B. UN RENFORCEMENT DES MOYENS DU PROGRAMME 308, À LA MESURE DE LA CROISSANCE NATURELLE DE L'ACTIVITÉ DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES.

Évolution des crédits du programme 308 demandés en 2024par rapport à la loi de finances pour 2023

(en euros)

Intituléde l'action

Autorisations d'engagement en €

Crédits de paiement en €

LFIpour 2023

Demandéespour 2024

Évolutionen %

LFIpour 2023

Demandéspour 2024

Évolutionen %

02

CNIL (20,6 %)

26 443 473

28 646 143

+ 8,33

26 443 473

28 646 143

+ 8,33

03

Arcom (36,6 %)

48 832 709

50 939 100

+ 4,31

48 832 709

50 939 100

+ 4,31

05

CGLPL (7,4 %)

5 548 646

10 308 509

+ 85,78

5 970 786

6 259 674

+ 4,84

06

Autres autorités indépendantes (3,6 %)

5 440 447

5 034 765

- 7,46

5 440 447

5 034 765

- 7,46

06.01

CADA

1 875 838

1 895 350

+ 1,04

1 875 838

1 895 350

+ 1,04

06.02

CCNE

NC4(*)

1 574 833

NC

NC

1 574 833

NC

06.03

CNCDH

NC

1 564 582

NC

NC

1 564 582

NC

09

Défenseur des droits (21,6 %)

27 357 762

30 107 399

+ 10,05

27 357 762

30 107 399

+ 10,05

10

HATVP (7,2 %)

9 661 426

9 984 111

+ 3,23

9 661 426

9 984 111

+ 3,23

12

CNCTR (2,5 %)

3 234 918

3 520 188

+ 8,82

3 234 918

3 520 188

+ 8,82

13

CSDN (0,5 %)

768 570

653 959

- 14,91

768 570

653 959

- 14,91

Total

127 287 951

139 194 174

+ 9,35

127 710 091

135 145 339

+ 5,82

Source : PAP de la mission « Direction de l'action du Gouvernement »annexé au projet de loi de finances pour 2024

Bénéficiant d'une meilleure visibilité, la majorité des autorités du programme 308 sont soumises à une croissance continue de leurs activités, traduite par l'augmentation du nombre de saisines.

Le Défenseur des droits voit, dans ce cadre, ses effectifs renforcés de dix ETP. En parallèle de l'extension constante de son champ de compétences, notamment à l'endroit des lanceurs d'alerte, l'institution a en effet reçu près de 126 000 réclamations en 2022 soit + 29 % par rapport à 2020.

La Commission d'accès aux documents administratifs (Cada) fait également face à une hausse exponentielle du nombre de saisines depuis plusieurs années. Avec 10 478 demandes en 2022, ce volume augmente de 46,03 % par rapport à la moyenne des quatre années précédentes. À ce titre, les moyens dédiés à la CADA sont accrus de trois ETP.

Cette croissance des activités est particulièrement significative dans le cas des autorités de régulation des plateformes numériques.

1. Une augmentation des moyens dédiés aux régulateurs sectoriels du numérique et de l'informatique à la hauteur de l'évolution de leurs attributions

Autorité administrative indépendante créée en 1978, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) exerce un rôle de régulateur en matière de protection des données personnelles. Son action repose sur deux piliers complémentaires : l'accompagnement des opérateurs dans leur mise en conformité et l'action répressive, allant de la réception de plaintes et de signalements à la réalisation de contrôle sur place, sur pièce, puis à la possibilité d'émettre des mises en demeure ou des sanctions financières.

Pour l'exercice 2024, la Cnil dispose d'une augmentation de sa dotation de 2,2 M€ (+ 8,3 % par rapport aux crédits LFI 2023) et bénéficiera de 10 ETP supplémentaires. L'autorité doit notamment faire face à un grand nombre de plaintes reçues, entre 13 000 et 14 000 annuellement. Si le stock de 11 000 plaintes non traitées en 2022 a été réduit à 7 500 en 2023, une telle réduction a nécessité l'intervention, depuis le 13 octobre 2022, d'un prestataire externe (Luminess) pour le traitement de 40% d'entre elles. Ce dernier est chargé de vérifier la qualité des données transmises, ainsi que d'éditer la décision prise par la Cnil.

Créée le 1er janvier 2022, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) est chargée de la régulation technique et économique des services de télévision et de radio, ainsi que la protection des droits d'auteur par la lutte contre le piratage.

Ces missions se sont étendues au fil des évolutions législatives pour inclure de nouveaux acteurs, dont les services de vidéo à la demande et les plateformes en ligne, et de nouveaux domaines, tels que la lutte contre la désinformation et les contenus haineux en ligne, ainsi que la protection des mineurs à l'égard des contenus pornographiques ou relatifs aux jeux d'argent, de leur utilisation des réseaux sociaux ou de l'exploitation commerciale de leur image. En quatre ans, treize textes législatifs sont venus compléter ou renforcer les missions confiées au CSA, à l'Hadopi, puis finalement à l'Arcom.

Dans le cadre de la trajectoire financière quinquennale de 2023 à 2027, dix ETP supplémentaires ont été accordés à l'Arcom pour 2024, portant son plafond d'emplois à 380 ETP.

2. Les enjeux issus des nouvelles réglementations européennes sur le numérique

Les moyens de la mission tiennent également compte de l'entrée en application progressive du paquet législatif européen relatif aux services numériques (Data Governance Act, Data Act, Digital Markets Act, Digital Services Act). Dans ce contexte, l'Arcom et la Cnil sont appelées à jouer le rôle d'autorités de coordination et de têtes de réseau, chargées de la mise en oeuvre et de l'application des règlements et servant de points de contact avec la Commission européenne.

Le règlement sur les services numériques (Digital Services Act - DSA) renforce la contribution des plateformes en ligne à la lutte contre la diffusion de contenus illicites. Le règlement est applicable depuis août 2023 aux très grandes plateformes. Son champ d'application sera étendu à l'ensemble des opérateurs numériques concernés à compter de février 2024, sous la supervision d'autorités nationales désignées comme coordinateurs pour les services numériques (CSN). Le projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique, en cours d'examen au Parlement, prévoit de désigner l'Arcom, la Cnil et l'Arcep comme coordinateurs pour la France.

Le projet de loi confie également à l'Arcom de nouvelles missions en matière de protection des publics, notamment face aux chaînes étrangères sous sanctions européennes et aux contenus pornographiques accessibles aux mineurs. Il prévoit, en outre, la création d'un filtre national de cybersécurité destiné au grand public, afin d'afficher un avertissement lors de l'accès à des sites présentant des risques. La Cnil se verra confier la mission de contrôler la mise en oeuvre de ce filtrage, impliquant la surveillance d'environ 300 000 sites par an.

Entré en vigueur en septembre 2023, le règlement sur la gouvernance des données (Data Governance Act) a pour objectif l'essor d'un marché de l'intermédiation de la donnée, fondé sur des tiers de confiance. La Cnil devra notamment administrer la procédure d'enregistrement des tiers de confiance, ainsi que contrôler et surveiller le respect par ces organisations des exigences fixées par le règlement.

Enfin, des propositions de règlement sur les données (Data Act) et de règlement sur l'intelligence artificielle sont en cours d'élaboration au niveau européen. La très forte adhérence entre la régulation des services d'intelligence artificielle et celle des données plaide assez naturellement pour que la Cnil se voie confier les deux fonctions.

Entraînant une mobilisation importante des services de la Cnil, l'entrée en application de ces nouvelles législations européennes confirme également un changement de paradigme. La Commission est désormais non seulement une autorité garante de la sauvegarde des droits fondamentaux et de la protection de la vie privée, mais aussi un véritable régulateur qui soutient l'innovation et conjugue les considérations techniques, économiques et juridiques. En ce sens, le coeur de mission de la Cnil ne peut plus être réduit à ses seules actions répressives. Dans un souci d'allocation équilibrée de ses moyens, un effort budgétaire particulier doit être consenti à l'endroit des missions d'appui à la conformité, d'une part, et de soutien à l'innovation technologique, d'autre part.

Concernant l'Arcom, ses missions de coordination à l'échelle européenne ne sauraient conduire à négliger ses missions initiales de régulation des médias audiovisuels traditionnels et ses actions auprès des acteurs locaux. À ce titre, la rapporteure appelle à étendre son contrôle des contrats d'objectifs et de moyens (COM) à ceux conclus avec les chaînes de télévision locales. En effet, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent verser une subvention ou une rémunération à un service de télévision locale, dans le cadre d'un contrat d'objectifs et de moyens, mentionné à l'article L. 1426-1 du code général des collectivités territoriales. Toutefois, ces contrats, impliquant des montants et services importants, ne sont pas soumis à l'avis de l'Arcom, contrairement aux COM conclus entre l'État et les sociétés de l'audiovisuel public5(*).


* 4 Non renseigné en 2023, la ventilation de l'action 06 par autorité n'apparaît que dans le PLF 2024. Les crédits de la Cada sont, pour leur part, tirés du Jaune budgétaire sur les AAI.

* 5 Article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

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