II. LE BUDGET 2025 DU SGDSN : BAISSE DES CRÉDITS ET STAGNATION DES RESSOURCES HUMAINES

Avec 425 millions d'euros au lieu de 438 millions d'euros, les crédits de paiement de l'action n°2 « Coordination de la sécurité et de la défense » subiront en 2025 une baisse de 3 % par rapport à 2024. Sont donc impactés dans ce périmètre budgétaire le coeur de l'activité de défense et de sécurité nationale à savoir les fonds spéciaux qui financent certaines actions des services de renseignement liés à la sécurité intérieure et extérieure (72 millions d'euros en 2025 au lieu de 76 millions d'euros en 2024) et le Groupement interministériel de contrôle (GIC) qui centralise les techniques de renseignement (cf. infra).

Les 3 services du SGDSN en charge de la cybersécurité et de la lutte contre les manipulations de l'information (ANSSI, OSIIC et Viginum) vont devoir fonctionner avec 8 millions d'euros en moins. Les réductions de crédits hors titre 2 sont précisément détaillées dans le tableau ci-dessous. En revanche, la ventilation entre services des dépenses de personnel (titre 2), qui subissent une réduction d'un million d'€ n'est pas présentée. Cela reflète un manque global de lisibilité dans le projet annuel de performance de la répartition des crédits de personnels ou de la projection pluriannuelle des crédits.

Évolution des crédits du SGDSN par services

 

Exécution 2023 en CP

LFI 2024 en CP

PLF 2025 en CP

 

Titre 2

Hors titre 2

Titre 2

Hors titre 2

Titre 2

Hors titre 2

ANSSI

78 897 037

26 433 395

92 509 724

30 727 870

91 569 378

27 234 359

OSIIC

32 892 606

33 574 212

31 381 774

VIGINUM

1 818 714

2 365 186

2 500 000

Total SGDSN

190 950 534

223 320 925

215 989 301

Source : réponses au questionnaire budgétaire

Quant aux effectifs, le plafond d'emplois ne devrait évoluer que marginalement, passant de 1 283 équivalents temps plein travaillé (ETPT) en 2024 à 1 300 pour 2025.

Évolution des effectifs du SGDSN par services

 

Effectifs 2023

LFI 2024

PLF 2025

 

ETP (Schéma d'emplois)

ETPT (plafond d'emplois)

ETP (Schéma d'emplois)

ETPT (plafond d'emplois)

ETP (Schéma d'emplois)

ETPT (plafond d'emplois)

Viginum

0

898,2

0

42

0

42

OSIIC

+9

+10

135

0

138

ANSSI

+41,7

+40

644

0

657

SGDSN hors Viginum, OSIIC et ANSSI

+12,7

0

189

0

187

Total SGDSN hors GIC

+63,4

898,2

+50

1 010

0

1 024

GIC

+34

210,4

+6

273

0

276

Total BOP SGDSN

+97,4

1 108,6

+56

1 283

0

1 300

Source : réponses au questionnaire budgétaire

A. LES CONTRAINTES DU BUDGET 2025 SUR LES FONCTIONS DE CYBERSÉCURITÉ ET DE LUTTE CONTRE LES MANIPULATIONS DE L'INFORMATION

1. L'ANSSI : des adaptations à envisager pour supporter la charge des nouvelles missions en 2025

L'ANSSI avait demandé un budget de 35 millions d'euros et 60 emplois supplémentaires notamment pour conduire la réforme nécessaire pour appliquer le projet de loi relatif à la résilience des entités critiques et au renforcement de la cybersécurité, dont fait partie la transposition de la directive dite NIS2 (Network and Information Security) ; l'agence n'aura que 27 millions d'euros (hors T2) et aucun poste en plus.

L'objectif majeur de l'agence pour 2025 reste de réussir la transformation de l'ANSSI en vue de la transposition de la directive NIS 2. Celle-ci prévoit un accroissement du périmètre de compétence de l'agence de quelque 500 OIV à environ 15 000 entreprises dont le suivi constitue un changement d'échelle pour l'agence et nécessite une reconfiguration de son offre de services.

Cette contrainte budgétaire annonce nécessairement des ajustements sur plusieurs postes.

· la préparation de la transposition de la directive NIS 2 : le passage à l'échelle qui était annoncé au sein du dernier rapport devra être retardé ;

· le maintien de son expertise de pointe : la création d'un laboratoire dédié à l'intelligence artificielle devra être retardée ;

· la création d'un second centre de données sécurisées devra être reportée ;

· l'agence ne pourra pas non plus continuer à étendre sa couverture des ministères, ni faire l'acquisition de nouveaux téléphones sécurisés.

2. Viginum : un coût d'arrêt au développement de la lutte contre les manipulations de l'information

En matière de lutte contre les manipulations de l'information (LMI), le service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum) a été créé à l'automne 2021 afin de détecter et de caractériser les ingérences numériques étrangères (INE).

Le rapport de la commission d'enquête sur les politiques publiques face aux opérations d'influences étrangères3(*) a souligné le rôle central qu'occupe ce service en France et en Europe après seulement 2 ans de mise en oeuvre d'une politique de publication de rapports sur des opérations de déstabilisation à grande échelle. Le bilan quantitatif pour 2023 s'établit à 236 notes (détection de phénomènes inauthentiques, d'INE et d'analyse de la menace) avec une accélération en 2024 (158 notes sur le 1er semestre). Dans le même temps, quatre rapports publics ont dénoncé des opérations attribuées à des acteurs pro-russe ou pro-azerbaïdjanais (RRN, Portal Kombat, Nouvelle Calédonie, Matriochka).

Il faut signaler que pour la première fois depuis sa création en 2021, les effectifs de VIGINUM ne vont pas augmenter. Une telle stagnation nous paraît inquiétante alors que les manipulations de l'information continuent de croître quantitativement et qualitativement du fait également de l'intelligence artificielle. Viginum devait passer de 42 à 65 ETPT fin 2025, il restera à 42, pour environ 53 personnels fin 2024 (au lieu de 59), ce qui ne permettra pas de développer les programmes de coopérations européenne et internationale et le projet de développement d'une académie de la LMI portée par une recommandation de la commission d'enquête. Le déficit de 12 postes en 2025 par rapport à la progression initialement prévue représente une économie d'environ 1 million d'€, mais aussi un risque de limitation capacitaire pour les équipes opérationnelles alors même que l'année 2025 doit être celle du lancement d'une stratégie nationale de lutte contre les manipulations de l'information.


* 3 Rapport n° 739 (2023-2024), du 23 juillet 2024, présenté par MM. Dominique de Legge, président, et Rachid Temal, rapporteur.

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