CHAPITRE III LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Votre Commission des Affaires économiques et du Plan ne peut pas accueillir sans préoccupation l'évolution -qu'il est impossible de ne pas considérer comme défavorable- des crédits de la Sécurité routière pour 1996. Avec 500 millions de francs (dépenses ordinaires + crédits de paiement), ces crédits reculent -force est de le constater- de quelque 8,3 % en francs constants, compte tenu de la hausse attendue des prix en 1996, par rapport aux crédits votés de 1995. Une telle perspective est donc difficile.

I. DES STATISTIQUES QUI RÉVÈLENT UNE DÉGRADATION RÉCENTE

Alors que, selon le modèle STRA-ONSIR qui porte sur le nombre total de tués de janvier 1985 à avril 1995, le nombre annuel moyen de décès sur la route dépassait les dix mille jusqu'en 1989, la tendance s'était infléchie à la baisse à compter de 1990. L'amélioration avait été particulièrement sensible de 1992 à l'été 1994. En 1994, on avait compté 8.533 tués et 132.726 accidents corporels (- 5,7 %). Le nombre des blessés était en recul de 4,3 % (180.832 personnes concernées) et le nombre des accidents corporels de 3,5 %.

On notera que les véhicules utilitaires poids lourds ont été impliqués, en 1994, dans 13,7 % des accidents mortels alors qu'ils ne représentaient que 2 % du parc des véhicules à quatre roues.

La fin de l'année 1994 a connu une nouvelle dégradation qui s'est poursuivie en 1995. Selon les experts, comme pour l'élection présidentielle de mai 1988, ce sont les perspectives d'amnistie qui, en induisant une modification sensible du comportement des conducteurs, sont à l'origine de cette dégradation récente des indicateurs.

Enfin, les cyclistes et moto-cyclistes victimes d'accidents ont vu leur nombre augmenter de façon inquiétante dans la période récente.

En 1995, sur les douze derniers mois connus au mois d'août, le nombre des tués sur les routes de France frôlait toujours les dix mille (9.158 précisément).

II. DES RÉACTIONS NON DÉPOURVUES D'INTÉRÊT

Notre Commission n'est pas seule à se soucier de cette dégradation puisqu'une proposition de résolution n° 1940 (AN 1995) a été déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale en février 1995, tendant à la création d'une commission d'enquête sur l'organisation du transport routier et ses conséquences sur la sécurité routière. Cette proposition de résolution n'a cependant pas été suivie (cf. rapport n° 2142 (AN 1995).

Au cours de sa réunion du 28 juin 1995, le Conseil des Ministres a décidé l'abaissement du seuil limite d'alcoolémie de 0,7 g/litre à 0,5 g/litre. Dans le même esprit, la loi portant amnistie exclut de son bénéfice les infractions sanctionnant de tels comportements.

Votre Commission émet le souhait que l'adoption de ce nouveau seuil s'accompagne de la mise en place rapide d'éthylotests suffisamment sensibles et sûrs pour permettre le contrôle sans faille de ce seuil.

Le Premier Ministre devait présider, à l'automne, le Comité interministériel de sécurité routière pour dresser le bilan de la situation. Le comité devait se prononcer sur la généralisation des obligations de réparation consécutives au contrôle technique des véhicules.

III. LE TRAITEMENT DES POINTS OU ITINÉRAIRES « NOIRS »

Les endroits dangereux, ponctuels ou linéaires du réseau routier national, font l'objet d'aménagements qui sont inventoriés dans les plans régionaux d'aménagements de sécurité (PRAS) élaborés par les directions régionales de l'Équipement et validés par la direction des Routes.

Le plan régional d'aménagement de sécurité est un document de référence qui définit la stratégie régionale en matière d'aménagements de sécurité et un réservoir d'opérations sélectionnées, hiérarchisées et financées sur contrats et hors contrats de plan État-Régions, qui aide à la programmation.

D'autre part, les crédits d'initiative locale (CIL), dotation globalisée et déconcentrée à l'échelon départemental, permettent de réagir rapidement par des aménagements légers dès l'apparition des risques.

A. LE BILAN DE 1995


• Budget 1995 - Chapitre 53-42 article 50
:

- crédits d'initiative locale 80 MF

- opérations spécifiques de sécurité (retenues au PRAS) 90 MF

(dont 60 MF sur les contrats État-Régions et 30 MF sur le programme général).

Le financement sur le programme général est consacré exclusivement au traitement des endroits les plus dangereux du réseau national, par des aménagements d'un coût modéré, compte tenu de l'enveloppe. Les contrats État-Régions, résultant de négociations locales permettent de traiter des zones plus sensibles avec des montants unitaires, plus élevés. Ils permettent notamment dans certaines régions de faire du traitement par itinéraire soit des obstacles, soit des intersections.

Ainsi le programme général a permis de doter, en autorisations de programme, 15 aménagements dont 14 localisés et de financer 3 études et acquisitions foncières.

Dans le cadre des contrats État-Régions, les dotations ont concerné 38 opérations, dont 29 aménagements localisés et 9 aménagements d'itinéraires, et 8 études et acquisitions foncières.

B. LES PERSPECTIVES POUR 1996

Les crédits demandés pour 1996 sont de :

- 80 MF pour les crédits d'initiative locale,

- 70 MF pour les opérations sur contrats État-Régions,

- 25 MF pour les opérations hors contrat (programme général).

La répartition des opérations par nature devrait respecter approximativement les mêmes proportions qu'en 1995.

Votre Commission émet, à cet égard, un double souhait en matière d'harmonisation à l'échelle européenne :

- le premier concerne la signalisation, dont tout indique que l'uniformisation n'est pas hors de portée, pour autant qu'on la planifie et qu'on y consacre avec persévérance les moyens nécessaires ;

- le second concerne la réglementation, en matière de limitations de vitesse et de circulation des motocyclistes, particulièrement dans les zones urbanisées.

IV. DEUX SUJETS DE PRÉOCCUPATION

A. LA CONDUITE AUTOMOBILE SOUS L'EMPRISE DE LA DROGUE

La question de la conduite sous l'influence de drogue est plus complexe que celle de la conduite sous l'influence de l'alcool.

S'agissant de substances à effets psychotropes, les études expérimentales et épidémiologiques ont été nombreuses et ont donné des résultats contradictoires. Selon les experts, les études doivent continuer. Lors du comité interministériel de la sécurité routière du 17 décembre 1993, le Gouvernement avait pris la décision de mettre en place un comité de personnalités scientifiques hautement qualifiées et chargées de faire le point sur la question et d'émettre des propositions d'action dans les domaines de la prévention, de la communication et du système de contrôle-sanction. Les conclusions de ce groupe de travail ont été déposées à l'été 1995. Elles font l'objet d'une concertation avec les ministres de la Santé et de l'Intérieur, à partir desquelles votre Commission juge souhaitable que le Gouvernement prenne des initiatives.

B. LE CONTRÔLE TECHNIQUE

1,2 million de véhicules poids lourds sont contrôlés par an, dans les 137 centres agréés. 12 % des véhicules présentés au contrôle chaque année font l'objet d'interdictions. Pour autant, le manque de sérieux du contrôle technique dont font parfois l'objet les véhicules et, notamment, les poids lourds a été mis en évidence en 1995.

Les textes officiels relatifs au contrôle des poids lourds précisent en effet que les contrôles, sauf le freinage, sont visuels. Or, les dirigeants des centres de contrôle incitent, semble-t-il, dans certains cas, leurs employés à « faire du rendement » sans leur donner véritablement les moyens de mener des contrôles poussés.

Votre Commission des Affaires économiques et du Plan émet le souhait que l'État veille à la rigueur des contrôles techniques portant sur les véhicules routiers, s'agissant notamment des bancs de freinage.

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