2. Le financement de la professionnalisation à titre III constant : un pari audacieux
Le titre III de la Défense représentera une masse financière de 594 milliards de francs 1995 sur la période 1997-2002, soit une dotation annuelle de 99 milliards de francs, qui équivaut à une quasi-stabilité de ces crédits par rapport à la période antérieure. La loi de programmation repose donc sur le pari de financer la professionnalisation sans faire dériver le titre III . La diminution de 24 % environ des effectifs de la Défense (qui perdra 132 875 personnels entre 1996 et 2002), et la réduction des coûts de fonctionnement attendus de la contraction du format des armées, devront ainsi couvrir les frais liés au remplacement des appelés par des professionnels, qui se traduira nécessairement par une augmentation des charges liées aux rémunérations.
En effet, la professionnalisation aura pour conséquence une croissance des rémunérations et charges sociales de quelque 5 % (soit 76,91 milliards de francs 1995 au lieu de 73,39 actuellement). Cette augmentation, qui s'élèvera à + 3,9 % en francs courants pour la seule dotation 1997 (77,72 milliards de francs au lieu de 74,7 en 1996), est liée à une modification substantielle des effectifs , la part des civils et des militaires du rang engagés devant s'élever pendant la période de transition, aux dépens de celle des cadres d'active et des appelés.
Par ailleurs, le poids des rémunérations et charges sociales au sein du titre III passera ainsi de 74 % en 1996 à 77,68 % en 2002 (elle sera d'ores et déjà de 76 % en 1997), ce qui constituera un élément de rigidité à prendre en compte, au moment même où le titre III devra faire face aux charges nouvelles dues à la professionnalisation : mesures destinées à encourager le départ des cadres d'active, revalorisation des rémunérations des engagés, développement du recours à la sous-traitance, financement de la montée en puissance des réserves, aides à la reconversion des engagés, compensation du surcroît de mobilité des personnels dû aux restructurations ...). C'est ainsi que le fonds d'accompagnement de la professionnalisation sera doté de 9,1 milliards sur 1997-2002, équivalant à un prélèvement annuel moyen de 1,5 milliard de francs constants sur le titre III (qui atteindra 2,042 milliards de francs en 2002).
En 2002, la tranche annuelle du fonds d'accompagnement de la professionnalisation , jointe au surcoût en rémunérations et charges sociales lié à la professionnalisation (RCS 2002-RCS 1996) s'élèvera ainsi à 5,56 milliards de francs . Ces charges ne sauraient être considérées comme négligeables, si l'on considère qu'elles se cumuleront avec :
- le financement du surcoût des opérations extérieures dites « courantes » sur le titre III : à titre d'exemple, les dépenses supplémentaires imputables à la présence française au Tchad et en Centrafrique, qui pourraient entrer dans la catégorie des opérations extérieures « courantes » définie par la loi de programmation, se sont élevées à 0,72 milliards de francs sur le seul titre III en 1995 (le projet tendant à revoir le régime de la solde à l'étranger servie aux militaires en opérations revêt donc un intérêt évident dans la perspective de la diminution du surcoût lié aux opérations extérieures sur le titre III, comme votre rapporteur le précisera ci-après) ;
- une aggravation transitoire de certaines dépenses de fonctionnement pendant la période de transition : c'est ainsi que l'entretien des emprises libérées par les armées dans le cadre des restructurations continuera à peser sur le titre III, tant que ces immeubles ne seront pas vendus.
Les lourdes charges qui pèseront sur le titre III pendant la période de transition expliquent que la loi de programmation ait prévu une réduction de quelque 20 % des crédits consacrés au fonctionnement courant. Pour imparable qu'elle soit, pour des motifs d'équilibre budgétaire, cette prescription nécessitera, pour chaque armée, un effort d'économie extrêmement rigoureux.