E. FRANCE MÉDIAS MONDE : UN ÉCART DE MOYENS AVEC SES CONCURRENTS QUI INTERPELLE
1. Une situation financière maîtrisée malgré la baisse des moyens
Le résultat de l'entreprise devrait être positif en 2021 tout comme en 2022. L'entreprise a donc réussi à absorber la baisse des dotations publiques à hauteur de 3,5 M€ depuis 2018 dont 0,5 M€ au titre de l'année 2022 . La situation demeure néanmoins fragile puisqu'une évolution défavorable de la prévision de recettes publicitaires pourrait suffire à contrarier l'équilibre des comptes. Le plan de départs volontaires a pour sa part atteint ses objectifs et devrait permettre de faire baisser la masse salariale de 3 M€.
2. Un risque de déclassement par rapport aux autres audiovisuels extérieurs
La présidente de France Médias Monde rappelle qu'en 2012 Deutsche Welle avait les mêmes moyens que France Médias Monde mais qu'il existe aujourd'hui un écart de 100 M€ dans les moyens des deux entreprises. L'écart est également sensible avec le service international de la BBC qui dispose de près de 385 M€ compte tenu d'un plan de soutien à la transition numérique tandis que les États-Unis mobilisent des moyens sans commune mesure.
Dans ce contexte, l'irruption de nouveaux acteurs chinois, russes et turcs crée un risque de déclassement pour l'audiovisuel extérieur français qui est de plus en plus pris à partie dans les zones de tension.
3. Une difficulté à financer de nouveaux projets pourtant indispensables
La contrainte financière que rencontre France Médias Monde pèse sur les projets de développement de l'entreprise qui concernent tant l'obligation de mener à bien la transition numérique que l'impératif de présence dans certaines zones géographiques sensibles.
Les crédits de l'Agence française de développement (AFD) permettent de développer des programmes en langues africaines (13,5 M€ sur 3 ans) sans que la question de la pérennisation de ces initiatives soit complètement résolue. Mais certains projets qui pourraient être utiles, comme la création d'un service numérique en turc, ne peuvent pas être aujourd'hui mis en oeuvre malgré leur coût modeste.
F. TV5 MONDE : UN RÉSEAU FRANCOPHONE EN PLEIN DÉVELOPPEMENT
1. Une stabilisation des moyens
Le réseau francophone TV5 Monde se porte plutôt bien selon son directeur général, Yves Bigot, avec des moyens toujours stables. La contribution française devrait se maintenir à 76,2 M€ en 2022. À noter que les autorités françaises ont du retard en 2021 dans le versement de leur quote-part ce qui complique la gestion de l'entreprise.
TV5 Monde peut s'appuyer en particulier sur de nombreux programmes de France Télévisions dont le groupe possède les droits. Le réseau anime huit chaînes différentes autour du monde auxquelles il convient d'ajouter les chaînes jeunesse Tivi 5 Monde en Afrique et bientôt dans le monde arabe.
2. Un nouvel actionnaire bienvenu
Parmi les actionnaires de TV5 Monde, seul le Canada propose d'augmenter sa participation afin de développer les nouveaux projets. La France n'accompagne pas ce dynamisme et nourrit au contraire l'incertitude compte tenu des interrogations qui entourent la réforme de la CAP après 2022.
L'arrivée de la Principauté de Monaco parmi les actionnaires devrait être officialisée lors de la conférence ministérielle du 9 décembre prochain. Ce nouvel actionnaire devrait contribuer à hauteur d'un demi-neuvième du budget ce qui représente 4,2 M€ par an. Le directeur général espère que l'arrivée de ce nouvel actionnaire permettra d'apporter un nouveau dynamisme et des perspectives plus optimistes pour les personnels de la chaîne francophone.
3. TV5 Monde + : une plateforme francophone gratuite à populariser
L'offre gratuite numérique TV5 Monde + poursuit son développement grâce à l'implication des Canadiens (14,6 M€ sur 3 ans). Son catalogue de 5 400 heures de programmes comprend des programmes issus de plusieurs nationalités (France, Belgique, Suisse, pays d'Afrique...) et des formats divers (documentaires, films d'animation, séries...).
La nouvelle plateforme constitue un outil remarquable pour faire rayonner la culture francophone dans plus de deux cents pays avec pour enjeu dans les mois à venir de faire croître son audience, en particulier en Afrique où le coût de la consommation des données constitue encore un frein au développement de ce type de programmes. L'objectif pour 2022 est d'augmenter de 15 % le trafic sur la plateforme en développant l'attractivité du catalogue et les dépenses de marketing.
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En conclusion, au terme de ce quinquennat, le rapporteur regrette que les avancées promises aient abouti à un surplace, ce qui dans le secteur des médias constitue toujours un recul.
Nos entreprises publiques ont montré qu'elles étaient capables de se réformer, de se transformer et d'innover. Les économies ont été faites mais elles n'ont été que trop partiellement réinvesties dans le développement et l'innovation. Autant dire dans ces conditions que l'audiovisuel public n'a jamais été depuis 2017 une priorité. L'absence de perspectives sur la réforme de la CAP dont le montant est à nouveau gelé en 2022 (article 16 du PLF) ne peut être par ailleurs considérée comme rassurante.
La commission de la culture, de l'éducation et de la communication a émis, lors de sa réunion plénière du 17 novembre 2021, un avis défavorable à l'adoption des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».