II. DU CONTRAT DE PLAN AU « PACTE DE MODERNISATION » : UNE ÉVOLUTION ?
L'idée d'un contrat de plan entre l'État et la SNCF a, semble-t-il, vécu. La grève de la fin de l'année 1995 a-t-elle eu raison d'elle ? Tout instrument de planification à moyen terme est exposé au risque d'être contredit par les réalités. Pour autant, faut-il s'abstenir d'une telle planification ?
Le contrat de plan, qui aurait dû entrer en vigueur au 1 er janvier 1995 fait donc défaut. Pour autant, l'État ne doit-il pas clarifier ses relations avec la SNCF sous la forme d'engagements réciproques ?
Des sujets aussi importants que l'évolution des effectifs, la densité du réseau, le rythme des investissements, la productivité, la contribution de l'entreprise au service public et à l'aménagement du territoire doivent, en effet, faire de la part de l'État l'objet d'indications claires que le seul projet d'entreprise ne suffirait pas à définir.
Un autre sujet mériterait de faire l'objet d'un engagement réciproque entre l'État et la SNCF : le service minimum qui, au début de l'année 1996 a donné lieu, une fois encore, à un amendement mis en discussion au Sénat puis retiré. Si le droit de grève est garanti par la Constitution, la grève ne doit pas conduire à prendre « en otages » des millions d'usagers et des centaines d'entreprises privées. Il en va de la responsabilité de l'entreprise et de son personnel de s'engager sur les modalités d'un tel service minimum en cas de grève.
Il convient de rappeler que, le 5 février 1996, M. le Premier ministre avait saisi le Conseil économique et social d'une demande d'avis sur « Les grandes orientations du contrat de plan État SNCF 1996-2000 » . Le Conseil a rendu son avis, dès les 23-24 avril.
Votre commission ne peut, en outre, que rappeler les termes de l'article 24 de la loi d'orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982 (la LOTI). Elle invite le Sénat à réfléchir, à la lumière de l'adage « Qui décide paie » sur la signification de l'autonomie de gestion pour une entité qui reçoit de l'État l'équivalent de 38 milliards de francs l'an.
La lettre adressée par M. le Premier ministre au président de la SNCF le 27 juin 1996 ne saurait tenir lieu de contrat de plan, même si certains points de cette lettre constituent des objectifs essentiels :
- retour à un équilibre durable à compter de 1999 ;
- regroupement au sein d'une holding spécifique des activités non directement ferroviaires ;
- valorisation du patrimoine.
Enfin, le regroupement sous le vocable de « Pacte de modernisation » de cette lettre, d'une lettre du ministre chargé des Transports en date du 3 juillet 1996 et des discours de ce ministre et de son secrétaire d'État devant l'Assemblée nationale, le 11 juin 1996, puis devant le Sénat, le 25 juin 1996, pour utile sur le plan documentaire qu'il soit, ne constitue qu'une indication de l'engagement de l'État et l'on peut redouter que de telles déclarations ne s'avèrent, à terme, limitées dans leur mise en oeuvre.
Il faut donc surtout placer son espoir dans le projet « industriel » -le terme projet d'entreprise paraîtrait plus adapté- qu'élabore la SNCF sous l'impulsion de son président : la reconquête de la clientèle, la renonciation à une certaine pratique fixiste ou triomphaliste en matière de normes techniques et sécuritaires, l'accessibilité des chefs d'établissements au dialogue social sont autant de pistes à explorer.