C. DES MOYENS ET DES MISSIONS TOUJOURS INCERTAINS À L'ISSUE DU QUINQUENNAT
1. Une réforme de la CAP reportée au mieux à 2023
L'échec de la réforme du modèle économique de l'audiovisuel public constitue l'autre face de l'échec de la réforme de la gouvernance . Le projet de réforme de 2015 élaboré par le Sénat prévoyait de moderniser la contribution à l'audiovisuel public (CAP) pour en faire une taxe universelle dont le produit aurait été réparti par la holding afin de garantir l'indépendance. Cette réforme devait s'accompagner d'une suppression progressive de la publicité et d'une augmentation des ressources issues des droits attachés à la production.
Force est de constater que la CAP ne sera pas réformée avant 2023 et peut-être même 2024 si une période de transition devait être nécessaire afin de conduire une véritable réforme. En outre, les recettes publicitaires constituent toujours la seule marge de manoeuvre de France Télévisions et Radio France. Cette situation crée une grande incertitude et nourrit un certain attentisme du côté des dirigeants de ces entreprises.
Source : réponse au questionnaire budgétaire
2. Des offres numériques publiques dispersées et dépourvues de puissance face aux concurrents privés
Les offres numériques de l'audiovisuel public demeurent dispersées, désordonnées et, au final, assez décevantes. Après avoir pris l'initiative de créer Salto, France Télévisions pourrait être amenée à se retirer de cette offre si le rapprochement de TF1 et M6 devait aller à son terme. France Télévisions n'aurait alors plus de véritable stratégie numérique .
Quatre ans après l'annonce du rapprochement entre France 3 et France Bleu, la ministre vient seulement d'annoncer lors de son audition au Sénat un projet d'offre commune d'ici mars 2022 mais il semble acquis qu'il s'agira davantage d'un outil de distribution des programmes des deux groupes que d'une nouvelle offre dotée de moyens propres et d'une ligne éditoriale commune.
Concernant l'éducation, France Télévisions et ARTE ont créé deux offres concurrentes. On pourrait aussi évoquer la jeunesse où chaque acteur propose ses programmes de son côté.
Alors que Netflix, Disney, Amazon comptent maintenant des dizaines de millions d'abonnés en France et que deux pôles privés semblent devoir émerger autour de TF1/M6 et Canal +, l'audiovisuel public ne peut revendiquer que trois avancées à l'issue de ce quinquennat : la plateforme de podcasts de Radio France, l'offre numérique d'ARTE (qui dépasse en fréquentation celle de France Télévisions) et la plateforme numérique de France Info. C'est évidemment un bilan très insuffisant pour des entreprises qui bénéficieront en 2022 de plus de 3,7 milliards d'euros de dotations publiques.
Si les directions des entreprises publiques ont évidemment contribué à cet échec en freinant trop longtemps les coopérations, c'est d'abord à l'État actionnaire qu'incombe la responsabilité de ce fiasco.