II. UNE « DISCRIMINATION TERRITORIALE POSITIVE » REPOSANT NOTAMMENT SUR DES EXONÉRATIONS FISCALES ET SOCIALES
Le Pacte de relance prévoit d'aider les secteurs les plus défavorisés des zones urbaines, en proportion des difficultés qu'elles rencontrent.
Le principe de cette discrimination territoriale positive a d'ailleurs été admis par le Conseil constitutionnel qui a jugé, dans une décision n° 95-358 DC du 26 janvier 1995 que le « principe d'égalité ne faisait pas obstacle à ce que le législateur édicté , par l'octroi d'avantages fiscaux , des mesures d'incitation au développement et à l'aménagement de certaines parties du territoire , dans un but d'intérêt général ».
Ces mesures dérogatoires consistent principalement en des exonérations fiscales et sociales.
Il convient de souligner que les exonérations mises en place dans le cadre du Pacte de relance sont de portée générale. Elles s'appliquent sans que les collectivités aient à délibérer. Le système constitue donc une réelle avancée par rapport à la loi d'orientation pour la ville du 13 juillet 1991 qui avait, certes, déjà ouvert aux collectivités locales la possibilité d'accorder des exonérations de taxe professionnelle, mais sans aucune compensation par l'État. De ce fait, seuls 42 communes, un département et trois communautés urbaines avaient institué cette exonération qui, en cinq ans, n'a pas permis d'exonérer qu'un million de francs de bases d'imposition.
Comparées aux exonérations de 1991, les exonérations instituées en 1996 couvrent un champ d'application très large en termes d'impositions et constituent une très importante dépense fiscale, estimée à 1.265 millions de francs.
A. LE RÉGIME APPLICABLE AUX ZONES DE REDYNAMISATION URBAINE (ZRU)
Les exonérations instituées par la loi d'orientation n° 95-115 du 4 février 1995 qui s'appliquent aux zones de redynamisation urbaines demeurent en vigueur. Il s'agit :
- de l'exonération de taxe professionnelle pour la création, l'extension, la décentralisation d'entreprises, pendant une durée de cinq ans (a 52,11) la base nette exonérée étant plafonnée à un million de francs ;
- de l'exonération de l'impôt sur les sociétés accordée aux entreprises qui se créent dans les ZRU jusqu'au 31 décembre 1999, elle est totale pendant deux ans (a 44,1) ;
- de l'exonération des droits de mutation sur les fonds de commerce (a 44,11) ;
- de la réduction de la taxe départementale de publicité foncière (a 49) ;
-
du
régime d'amortissement
accéléré des immeubles acquis ou
construits
dans les ZRU (a 56) ;
- de la déduction intégrale des redevances dues au titre du régime du crédit bail immobilier (article 57).
Le volet législatif du Pacte de relance pour la ville a apporté deux modifications importantes à ces dispositions. Il prévoit, en effet :
• l'extension de l'exonération de
plein droit de taxe professionnelle aux établissements existants,
dans la limite de 500.000 francs de bases exonérées par
établissement et par an (article 3 du projet de loi). Votre rapporteur
pour avis se félicite d'une mesure qui viendra en aide aux entreprises
qui ont fait l'effort de se maintenir dans des quartiers sensibles :
• la fixation d'un régime unique
d'exonération de charges sociales patronales
pour une
durée de douze mois, pour l'embauche des 50 premiers salariés de
l'entreprise dans la limite d'une fois et demi le SMIC (article 18 du projet de
loi).
Votre commission note, au surplus, que ce régime, applicable aux ZRU vaudra également pour les zones de revitalisation rurales (ZRR) et pour toutes les entreprises, quelle que soit leur forme juridique. Elle s'interroge cependant sur l'opportunité de l'exclusion des organismes mentionnés à l'article premier de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications. Elle estime qu'il serait souhaitable d'étendre à ces services publics - qui ont souvent une fonction sociale importante dans les quartiers - le bénéfice de cette exonération.
B. LE RÉGIME APPLICABLE AUX ZONES FRANCHES URBAINES (ZFU)
Quatre mesures spécifiques aux ZRU constituent de fortes incitations à l'emploi et à l'activité. Il s'agit :
•
de
l'exonération de
plein droit de taxe professionnelle de cinq ans dans la limite d'un plafond de
3 millions de francs de base nette
par entreprise et par an (article
4. B du projet de loi) ;
•
de
l'exonération
d'impôt sur les bénéfices pendant cinq ans, dans la limite
de 400.000 francs de bénéfices par an et par entreprise,
quelle que soit l'activité exercée (article 4.A du
projet de loi) :
•
de
l'exonération de
plein droit de taxe foncière pour les propriétés
bâties d'une durée de cinq ans
pour les immeubles entrant
dans le champ d'application de la taxe professionnelle (article 4 D du projet
de
loi) :
• de l
'exonération de plein droit de
cotisations patronales de sécurité sociale pour une durée
de cinq ans,
dans la
limite de 50 emplois équivalents
temps plein
(CDI et CDD d'au moins 12 mois), plafonnée
a
1,5 fois le SMIC. Cette mesure est liée, en cas
d'embauche, à une clause d'emploi de personnes résidant sur le
périmètre de la zone franche urbaine (article 7 du projet de
loi).
Cette mesure permettra de réaliser une économie de 47 à 71 % sur les charges sociales, comme le montre le tableau ci-dessous :
INCIDENCE DES MESURES D'EXONÉRATION DE COTISATION SOCIALE
( en francs )
Montant du salaire |
Montant normal des charges |
Montant des charges après application de l'exonération |
économie réalisée par l'entreprise en % |
égal au SMIC brut |
1.480 |
700 |
50 |
Salaire brut mensuel de 8.000 francs |
3045 |
880 |
71 |
Salaire brut mensuel de 15.000 francs |
6.200 |
3.300 |
47 |
Sources Rapport n° 1 Sénat ( 1996-1997 ) rapport de la commission spéciale précitée
Le tableau suivant récapitule l'ensemble des mesures d'exonérations fiscales et sociales applicables aux entreprises.
PRÉSENTATION SYNTHÉTIQUE ET
COÛT
ESTIMÉ DES MESURES EXONÉRATOIRES
Type d'entreprise |
Taxe professionnelle |
Impôt sur les bénéfices |
Taxe foncière sur les propriétés bâties |
Cotisations patronales |
Autres exonérations |
Entreprise nouvelle de 50 salariés au plus. Tous secteurs d'activité commercial, non commercial, artisanal, industriel) |
exonération pendant 5 ans dans la limite d'un montant de base nette imposable de 3 MF par établissement et par an |
exonération pendant 5 ans dans la limite de 400 000F de bénéfice par an et par contribuable (règle du « de minimes ») |
exonération pendant 5 ans des immeubles entrant dans le champ d'application de la TP |
exonération pendant 5 ans des cotisations patronales (3) dans la limite de 50 emplois (avec clause d'embauche de résidents si recrutement de plus de 5 salariés) |
réduction à 0 % des droits de mutation pour les acquisitions de fonds de commerce |
Certains secteurs (2) |
idem |
idem |
idem |
idem |
idem |
Autres secteurs d'activité % du CAHT pour les échanges intracommunautaires et l'exportation < 15 % entre 1995 et 1996 |
idem |
idem |
idem |
idem |
idem |
% du CAHT pour les échanges intracommunautaire > 15 % entre 1994 et 1996 |
option entre - exonération pendant 5 ans dans la limite de 500 000 F par an (régime ZRU) - exonération pendant 5 ans dans la limite de 3 MF en cas d'extension d'activité dans la zone (si augmentations de bases nettes) |
idem (règle du « de minimes ») |
option entre Exonération facultative pendant 2 ans (si exonération au titre de l'art. 44 sexties) - exonération de plein droit pour l'extension d'activité |
- exonération pendant 1 an des cotisations patronales (4) pour l'embauche du 1 er au 50è salarié (régime ZRU) |
idem |
- exonération pendant 5 ans en cas d'extension d'activité et embauches nouvelles ayant pour effet d'accroître l'effectif (dans la limite de 50 salariés) |
|||||
Entreprise existante de 50 salariés au plus |
|||||
Entreprise nouvelle de plus de 50 salariés (régime ZRU) applicable au zone franche est classée ZRU) |
exonération pendant 5 ans dans la limite de 1 MF par an pour les établissements de moins de 150 salariés(ZRU) |
idem |
exonération facultative pendant 2 ans (si exonération d'impôt sur les bénéfices au titre de l'art. 44 sexties du CGI |
exonération pendant 1 an des cotisations patronales (4) pour l'embauche du 1 er au 50è salariés (ZRU) |
idem |
Entreprise existante de plus de 50 salariés (régime ZRU) applicable zone franche est classée ZRU° |
exonération pendant 5 ans dans la limite de 500 000 F par an pour les établissements de moins de 150 salariés |
Idem |
Idem (exonération facultative) |
Idem (exonération 1 an) |
|
COUT ESTIMÉ en millions de francs |
280 |
180 |
80 |
725 |
Source Fascicule budgétaire «jaune » précité
(1) 50 emplois équivalent temps plein à la date de création de l'entreprise ou d'instauration de la zone franche urbaine
(2) construction, commerce et réparation automobile, commer ce de détail et réparation d'articles domestiques, hôtels et restaurant, tours, santé et action sociale, services collectifs, sociaux et p ers o nnels, services domestiques.
(3) assurances sociales, allocations familiales, accidents de travail, versement transport, contributions au fonds national d'aide au logement
(4) assurances so ci ales, allocations familiales, accidents de travail