des pays de l'Union. Les dépenses réalisées au titre des régimes de retraite publics y représentent près de la moitié du total des dépenses de protection sociale. Elles représentent entre 9 et 15 % des Produits Intérieurs Bruts (PIB) des Etats membres 9 ( * ) . Cette proportion risque de fortement augmenter sous l'effet du vieillissement de la population de l'Union. En 1995, 23 % de la population était âgée de 65 ans ou plus. Ce chiffre atteindra 40 % en 2025 . "

En 2030, un tiers de la population européenne aurait plus de soixante ans . Les personnes âgées de soixante-cinq ans et plus sont aujourd'hui 60 millions dans l'Union européenne, elles devraient être plus de 88 millions en 2030.

Les statistiques d'Eurostat montrent en outre une augmentation très marquée du rapport entre le nombre de personnes âgées de plus de soixante ans et celui de personnes âgées de vingt à soixante ans. Celui-ci qui était de 371 pour mille en 1995, augmenterait à 519 pour mille en 2020 et atteindrait 723 pour mille en 2050.

B. L'INSTAURATION D'UN SYSTÈME DE RETRAITE PAR CAPITALISATION EST NÉCESSAIRE POUR CONSOLIDER LES RETRAITES PAR RÉPARTITION

Il serait naïf et irresponsable de croire ou faire croire que la simple augmentation de la productivité ou la décrue du chômage suffiront à régler la problème du financement des retraites.

Différentes solutions de " sauvetage de nos retraites " sont envisageables. La solution que préconise la Commission des affaires sociales du Sénat, appuyée par votre Commission des finances est la suivante : consolider notre système de retraite actuel par un développement de la capitalisation . A aucun moment il n'est question de remplacer un système par un autre : loin d'être exclusifs, ces régimes sont au contraire complémentaires.

Cette solution doit être mise en oeuvre rapidement . Elle ne nous exonérera toutefois pas d'une réforme des systèmes de retraite par répartition .

1. La nécessaire poursuite de la réforme des retraites par répartition

Votre Commission des finances est en effet très attachée au système des retraites par répartition qui a montré son succès. Afin d'en assurer la pérennité, votre Commission estime en particulier nécessaire d'envisager la poursuite de la réforme du système, déjà engagée par la réforme de 1993.

Pour cela, trois voies sont possibles :

la réduction des prestations,

l'augmentation du produit des cotisations perçues sur les actifs (par élargissement de l'assiette ou augmentation du taux),

l'allongement de la durée de la vie active.

Les deux premières solutions évoquées ne sont acceptables que pour des réformes limitées. Quant à la troisième, elle semble incontournable ; d'autant plus que l'âge biologique de la vieillesse est en recul constant.

La plupart des pays de l'OCDE se sont déjà engagés sur cette voie

. en France, la réforme de 1993 a notamment pour effet d'allonger progressivement la durée de cotisation minimale pour accèder à une retraite à taux plein ;

. en l'Allemagne, l'âge de la retraite passera de 63 à 65 ans à partir de 2001 pour les hommes et de 60 à 65 ans à partir de 2005 pour les femmes ;

. au Royaume-Uni, l'âge de la retraite passera de 60 à 65 ans pour les femmes entre 2010 et 2020 (alignement sur les hommes) ;

. en Italie, l'âge de la retraite est relevé progressivement d'un an tous les dix-huit mois jusqu'à 65 ans pour les hommes et 60 ans pour les femmes (aujourd'hui 63 et 58 ans).

. aux Etats-Unis, l'âge de la retraite devrait passer de 65 à 67 ans entre aujourd'hui et 2022.

2. Un complément indispensable : la capitalisation

Le développement de la capitalisation constituera un complément indispensable de cette réforme des retraites dans notre pays. En particulier, il pourrait en atténuer les rigueurs.

Dans notre optique, le régime de retraite par répartition sera toujours amené à verser l'essentiel des retraites aux salariés du privé, le régime par capitalisation n'ayant qu'un rôle d'appoint . Ce système " mixte " permettrait d'allier les avantages des deux systèmes : en particulier, dans une optique de gestion de portefeuille, un tel système diversifié serait optimal 10 ( * ) .

Il faut enfin remarquer que sur le long terme, le taux de rendement de la capitalisation a jusqu'à présent été supérieur à celui de la répartition . Les futurs retraités français ont donc tout à gagner à diversifier en ce sens leur système de retraites.

3. Une situation d'urgence

a) Il faut engager une réforme " dès à présent "

Jean-Michel Charpin insiste avec raison dans son rapport 11 ( * ) sur la nécessité d'" engager dès à présent la réforme du système ". Il y voit deux raisons principales :

la nécessité d'engager une réforme progressive (notamment en matière de décalage de l'âge de départ à la retraite) " pour éviter de désavantager certaines générations et soumettre le marché de l'emploi à un choc certain " ;

la nécessité, si des mécanismes de capitalisation sont instaurés, de " pouvoir accumuler un capital suffisant avant que ne soit atteinte la période de plus fort déséquilibre des régimes de retraite ".

b) 2006 ... c'est demain : les hésitations du gouvernement sont impardonnables

Or, c'est dès 2006 que nos régimes de retraite par répartition vont commencer à être confrontés aux conséquences d'une accélération marquée du vieillissement : 2006 c'est dans à peine plus de six ans !

Face à cette situation d'urgence, que fait le gouvernement ?

Tout d'abord, il commande un " n ième rapport " sur les retraites qui est venu - qui s'en serait étonné ? - rappeler la gravité de la situation et l'urgence des réformes.

Ensuite, il crée un fonds de réserve pour les retraites , bien trop maigrement abondé pour constituer ne serait-ce qu'un début de réponse au problème des retraites.

Le fonds de réserve pour les retraites

Créé au sein du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) par l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, le fonds de réserve ne dispose ni de ressources précises, ni de missions déterminées. Sa création a fait l'objet de commentaires critiques de la part des Commissions des affaires sociales et des finances.

Les missions du fonds de réserve ne sont pas indiquées dans la loi. Celle-ci dispose seulement que le fonds est créé au bénéfice de la branche vieillesse du régime général et des régime alignés. Deux options sont théoriquement possibles : le fonds de réserve peut avoir pour but, soit de lisser simplement l'augmentation future des cotisations d'assurance vieillesse, soit d'engendrer des revenus suffisants pour minorer durablement le niveau futur des cotisations. Dans le premier cas, le montant visé s'exprime en centaines de milliards de francs. Dans le second cas, il s'exprime en milliers de milliards de francs.

Ont par ailleurs été mises en cause les modalités de financement particulièrement complexes du fonds et les incertitudes qui pèsent sur les sommes effectivement disponibles. La loi précitée a en effet prévu d'affecter au fonds de réserve une fraction du produit de la contribution de solidarité sur les sociétés (C3S), tout ou partie des excédents éventuels du FSV et toute autre ressource affectée en vertu de dispositions législatives. Lors des débats, la possibilité d'une affectation du produit des privatisations et celle d'une surcotisation ont été aussi évoquées par le gouvernement.

Deux milliards de francs d'excédent de la C3S ont déjà été affectés. Trois à quatre milliards de francs provenant toujours de la C3S et d'autres contributions pourraient encore s'y ajouter ainsi que 4 milliards de francs issus du produit de la souscription des parts sociales des caisses d'épargne et l'excédent de la branche vieillesse du régime général, soit environ trois milliards de francs.

Ce fonds devrait donc atteindre en 2000 un montant d'une quinzaine de milliards de francs, soit à peine 0,16 % du PIB . Le Programme pluriannuel de finances publiques de décembre 1998 prévoyait qu'à l'horizon 2002 l'actif du fonds de réserve des retraites s`établirait à 0,8 % du PIB avec une hypothèse de croissance économique à 2,5 % et à 1,6 % avec une hypothèse de croissance économique à 3 %.

Or, Jean-Michel Charpin évalue les sommes nécessaires à " au moins trois points de PIB " en cas de fonds de lissage et à " au moins dix points de PIB " pour un apport permanent de revenus. Il faudrait donc une dotation entre 18 et 62 fois plus importante que celle qui nous est proposée pour 2000 . A plus long terme, l'OCDE estime que les pensions de la période 1994-2070 ne sont pas financées à hauteur de 100 % du PIB de 1994 et pour l'ensemble du siècle prochain on peut évaluer l'impasse financière des retraites à une somme comprise entre 50 et 300 % du PIB de 1998. L'actif du fonds est manifestement hors de proportion avec les montants nécessaires.

Plutôt que de créer un fonds de réserve pour provisionner ces engagements de hors-bilan de l'Etat, le gouvernement aurait été mieux inspiré de procéder directement à un désendettement de l'Etat : cette solution aurait été équivalente d'un point de vue économique et aurait évité la bureaucratisation et l'étatisme qui président à l'instauration de ce fonds 12 ( * ) .

Enfin, le gouvernement prend des engagements qu'il ne tient pas : dans le Cadre de référence " Retraites par répartition et fonds partenariaux de retraite " diffusé le 29 octobre 1998, le gouvernement s'engageait à mettre en place un " dispositif d'épargne longue pour la retraite " par le biais d'un texte présenté au Parlement en 1999 . A ce jour, le Parlement n'a toujours pas été saisi de ce texte.

4. Une attente sociale très vive

La question des retraites préoccupe nos concitoyens , à juste titre. Un sondage publié l'an dernier par l'institut Ipsos indiquait que 88 % des personnes interrogées ont de vives inquiétudes sur leur niveau de vie à la retraite et 43 % sont favorables à l'instauration de fonds de pension pour régler le problème des retraites.

Les nombreuses initiatives parlementaires sur ce sujet sont le reflet de cette inquiétude des Français quant à leur retraite.

C. DES EFFETS ÉCONOMIQUES BÉNÉFIQUES

L'instauration de fonds de retraite dans notre pays aura d'incontestables effets bénéfiques sur notre économie.

Ces fonds vont permettre d'encourager l'investissement à long terme en actions et donc renforcer les fonds propres des entreprises et contribuer au contrôle durable des sociétés cotées françaises par des capitaux d'origine française.

1. La situation actuelle

En l'absence de fonds de pension en France, qu'observe-t-on ?

Tout d'abord, la faiblesse de l'investissement des ménages et des institutionnels nationaux en actions . En effet, dans la structure de leur épargne, les ménages français ont une nette préférence pour les titres courts, les produits de taux ou réglementés ; quant aux institutionnels, leur faible part dans la capitalisation actions de la place financière de Paris s'explique notamment par l'absence de fonds de pension français.

Les placements des ménages en fonds propres d'entreprise

En dépit de progrès importants ces dernières années, la place du marché des actions dans le financement de l'économie reste, en France, largement inférieure à celle observée dans les pays anglo-saxons : en 1998, la capitalisation boursière représente 64 % du PIB en France (en 1996, 110 % aux Etats-Unis et 139 % au Royaume-Uni). L'épargnant français privilégie traditionnellement une faible prise de risque, et est donc plus orienté vers les produits de taux ou les placements dont la rémunération est réglementée. (...)

La proportion des ménages actionnaires est en hausse depuis 12 ans . En 1998 13 ( * ) , 83,7 % des ménages détiennent un livret d'épargne, 41,4 % un produit en direct d'épargne-logement, 35 % un produit d'assurance-vie et seulement 5,3 % des obligations en direct, 10,8 % des parts d'OPCVM et 13,2 % des actions en direct . Bien que faible, ce dernier chiffre marque une nette progression puisque la part des ménages détenant des actions (cotées ou non cotées) n'était que de 7,3 % en 1986 et 8,5 % en 1992. La détention d'actions non cotées est quant à elle extrêmement peu répandue puisqu'elle ne concerne que 1,5 % des ménages. (...)

Les flux de placements restent limités . Sur les quatre dernières années, l'évolution des placements est moins favorable aux fonds propres d'entreprises.

Si la part des actions semble croître de façon importante, il s'agit surtout d'un effet de valorisation. En effet, sur la période, l'indice des actions françaises à pratiquement doublé. C'est ce que confirme le même graphique, exprimé en flux nets 14 ( * ) :

(...) Cette relative faiblesse de l'investissement direct en fonds d'entreprises n'est pas contrebalancée par une part intermédiée importante. L'encours d'OPCVM actions détenue par les agents non financiers résidents était de 246,7 milliards de francs en décembre 1997, alors qu'il atteignait déjà 239,8 milliards en décembre 1989 15 ( * ) . Son évolution positive en 1998 est essentiellement due à l'accroissement du nombre de détenteurs d'OPCVM actions.

La faiblesse de l'investissement national direct en actions françaises cotées

La part des investisseurs institutionnels dans la capitalisation actions de la Bourse de Paris, qui s'élève à 26 % à fin décembre 1998, est encore faible comparée à celle observée sur les places financières anglo-saxonnes. Cette situation s'explique, notamment, par le poids relativement limité des OPCVM actions et surtout par l'absence de fonds d'épargne à long terme . Les parts d'actions françaises cotées détenues directement par les ménages et les sociétés non financières s'établissent à environ 11 % et 18 % à fin décembre 1998. Par ailleurs, les placements en actions ne concernent qu'une partie réduite des épargnants (5,2 millions de Français en avril-mai 1996 et en décembre 1997 16 ( * ) ) et la concentration des portefeuilles est forte : plus de 73 % de l'encours d'actions françaises se trouve logé dans un peu plus de 10 % des comptes à fin 1997 17 ( * ) . Les non résidents clients des dépositaires français détiennent la fraction comparativement la plus importante du capital des entreprises françaises, près de 36 % à fin décembre 1998 18 ( * ) . Cette situation qui se conjugue avec de loin les plus importants volumes de transactions, les conduit souvent à jouer un rôle directeur dans l'orientation des cours.

(Extraits du Rapport annuel 1998 du Conseil national du crédit et du titre)

On observe par ailleurs que le marché financier français est dominé par les investisseurs institutionnels étrangers , et en particulier les fonds de pension anglo-saxons. En effet, la part des investisseurs internationaux dans la capitalisation de la bourse de Paris est passée de 25 % à 30 % entre 1994 et 1998 : ils sont devenus les premiers investisseurs de la place , devant les ménages. Par ailleurs, il faut rappeler que les fonds de pension anglo-saxons possèdent de 10 à 50 % des entreprises du CAC 40, c'est dire qu'ils en sont devenus des actionnaires dominants.

Cette évolution n'a pas été sans incidence sur le capitalisme à la française, avec notamment l'introduction de pratiques dites de " gouvernement d'entreprise ".

La capitalisation boursière de la place de Paris

Le poids relatif des non-résidents dans la capitalisation boursière de la Bourse de Paris est lié à plusieurs facteurs.

Du côté de la demande, on peut probablement citer comme frein à l'accroissement du marché des actions françaises l'aversion au risque des investisseurs français, en particulier des ménages, dont on peut trouver confirmation dans la part relativement faible des flux d'achats d'actions dans les investissements en titres étrangers des résidents français (20 %, contre 53 % en Allemagne en 1998) ainsi que dans la faiblesse des investissements en actions des fonds d'épargne collectifs. En revanche, l'intérêt croissant des non-résidents est justifié par la notoriété internationale du marché des actions de Paris, qui a pu être vérifiée notamment lors des privatisations, par les facilités offertes par les systèmes de transactions et de règlement-livraison ainsi que par le bas niveau comparatif des coûts de transaction.

Du côté de l'offre, il apparaît, en premier lieu, que la capitalisation boursière est plus faible à Paris que sur les autres grandes places financières (Londres en particulier totalise 2.300 milliards de dollars à fin 1998, contre 980 pour Paris). Par ailleurs, le nombre de sociétés cotées à la Bourse de Paris apparaît nettement plus faible que sur les autres grandes places européennes (962 contre 2.920 en Allemagne et 3.525 à Londres). On note en outre une moindre importance du nombre d'introductions en bourse (109 à Paris, contre 500 en Allemagne en 1998), du montant des émissions de titres cotés (69,1 milliards de francs contre 148 milliards de francs en Allemagne en 1998) et du recours aux émissions d'actions pour financer la formation brute de capital fixe (4,3 % en France, contre 12 % au Royaume-Uni et 9 % aux Etats-Unis en 1998). Par ailleurs, l'absence en Bourse de grandes entreprises publiques telles EDF, GDF ou la SNCF se fait sentir, tout comme le maintien dans les mains de l'Etat d'une part significative du capital de celles qui ont été partiellement privatisées (France Telecom, Renault).

(Extraits du Rapport annuel 1998 du Conseil national du crédit et du titre)

2. Quels effets économiques peut-on attendre de l'introduction des fonds de pension en France ?

Le développement des fonds de pension devrait logiquement apporter des ressources longues à l'ensemble de notre économie, sous forme d'un développement du marché des actions . En effet, dans les pays anglo-saxons l'investissement des fonds de pension se fait en grande majorité en actions. Sans qu'il soit besoin d'instaurer une règle spécifique, il est probable qu'il en sera de même pour les fonds de retraite français.

Structure de l'actif financier des sociétés d'assurance et fonds de pension
en 1995 (en %)

France

Royaume Uni

Liquidités

4

4

Obligations

59

15

Actions

10

73

OPCVM

17

6

Prêts et divers

10

2

Source : INSEE, Bank of England. " Retraites et épargne ", rapport du Conseil d'analyse économique, La Documentation française, 1998.

Cette situation devrait notamment permettre l'amélioration de la structure de bilan des entreprises françaises avec l'enchaînement suivant : développement des fonds propres et réduction de l'endettement, accès à des ressources meilleur marché, développement des investissements et enfin contribution accrue à la croissance et à l'emploi.

La création de fonds de pension à la française permettra également de reprendre le contrôle de sociétés cotées françaises, dont les actionnaires dominants étaient devenus des fonds de pension anglo-saxons, par des capitaux d'origine française.

* 4 " L'avenir de nos retraites ", Rapport au Premier ministre, Jean-Michel Charpin, Commissaire au Plan ; La Documentation française, collection des rapports officiels, Paris 1999.

* 5 Selon le scénario intermédiaire retenu par le Commissariat général au Plan, qui prolonge les évolutions tendantielles observées depuis vingt ans en matière de mortalité, de fécondité et de migrations.

* 6 Il s'agit du rapport entre le nombre de personnes âgées de soixante ans et plus et le nombre de personnes âgées de moins de soixante ans.

* 7 Il s'agit du rapport entre le nombre de retraités et le nombre d'actifs cotisants. Il est déterminé par trois facteurs partiellement interdépendants : un facteur démographique (mortalité, espérance de vie, fécondité), un facteur économique (chômage, emploi) et un facteur " sociétal " (travail des femmes, âge de l'entrée dans la vie active, date de prise de la retraite).

* 8 Communication de la Commission européenne, " Vers un Marché Unique pour les retraites complémentaires - Résultats de la consultation relative au Livre vert sur les retraites complémentaires dans le Marché Unique ", 1999.

* 9 En moyenne, les prestations vieillesse représente 12,3 % du PIB dans l'Union européenne.

* 10 Ce système permettrait en effet de diversifier les risques : le système en capitalisation supporte un risque financier alors que le système en répartition supporte un risque dit " politique " (risque de modification des règles du jeu par les autorités, voire risque que les actifs refusent de payer pour les retraités). Ces deux risques ne sont en principe pas corrélés.

* 11 op.cit.

* 12 Voir rapport de la Commission des finances du Sénat, " Le débat d'orientation budgétaire pour 2000 : des intentions aux faits ", n° 437, 1998-1999, M. Philippe Marini.

* 13 Enquête Patrimoine 1998 de l'INSEE (INSEE Résultats n° 144-145).

* 14 Tableau des Financements de l'économie et des Placements financiers.

* 15 En base 95 (en base 80, ces flux étaient négatifs pour certaines années).

* 16 Selon les derniers résultats du sondage réalisé par la SOFRES pour le compte de la Banque de France, de la COB et de la SBF-Bourse de Paris.

* 17 " Le patrimoine en valeurs mobilières des personnes physiques à fin décembre 1997 ", Bulletin de la Banque de France n° 54, Juin 1998.

* 18 Selon les statistiques de la Balance des paiements et les statistiques établies à partir du tableau des opérations financières, le taux de détention par les non-résidents des actions françaises cotées est de 31 % de la capitalisation boursière à la même date.

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