II. TRANSPORT FERROVIAIRE : UNE TRAJECTOIRE POSITIVE ENCORE TRÈS INSUFFISANTE AU REGARD DE NOS OBJECTIFS
A. RÉSEAU FERROVIAIRE : LE COMPTE N'Y EST PAS
1. Des efforts en matière de régénération du réseau loin de compenser la poussée inflationniste
Près de 2,9 Md€ sont prévus pour 2023, aux termes du contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau . La régénération du réseau ferroviaire est principalement financée par les fonds propres de SNCF Réseau , et notamment par le produit des péages ferroviaires .
Si, ces deux dernières années, le plan de relance a permis d'allouer 4,7 Md€ supplémentaires au transport ferroviaire, ces montants ont surtout servi à combler le manque de recettes de SNCF Réseau et à mettre en oeuvre des investissements déjà prévus, mais non budgétés .
D'après l'Autorité de régulation des transports (ART), la stabilité de l'effort d'entretien et de renouvellement du réseau ferré national contraste avec la forte augmentation des efforts récemment annoncée au Royaume-Uni et en Allemagne .
En l'état actuel des choses, d'après l'Autorité de régulation des transports (ART), l'état du réseau - en particulier le réseau structurant - est d'ores et déjà préoccupant , au regard de l' indice de consistance de la voie (ICV), qui reflète l'âge moyen relatif de la voie au regard de sa durée de vie.
Source : ART
De l'avis de tous les acteurs du secteur, les montants prévus en matière de régénération du réseau par le nouveau contrat de performance entre SNCF Réseau et l'État sont très insuffisants. Ils ne permettront même pas d'enrayer la spirale de dégradation du réseau .
Malgré un niveau de péages le plus élevé d'Europe, l'état de notre réseau ferroviaire est alarmant et la situation n'ira pas en s'améliorant si nous ne revoyons pas le contrat de performance.
Philippe Tabarot, Rapporteur pour avis
Pire encore, la trajectoire fixée par le nouveau contrat de performance (2021-2030) annonce une évolution critique sur le long terme. D'après la SNCF, à l'horizon 2040 :
- l'enveloppe allouée à la régénération des voies ne permettra de maintenir l'âge des voies qu'en Île-de-France, le reste du réseau structurant subissant une dégradation nette de l'état des infrastructures et un vieillissement encore plus prononcé, son âge augmentant de 5 et 14 ans ;
- les ralentissements sur le réseau structurant classique risquent d'augmenter de plus de 50 % .
Cette situation est extrêmement préoccupante , d'autant plus que les hypothèses sur lesquelles repose le retour l'équilibre financier prévu par le contrat de performance sont, aux termes de l'ART, « peu ou pas justifiées ». La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable avait d'ailleurs à plusieurs reprises alerté le Gouvernement sur les insuffisances du projet de contrat.
En outre, le contexte actuel de forte augmentation des prix de l'énergie et des matières premières laisse à penser que les investissements de régénération prévus, et déjà insuffisants, devront être revus à la baisse.
Aussi, et dans la mesure où le Gouvernement a annoncé que les 150 M€ supplémentaires alloués à l'Afitf pourraient majoritairement bénéficier au mode ferroviaire, la commission a adopté, sur la proposition du rapporteur, un amendement II-334 visant à allouer 150 M€ additionnels à la régénération du réseau ferroviaire .
2. L'absence de vision stratégique et industrielle en matière de modernisation du réseau
Au-delà des insuffisances en matière de régénération du réseau, sa modernisation manque aujourd'hui cruellement d'orientation stratégique et de financement . La comparaison du niveau et du calendrier de déploiement des deux principaux projets de modernisation avec les autres États européens est à cet égard édifiante...
Source : ART
Le rapporteur regrette que ni le contrat de performance ni le PLF pour 2023 ne définissent de vision stratégique et industrielle pour la modernisation du réseau ferroviaire . Par ailleurs, il partage la préoccupation de la Fédération des industries ferroviaires (FIF), selon laquelle il est indispensable de soutenir des investissements pour assurer la cybersécurité du système ferroviaire , à la fois pour le transport de voyageurs et pour le transport de marchandises - en particulier des produits dangereux.