II. LA DOTATION DE L'ARMÉE DE TERRE EN 1999

. Le budget de la défense représentera, en 1999, 243,5 milliards de francs (pensions comprises), et 189,9 milliards de francs hors pensions, soit une progression de 2,8 % en francs courants (+ 1,7 % en francs constants) par rapport aux 184,7 milliards de francs (hors pensions) inscrits en loi de finances initiale en 1998. Cette évolution relativement favorable succède, il convient de le rappeler, à la baisse de - 3,2 % en francs courants (- 4,5 % en francs constants) constatée en 1998 par rapport à 1997. L'augmentation prévue pour 1999 ne permet donc que de rattraper, dans une certaine mesure, les difficultés imputables à "l'encoche" de quelque 7,7 milliards de francs qui, en 1998, a caractérisé les crédits d'équipement de la défense, en contradiction avec les engagements souscrits dans le cadre de la loi de programmation 1997-2002.

Cette hausse de 2,9 % en francs courants recouvre des évolutions nuancées selon les catégories de dépenses.

Les dépenses d'équipement , auxquelles seront consacrés 86 milliards de francs, renouent avec la logique de la programmation. Optiquement, ce montant peut paraître cohérent avec l'annuité pévue par la loi de programmation militaire , soit 86 milliards de francs. Mais celle-ci prévoyait également une actualisation des annuités , destinée à maintenir constant le "pouvoir d'achat" des crédits d'équipement militaire en francs valeur 1995. Sur la base de ce principe, la dotation de 1999 aurait dû s'élever, pour les seuls crédits d'équipement, à 91 milliards de francs. L'augmentation de 6,17 % en francs courants constatée par rapport à la dotation de 1998 ne résulte, par ailleurs, que de l'interruption des prélèvements effectués au cours du précédent exercice dans le cadre de "l'encoche", et ne saurait être présentée comme un effort particulier destiné aux équipements militaires.

En revanche, les crédits de fonctionnement subissent, hors rémunérations et charges sociales, une pression particulièrement rigoureuse , et diminueront de 9 % entre 1998 et 1999, passant de 23,2 à 21,1 milliards de francs. Cette évolution tient, certes, notamment aux économies liées à la réduction nette des effectifs et aux restructurations. Mais elle recouvre également de très importants efforts d'économies qui paraissent conforter les interrogations exprimées depuis deux ans par votre rapporteur sur la pertinence du pari consistant à réaliser la professionnalisation à titre III constant, sans que les capacités opérationnelles des forces soient altérées par les contraintes budgétaires imputables à la période de transition.

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En 1999, les crédits de l'Armée de terre représenteront 25,9 % de l'ensemble du budget de la défense , soit une proportion stable par rapport aux grandeurs habituellement observées et, plus particulièrement, par rapport au budget 1998. Les 49,189 milliards de francs qui seront consacrés à l'Armée de terre en 1999 se situeront quant à eux en augmentation sensible (+ 2,59 % en francs courants ; + 1,48 % en francs constants 98) par rapport à la dotation de 1998 (soit 47,946 milliards de francs). Il convient néanmoins, comme votre rapporteur l'a fait observer plus haut à propos de l'ensemble du budget de la défense, de relever que la dotation de 1998 a été en baisse de - 2,3 % en francs courants (- 3,7 % en francs constants) par rapport à l'exercice précédent. Le budget prévu pour 1999 permet donc de "lisser" les diminutions observées en 1998, sans pour autant constituer un effort véritable pour l'Armée de terre.

Plus encore, la dotation des forces terrestres inscrite au budget de la Défense pour 1999 illustre très clairement le bien-fondé des craintes suscitées par la volonté de compenser les charges liées à la mise en oeuvre de la professionnalisation par de substantiels gains de productivité, sans revalorisation des moyens de fonctionnement.

A. VERS UNE CERTAINE STABILISATION DES CRÉDITS D'ÉQUIPEMENT

L'augmentation des crédits d'équipement des forces terrestres, qui passent de 17 305,3 à 18 464,6 millions de francs en crédits de paiement, soit une hausse de + 6,7 % en francs courants (+ 5,5 % en francs constants 98), ne traduit en réalité, au mieux, comme votre rapporteur le soulignait plus haut à propos du budget de la Défense dans son ensemble, qu'une stabilisation du titre V , dans la logique définie par la " revue des programmes". L'augmentation apparente constatée entre la loi de finances initiale de 1998 et le projet de loi de finances pour 1999 ne permettra, en effet, que de compenser, dans une certaine mesure, les prélèvements effectués en 1998. Rappelons que ceux-ci se trouvent à l'origine d'un manque à gagner de 11 % par rapport à ce qu'aurait dû être l'annuité 1998 de la loi de programmation 1997-2002 pour l'Armée de terre.

Les crédits d'équipement se situent dans un contexte caractérisé par l'élaboration d'une nouvelle nomenclature budgétaire, ainsi que par les décisions adoptées au terme de la "revue des programmes".

1. Le contexte : nouvelle nomenclature budgétaire et conséquences de la "revue des programmes"

a) Une nomenclature budgétaire réformée

Le projet de budget de la Défense pour 1999 est présenté selon la nouvelle nomenclature annoncée lors du débat budgétaire de l'automne 1997.

La réforme de 1993 avait consisté à substituer sept chapitres aux seize chapitres hérités des sections budgétaires qui avaient subsisté après la fusion des ministères en 1962.

Les crédits d'équipement inscrits au projet de budget pour 1999 s'appuient sur huit chapitres :

- 51-61 : Espace - système d'information et de communication,

- 51-71 : Forces nucléaires,

- 52-81 : Etudes,

- 53-71 : Equipements communs, interarmées et de la gendarmerie,

- 53-81 : Equipements des armées,

- 54-41 : Infrastructures,

- 55-11 : Soutien des forces

- 55-21 : Entretien des matériels.

A l'exception du chapitre 51-71, tous ces chapitres concernent la dotation de l'Armée de terre.

De manière générale, la nouvelle nomenclature assure une répartition plus homogène des crédits entre les chapitres . C'est ainsi que les dépenses jusqu'à présent inscrites au chapitre 53-80 (Fabrications) ont été réparties entre les chapitres 53-71 (équipements communs), 53-81 (équipements des armées), 55-11 (le soutien des forces intègre désormais, en effet, les dépenses d'habillement, campement, couchage et ameublement), et 55-21 (entretien des matériels). Rappelons que l'ancien chapitre 53-80 représentait à lui seul, en 1998, 68,6 % des crédits de paiement du titre V et 76,5 % des autorisations de programme.

Par ailleurs, en mettant fin à la dissociation classique entre crédits consacrés, d'une part, au développement et, d'autre part, à la fabrication, la nouvelle nomenclature a l'intérêt de présenter dans le même chapitre l'ensemble des ressources consacrées à un même programme, avec un avantage évident en termes de lisibilité . Dans cet esprit, il convient de relever que les moyens impartis à chacun des vingt-cinq programmes d'armement sont rassemblés en articles très explicites. Ainsi, au sein du chapitre 53-81 (équipements des armées), les programmes VBCI, Leclerc et Tigre font-ils l'objet d'articles distincts, de même que, au sein du chapitre 53-71 (équipements communs, interarmées et de la gendarmerie), les crédits affectés au programme NH90.

b) Des ambitions réduites par la "revue des programmes"

Mise en oeuvre en octobre 1997, la "revue des programmes" avait pour objet d'actualiser l'ensemble des programmes d'armement, afin de préparer des choix politiques cohérents avec le niveau de notre effort de défense et avec les objectifs opérationnels impartis aux armées. Conséquence de "l'encoche" constatée dans les crédits d'équipement militaire en 1998, la "revue des programmes" a conduit à la décision d'arrêter le niveau des crédits d'équipement à 85 milliards de francs 1998 par an, soit une réduction de cinq milliards de francs par an par rapport aux prévisions de la programmation, et un prélèvement de vingt milliards de francs 1998 au terme de celle-ci (exercices 1999, 2000, 2001 et 2002).

Cette économie de cinq milliards de francs (valeur 1998) par an résulte :

- d'abandons ou arrêts de programme (concernant les forces terrestres, il s'agit du missile AC3GLP),

- de réaménagements d'échéanciers ou de réductions de cibles (comme celle de l'engin porte-blindé),

- de l'abandon de capacités significatives comme la permanence du groupe aéronaval opérationnel, et le retrait anticipé du service de deux escadrons de Jaguar en 2001,

- et d'économies réalisées sur les études, les infrastructures et l'entretien programmé du matériel auxquelles l'Armée de terre n'échappera pas, et dont votre rapporteur commentera les conséquences ci-après.

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