2. Vers une réforme radicale de la formation professionnelle : la mise en oeuvre des propositions du rapport de Virville
a) Les propositions du rapport
Demandé en novembre 1995 par le ministre chargé du travail à M. Michel de Virville, secrétaire général de Renault, ce rapport se propose de développer la formation qualifiante et de généraliser la logique de l'alternance afin de mieux adapter, aussi bien la formation initiale des jeunes que la formation continue, aux besoins réels des entreprises.
Le rapport part d'un double constat : d'une part, les jeunes sont considérés généralement par les employeurs comme trop formés par rapport à ce que demandent les entreprises en début de carrière ; d'autre part, s'ils poursuivent tardivement leurs études supérieures, c'est parce que les entreprises ne sont pas en mesure de leur offrir une réelle seconde chance au cours de leur parcours professionnel. Le rapport de Virville propose un bouleversement radical de l'édifice existant en appréhendant conjointement les problèmes de la formation initiale et de la formation ultérieure.
Ses orientations sont les suivantes :
une définition nationale des qualifications ;
une valorisation et une reconnaissance de l'expérience professionnelle pour l'obtention d'une qualification ;
une possibilité de formation des salariés tout au long de leur vie professionnelle ;
une modélisation de l'alternance.
Le projet de réforme proposé s'ordonnerait autour de deux axes, la formation qualifiante et la formation en alternance.
- Une véritable formation qualifiante
• instauration d'un référentiel
national des qualifications organisé par métiers et par niveaux,
établi par une structure regroupant l'éducation nationale, les
formateurs, les représentants des employeurs et des salariés et
placée sous le contrôle de l'État ;
mise en place d'une pédagogie fondée sur les acquis individuels résultant de l'expérience ou des formations antérieures ;
création d'un dispositif de validation des acquis dirigé au niveau régional ;
institution d'une épargne temps de formation individuelle obligatoire, qui serait cumulable sur plusieurs années ;
financement de l'épargne-temps par les entreprises dans des conditions à déterminer par accord collectif et réduction en contrepartie de leur participation au financement du plan de formation ;
participation financière des salariés à leur formation.
- Le développement des formations en alternance résulterait des mesures suivantes :
maintien des deux formules des contrats de qualification et de l'apprentissage mais unification de leur statut, de la rémunération et de la couverture sociale des bénéficiaires ;
ouverture de l'alternance aux adultes demandeurs d'emploi et aux salariés suivant une formation qualifiante hors de leur entreprise ;
formation financée par l'entreprise sur la base d'un contrat commercial passé avec l'organisme de formation ;
regroupement des deux collectes de l'alternance (contrats de qualification et apprentissage) ;
fusion des réseaux de collecte interprofessionnelle régionale ;
liberté pour les entreprises de verser leurs fonds à un collecteur de branche ou à un collecteur régional ;
contrôle accru de l'État sur les organismes de collecte.
b) L'annonce d'un projet de loi
Le ministre chargé du travail a annoncé le 1er octobre 1996 que le gouvernement allait déposer au début de 1997 un projet de loi destiné à donner un nouvel essor à la formation professionnelle, le système actuel qui date de vingt-cinq ans n'étant, selon lui, plus capable de répondre aux défis d'une économie contraignant désormais les entreprises et leurs salariés à des adaptations permanentes.
Dans cette perspective, il a indiqué que le rapport de Virville, servirait de base de discussion aux partenaires sociaux et estimé que la sécurité du plus grand nombre face à l'emploi ne pourra résulter que d'un développement des formations en alternance, de la formation continue et de la validation des acquis, formules qui devraient bénéficier d'une valeur convertible équivalente et complémentaire de celle reconnue aux études initiales.
La réforme annoncée aurait pour objectif de multiplier par deux le nombre de jeunes en apprentissage, de permettre aux entreprises de définir plus librement les contenus des formations et de choisir leur organisme de formation, de donner aux salariés la faculté de capitaliser des droits à la formation sous forme d'une réserve de temps rémunérée, les modalités de cette réforme devant être arrêtées par les partenaires sociaux notamment dans le cadre des négociations sur l'aménagement et la réduction du temps de travail.