DEUXIÈME PARTIE :

UN EFFORT D'ADAPTATION À POURSUIVRE

L'inflexion du rythme de progression des effectifs de l'enseignement agricole observée en 1997 s'est confirmée à la rentrée 1998. Comme l'avait prévu votre rapporteur, la forte croissance des effectifs constatée à partir de 1993 ne correspondait pas à un engouement soudain et irraisonné pour l'enseignement agricole mais à la conjonction de facteurs dont l'effet devait mécaniquement s'atténuer : montée en puissance des filières longues et développement des poursuites d'études.

Les chiffres de la rentrée 1998 valident cette analyse tandis que les résultats des examens comme ceux des enquêtes d'insertion professionnelle des diplômés mettent en évidence le maintien du niveau des performances de l'enseignement agricole.

La croissance des effectifs n'a donc plus lieu de demeurer un impératif catégorique de la gestion de l'enseignement agricole.

Le regain d'intérêt pour les formations du secteur de la production atteste que l'enseignement dont le ministère de l'agriculture a la charge ne s'est pas banalisé. Par ailleurs, les taux d'insertion professionnelle des diplômés des formations du secteur des services démontrent que ces dernières répondent à un véritable besoin de l'économie agricole et rurale. L'enseignement agricole demeure donc un des principaux atouts dont dispose l'agriculture française pour faire face aux défis nouveaux que sont la diversification des activités agricoles ou encore les préoccupations liées à la sécurité alimentaire ou à la protection de l'environnement et à ce titre constitue un instrument d'action indispensable pour le ministère de l'agriculture et de la pêche.

Néanmoins, le ralentissement de la croissance des effectifs, qui contribue à desserrer la contrainte budgétaire pesant sur l'enseignement agricole, ne peut dispenser d'un effort permanent d'ajustement des formations, des niveaux de qualifications et des flux de diplômés à l'évolution des métiers et du marché de l'emploi.

I. LES EFFECTIFS ET LES RÉSULTATS DE L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE

A. L'ÉVOLUTION DES EFFECTIFS

1. L'enseignement technique

3 500 élèves supplémentaires sont entrés dans l'enseignement agricole à la rentrée 1998, ce qui porte les effectifs à 177 900 élèves, soit une progression de 2 % par rapport à 1997.

Cette progression est inférieure à celle prévue dans le cadre de la croissance maîtrisée des effectifs qui prévoyait de ne ramener qu'en 1999 la croissance des effectifs à 2 %.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS
DE L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE AGRICOLE DEPUIS 1993

 

1993

1994

1995

1996

1997

1998

Taux de progression des effectifs scolarisés dans l'enseignement agricole technique (en %)

6

6,9

4,66

5,5

3,03

2
(1)

(1) Estimation au 15 septembre 1998

Cette évolution confirme le ralentissement observé l'an dernier.

Au delà d'un succès apparent de la politique volontariste de maîtrise de la croissance des effectifs, elle s'explique par un ralentissement des flux d'entrées dans l'enseignement agricole tenant pour l'essentiel à deux phénomènes qui ne sont pas au demeurant de nature à surprendre votre rapporteur.

Les effectifs de l'enseignement agricole subissent à leur tour -bien qu'avec retard par rapport à l'éducation nationale- le contrecoup des mouvements démographiques qui n'avait pas jusqu'ici affecté l'enseignement agricole. Son effet se trouve amplifié par l'instauration d'un nouveau palier d'orientation à l'issue de la quatrième, qui tend à réduire les flux d'entrée en quatrième dans l'enseignement agricole. On constate, en effet, une réduction des effectifs en classe de quatrième qui s'accompagne d'un maintien des effectifs en classe de troisième.

La répartition par niveau d'enseignement

Parallèlement à un ralentissement global de la progression des effectifs scolaires dans l'enseignement agricole, on assiste à une évolution dans la progression respective des différents niveaux d'enseignement.

- Les formations courtes (formation de niveau V : CAPA, BEPA, 4e et 3e technologiques) se sont stabilisées à cette rentrée après plusieurs années de forte croissance des effectifs ; elles n'accueillent à la rentrée 1998 que 29 élèves supplémentaires, contre 2 434 en 1997, ce qui porte à 96 601 leur effectif total.

- Les effectifs des formations de niveau IV (BTA, baccalauréats) poursuivent leur progression à un rythme légèrement inférieur mais comparable à celui des années précédentes (+ 4,72 % soit 2 649 élèves en plus). Cette évolution s'explique par la poursuite de la montée en puissance des nouveaux baccalauréats.

- Enfin, le cycle supérieur court (BTSA) continue à progresser mais dans une moindre mesure qu'en 1997 et 1998. Ses effectifs n'augmentent que de 3,97 % (soit 860 élèves supplémentaires) contre 6 % en 1998.

L'ampleur de cette stabilisation ne résulte pas du seul effort de limitation de la progression des inscriptions consenti par les établissements pour respecter les quotas -bien que ce dernier continue à l'évidence à brouiller l'analyse de l'évolution de la demande de formation- ni des fermetures de filières auxquelles l'enseignement public avait dû procéder faute de moyens.

Les formations de niveau V sont les premières à subir la conséquence mécanique de l'arrivée de classes d'âge moins nombreuses, effet amplifié par le nouveau palier d'orientation.

Ce " refroidissement " des entrées en début de scolarité est susceptible d'entraîner, dans les années à venir, une stagnation des effectifs de l'enseignement technique agricole qui pourrait s'amplifier jusqu'à entraîner une réduction globale des effectifs. La poursuite de la montée en puissance du niveau baccalauréat sera de ce point de vue décisive pour déterminer l'évolution à moyen terme des effectifs de l'enseignement agricole. Le ralentissement des flux d'entrées en niveau V n'entraînera pas inéluctablement une diminution des effectifs des formations de niveau IV. En effet, comme le montrent les travaux de l'Observatoire national de l'enseignement agricole, le modèle d'entrée dans l'enseignement agricole s'est profondément transformé : les jeunes issus de l'éducation nationale sont de plus en plus attirés par l'enseignement agricole et cet attrait se manifeste désormais à tous les niveaux d'enseignement et non plus seulement pour les seules formations aux niveaux VI, V bis et V, comme cela avait été longtemps le cas.

La répartition entre enseignement public et enseignement privé

Selon les chiffres établis au 15 septembre 1998, 72 123 élèves étaient inscrits dans les établissements publics (40,54 %) et 105 777 (59,46 %) dans les établissements privés sous contrat.

On observe donc à la rentrée 1998 une stabilisation de la part respective de l'enseignement public et de l'enseignement privé. Le ralentissement très sensible de la progression des effectifs du secteur privé, qui à la rentrée 1998 est pour la première fois depuis de nombreuses années inférieure à celle constatée dans les établissements publics, est à l'origine de cette évolution.

La répartition effective par niveau et par catégorie d'établissements n'étant pas encore connue, le tableau ci-après donne, à titre indicatif, les estimations disponibles au 15 septembre 1998 et leurs évolutions par rapport à 1997, pour un effectif évalué alors à 177 900.

RÉPARTITION ET ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DE
L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE PAR NIVEAU DE FORMATION
ET PAR CATÉGORIE D'ÉTABLISSEMENTS (1)

 

Niveau V

Niveau IV

Niveau III

Total

Enseignement public

24 596
(+0,7 %)

32 387
(+3,1 %)

15 140
(+37 %)

72 123
(+2,4 %)

Enseignement privé à temps plein

33 381
(-1,06 %)

17 655
(+6,74 %)

5 838
(+4,36 %)

56 874
(+1,79 %)

Enseignement privé à rythme approprié

38 624
(+0,53 %)

8 734
(7,03 %)

1 545
(+5,46 %)

48 903
(+ 1,79 %)

(1) estimations au 15 septembre 1998.

Au cours des dernières années les effectifs de l'enseignement technique privé agricole ont progressé à un rythme plus soutenu que ceux de l'enseignement public, cette évolution ramenant les proportions d'effectifs scolarisés dans le public et le privé à leur niveau d'avant la loi de 1984.

Cette progression contrastée des effectifs constatée entre 1993 et 1997 s'explique notamment par le regain de faveur des formations de niveau V qui a profité essentiellement à l'enseignement privé ; ce dernier disposait en effet en ce domaine d'une plus grande capacité d'accueil que l'enseignement public, contraint de redéployer ses moyens vers des filières longues et de procéder en conséquence à de nombreuses fermetures de filières courtes. Elle a par ailleurs été amplifiée par les résultats contrastés de la politique de maîtrise des effectifs, l'enseignement privé et en particulier les établissements privés à rythme approprié éprouvant plus de difficultés que les établissements publics à respecter les objectifs fixés.

L'effort accompli l'an dernier par les établissements à temps plein pour respecter les objectifs de croissance des effectifs est désormais partagé par les établissements à rythme approprié. La décélération est, en effet, particulièrement sensible dans l'enseignement privé à rythme approprié qui connaît une réduction très significative des flux d'entrées dans les formations de niveau V, dont les effectifs ne progressent à la rentrée 1998 que de 0,53 %, contre 4,05 % à la rentrée 1997.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS SCOLARISÉS
DANS L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE AGRICOLE

 

Rentrée 1997-1998

Rentrée 1998-1999 (1)

Enseignement public

+ 3,1 %

+ 2,4 %

Enseignement privé à temps plein

+ 3,27 %

+ 1,79 %

Enseignement privé à rythme approprié

+ 4,97 %

+ 1,79 %

(1) Estimations au 15 septembre 1998

Le tableau ci-après fournit des indications sur la répartition des effectifs entre établissements privés et établissements publics, par niveau de formation sur la période 1993-1998.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS PAR SECTEUR PUBLIC/PRIVÉ (en %)

 
 

93-94

94-95

95-96

96-97

97-98

98-99

Niveau V

public

27,6

26,9

26,2

25,6

25,3

25,4

 

privé

72,4

73,1

73,8

74,4

74,7

74,6

Niveau IV

public

60

58,7

57,6

56,6

56

55,1

 

privé

40

41,3

42,4

43,4

44

44,9

Niveau III

public

67,1

67,7

68,1

67,7

67,4

67,2

 

privé

32,9

32,3

31,9

32,3

32,6

32,8

Total

public

43,6

42,4

41,5

40,7

40,4

40,5

 

privé

56,4

57,6

58,5

59,3

59,6

59,5

2. L'enseignement supérieur

Les effectifs de l'enseignement supérieur long relevant du ministère de l'agriculture et de la pêche sont passés de 10 004 étudiants à la rentrée 1992-1993 à 11 099 étudiants à la rentrée 1997-1998, soit une augmentation de 11 %.

EFFECTIFS DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR AGRICOLE

 

1992-1993

1997-1998

I. Enseignement public

 
 

Écoles d'ingénieurs agronomes (ENSA)

2 367

2 546

Écoles d'ingénieurs des techniques (ENIT et assimilés)

1 767

1 946

Centres de 3e cycles et écoles d'application

348

609

Écoles vétérinaires (ENV)

2 133

2 244

Formation de paysagistes

142

178

Formation d'enseignants

116

249

 

6 922

7 770

II. Enseignement privé

 
 

Écoles d'ingénieurs en agriculture

2 937

3 165

Enseignement du bois

145

164

 

3 329

3 437

Total enseignement public et privé

10 004

11 099

• Dans l'enseignement supérieur public , l'accroissement des effectifs a été de 12,1 % sur cinq ans, ce qui correspond à une stabilisation de la progression des effectifs par rapport à la période 1991-1996.

La progression des effectifs sur cette période résultait de l'augmentation du nombre d'ingénieurs formés pour répondre aux directives gouvernementales et de l'allongement d'une année du cursus des études dans les écoles nationales d'ingénieurs des travaux (ENIT). Elle reflétait également l'importance prise par les études doctorales dans les écoles nationales supérieures agronomiques et les écoles d'application.

En ce qui concerne le secteur vétérinaire, si les effectifs ont été stabilisés en formation de base, ils ont globalement augmenté en raison de la création du troisième cycle professionnel long de spécialisation vétérinaire (certificats d'études approfondies vétérinaires et diplômes d'études spécialisés vétérinaires).

Néanmoins, l'effet " volume " résultant mécaniquement de l'allongement des études semble arriver à son terme. En effet, à la rentrée 1997, le nombre total d'étudiants a diminué de 0,6 % alors qu'il progressait en 1996 de 3,4 %. Par ailleurs, le net ralentissement de la progression des effectifs résulte également d'une certaine " fermeture " de l'enseignement supérieur agricole public qui, après les écoles vétérinaires, concerne désormais les écoles d'ingénieurs.

• Dans les écoles d'ingénieurs de l'enseignement supérieur privé , la hausse des effectifs est de 7,66 % sur cinq ans, ce qui correspond, comme dans l'enseignement supérieur public, mais d'une manière plus marquée, à un ralentissement du rythme d'augmentation des effectifs par rapport à la période 1991-1996, pendant laquelle la croissance a été de 12 %.

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