EXAMEN DES ARTICLES
ARTICLE
25
Objectifs de diminution et de fin de vente des voitures
particulières neuves les plus émettrices de dioxyde de carbone
à horizon 2030, de fin de vente des véhicules lourds neufs
à horizon 2040 et soutiens à l'acquisition de
véhicules propres
. I. POUR PROMOUVOIR UNE TRANSITION ÉNERGÉTIQUE DES VÉHICULES ENCADRÉE PAR DES OBJECTIFS EUROPÉENS ET NATIONAUX, DIVERSES AIDES FINANCIÈRES ONT ÉTÉ INSTAURÉES
A. LES NORMES D'ÉMISSIONS DES VÉHICULES SONT ENCADRÉES PAR LE DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE TANDIS QUE DES OBJECTIFS DE TRANSITION ÉNERGÉTIQUE DU PARC AUTOMOBILE SONT PRÉVUS AU NIVEAU NATIONAL
1. Le droit de l'Union européenne fixe des objectifs d'émissions pour les voitures particulières et les véhicules utilitaires légers
Des normes d'émissions de CO 2 pour les voitures particulières neuves et les véhicules utilitaires légers (VUL) sont déterminées par le règlement (UE) 2019/631 . En ce qui concerne le parc européen de voitures particulières neuves, le règlement porte un objectif, à compter du 1 er janvier 2020 , d'émissions moyennes de 95 grammes de CO 2 par kilomètre . Pour les VUL, l'objectif est établi à 147 grammes de CO 2 par kilomètre.
D'ici 2025 , les règles européennes prévoient une réduction de 15 % des émissions des voitures particulières et VUL neufs. D'ici 2030 , elles prévoient des réductions d'émissions de 37,5 % pour les voitures particulières et 31 % pour les VUL .
Pour tenir les engagements de réduction d'émissions renforcés décidés par le Conseil européen le 10 décembre 2020 1 ( * ) , la Commission européenne entend proposer, à l'été 2021, une révision du règlement cité supra , afin de réévaluer à la hausse les objectifs. Elle devrait proposer de relever l'objectif de réduction des émissions de voitures particulières neuves à 50 % à l'horizon 2030 .
Par ailleurs, les différents constructeurs de véhicules européens se voient également attribuer des objectifs d'émissions particuliers.
2. Au niveau national, la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), la stratégie nationale bas carbone (SNBC) et la loi d'orientation des mobilités (LOM) prévoient des objectifs de transition énergétique du parc de véhicules
Programmatique, l'article 73 de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (LOM) fixe l'objectif d'une « décarbonation complète du secteur des transports terrestres » d'ici 2050 . Pour y parvenir, il prévoit deux « objectifs intermédiaires » :
- la « hausse progressive de la part des véhicules à faibles et très faibles émissions » afin de respecter les objectifs européens établis à l'horizon 2030 ;
- d'ici 2040, la fin de la vente des voitures particulières et des VUL neufs utilisant des énergies fossiles .
La PPE comme la SNBC prévoient des trajectoires de réduction des émissions des véhicules avec un développement significatif de l'électromobilité :
- en 2023, les objectifs de part de marché dans les immatriculations pour les voitures particulières s'élèvent à 7 % pour les véhicules électriques (VE) comme pour les véhicules hybrides rechargeables (VHR) ;
- en 2028, les objectifs sont fixés à 27 % pour les VE et 11 % pour les VHR ;
- en 2050, la SNBC prévoit 100 % de part de marché des VE pour les voitures particulières neuves.
Par ailleurs, le contrat stratégique de filière automobile fixe les objectifs d'une multiplication par cinq des ventes de véhicules électriques entre 2017 et 2022 et d'un million de VE et de VHR en circulation.
Enfin, de nombreux constructeurs automobiles, notamment français, ont pris des engagements d'électrification de leurs ventes.
B. LES DISPOSITIFS D'AIDE À LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE DES VÉHICULES REPOSENT PRINCIPALEMENT SUR LE BONUS ET LA PRIME À LA CONVERSION
1. Le bonus et la prime à la conversion constituent les principaux dispositifs d'aide à l'acquisition de véhicules propres
Les aides à l'acquisition de véhicules propres reposent sur deux dispositifs principaux régis par le code de l'énergie : le bonus et la prime à la conversion . Ils permettent aux particuliers et aux professionnels d'acquérir des voitures, des camionnettes, des véhicules à deux-trois roues et quadricycles motorisés peu polluants. Dans le cas de la prime à la conversion, l'aide s'accompagne de la mise au rebut d'un véhicule polluant.
Un bonus à l'acquisition d'un vélo à assistance électrique (VAE) par les personnes physiques aux revenus modestes est également prévu à l'article D251-2 du code de l'énergie sous réserve qu'une collectivité territoriale ait accordé une aide similaire .
2. Au-delà des seuls bonus et prime à la conversion, d'autres dispositifs de soutien ont été mis en oeuvre
En ce qui concerne les poids lourds , deux dispositifs d'aide à l'acquisition existent :
- le suramortissement prévu à l'article 39 decies A du code général des impôts ;
- le bonus pour l'acquisition d'un véhicule industriel à motorisation électrique ou hydrogène créé dans le cadre du plan de relance.
Le gouvernement a mis en place un dispositif de microcrédit pour accompagner l'acquisition de véhicules peu polluants. D'une durée de cinq ans, d'un montant maximum de 5 000 euros, cumulable avec le bonus et la prime à la conversion, il est garanti à 50 % par l'État via le fonds de cohésion sociale. 33 millions de crédits ont été prévus pour ce dispositif dans le cadre du plan de relance.
Il existe également certains avantages fiscaux en faveur des véhicules électriques en termes de fiscalité du carburant, à travers l'exonération de taxe spéciale sur les contrats d'assurance ou encore le barème majoré de l'indemnité kilométrique.
Par ailleurs, l'article D251-3-1 du code de l'énergie prévoit une prime au rétrofit électrique.
II. L'ARTICLE 25 DÉTERMINE DES OBJECTIFS DE DIMINUTION ET DE FIN DE VENTE, À HORIZON 2030, POUR LES VOITURES PARTICULIÈRES NEUVES LES PLUS ÉMETTRICES, DE FIN DE VENTE, À HORIZON 2040, POUR LES VÉHICULES LOURDS NEUFS UTILISANT MAJORITAIREMENT DES ÉNERGIES FOSSILES ET POSE LE PRINCIPE DE SOUTIENS RENFORCÉS À LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE DES VÉHICULES
De portée programmatique , l'article 25 du projet de loi vient premièrement modifier l'article 73 de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités (loi LOM) pour proposer deux nouveaux objectifs intermédiaires dans la perspective d'atteindre la décarbonation complète du secteur des transports terrestres en 2050 2 ( * ) .
Le premier objectif porte sur les ventes de voitures particulières neuves émettant plus de 95gCO 2 /km selon la norme NDEC 3 ( * ) . L'article 25 ajoute un 1° bis au II de l'article 73 de la loi LOM pour fixer un objectif de fin de la vente de ces véhicules d'ici le 1 er janvier 2030 . Dans la mesure où elle ne constitue qu'un objectif et non une interdiction de vente, la disposition n'enfreint pas le droit de l'Union européenne. L'article précise qu' à la date du 1 er janvier 2030, ces véhicules devront représenter « au maximum 5 % de l'ensemble des ventes annuelles de voitures particulières neuves » .
Le second objectif 4 ( * ) tient à « la fin de la vente des véhicules lourds neufs affectés au transport de personnes ou de marchandises et utilisant majoritairement des énergies fossiles, d'ici à 2040 » .
Deuxièmement, par un amendement n° 5360, le Gouvernement a ajouté à l'article 25 des dispositions visant à développer les soutiens publics en faveur de la transition écologique des véhicules .
L'article 25 propose d'ajouter un II bis à l'article 73 de la loi LOM pour signifier que les objectifs fixés aux I. et au II. de l'article 73 « s'accompagnent d'un soutien à l'acquisition de véhicules propres » .
Enfin, l'article 25 propose une nouvelle rédaction de l'article L. 251-1 du code de l'énergie pour prévoir l'institution de diverses aides en faveur de la transition écologique des véhicules .
Le développement d'aides à l'acquisition de véhicules propres pourra inclure des soutiens et, possiblement, une prime à la conversion destinée à l'acquisition de vélos . Le texte précise que « sont instituées des aides à l'acquisition de véhicules propres, y compris des cycles et des cycles à pédalage assisté, le cas échéant sous réserve de la mise au rebut des véhicules polluants » .
Ces aides pourront aussi encourager le développement du rétrofit . L'article précise à ce titre que sont instituées des aides « à la transformation de véhicules à motorisation thermique en motorisation électrique » .
Enfin, seront instituées également des aides « à l'installation d'équipements techniques de nature à améliorer la sécurité » .
III. AU-DELÀ DES OBJECTIFS PROGRAMMATIQUES DONT LES CONSÉQUENCES ENVIRONNEMENTALES ET SOCIO-ÉCONOMIQUES SONT INSUFFISAMMENT ÉVALUÉES, L'ÉTAT DOIT ACCOMPAGNER CONCRÈTEMENT ET AVEC DAVANTAGE DE VOLONTARISME LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE NÉCESSAIRE DES VÉHICULES
A. LA CROISSANCE DU MARCHÉ DES VÉHICULES PROPRES DOIT PERMETTRE DE RÉDUIRE LES ÉMISSIONS MOYENNES DE CE SECTEUR
D'après le centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (CITEPA), le secteur des transports représentait 30 % des émissions nationales en 2019 (136 MtCO 2 e). Le transport routier y contribue à hauteur de 94 % (128 MtCO 2 e). 55 % des émissions du transport routier relèvent des voitures particulières (69,5 MtCO 2 e), 24 % des poids lourds (31 MtCO 2 e) et 20 % des VUL (26 MtCO 2 e). Particulièrement dynamiques de 1990 à 2004 (+ 18,9 %), les émissions des véhicules ont progressé de 11,8 % entre 1990 et 2017. En 2019, en termes d' émissions moyennes de CO 2 /km pour les voitures neuves, la France , avec un niveau de 113,3 grammes, se situe au sixième rang européen 5 ( * ) . La moyenne pour l'Union européenne se situe à 123 grammes. Si la moyenne d'émissions a nettement baissé en France en 2020 (97 grammes), sur cette même année, les voitures thermiques dont les émissions sont comprises entre 100 et 140 gCO 2 /km y représentent encore près de 60 % des ventes de véhicules neufs.
Depuis 2017, on observe une augmentation des ventes de véhicules électriques . Cette augmentation s'est accélérée à compter de 2019. Avec une part de marché de 7,1 % sur le début de l'année 2021, contre 2 % en 2019 , la France se situe en cinquième position des pays européens avec la plus forte pénétration de véhicules électriques dans les ventes de voitures neuves 6 ( * ) . En 2020, la France a connu une forte hausse des immatriculations de voitures électriques et hybrides rechargeables neuves de respectivement 154 % et 297 %.
En 2020, le parc de voitures particulières neuves ne compte néanmoins que 6 % de voitures électriques et 4 % de véhicules hybrides rechargeables contre 48 % de véhicules à essence et 31 % de motorisations diesel. Dans sa trajectoire prévisionnelle d'évaluation du parc automobile, la SNBC prévoit qu'en 2030, les voitures électriques (35 %) et hybrides rechargeables (11 %) pourraient représenter près de la moitié des ventes de voitures particulières neuves.
Deux modalités permettent de poursuivre les objectifs de réduction des émissions des véhicules : l'accroissement de la part de marché des véhicules à faibles émissions ou les gains de performances des véhicules. D'après la direction générale de l'énergie et du climat, la trajectoire de développement des ventes de véhicules particuliers électriques et hybrides rechargeables doit permettre d'atteindre les objectifs fixés à horizons 2025 et 2030 par le droit européen. En revanche, concernant les VUL, une optimisation de la consommation des véhicules diesel est indispensable pour tenir l'objectif de diminution de 15 % des émissions à horizon 2025.
L'objectif de fin de vente en 2030, des voitures particulières neuves émettant plus de 95gCO 2 /km porté par le présent article est censé sécuriser encore davantage les réductions d'émissions prévues par le droit européen et vouées à être rehaussées prochainement, mais aussi l'objectif prévu par la LOM de fin de vente, d'ici 2040, des voitures particulières et VUL utilisant des énergies fossiles.
B. LES DISPOSITIONS PROGRAMMATIQUES DE CET ARTICLE AURAIENT DÛ FAIRE L'OBJET D'UNE ÉVALUATION PRÉALABLE DE LEURS CONSÉQUENCES PLUS AFFINÉE
1. Les effets environnementaux et socio-économiques de l'objectif de fin de vente des véhicules émettant plus de 95gCO 2 /km ne sont pas évalués avec précision
La filière automobile représente 400 000 emplois en France. Il convient d'évaluer et d'anticiper le plus précisément possible les conséquences économiques et sociales des objectifs que l'État fixe à ce secteur. À ce titre, l'étude d'impact est malheureusement très évasive en mentionnant, concernant l'objectif de fin de vente en 2030 des véhicules particuliers émettant plus de 95gCO 2 /km, qu'il n'était « pas exclu qu'une telle mesure ait un impact sur le volume des ventes d'automobile, et donc sur l'emploi dans le secteur automobile français » . L'étude d'impact précise que, si l'on retient la trajectoire d'évolution du parc automobile prévue par la SNBC, de 1 à 3 % des voitures neuves sur le marché pourrait être concernées par cet objectif de fin de vente. En 2020, sur 38 millions de véhicules, seuls 5,9 % émettent moins de 95gCO 2 /km (2,3 millions de véhicules). Même si la part de ces véhicules dans les ventes 2020 a atteint 20,4 %, il reste encore du chemin à parcourir d'ici 2030.
Les gains environnementaux potentiels de cet objectif sont évalués de façon approximative par l'étude d'impact dans le cadre d'une fourchette qui s'étend de 80 000 à 300 000 tonnes de CO 2 par an à compter de 2030.
2. L'objectif de fin de vente des véhicules lourds en 2040, s'il semble atteignable au regard de l'engagement des constructeurs, devra être confirmé dans la pratique
L'analyse des conséquences socio-économiques de l'objectif de fin de vente, en 2040, des véhicules lourds utilisant majoritairement des énergies fossiles devra être réalisée . Pour le volet transport de marchandises, cette évaluation devra notamment être précisée dans le cadre des groupes de travail organisés au sein de la « Task Force camions propres » qui réunit actuellement l'ensemble des acteurs appartenant à l'écosystème du transport routier de marchandises. Quand bien même les dirigeants des grands constructeurs européens de poids lourds (Daimler, Scania, MAN, Volvo, DAF, Iveco et Ford) se sont engagés, dans une déclaration conjointe du 15 décembre 2020 à ne plus produire de véhicule utilisant des énergies fossiles en 2040, la réalité du calendrier de la la mise à disposition d'une offre suffisamment massive et à des coûts abordables de camions décarbonés devra être confirmée .
Concernant les bus, si l'offre de bus électriques existe, d'après Avere-France, la France présente un retard significatif 7 ( * ) . Ce retard rendra d'autant plus exigeant l'objectif de fin de vente prévu en 2040.
3. La France pourrait mieux coordonner les objectifs qu'elle se fixe avec ceux de ses voisins européens
Avec son objectif fixé à horizon 2040 dans la LOM, la France fait partie des 12 gouvernements européens à s'être fixés des échéances cibles pour la transition complète du parc de voitures neuves 8 ( * ) . L'objectif porté par l'article 25 de fin de vente de véhicules thermiques en fonction d'un seuil démission serait en revanche une exception dans le paysage européen. L'objectif de fin de vente des véhicules lourds utilisant majoritairement des énergies fossiles, d'ici à 2040 ferait également figure d'exception en Europe 9 ( * ) .
De tels objectifs ne seraient pas partagés par nos partenaires européens et ne sont pas prévus par le droit européen qui prohibe d'ailleurs l'instauration de fin de vente contraignante de véhicules.
Le rapporteur prend acte de la volonté du Gouvernement de porter le principe d'une réforme du règlement (UE) 2019/631 visant à introduire, dans le droit européen, des dates de fin de vente de certains véhicules sur le modèle de l'objectif d'ores et déjà fixé à horizon 2040 dans la loi LOM ou des objectifs complémentaires prévus au présent article. Cette révision étant prévue pour l'été 2021, elle y portera une attention particulière. Si l'ambition de transition énergétique du parc de véhicule doit être poursuivie de façon volontariste, il serait préférable , pour éviter des conséquences économiques potentiellement défavorables, que les objectifs de fin de vente de véhicules soient partagés par tout ou partie des États membres de l'Union européenne. Le « cavalier seul », même pour des intentions louables, ne va pas sans présenter certains risques.
4. La nouvelle norme Euro 7 pourrait compromettre les objectifs de transition énergétique du parc de véhicules
La norme Euro 7 actuellement en préparation par la Commission devrait remplacer la norme Euro 6 en 2025. Le projet est attendu pour la fin de l'année . Pour améliorer la qualité de l'air, cette nouvelle norme vise notamment à abaisser les limites d'émissions des polluants émis par les véhicules. La détermination de ce cadre d'émissions et les efforts demandés aux constructeurs doivent être pertinents et proportionnés.
L'impact sur les coûts des véhicules à moteurs doit faire l'objet d'une attention particulière alors que des investissements massifs sont aujourd'hui réalisés pour permettre l'accélération de l'électrification des flottes de véhicules neufs.
Une augmentation trop significative des coûts des systèmes de dépollution pourrait engendrer une hausse du prix d'achat des véhicules, notamment pour les véhicules d'entrée de gamme les plus légers et les plus abordables, pouvant compromettre les objectifs de renouvellement du parc automobile.
Le rapporteur prend acte de ce que le Gouvernement entend porter ces préoccupations au niveau européen . Elle suivra avec attention le dispositif qui sera mis en oeuvre et ses répercussions possibles sur la trajectoire de transition énergétique des véhicules.
C. L'ÉTAT DEVRA CONFIRMER CONCRÈTEMENT SES ENGAGEMENTS PROGRAMMATIQUES DE SOUTIEN RENFORCÉ À LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE DE LA MOBILITÉ
L'article 25 affiche des ambitions, à caractère programmatiques, de développement des aides à la transition écologique des véhicules . Ces engagements ne devront pas se limiter à des effets d'annonce et devront être traduits de façon concrète . A ce stade, les dispositifs envisagés apparaissent encore flous et aucune évaluation de leurs conséquences sur les finances publiques n'est disponible . Compte-tenu des limites de certaines des mesures de soutien existantes, leur amélioration semble nécessaire .
Les mesures qui pénalisent l'achat des véhicules les plus émetteurs se renforcent chaque année. Le Gouvernement a prévu de poursuivre la trajectoire de durcissement du malus automobile. En outre, un malus portant sur le poids des véhicules doit être introduit en 2022 . Cette approche négative doit nécessairement avoir son pendant en termes de soutiens renforcés en faveur de la transition énergétique des véhicules.
Dans le cadre de l'avenant au contrat stratégique de la filière automobile du 26 avril 2021, l'État a annoncé vouloir ajuster les dispositifs de bonus écologique et de prime à la conversion aux spécificités des VUL électriques. Le rapporteur sera attentif à ces évolutions souhaitables.
Les dispositifs actuels de bonus et de prime à la conversion parviennent imparfaitement à couvrir l'écart de prix entre un véhicule thermique et son équivalent électrique.
Les diminutions programmées du bonus - le Gouvernement en prévoit deux, en juillet 2021 et en janvier 2022 - sont à envisager avec prudence et semblent entrer en contradiction avec les objectifs de soutiens affichés à l'article 25 . Cette situation peut instiller un doute sur les intentions et le volontarisme du Gouvernement en la matière.
Les soutiens publics doivent être maintenus à un niveau suffisant jusqu'à ce que la parité des prix soit atteinte . Une récente étude de Bloomberg pour Transport et Environnement prévoit que la parité des prix d'acquisition entre les véhicules à essence et les véhicules à batterie pourrait être atteinte entre 2025 et 2027.
Le renforcement des aides à l'acquisition de vélos, notamment à l'acquisition de vélos à assistance électrique (VAE) apparaît nécessaire. Aujourd'hui, l'efficacité du bonus à l'acquisition de VAE est limitée du fait qu'il est conditionné à l'attribution d'une aide équivalente accordée par une collectivité territoriale . Aussi, ce bonus n'est pas accessible sur l'ensemble du territoire, ce qui est fort regrettable.
Le rapporteur prend acte de la réflexion actuelle du Gouvernement pour encourager davantage le développement du VAE. Elle sera vigilante sur les dispositifs qui seront proposés par voie réglementaire et sur le fait que les objectifs de soutien programmatiques affichés au présent article se traduisent par des mesures concrètes, utiles, accessibles à tous et en particulier aux plus modestes et financées dans le cadre des lois de finances. L'article 25 suppose que la prime à la conversion pourrait être étendue aux vélos. Cet engagement du Gouvernement figure par ailleurs dans l'objet de l'amendement n° 5360 voté en séance publique à l'Assemblée nationale. Le rapporteur portera un intérêt particulier à l'évaluation de l'efficacité d'un tel dispositif.
L'article 25 prévoit également la possibilité de renforcer les aides en faveur du rétrofit . Comme l'a démontré l'étude de l'ADEME 10 ( * ) publiée le 19 mai 2021, la filière rétrofit est une des solutions pertinentes sur la voie de la transition énergétique des véhicules et doit être encouragée. Il serait opportun que l'État apporte un soutien renforcé à ce procédé.
Le livre blanc intitulé « l'électricité pour la filière des véhicules industriels » , publié en novembre 2019, soulignait l'importance des soutiens publics en faveur de l'acquisition des véhicules industriels électriques. Les aides qui existent aujourd'hui (le suramortissement et le bonus à l'achat de véhicules lourds électrique ou hydrogène) ne permettent pas de couvrir l'intégralité du surcoût lié à l'achat d'un véhicule lourd peu polluant. Le bonus à l'achat de véhicules lourds à motorisation électrique ou à hydrogène n'est pas opérant . Dans la perspective de la fin de vente fixée en 2040 par le présent article, les aides destinées aux véhicules lourds à motorisation alternative doivent être ajustées . Le rapporteur a bien noté que dans l'objet de l'amendement n° 5360 le Gouvernement s'engage à majorer, dès 2021 le bonus à l'achat des véhicules lourds à faibles émissions équipés de détecteurs d'angles morts.
Pour traduire concrètement le renforcement nécessaire des soutiens à la transition énergétique des véhicules portée par les objectifs du présent article, la commission a adopté deux amendements portant articles additionnels et visant à créer des dispositifs de prêts à taux zéro pour accompagner l'acquisition :
- de véhicules particuliers et utilitaires légers émettant moins de 50 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre (l'amendement COM-1929 ) ;
- de poids lourds affectés au transport de marchandises dotés de motorisations alternatives au gazole d'origine fossile (l'amendement COM-1934 ).
D. L'ÉTAT DOIT TENIR SES ENGAGEMENTS DE DÉVELOPPEMENT DU RÉSEAU DES INFRASTRUCTURES DE RECHARGE POUR QUE CELUI-CI NE CONSTITUE PLUS UN FREIN À LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE DES VÉHICULES
1. Les retards pris dans le développement des infrastructures de recharge constituent l'un des principaux freins au développement de la mobilité propre
D'après le baromètre trimestriel d'Avere-France, en mai 2021, la France compte 451 803 points de recharge pour 556 756 VE et VHR en circulation. 93 % de ces points appartiennent à des particuliers ou à des sociétés.
Au 1 er mai 2021, 38 700 points de recharge ouverts au public sont mis à disposition des VE et des VHR. L'accélération de leur déploiement est manifeste depuis le début de l'année (+18 %). Au cours des trois premiers mois de l'année 2021, il devrait être déployé davantage de points de recharge que durant l'ensemble de l'année 2020 11 ( * ) . Néanmoins, cette accélération fait suite à des retards accumulés qui ont constitué un frein au développement des véhicules électrifiés . Ces retards sont notamment à imputer aux délais préjudiciables de publication de certains textes d'application de la LOM. L'objectif de 100 000 bornes ouvertes au public installées en 2022 sera difficile à atteindre , même si, dans le cadre de la charte d'engagement de déploiement, les acteurs ont défini leurs spécifications techniques, référencé leurs fournisseurs et lancé leurs approvisionnements.
Deux autres freins restent à lever et doivent faire l'objet d'un effort renforcé :
- faciliter les installations de points de recharge dans les immeubles résidentiels collectifs ;
- déployer un réseau de recharge ultra rapide sur les grands axes routiers pour sécuriser et rassurer les automobilistes sur leurs capacités à faire de plus longs trajets.
Les aides à la mise en place d'infrastructures de recharge sont bienvenues pour accélérer leur développement. Les programmes de certificats d'économie d'énergie peuvent constituer un dispositif intéressant en ce sens. Le rapporteur note qu'un programme ADVENIR2, doté de 100 millions d'euros a été lancé en 2020 et que les aides aux bornes de recharge ouvertes au public ont été augmentées.
Comme le souligne l'avenant au contrat stratégique de la filière automobile du 26 avril 2021, il sera nécessaire de suivre avec attention la mise en oeuvre des engagements de développement de cette infrastructure indispensable à la transition énergétique du parc de véhicules.
2. Les enjeux de capacité du réseau électrique en lien avec la stratégie de déploiement des bornes de recharge dans le cadre de l'accélération de la mobilité électrique devraient être mieux pris en compte
En mai 2019, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité (RTE) publiait une étude sur les « enjeux du développement de l'électromobilité pour le système électrique » . En effet, l'électromobilité constitue un écosystème complexe qui fait intervenir de nombreux acteurs et qui est susceptible d'avoir des répercussions sur de nombreuses activités. À ce titre, la question de la capacité du réseau électrique à supporter l'accélération du déploiement ne doit pas rester un impensé .
L'étude de RTE de 2019 reposait sur des hypothèses qui semblent aujourd'hui devoir être partiellement révisées ou, tout au moins, complétées. RTE doit à ce titre produire une nouvelle étude globale à l'automne 2021 .
L'étude de 2019 anticipait une première étape de massification de la mobilité électrique en 2030 puis la fin de la vente des modèles thermiques en 2040. Son hypothèse médiane prévoyait 11,5 millions de véhicules légers électriques en circulation en 2035 pour 112 000 véhicules lourds. L'hypothèse haute, correspondant aux objectifs de la SNBC et de la PPE prévoyait respectivement 15,6 millions et 156 000 unités pour les deux types de véhicules. Dans ces conditions, et en prenant en compte le parc de production d'électricité prévu par la PPE, le réseau électrique devait être en mesure de couvrir la totalité des besoins électriques , y compris ceux liés à la mobilité électrique. Dans cette modélisation, la consommation électrique liée à la mobilité électrique apparaissait modérée 12 ( * ) . L'effet de la mobilité sur les pointes électrique devait être modéré à condition qu'une partie significatives des recharges, dont 90 % sont effectués à domicile ou sur le lieu de travail, soient pilotées pendant les périodes de faible consommation.
L'accélération de la transition énergétique des véhicules , à laquelle le projet de loi entend à juste titre participer, va imposer de nouvelles contraintes aux réseaux de transport et de distribution électrique qui, malheureusement, n'ont pas encore pu être parfaitement modélisées . Ces nouvelles contraintes à intégrer portent tout particulièrement sur :
- l'accélération de la transition vers la mobilité électrique d'ici 2030 , incluant un probable renforcement des objectifs européens ;
- une électrification plus importante qu'anticipée des véhicules lourds 13 ( * ) non seulement pour les usages urbain et régional mais également pour le cabotage long ;
- un développement significatif des bornes à très haute puissance .
Ce dernier point est peut-être le plus structurant. Actuellement, les hypothèses reposaient sur un déploiement marginal des bornes ultra-rapides (350 kW). Cependant, malgré leur coût élevé et l'équilibre économique difficile à trouver pour ce type de dispositifs, une stratégie de développement étendue de ces bornes pourrait être nécessaire afin, notamment, de contribuer à lever les barrières psychologiques qui freinent l'essor de la mobilité électrique longue.
Dans cette hypothèse il conviendra de s'assurer que les réseaux de transport et de distribution d'électricité pourront effectivement répondre aux implications de la stratégie définie . Le rapporteur examinera avec attention l'étude actualisée que réalisera RTE à l'automne prochain.
Si elle regrette les lacunes de l'évaluation de ses conséquences socio-économiques, le rapporteur n'a pas proposé de modifications au présent article. Elle se montrera d'autant plus attentive aux mesures qui seront prises par le Gouvernement pour tenir l'ensemble de ses engagements d'accompagnement et de soutien renforcé à la mobilité propre.
Décision de la commission : la commission des finances n'a pas proposé de modifications au présent article.
ARTICLE
25 bis (nouveau)
Objectif d'accompagnement des ménages dans le
report modal vers les modes de transport les moins polluants
. I. OUTIL AU SERVICE DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE, LA PRIME À LA CONVERSION NE PERMET PAS D'ENCOURAGER TOUTES LES SOLUTIONS DE MOBILITÉ DURABLE QUI ONT VOCATION À SE DÉVELOPPER, NOTAMMENT AU SEIN DES ZONES À FAIBLES ÉMISSIONS MOBILITÉ
A. AUJOURD'HUI, LE PÉRIMÈTRE DU DISPOSITIF DE PRIME À LA CONVERSION EST LIMITÉ À CERTAINS VÉHICULES À MOTEUR
La prime à la conversion fait partie, avec le bonus écologique, des deux principaux outils nationaux permettant d'accompagner l'acte d'achat de véhicules peu polluants neufs ou d'occasion.
Après un démarrage poussif entre 2015 et 2017, le dispositif a pris son essor pour devenir un outil privilégié de la transition énergétique du parc de véhicules français.
Prévue à l'article D251-3 du code de l'énergie, la prime est octroyée en contrepartie de la mise à la décharge d'un véhicule.
Le véhicule à mettre au rebus doit être une voiture particulière ou une camionnette répondant à certains critères, notamment d'ancienneté 14 ( * ) .
Le périmètre des véhicules dont l'acquisition peut être accompagnée par la prime à la conversion inclut les voitures particulières, les camionnettes, les véhicules à moteur à 2 ou 3 roues et les quadricycles à moteur.
Le montant maximum est de 5 000 euros pour l'achat d'un véhicule particulier électrique ou hybride rechargeable neuf ou d'occasion, lorsque le revenu fiscal de référence du foyer est inférieur à 6 300 euros. Dans le cas contraire, elle tombe à 2 500 euros. Pour une camionnette, le montant maximum est de 5 000 euros.
L'objet des amendements qui ont introduit la présente disposition évoquent la réussite du dispositif Bruxell'Air . Destinée aux personnes domiciliées dans la région Bruxelles-capitale, cette prime, créée en 2006, est octroyée aux personnes qui choisissent de mettre au rebus leur voiture au profit de moyens de transports plus favorables à l'environnement. De 500 à 900 euros, modulée selon les revenus, la prime se matérialise par un forfait mobilité que la personne bénéficiaire peut utiliser pour des modes de déplacement vertueux d'un point de vue environnemental.
Ainsi, ce budget mobilité peut servir à financer un abonnement de transport en commun, des services d'autopartage, des vélos ou encore des trottinettes.
B. LES ZONES À FAIBLES ÉMISSIONS MOBILITÉ VONT SE DÉVELOPPER ET ACCROÎTRE LE BESOIN DE SOUTIENS EN FAVEUR DES DIFFÉRENTS TYPES DE MOBILITÉ DURABLE
Les zones à faibles émissions mobilité (ZFEM) sont définies à l'article L. 2213-4-1 du code général des collectivités territoriales .
Mises en oeuvre dans des zones où la pollution de l'air est importante, elles se traduisent par des restrictions de circulation concernant certains véhicules en fonction de leur certificat Crit'Air. Les collectivités territoriales sur le territoire desquelles est mise en place une ZFEM fixent les périodes de restrictions, les véhicules concernés et le niveau du certificat nécessaire pour pouvoir y circuler.
À la fin de l'année 2020, quatre collectivités disposaient de ZFEM : la métropole de Lyon, Grenoble-alpes-métropole, la ville de Paris et la métropole du Grand Paris. Un décret publié le 17 décembre 2020 a rendu obligatoire le développement de ZFEM dans 7 nouvelles métropoles.
L'article 27 du présent projet de loi entend par ailleurs étendre les ZFEM sur le territoire.
II. L'ARTICLE 25 BIS FIXE À L'ÉTAT UN OBJECTIF D'ACCOMPAGNEMENT DES MÉNAGES DANS LE REPORT MODAL VERS LES MODES DE TRANSPORT LES MOINS POLLUANTS
À caractère programmatique , l'article 25 bis a été introduit par l'adoption de plusieurs amendements identiques 15 ( * ) lors de l'examen du texte en séance publique à l'Assemblée nationale .
L'article dispose que « pour atteindre les objectifs climatiques de la France et lutter efficacement contre la pollution de l'air, l'État se fixe pour objectif d'accompagner les ménages dans le report modal vers les modes de transport les moins polluants » .
L'article précise que l'action de l'État devrait cibler prioritairement les zones à faibles émissions mobilité avant sa généralisation.
III. L'OBJECTIF PROGRAMMATIQUE FIXÉ À L'ÉTAT PAR CET ARTICLE DEVRA SE TRADUIRE CONCRÈTEMENT
A. L'OBJET DES AMENDEMENTS PROPOSE D'ÉLARGIR LES CHAMPS DE LA PRIME À LA CONVERSION À DE NOUVELLES SOLUTIONS DE MOBILITÉ ENVIRONNEMENTALEMENT VERTUEUSES POUR CRÉER UNE PRIME À LA MOBILITÉ DURABLE
L'objet des amendements qui ont introduit le présent article précise par quelles modalités l'État pourrait atteindre « l'objectif d'accompagner le report modal vers les modes de transport les moins polluants » .
Le mécanisme privilégié serait une extension du périmètre de l'actuelle prime à la conversion . Ainsi, celle-ci pourrait à l'avenir permettre de financer de nouvelles formes de mobilités vertueuses d'un point de vue environnemental. Le dispositif pourrait être élargi pour permettre l'acquisition de vélos à assistance électrique (VAE), de vélos cargos, d'abonnements aux transports en commun, de services d'autopartage ou encore de covoiturage .
Il s'agirait de mettre en oeuvre au niveau national une prime à la mobilité durable qui pourrait s'inspirer du dispositif Bruxell'Air.
Afin de favoriser la lutte contre le changement climatique, de participer à la réalisation des objectifs que s'est fixés la France en la matière et d'améliorer la qualité de l'air dans les zones les plus polluées il est nécessaire d'encourager les formes de mobilité qui ont le moins d'impact sur l'environnement lorsqu'elles peuvent être des alternatives efficaces et opérationnelles. Pour poursuivre cet objectif, il convient de consacrer les aides nécessaires pour accompagner les ménages dans cette nécessaire transition. Le rapporteur soutient le principe d'inciter, par des aides ciblées, lorsqu'il est pertinent, le report modal vers l'ensemble de la gamme des mobilités durables.
B. LE GOUVERNEMENT AURA À RENDRE OPÉRATIONNEL L'OBJECTIF QUE L'ARTICLE FIXE À L'ÉTAT
L'objectif programmatique posé par l'article devra se traduire concrètement par l'évolution de la réglementation. Le rapporteur note que le Gouvernement s'est par ailleurs engagé , notamment à travers l'amendement n° 5360 qui est venu compléter l'article 25 du présent projet de loi, sur une extension de la prime à la conversion, en particulier en faveur de l'acquisition de VAE et de vélos cargos .
Elle sera attentive aux textes réglementaires qui seront pris pour mettre en oeuvre concrètement ces engagements. L'évolution envisagée de ces dispositifs aura un coût qui devra être évalué .
Par ailleurs il conviendra de garantir une bonne articulation de l'ensemble des dispositifs existants avec les éventuels nouveaux outils qui pourraient être instaurés. La lisibilité des aides à la mobilité durable conditionne leur efficacité ainsi que celle de la transition écologique des mobilités.
C. COMPTE-TENU DE L'INCIDENCE POTENTIELLE DE LEUR DÉVELOPPEMENT, IL APPARAÎT PERTINENT, DANS UN PREMIER TEMPS, DE CIBLER UN ÉLARGISSEMENT DU PÉRIMÈTRE DE LA PRIME À LA CONVERSION SUR LES ZONES À FAIBLE ÉMISSIONS MOBILITÉ
Le développement des ZFEM ne sera pas sans incidence socio-économiques. Les contraintes qu'elles occasionnent peuvent être lourdes. Aussi, pour garantir leur acceptabilité sociale, il est nécessaire d'accompagner leur création par des dispositifs de soutiens adaptés . Une prime à la mobilité durable élargie pourrait utilement répondre à cet enjeu.
Le rapporteur souscrit à l'objectif porté par la présente disposition mais attend qu'il soit traduit concrètement par des mesures qui devront faire l'objet d'une évaluation de leurs conséquences financières ainsi que de leurs bénéfices socio-économiques attendus.
Décision de la commission : la commission des finances n'a pas proposé de modifications au présent article.
ARTICLE
ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 26
Instauration d'un prêt à
taux zéro pour l'achat d'un véhicule propre
. I. EN PLUS DES DEUX MÉCANISMES PRINCIPAUX D'AIDE À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES QUE SONT LE BONUS ÉCOLOGIQUE ET LA PRIME À LA CONVERSION, L'ÉTAT GARANTIT À 50 % DES MICRO-CRÉDITS « VÉHICULES PROPRES »
A. LE BONUS ÉCOLOGIQUE ET LA PRIME À LA CONVERSION SONT LES DEUX PRINCIPAUX OUTILS D'AIDE À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES
1. Le bonus écologique
Un bonus écologique est alloué pour l'achat d'un véhicule neuf dont le taux d'émission de CO 2 est inférieur ou égal à 50 grammes par kilomètre ou pour l'achat d'un véhicule d'occasion dont le taux d'émission de CO 2 est inférieur ou égal à 20 grammes par kilomètre. Ce bonus est défini aux articles D251-1 et D251-2 du code de l'énergie.
Le montant du bonus est plafonné à 27 % du prix d'acquisition du véhicule et à 6 000 euros 16 ( * ) pour un véhicule électrique dont le prix d'achat est inférieur à 45 000 euros.
Pour un véhicule électrique d'occasion, le montant de l'aide est de 1 000 euros.
Un véhicule hybride rechargeable de moins de 50 000 euros peut bénéficier d'un bonus de 1 000 euros .
2. La prime à la conversion
La prime à la conversion est versée pour les véhicules neufs ou d'occasion . Elle est octroyée en contrepartie de la mise à la décharge d'un véhicule.
Son montant maximum est de 5 000 euros pour l'achat d'un véhicule particulier électrique ou hybride rechargeable, neuf ou d'occasion, lorsque le revenu fiscal de référence du foyer est inférieur à 6 300 euros . Dans le cas contraire , elle tombe 2 500 euros. Pour une camionnette, le montant maximum est de 5 000 euros.
B. DANS LE CADRE DU PLAN DE RELANCE, DES CRÉDITS ONT ÉTÉ ALLOUÉS POUR APPORTER UNE GARANTIE PARTIELLE DE L'ÉTAT À UN DISPOSITIF DE MICRO-CRÉDITS « VÉHICULES PROPRES »
Un dispositif de micro-crédit « véhicules propres » a été créé en faveur des ménages modestes, notamment pour répondre aux besoins des personnes exclues du système bancaire classique ou en situation professionnelle fragile.
Ce dispositif bénéficie d'une garantie de l'État à hauteur de 50 % via le fonds de cohésion sociale . Variable en fonction des revenus, le montant du crédit peut atteindre jusqu'à 5 000 euros pour une durée maximale de cinq ans.
Ce dispositif est cumulable avec le bonus écologique et la prime à la conversion. Il peut accompagner l'acte d'achat ou la location de longue durée d'un véhicule neuf ou d'occasion . Les véhicules éligibles sont :
- les voitures particulières et camionnettes classées Crit'Air zéro, c'est-à-dire, à motorisations électriques ou hybrides rechargeables ;
- les voitures particulières et camionnettes thermiques classées Crit'Air 1, soit les véhicules à motorisation essence immatriculées depuis le 1 er janvier 2011, dont le taux d'émission de CO 2 est inférieur ou égal à 132 g/km ;
- les véhicules à deux ou trois roues et quadricycles à motorisation électrique.
33 millions d'euros de crédits ont été attribués au dispositif dans le cadre du plan de relance .
C. DES AIDES COMPLÉMENTAIRES SONT ACCORDÉES PAR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
Certaines collectivités territoriales accordent des aides complémentaires qui se cumulent avec les aides nationales et permettent de les optimiser.
La direction générale de l'énergie et du climat constate que les dispositifs nationaux sont significativement plus efficaces dans les territoires où ces aides complémentaires sont appliquées . À ce titre, le ministère de la transition écologique effectue des démarches auprès des collectivités afin de les inciter à créer ce type de dispositifs.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LA COMMISSION DES FINANCES : UN PRÊT À TAUX ZÉRO POUR L'ACHAT DE VÉHICULES PROPRES
A. IL APPARAÎT NÉCESSAIRE DE COMPLÉTER LES AIDES EXISTANTES
La mise en place d'un prêt à taux zéro pour l'acquisition de véhicules propres avait été portée par la convention citoyenne pour le climat .
Les dispositifs de bonus écologique et de prime à la conversion répondent encore imparfaitement aux besoins et au nécessaire renouvellement du parc de véhicules, en témoignent la garantie apportée par le Gouvernement au dispositif de micro-crédits à destination des ménages modestes ou le fait que la pleine efficacité des dispositifs est conditionnée à la mise en oeuvre de soutiens locaux complémentaires.
Par ailleurs, il apparaît que le dispositif de micro-crédits véhicules propres promu par le Gouvernement dans le cadre du plan de relance est faiblement efficace et insuffisant pour répondre aux besoins, en particuliers des ménages modestes, notamment en raison de taux d'intérêts trop élevés.
Concernant les véhicules utilitaires légers (VUL), les conclusions provisoires de la « task force camions propres » rendues le 20 mai 2021, concluent à des aides à l'achat insuffisantes , notamment du fait de « barèmes peu incitatifs » . Elles soulignent qu' en dépit d'une offre significative sur ce segment, la pénétration des VUL électriques demeure faible. Le Gouvernement semble avoir conscience de ces difficultés. Il a reconnu les faiblesses des dispositifs de soutien actuels pour ce segment et s'est engagé à les ajuster , notamment en déplafonnant les aides et en augmentant leur montant unitaire.
Actuellement, le surcoût à l'acquisition pour des véhicules à motorisations alternatives demeure non négligeable . En France, une mini citadine électrique est vendue environ 21 000 euros contre 11 000 euros pour son équivalent thermique. Le prix d'une citadine électrique démarre à environ 32 500 euros et celui de son équivalente thermique à 15 300 euros. Aujourd'hui, les modèles électriques coutent en moyenne 30 % plus cher que les modèles thermiques.
Une récente étude de Bloomberg pour Transport et Environnement estime que la parité des prix d'acquisition entre les véhicules à essence et les véhicules à batterie pourrait être atteinte entre 2025 et 2027 . Il apparaît indispensable de renforcer les aides à l'acquisition, en particulier pour les ménages modestes, durant la phase de transition qui conduira à la parité des prix d'achat.
Une enquête IPSOS de décembre 2020 , réalisée pour Avere France souligne que les soutiens publics à l'acquisition sont d'autant plus indispensables pour les particuliers . En effet, ces derniers n'intègrent pas toujours le coût total de possession dans leur réflexion d'achat. C'est ainsi que 49 % des conducteurs interrogés indiquent qu'ils auraient renoncé à acquérir un véhicule électrique sans les aides à l'achat auxquelles ils ont pu bénéficier.
B. LA COMMISSION DES FINANCES PROPOSE DE CRÉER UN PRÊT À TAUX ZÉRO POUR L'ACHAT DE VÉHICULES PROPRES
Le présent article propose de compléter les dispositifs d'aides existants par la création d'un prêt à taux zéro pour accompagner l'acquisition de véhicules particuliers et utilitaires légers propres .
Ce prêt à taux zéro s'appliquera aux particuliers comme aux professionnels , pour l'acquisition d'un véhicule émettant une quantité de dioxyde de carbone inférieure ou égale à 50 grammes par kilomètre et dont le poids total autorisé en charge est inférieur ou égal à 2,6 tonnes .
En contrepartie des prêts accordés, les établissements bancaires se verront accorder une réduction d'impôt.
Pour tenir compte des dernières prévisions d'évolution du différentiel de coût à l'achat entre les véhicules à moteur thermique et les véhicules à motorisation alternatives, le dispositif de prêt à taux zéro prévu au présent article entrera en vigueur au 1 er janvier 2022 et pour une durée de trois ans jusqu'au 31 décembre 2024 . Dans l'hypothèse où, à cette date, le surcoût à l'achat des véhicules légers à motorisations alternatives demeurait significatif et exigerait le maintien du présent dispositif, son prolongement devra être envisagé .
Décision de la commission : la commission des finances a proposé d'adopter le présent article additionnel.
ARTICLE
30
Objectif de suppression progressive, à horizon 2030, du tarif
réduit de taxe intérieure de consommation sur les produits
énergétiques (TICPE) sur le gazole utilisé par les
transporteurs routiers de marchandises en contrepartie d'un soutien
renforcé à la transition énergétique du secteur
I. I. LE SECTEUR DU TRANSPORT ROUTIER BÉNÉFICIE D'UN DISPOSITIF DE REMBOURSEMENT D'UNE FRACTION DU TARIF DE TICPE DE DROIT COMMUN APPLIQUÉ SUR LE GAZOLE ROUTIER ET SE VOIT ACCOMPAGNÉ DANS SA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE PAR DES AIDES NÉANMOINS INSUFFISANTES
A. LES TRANSPORTEURS ROUTIERS BÉNÉFICIENT D'UN MÉCANISME DE REMBOURSEMENT PARTIEL DU TARIF DE TICPE DE DROIT COMMUN APPLIQUÉ AU GAZOLE ROUTIER
Les produits énergétiques se voient appliquer des tarifs de TICPE. Ces tarifs figurent au tableau B du 1 de l'article 265 du code des douanes. Le gazole routier se voit ainsi appliquer un tarif de 59,40 euros par hectolitre . Les conseils régionaux, l'assemblée de Corse ou Ile-de-France Mobilités peuvent majorer ce tarif.
Afin de soutenir la compétitivité du secteur, les transporteurs routiers de marchandises bénéficient d'un dispositif de remboursement partiel du tarif de TICPE appliqué au gazole routier afin de leur garantir un tarif réduit de 45,19 euros par hectolitre . En tant qu'aide d'État, ce mécanisme fait l'objet d'une autorisation européenne à l'article 7 de la directive 2003/96/CE du Conseil du 27 octobre 2003, dite « directive énergie ». L'article stipule que le tarif acquitté par les transporteurs routiers ne doit pas être inférieur au tarif qui était en vigueur le 1 er janvier 2003, à savoir, 39,19 euros.
Le tome II de l'annexe « Voies et moyens » du projet de loi de finances pour 2021, évalue le coût de cette dépense fiscale à 1,27 milliards d'euros en 2021 .
La loi de finances pour 2020 a prévu une augmentation de 2 euros par hectolitre du tarif réduit de TICPE appliqué au gazole utilisé par le transport routier de marchandises. Auparavant, ce tarif avait été augmenté de 4 euros en 2015, après l'abandon du projet d'écotaxe.
B. DES DISPOSITIFS D'AIDE SONT AUJOURD'HUI EN VIGUEUR POUR ENCOURAGER LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE DU SECTEUR DU TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES
1. Un dispositif de suramortissement a été créé en 2016 et prolongé jusqu'en 2024
Un dispositif de suramortissement, créé en 2016, prévu à l'article 39 decies A du code général des impôts, a pour vocation de soutenir l'acquisition de poids lourds peu polluants. Son périmètre s'étend aux véhicules lourds utilisant du gaz naturel, du biométhane carburant, du carburant ED95, du carburant B100, de l'hydrogène ou une motorisation électrique.
Ce dispositif permet de déduire de son résultat imposable une somme égale à :
- 20 % pour les véhicules d'un poids total autorisé en charge (PTAC) compris entre 2,6 et 3,5 tonnes ;
- 60 % pour les véhicules d'un PTAC compris entre 3,5 et 16 tonnes ;
- 40 % pour les véhicules d'un PTAC supérieur à 16 tonnes.
À l'occasion de l'examen de la loi de finances pour 2021, la commission des finances du Sénat avait proposé d'adopter l'article prolongeant le dispositif jusqu'au 31 décembre 2024.
2. Créé dans le cadre du plan de relance, le bonus écologique pour l'acquisition de camions électriques ou à hydrogène s'est révélé inopérant
Dans le cadre du plan de relance, le Gouvernement a décidé d'instaurer un dispositif de bonus écologique destiné à l'acquisition ou la location 17 ( * ) de véhicules lourds neufs fonctionnant avec des motorisations électriques ou à hydrogène . L'objectif poursuivi était d'accompagner le développement des véhicules propres et d'accélérer la transition du parc.
Le montant de l'aide s'élève à 40 % du coût d'acquisition, dans la limite de 50 000 euros. Ce bonus est cumulable avec le suramortissement . Les crédits prévus pour financer ce dispositif s'élèvent à 100 millions d'euros pour la période 2021-2022.
Néanmoins, faute d'une offre mature et en raison d'un surcoût à l'achat qui demeure très élevé, ce dispositif n'est pas opérant et une seule demande a été enregistrée au cours du premier trimestre 2021 . Il apparaît en effet que les offres de véhicules électrique et hydrogène sont quasi inexistantes aujourd'hui pour les camions dont le PTAC est supérieur à 3,5 tonnes. Pour le transport longue distance, les motorisations électrique et hydrogène sont essentiellement au stade de l'expérimentation.
Le Gouvernement a annoncé que ce dispositif devait prochainement faire l'objet d'un bilan et d'ajustements, peut-être dès l'été 2021.
3. Des aides régionales et locales complètent les dispositifs nationaux
Pour accompagner la transition énergétique du secteur routier de marchandises, certaines collectivités territoriales apportent des aides complémentaires pour faciliter l'achat de véhicules propres.
C. LA CONVENTION CITOYENNE PRÉVOYAIT DE DÉMARRER DÈS 2021 LA TRAJECTOIRE DE CONVERGENCE ENTRE LE TARIF DE TICPE DE DROIT COMMUN ET LE TARIF RÉDUIT SUR LE GAZOLE UTILISÉ PAR LE SECTEUR DU TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES
Pour atteindre l'objectif de suppression d'ici 2030 du tarif réduit de TICPE sur le gazole utilisé par le transport routier de marchandises, la convention citoyenne pour le climat prévoyait une trajectoire de hausse annuelle de 3 centimes d'euros par litre dudit tarif réduit.
II. L'ARTICLE 30 PROPOSE UN OBJECTIF DE SUPPRESSION PROGRESSIVE, D'ICI AU 1 ER JANVIER 2030, DU TARIF RÉDUIT DE TICPE SUR LE GAZOLE UTILISÉ PAR LES VÉHICULES LOURDS DE TRANSPORT DE MARCHANDISES
À caractère programmatique , l'article 30 dispose, dans son I., que, d'ici au 1 er janvier 2030, « pour le gazole routier utilisé pour la propulsion des véhicules lourds de transports de marchandises, il sera procédé à une évolution de la fiscalité des carburants dans l'objectif d'atteindre un niveau équivalent au tarif normal d'accise sur le gazole » . L'objectif poursuivi par l'article 30 est ainsi de parvenir progressivement à un alignement, à horizon 2030, du tarif de TICPE portant sur le gazole utilisé par le secteur du transport routier de marchandises avec le tarif de TICPE de droit commun applicable au gazole .
L'article précise que cet objectif de suppression progressive du tarif réduit de TICPE sur le gazole utilisé par les transporteurs routiers « s'accompagne d'un soutien renforcé à la transition énergétique du secteur du transport routier » .
Le II. de l'article ajoute que la trajectoire devant permettre d'atteindre l'objectif fixé par le présent article sera précisée dans un rapport que le Gouvernement présentera au Parlement à l'issue de la présidence française du Conseil de l'Union européenne en 2022. Il est précisé que cette trajectoire doit « notamment » se concrétiser « par l'accélération de la convergence de la fiscalité énergétique au niveau européen » .
Par ailleurs, l'article prévoit que le rapport devra également présenter « le développement de l'offre de véhicules lourds à motorisation alternative au gazole d'origine fossile mis sur le marché » ainsi que « des réseaux correspondants d'avitaillement en énergie » .
Enfin, en cohérence avec l'accompagnement cité au I. du présent article, le rapport devra aussi envisager « les modalités du soutien renforcé à la transition énergétique du secteur » . Le rapport prendra en compte des formes de transition énergétique du secteur qui pourraient se traduire « notamment par le renouvellement des parcs de véhicules ou leur transformation » .
III. POUR PRÉSERVER LA COMPÉTITIVITÉ DU PAVILLON FRANÇAIS, L'OBJECTIF D'ALIGNEMENT FIXÉ À HORIZON 2030 ET LA TRAJECTOIRE QUI SERA DÉTERMINÉE POUR Y PARVENIR DOIVENT ÊTRE SOUMIS À DES PRÉALABLES INDISPENSABLES
A. LE COÛT TRÈS DYNAMIQUE D'UNE DÉPENSE FISCALE CONSIDÉRÉE COMME DÉFAVORABLE À L'ENVIRONNEMENT
1. Une dépense fiscale très dynamique qui devrait s'élever à 1,27 milliard d'euros en 2021
En 2021 , le coût de la dépense fiscale correspondant au remboursement partiel de TICPE dont bénéficie le secteur du transport routier devrait atteindre 1 274 millions d'euros . Cette dépense présente un dynamisme particulièrement prononcé dans la mesure où elle ne représentait que 357 millions d'euros en 2014 .
Cette progression sensible de 917 millions d'euros (+ 257 %) s'explique par une série de hausses successives du tarif de TICPE de droit commun sur le gazole routier qui n'ont pas été répercutées sur le tarif réduit applicable aux transporteurs routiers . Ainsi, depuis 2014 et jusqu'à ce que sa trajectoire de progression soit gelée, la composante climat énergie , intégrée aux tarifs de TICPE, augmentait chaque année. Par ailleurs, à partir de 2015, le processus de convergence des tarifs du gazole et de l'essence s'est traduit par une augmentation du premier. Alors qu'il était de 42,84 euros par hectolitre en 2014, aujourd'hui, le tarif de TICPE de droit commun sur le gazole s'établit à 59,40 euros par hectolitre, soit une progression de 38,7 %. Sur la même période, le tarif réduit de TICPE applicable aux transporteurs routiers n'a progressé que de 15,3 %. Le différentiel entre le tarif de droit commun de TICPE applicable au gazole routier et le tarif réduit affecté aux transporteurs de marchandises est ainsi passé de 3,63 euros à 14,21 euros .
Différentiel des tarifs de TICPE applicables pour le gazole et pour le gazole des transporteurs routiers après remboursement
Tarif de TICPE
|
2013 |
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018 |
2019 |
2020 |
2021 |
Pour le gazole routier |
42,84 |
42,84 |
46,82 |
49,81 |
53,07 |
59,40 |
59,40 |
59,40 |
59,40 |
Pour les transporteurs routiers après remboursement |
39,19 |
39,19 |
43,19 |
43,19 |
43,19 |
43,19 |
43,19 |
45,19 |
45,19 |
Différentiel remboursé par l'État |
3,65 |
3,65 |
3,63 |
6,62 |
9,88 |
16,21 |
16,21 |
14,21 |
14,21 |
Source : commission des finances
La trajectoire de diminution du remboursement de TICPE accordé au secteur du transport de marchandises conduirait à une diminution progressive de la dépense fiscale. La transition énergétique du parc de véhicules lourds se traduira aussi, mécaniquement par une déflation du coût de ce dispositif fiscal dérogatoire.
2. Une dépense fiscale classée comme défavorable à l'environnement
Le commissariat général au développement durable classe cette dépense fiscale parmi les principales « aides dommageables à l'environnement ».
3. Les émissions du transport routier de marchandises
D'après le centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (CITEPA), le secteur des transports représentait 30 % des émissions nationales en 2019 (136 MtCO 2 e). Le transport routier y contribue à hauteur de 94 % (128 MtCO 2 e). Les poids lourds représentent 24 % des poids lourds (31 MtCO 2 e) des émissions du transport routier.
Le paradoxe est, qu'en lui-même, l'objectif porté par le présent article , quand bien même il vise notamment à réduire les émissions des transports, n'aura qu'un effet très réduit sur ce plan. Si l'étude d'impact chiffre la réduction des émissions des transports permise par cette mesure à 1,5 %, les principaux effets attendus en la matière résulteront de la transition énergétique du secteur à travers le renouvellement de la flotte de poids lourds . Or, cette transition dépendra de l'offre constructeur, du développement des infrastructures d'avitaillement et de l'accompagnement de cette transition par les pouvoirs publics.
B. COMPTE TENU DE LA FRAGILITÉ ÉCONOMIQUE DU SECTEUR ET DE SA FORTE EXPOSITION À LA CONCURRENCE ÉTRANGÈRE, L'OBJECTIF DE SUPPRESSION PROGRESSIVE DU TARIF RÉDUIT DE TICPE NE PEUT S'ENVISAGER QUE DANS LA PERSPECTIVE D'UNE HARMONISATION DE LA FISCALITÉ EUROPÉENNE DES CARBURANTS QUI S'ANNONCE DIFFICILE À FAIRE ABOUTIR
1. Le secteur du transport routier de marchandises est fragile autant qu'il est stratégique
Le secteur du transport routier de marchandises français présente plusieurs fragilités structurelles . Majoritairement composée de petites et moyennes entreprises , il dispose de faibles marges et se trouve particulièrement exposé à la concurrence intra-européenne. Les pavillons étrangers ont capté la plus grande partie de l'accroissement d'activité ces dernières années. Pour autant, et le rapporteur a pu le constater dans les pires moments de la présente crise, c'est un secteur stratégique qui permet de garantir l'intégrité de l'ensemble de la chaîne logistique et l'approvisionnement du pays. En outre, le transport routier de marchandises pèse lourd dans l'économie française. Il représente environ 600 000 emplois .
L'étude d'impact évalue l'effet d'une suppression du dispositif de remboursement de TICPE à 15 % sur le prix du carburant et, par voie de conséquence, à 3,5 % sur le prix du transport 18 ( * ) . Néanmoins, elle est moins affirmative concernant les conséquences de la mesure sur le secteur dans la mesure où celles-ci dépendront des capacités des transporteurs à se défaire de la dépendance au gazole . Malheureusement, comme décrit infra , il apparaît regrettable que ce sujet n'ait pas encore pu être objectivé .
2. Aussi difficile soit-elle, une convergence fiscale européenne est une condition nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi par la suppression progressive du dispositif de remboursement de TICPE
La question de la fiscalité du carburant des transporteurs routiers est particulièrement sensible, en particulier du fait qu'un grand nombre de transporteurs étrangers qui circulent en France ne s'approvisionnent pas en carburant dans le pays. Aussi, faute d'harmonisation européenne, une hausse de la fiscalité du carburant en France risquerait d'affaiblir significativement la compétitivité du secteur . Le résultat pourrait en être une substitution de transporteurs étrangers aux transporteurs français sans que la mesure ne produise les effets escomptés en termes de transition énergétique de la flotte de véhicule français ou de report modal. L'étude d'impact souligne d'ailleurs que « la mise en oeuvre d'une trajectoire d'augmentation non coordonnée au niveau européen présente un très fort risque de renforcement des pavillons étrangers sur le marché domestique » .
Parmi les pays européens limitrophes de la France, dans lesquels les véhicules de transport de marchandises peuvent faire le plein avant et après avoir circulé sur le réseau routier français, l'Allemagne applique un niveau de fiscalité sur le carburant plus élevé. En revanche, l'Espagne, la Belgique, le Luxembourg ou l'Italie ont des tarifs d'accises sur le carburant moins élevés qu'en France . Par ailleurs, le niveau de fiscalité français est supérieur à la moyenne européenne.
Tarif de TICPE par litre de gazole applicable aux
transporteurs routiers
de marchandises dans les pays limitrophes de la
France
Moyenne européenne |
Espagne |
Belgique |
Luxembourg |
Italie |
France |
Allemagne |
|
Tarif de la taxe énergétique (euros par hectolitre) |
0,41 |
0,33 |
0,35 |
0,35 |
0,40 |
0,45 |
0,47 |
Source : étude d'impact du projet de loi
Le rapporteur note que le Gouvernement affiche sa résolution à porter, au cours de la présidence française du Conseil de l'Union européenne, une volonté de réforme ambitieuse de la directive énergie afin de promouvoir un processus de convergence des fiscalités sur le carburant professionnel.
Toutefois, malgré le volontarisme affiché, en raison de la sensibilité de la question, des fortes divergences qui existent entre les États membres sur le sujet et de la règle de l'unanimité au Conseil en matière de fiscalité, il est permis de douter de l'aboutissement de ce projet . À défaut de pouvoir parvenir à une convergence des fiscalités à l'échelle de l'Union, des hypothèses dégradées, plus réalistes, pourraient devoir être envisagées telles qu'un relèvement des tarifs minimaux de taxation ou bien un accord partiel avec des États limitrophes du territoire français.
C. DES DISPOSITIONS QUI DOIVENT NÉCESSAIREMENT ÊTRE CONDITIONNÉES À UNE OFFRE DE POIDS LOURDS PROPRES PERMETTANT, GRÂCE À UN ACCOMPAGNEMENT RENFORCÉ, DE RENOUVELER SIGNIFICATIVEMENT LES FLOTTES DE VÉHICULES
1. La disponibilité et l'accessibilité d'une offre suffisante de poids lourds décarbonés à horizon 2030 n'apparaît pas pleinement garantie à ce stade
Le Gouvernement a pris l'engagement de stabiliser le tarif réduit de TICPE applicable au gazole routier utilisé par les transporteurs de marchandises jusqu'en 2022 . La trajectoire devant conduire à la suppression du mécanisme de remboursement de TICPE dont bénéficie le secteur du transport routier de marchandises ne débuterait donc pas avant les prochaines élections présidentielles.
Même si le report modal doit être encouragé et développé, en 2050, les camions pourraient encore assurer plus de 70 % des flux de marchandises. Aussi, la diminution des émissions du secteur passe nécessairement par une décarbonation ambitieuse des flottes de poids lourds.
Toutefois, l'étude d'impact de l'article 30 précise que « l'offre de véhicules lourds à motorisation alternative est actuellement réduite et présente des limites technologiques » . En effet , si les principaux constructeurs de véhicules lourds ont pris l'engagement de ne plus produire de véhicules dont les motorisations utilisent des énergies fossiles en 2040, l'horizon 2030 apparaît nettement plus incertain . Il semble à ce stade difficile de garantir qu'une offre massive à des coûts d'acquisitions économiquement supportables pour les transporteurs permettra de renouveler significativement les flottes de véhicules lourds d'ici 2030.
À ce titre, les transporteurs notent le décalage entre l'objectif de fin de vente des véhicules lourds qui utilisent majoritairement des énergies fossiles fixé en 2040 par l'article 25 du présent projet de loi avec l'horizon 2030 qui borne l'objectif prévu au présent article .
Pour les poids lourds, il existe plusieurs motorisations alternatives au gazole :
- les biocarburants (tels que le B100 et l'ED95) ;
- les carburants de synthèse ;
- le gaz naturel véhicule (GNV) ;
- les motorisations électrifiées (hybrides, hybrides rechargeables et électriques à batteries) ;
- l'hydrogène.
Les transporteurs soulignent les phénomènes de pertes de productivité associées aux motorisations électrique et hydrogène liées aux changements de plans de transports, à l'augmentation de la flotte de véhicules nécessaire à offre constante ou encore aux pertes de volume utile.
Maturité et coût des offres de motorisations alternatives au gazole
Source : réponse de la société Géodis au questionnaire du rapporteur
Trois groupes de travail , pilotés par le ministère de la transition écologique et solidaire, organisés dans le cadre d'une « Task Force » dite « camions propres » , ont pour objet de donner une vision prospective sur les capacités du secteur à négocier sa transition énergétique . Ces groupes de travail réunissent l'ensemble des acteurs qui ont à intervenir dans cette transition : les constructeurs , les transporteurs , ou encore les énergéticiens . Ces trois groupes de travail ont pour vocation de présenter une vision prospective à horizons 2025, 2030 et 2040 de l'offre constructeur, d'étudier l'adaptation des technologies alternatives aux différents usages et, enfin, de calculer le coût total de possession (TCO) des différents types de motorisations.
Ce sont les résultats de ces groupes de travail qui doivent permettre au Gouvernement de tracer la trajectoire devant conduire à la suppression progressive du tarif réduit de TICPE en 2030. Il est regrettable que les groupes de travail n'aient pas pu rendre leurs conclusions définitives avant le dépôt du présent projet de loi . Une convention est attendue à l'été 2021.
De premières conclusions provisoires ont été rendues le 20 mai 2021 . Actuellement, l'offre en carburant alternatif est concentrée sur le bioGNV, les biocarburants et les carburants de synthèse . Une offre électrique est disponible pour la distribution urbaine et la logistique courte distance , et, de façon parcellaire pour le transport régional. Le GNV et les motorisations hybrides apparaissent comme des énergies de transition. Les biocarburants et carburants de synthèse apparaissent comme des énergies de transition de long terme . L'électrique devrait se développer d'ici 2025, pour une maturité pleine en 2040 à l'exception des gros tonnages, en particulier du fait des incertitudes concernant les infrastructures de recharge et des limitations de la charge utile. La faisabilité technique de l'électrification des véhicules de plus de 40 tonnes demeure incertaine, même après 2040. L'offre en véhicules hydrogène devrait prendre son essor à compter de 2030, principalement sur les gros tonnages , sur le transport régional et sur le transport de longue distance.
Échéances de disponibilité
prévisionnelle des différents types
de motorisations
alternatives au gazole en fonction des tonnages
Source : Union des entreprises transport et logistique de France (TLF)
Entre 2022 et 2025, les véhicules lourds hybrides ou à batteries seraient encore deux à quatre fois plus onéreux que des véhicules diesel. L'hydrogène présente un TCO nettement plus élevé (deux à trois fois) que toutes les autres motorisations. Pour les plus gros tonnages, les motorisations électriques présentent également des TCO élevés . En revanche, le biogaz et les biocarburants présentent des TCO proches des motorisations diesel .
2. Le développement des infrastructures d'avitaillement constitue une autre limite à la transition énergétique du parc de véhicules lourds
Après l'adoption en 2014 d'une directive européenne visant à harmoniser l'effort européen en matière de déploiement des infrastructures pour carburants alternatifs, la France a développé des réseaux de ravitaillement en GNV (en gaz naturel liquéfié 19 ( * ) et en gaz naturel comprimé 20 ( * ) ). Aujourd'hui, ces infrastructures de ravitaillement sont en avance sur le parc de véhicules utilisant cette forme de motorisation.
La stratégie nationale pour le développement de l'hydrogène décarboné et le plan de relance se sont traduits par une amorce de déploiement de stations de distribution d'hydrogène . Elles sont 48 aujourd'hui avec des objectifs de déploiement de 100 en 2023 puis 1 000 en 2028.
Le maillage des réseaux d'infrastructures de recharges apparaît quant à lui encore insuffisant pour permettre un développement conséquent des poids lourds électriques . Une stratégie de développement volontariste doit être appliquée avec constance en veillant à anticiper ses implications potentielles sur les réseaux de transport et de distribution d'électricité. À ce titre, les besoins de maillage et la stratégie de développement de bornes de recharges ultra rapides doivent être évalués .
Il ressort des conclusions provisoires de la task force que l'un des principaux sujets de préoccupations des transporteurs tient au manque de visibilité sur la disponibilité future des infrastructures de recharge et d'avitaillement . L'enjeu de la recharge et de l'avitaillement en zone rurale est une question délicate. Malheureusement, l'analyse de l'offre des solutions de recharge et d'avitaillement, pourtant centrale, n'a pas été abordée de façon approfondie dans la première étape de la task force . Il ressort néanmoins des conclusions provisoires un besoin accru de soutien en faveur d'un développement accéléré des infrastructures publiques comme privées.
Position des groupements de transporteurs sur la
question du déploiement
des infrastructures de recharge et
d'avitaillement
Les échanges au sein de la task force permettent de constater qu' il n'existe actuellement aucune programmation d'un plan de développement du réseau de distribution électrique et hydrogène . Il est évident qu' aucun réseau d'avitaillement répondant à un usage massif de poids lourds électriques et hydrogènes n'est envisageable au mieux avant 2040 , voire bien au-delà. Cela constitue à l'évidence un important frein au développement de cette offre .
Or, la question du déploiement des réseaux de distribution n'a pas été traitée au sein de la task force . Aussi, aucun enseignement pratique sur ce point ne peut être déduit des travaux menés. Les constructeurs eux-mêmes conditionnent la production en masse de véhicules à énergie alternative à la mise en oeuvre effective d'un réseau de distribution adapté, qui reste une inconnue .
La fin de la vente des véhicules lourds à énergie principalement fossile dès 2040 apparait donc comme un objectif ambitieux et probablement incompatible avec la réalité de l'effectivité d'une production en masse d'une offre alternative de véhicules lourds et davantage encore d'un réseau de distribution adapté.
Source : réponse des organisations de transporteurs FNTR, OTRE et TLF au questionnaire du rapporteur
Au-delà du développement des bornes de recharge et d'avitaillement, il conviendra d'en garantir la maintenance . Il a été constaté qu'un manque de maintenance entraînant des dysfonctionnements a causé des freins au développement des véhicules électriques particuliers.
3. Un soutien renforcé à la transition énergétique du secteur est indispensable
Le Gouvernement a pris l'engagement de renforcer ses aides à la transition énergétique des véhicules lourds de transport de marchandises. Cet engagement d'un « soutien renforcé à la transition énergétique du secteur », qui figure au premier alinéa du présent article et dont les modalités devront être étudiées dans le rapport que le Gouvernement remettra au Parlement à l'issue de la présidence française du Conseil de l'Union, devra trouver des traductions concrètes et efficaces .
Aujourd'hui, en TCO, un véhicule lourd propre peut être 2 à 4 fois plus coûteux qu'un véhicule diesel répondant aux normes Euro 6. À l'achat, d'après les groupements de transporteurs 21 ( * ) , le prix d'un véhicule électrique peut être 3,5 à 4,5 fois plus important que celui d'un véhicule diesel. Le différentiel serait même 5 à 7 fois plus important pour un véhicule hydrogène.
Compte tenu de l'inefficacité manifeste du bonus de 50 000 euros créé dans le cadre du plan de relance pour soutenir l'acte d'achat de véhicules lourds électriques ou à hydrogène, le Gouvernement a annoncé qu'il allait prochainement revoir sa copie. Cette annonce est bienvenue et le rapporteur portera une grande attention aux adaptations nécessaires du dispositif.
Avant la maturité des technologies de rupture et pour accompagner le secteur routier sur la voie de sa transition, les biocarburants, les carburants de synthèse et le GNV méritent l'attention et le concours des pouvoirs publics .
Un rétrofit permet par exemple de convertir à moindre coût un camion diesel traditionnel au B100 . Toutefois, pour développer ce type de pratiques vertueuses, plusieurs mesures d'encouragement pourraient être prises par les pouvoirs publics telles que des aides renforcées au rétrofit, le passage du B100 en vignette Crit'Air 1 ou encore la structuration d'une filière B100.
Les aides qui pourraient être consenties en faveur de motorisations propres autres que l'électrique et l'hydrogène pourraient être moins coûteuses pour les finances publiques dans la mesure où les surcoûts à l'acquisition sont moins élevés pour ce type de propulsions : inférieure à 3 % pour le B100 ou 10 à 50 % pour le bioGNV.
Dans l'esprit du présent article et afin de renforcer le soutien à la transition énergétique du secteur, la commission des finances a adopté deux amendements portant articles additionnels :
- le premier pour créer un dispositif de prêt à taux zéro pour accompagner l'acquisition de poids lourds dotés de motorisations alternatives au gazole d'origine fossile (l'amendement COM-1934 ) ;
- le second pour prolonger le dispositif de suramortissement (l'amendement COM-1931 ).
S'il apparaît regrettable que l'ensemble des paramètres susceptibles d'objectiver la capacité du secteur à supporter un objectif de suppression du tarif réduit de TICPE dont il bénéficie à horizon 2030 ne soient pas encore disponibles, le rapporteur n'entend pas renoncer d'emblée à l'objectif programmatique affiché à l'article 30.
Cependant, pour que cette perspective ne risque pas de porter un trop grand préjudice au secteur, l'amendement COM-1930 , adopté par la commission des finances, conditionne cet objectif à la disponibilité effective et attestée d'une offre de véhicules lourds et d'un réseau d'infrastructures d'avitaillement suffisant pour permettre un renouvellement significatif du parc de poids lourds dans des conditions économiquement soutenables pour le secteur.
Décision de la commission : la commission des finances a proposé de modifier le présent article par son amendement COM-1930 .
ARTICLE
ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 31
Instauration d'un prêt à
taux zéro pour l'achat d'un véhicule lourd propre affecté
au transport de marchandises
. I. UN DISPOSITIF DE SURAMORTISSEMENT ET UN BONUS POUR L'ACQUISITION DE VÉHICULES À MOTORISATIONS ÉLECTRIQUE OU HYDROGÈNE SONT LES DEUX PRINCIPAUX DISPOSITIFS DÉDIÉS À ACCOMPAGNER LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE DU PARC DE VÉHICULES LOURDS
A. DEPUIS 2016, UN DISPOSITIF DE SURAMORTISSEMENT EST DÉDIÉ À L'ACQUISITION DE VÉHICULES LOURDS À MOTORISATIONS ALTERNATIVES AU GAZOLE
Un suramortissement, créé en 2016, prévu à l'article 39 decies A du code général des impôts, a pour vocation de soutenir l'acquisition de poids lourds peu polluants 22 ( * ) .
B. DANS LE CADRE DU PLAN DE RELANCE, UN BONUS À L'ACQUISITION DE VÉHICULES LOURDS À MOTORISATION ÉLECTRIQUE OU HYDROGÈNE A ÉTÉ CRÉÉ
Dans le cadre du plan de relance, le Gouvernement a décidé d'instaurer un bonus écologique destiné à l'acquisition ou la location de véhicules lourds neufs fonctionnant avec des motorisations électriques ou à hydrogène 23 ( * ) .
C. DES AIDES COMPLÉMENTAIRES À L'ACQUISITION DE VÉHICULES LOURDS PEU POLLUANTS ONT ÉTÉ CRÉÉES PAR CERTAINES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
Certaines collectivités se sont engagées dans l'accompagnement de la transition énergétique du transport routier de marchandises à travers la mise en oeuvre de dispositifs d'aides à l'achat de camions propres.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LA COMMISSION DES FINANCES : UN PRÊT À TAUX ZÉRO POUR L'ACHAT D'UN VÉHICULE LOURD PROPRE AFFECTÉ AU TRANSPORT DE MARCHANDISES
A. PRIMORDIALE MAIS COUTEUSE POUR UN SECTEUR FRAGILE ET STRATÉGIQUE, LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE DU TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES DOIT BÉNÉFICIER D'UN SOUTIEN RENFORCÉ
La transition énergétique du transport de marchandises doit constituer une priorité pour réduire les émissions de gaz à effets de serre (GES) du secteur. D'après le centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (CITEPA), en 2019, 24 % des émissions du transport routier proviennent des véhicules lourds .
Cette nécessaire transition doit néanmoins être conduite avec le souci de préserver l'intégrité économique d'un secteur très exposé à la concurrence intra-européenne et pesant pour environ 400 000 emplois en France.
Une « Task Force camions propres » réunit actuellement les différents acteurs de la transition énergétique du secteur, à savoir, les constructeurs, les transporteurs et les énergéticiens. Trois groupes de travail ont pour mission de tracer les perspectives de cette ambitieuse transition.
Les dispositifs de soutien qui existent aujourd'hui n'apparaissent pas suffisants pour combler le différentiel de coût d'achat d'un véhicule propre. D'après les transporteurs, à l'acquisition, un poids lourd électrique est 3,5 à 4,5 fois plus coûteux qu'un véhicule classique et 5 à 7 fois pour un poids lourds à motorisation hydrogène . En coût total de possession (TCO), un véhicule propre peut-être de 2 à 4 fois plus cher qu'un véhicule répondant aux normes Euro 6. En l'état actuel de maturité des technologies il apparaît que les motorisations électrique ou hydrogène provoquent des pertes de rentabilité significatives , notamment en raison des pertes de volume utile qu'elles génèrent. Les conclusions provisoires rendues le 20 mai 2021 par la task force mentionnée supra . anticipent qu'e ntre 2022 et 2025, les véhicules lourds hybrides ou à batteries seront encore deux à quatre fois plus chers que des véhicules diesel.
D'autres pays ou territoires proposent des aides nettement supérieures : 100 000 euros pour l'Allemagne, 150 000 euros pour l'État de Californie. Le bonus à l'acquisition d'un camion électrique ou hydrogène créé cette année par le Gouvernement dans le cadre du plan de relance est inopérant faute d'une offre véritablement effective et en raison de son montant très insuffisant pour couvrir le surcoût des véhicules électriques. Toujours selon les conclusions provisoires de la task force , les motorisations électriques pour les poids lourds affectés au transport de marchandises devraient réellement se développer d'ici 2025, pour une maturité pleine en 2040 à l'exception des gros tonnages. Quant à elle, l'offre de camions hydrogène ne devrait pas être mature avant 2030 et serait principalement dédiée aux gros tonnages , sur le transport régional et sur le transport de longue distance.
En outre, plusieurs articles du projet de loi prévoient de fixer de nouveaux jalons de transition ambitieux au transport de marchandises. Ainsi, l'article 25, prévoit, à horizon 2040, une fin de vente des véhicules lourds neufs utilisant majoritairement des énergies fossiles. L'article 30 prévoit un objectif de suppression, d'ici 2030, du remboursement partiel de TICPE sur le gazole dont bénéficient les transporteurs routiers de marchandises.
Le Gouvernement a, par ailleurs, pris l'engagement de fournir un soutien renforcé à la transition énergétique du transport routier de marchandises. Déposé à l'Assemblée nationale par le Gouvernement, un amendement à l'article 25 du projet de loi prévoit que les évolutions prévues à l'article 73 de la loi d'orientation des mobilités (LOM), y compris l'objectif de fin de vente des véhicules lourds neufs utilisant majoritairement des énergies fossiles, « s'accompagnent d'un soutien à l'acquisition de véhicules propres » . L'article 30 du projet de loi dispose par ailleurs que l'objectif de suppression du remboursement partiel de TICPE « s'accompagne d'un soutien renforcé à la transition énergétique du secteur du transport routier » . Le Gouvernement semble avoir pris acte de l'échec du bonus poids lourds dédié aux motorisations électrique et hydrogène et a annoncé avoir l'intention de revoir sa copie d'ici l'été .
B. LA CRÉATION D'UN PRÊT À TAUX ZÉRO DÉDIÉ À L'ACQUISITION DE VÉHICULES LOURDS À MOTORISATIONS ALTERNATIVES AU GAZOLE ET AFFECTÉS AU TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES DOIT PERMETTRE DE MIEUX ACCOMPAGNER LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE DU SECTEUR
Pour traduire concrètement la nécessité de soutenir avec davantage de volontarisme la transition énergétique du secteur, pour répondre aux faiblesses des mesures existantes et pour contribuer à amorcer le renouvellement des flottes de poids lourds, le présent article additionnel propose de créer un dispositif de prêt à taux zéro destiné à aider les transporteurs de marchandises dans l'acquisition de véhicules propres.
Ce prêt à taux zéro s'applique aux véhicules à motorisations alternatives au gazole, affectés au transport de marchandises et dont le poids total autorisé en charge est supérieur ou égal à 2,6 tonnes . Contrairement au bonus créé cette année par le Gouvernement, il ne se limite pas aux motorisations électrique et hydrogène trop peu matures . D'après les conclusions provisoires de la task force , le gaz naturel véhicule (GNV) et les motorisations hybrides apparaissent comme des énergies de transition essentielles à court et moyen terme. Les biocarburants et carburants de synthèse apparaissent quant à eux comme des énergies de transition de long terme.
C'est pour cette raison, et également par souci de cohérence et de bonne articulation avec les dispositifs existants, que le périmètre des véhicules concernés par le dispositif proposé reprend celui prévu à l'article 39 decies A du code général des impôts relatif au suramortissement . Ainsi, il sera applicable aux camions fonctionnant au gaz naturel et au biométhane carburant, au carburant ED95, au carburant B100 ou grâce à des motorisations bicarburant, électrique ou hydrogène.
Le dispositif sera institué à compter du 1 er janvier 2022 et pour une période de quatre ans , jusqu'au 31 décembre 2025. Au terme de ce délai, après une évaluation de l'efficacité du dispositif et dans la mesure où, à cette date, l'écart de coût à l'achat entre un véhicule lourd thermique et son équivalent en motorisation alternative demeurera significatif, le dispositif pourra être prolongé , notamment dans l'objectif de le faire correspondre avec la trajectoire envisagée de suppression du tarif réduit de TICPE sur le gazole routier d'ici 2030.
En contrepartie des prêts accordés, les établissements bancaires se verront accorder une réduction d'impôt.
Décision de la commission : la commission des finances a proposé d'adopter le présent article additionnel.
ARTICLE
ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 31
Prolongation du dispositif de
suramortissement en faveur de l'acquisition de véhicules lourds à
motorisations alternatives
. I. DEPUIS 2016, UN DISPOSITIF DE SURAMORTISSEMENT PERMET D'ACCOMPAGNER L'ACQUISITION DE POIDS LOURDS À MOTORISATIONS ALTERNATIVES AU GAZOLE
Créé en 2016, prévu à l'article 39 decies A du code général des impôts, un dispositif de suramortissement soutient l'acquisition de poids lourds à motorisations alternatives au gazole. Les véhicules lourds éligibles doivent utiliser du gaz naturel, du biométhane carburant, du carburant ED95, du carburant B100, de l'hydrogène ou une motorisation électrique.
Ce dispositif permet de déduire de son résultat imposable une somme égale à :
- 20 % pour les véhicules d'un poids total autorisé en charge (PTAC) compris entre 2,6 et 3,5 tonnes ;
- 60 % pour les véhicules d'un PTAC compris entre 3,5 et 16 tonnes ;
- 40 % pour les véhicules d'un PTAC supérieur à 16 tonnes.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LA COMMISSION DES FINANCES : UNE PROLONGATION DU DISPOSITIF DE SURAMORTISSEMENT JUSQU'EN 2030
La commission des finances et le Sénat sont attachés au suramortissement en faveur de l'acquisition de poids lourds à motorisations alternatives au gazole. La commission des finances a, de façon régulière, participé à consolider ce dispositif au cours de l'examen des textes financiers successifs.
Dernièrement, à l'occasion de l'examen de la loi de finances pour 2021, la commission des finances du Sénat avait proposé d'adopter l'article prolongeant le dispositif jusqu'au 31 décembre 2024 . À l'occasion de l'examen de cette même loi, la commission des finances avait proposé un amendement n° I-65, adopté par le Sénat, visant à relever les différents taux de déduction du suramortissement.
Comme précisé dans le commentaire de l'article additionnel proposant la création d'un prêt à taux zéro pour l'acquisition de poids lourds propres affectés au transport de marchandises, le dimensionnement des aides actuelles est insuffisant pour accompagner efficacement la transition énergétique du secteur.
Aussi, pour contribuer à renforcer le soutien au renouvellement des flottes de véhicules lourds et dans la mesure où le dispositif a prouvé son efficacité depuis sa création en 2016, il semble pertinent de le prolonger jusqu'en 2030, notamment pour le mettre en cohérence avec l'objectif de suppression du tarif réduit de TICPE sur le gazole routier fixé à l'article 30 du présent projet de loi.
Décision de la commission : la commission des finances a proposé d'adopter le présent article additionnel.
ARTICLE
32
Habilitation du gouvernement à légiférer par
ordonnance pour créer un dispositif expérimental facultatif de
contribution régionale assise sur le transport routier de
marchandises
I. I. DANS LE CADRE DE LA DIRECTIVE EUROVIGNETTE, LE GOUVERNEMENT VIENT DE PUBLIER UNE ORDONNANCE QUI DOIT PERMETTRE À LA COLLECTIVITÉ EUROPÉENNE D'ALSACE DE METTRE EN PLACE UNE CONTRIBUTION SIMILAIRE AU DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL PROPOSÉ À L'ARTICLE 32
A. LE DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE ENCADRE LES CONTRIBUTIONS APPLIQUÉES À LA CIRCULATION DES POIDS LOURDS
La taxation de la circulation des poids lourds sur les axes routiers est régie par la directive n° 1999/62/CE du 17 juin 1999 dite « eurovignette » . La directive définie deux types de contributions :
- les « péages » constituent un montant déterminé en fonction d'une distance parcourue (tarification au km parcouru) et qui comprend une redevance d'infrastructure ou une redevance pour coûts externes ;
- les « droits d'usage » (dits « vignette ») constituent un montant donnant droit à l'utilisation d'une infrastructure pendant une durée donnée.
La directive 24 ( * ) prohibe strictement les péages et droits d'usage qui introduiraient une discrimination « en raison de la nationalité du transporteur , de l'État membre ou du pays tiers d'établissement du transporteur ou d'immatriculation du véhicule ou de l'origine ou de la destination du transport » . Elle précise que les États membres sont libres d'appliquer des péages et/ou des droits d'usage « pour autant que la perception de péages et/ou de droits d'usage sur ces autres axes ne présente pas de caractère discriminatoire à l'égard du trafic international et n'entraîne pas de distorsion de concurrence entre les opérateurs » .
La directive « eurovignette » est actuellement en cours de révision .
La directive n° 2004/52/CE dite « télépéage » régit quant à elle les dispositifs électroniques servant notamment à la perception des contributions 25 ( * ) .
Plusieurs États européens ont mis en place sur leur réseau routier des dispositifs de type péage ou droit d'usage . Il en va ainsi par exemple de la LKW Maut , péage instauré en Allemagne et qui est à l'origine de reports de trafic constatés sur le réseau routier alsacien. La Belgique a également mis en place un péage de cette nature depuis 2016. Le Danemark, la Suède, les Pays-Bas et le Luxembourg ont quant à eux instauré, par un accord international, un dispositif commun de vignette.
En France, sur le réseau autoroutier concédé , les poids lourds contribuent au financement des infrastructures à travers la taxe d'aménagement du territoire .
B. L'ORDONNANCE N° 2021-659 DU 26 MAI 2021 INSTAURE, POUR LA COLLECTIVITÉ EUROPÉENNE D'ALSACE, UNE CONTRIBUTION SIMILAIRE À CELLE QUI EST PROPOSÉE AU PRÉSENT ARTICLE
En raison des effets de bord provoqués par l'instauration de la LKW Maut de l'autre côté de la frontière, l'Alsace réclame depuis longtemps de pouvoir appliquer une contribution poids lourds sur certains axes de son réseau routier non concédé.
Aussi, la loi n° 2019-816 relative aux compétences de la Collectivité européenne d'Alsace (CEA) a transféré à cette nouvelle collectivité l'ensemble du réseau routier national non concédé. Par ailleurs, son article 13 habilitait le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour instaurer « des contributions spécifiques versées par les usagers concernés afin de maîtriser le trafic routier de marchandises sur les axes relevant de la Collectivité européenne d'Alsace » .
En application de cette disposition, le 26 mai 2021 , le Gouvernement a publié l'ordonnance n° 2021-659 relative aux modalités d'instauration d'une taxe sur le transport routier de marchandises recourant à certaines voies du domaine public routier de la Collectivité européenne d'Alsace . Au dire des services du ministère de transports, cette ordonnance pourrait servir de modèle à celle que prévoit le présent article pour autoriser les régions volontaires à mettre en place une contribution expérimentale sur les transporteurs routiers.
Cette ordonnance créée une contribution kilométrique de type péage. Elle laisse de nombreuses marges de manoeuvre à la CEA pour déterminer certains des principaux paramètres de la contribution. Ainsi, la collectivité pourra déterminer dans une fourchette comprise entre 3,5 tonnes et 12 tonnes le poids total en charge à partir duquel les véhicules seront taxables. Les voies taxables seront également définies par la CEA à condition qu'elles répondent à un seuil de trafic moyen journalier ou qu'elles supportent un report de trafic significatif dû à l'application de la contribution sur une autre voie. Le réseau des voies taxables sera divisé en sections de tarifications, elles aussi déterminées par la CEA. L'assiette doit correspondre à la longueur de la section. Les taux kilométriques peuvent être modulés par la CEA en fonction de la classe d'émission Euro des véhicules ou « sur une base horaire, journalière ou sur toute autre période pertinente » dans le but de réduire la congestion , l'usure des infrastructures ou pour améliorer la sécurité routière. La CEA peut aussi accorder des réductions du montant de la taxe ainsi que diverses exonérations . Un équipement électronique embarqué dans les véhicules est nécessaire, notamment pour assurer la liquidation de la contribution.
C. LA CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT AVAIT PROPOSÉ LA CRÉATION D'UNE VIGNETTE NATIONALE
La proposition SD-B1.5 de la convention citoyenne suggérait la création d'une vignette nationale appliquée aux poids lourds en contrepartie d'une diminution de la taxe à l'essieu.
II. L'ARTICLE 32 HABILITE LE GOUVERNEMENT À LÉGIFÉRER PAR VOIE D'ORDONNANCE POUR PERMETTRE AUX RÉGIONS VOLONTAIRES, DANS LE CADRE D'UNE EXPÉRIMENTATION, D'INSTITUER DES CONTRIBUTIONS SPÉCIFIQUES ASSISES SUR LA CIRCULATION DES VÉHICULES DE TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES
L'article 32 dispose que, dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à légiférer par voie d'ordonnance pour permettre aux régions « d'instituer des contributions spécifiques assises sur la circulation des véhicules de transport routier de marchandises empruntant les voies du domaine public routier national mises à leur disposition dans le cadre d'une expérimentation » .
Cette expérimentation du transfert d'une partie du réseau routier national non concédé aux régions est prévue à l'article 7 du projet de loi relatif à la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dit « 4D ».
L'article précise les objectifs poursuivis par l'institution de ladite contribution en indiquant qu' elle a pour but de « permettre une meilleure prise en compte des coûts liés à l'utilisation des infrastructures routières et des externalités négatives » qui résultent du transport routier de marchandises.
L'article ajoute que l'ordonnance peut prévoir que les départements aient la possibilité d'étendre ces contributions régionales aux voies de leur propre domaine routier qui seraient « susceptibles de subir un report significatif de trafic » en raison des contributions qui auraient été instaurées par les régions.
III. LES NOMBREUSES INCERTITUDES QUI ENTOURENT LE DISPOSITIF ENVISAGÉ FONT CRAINDRE LE DÉVELOPPEMENT D'UNE SITUATION D'UNE GRANDE COMPLEXITÉ, SOURCE D'EFFETS DE BORDS MULTIPLES ET SUSCEPTIBLE DE NUIRE À L'ÉQUILIBRE ÉCONOMIQUE DU TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES FRANÇAIS
A. CETTE DISPOSITION LAISSE DE NOMBREUSES QUESTIONS EN SUSPENS QUI METTENT EN DOUTE SA PERTINENCE
1. Les régions sont divisées
Le Gouvernement défend que cette mesure est une réponse à une demande des régions. En réalité, il apparaît que les régions sont profondément divisées sur le sujet et peu d'entre elles se sont exprimées en faveur du dispositif. Et, parmi les régions qui seraient partantes pour s'engager dans l'expérimentation de transfert d'une partie du réseau routier national et pour mettre en place cette contribution spéciale, il n'existe pas d'unanimité sur la nature et les caractéristiques du dispositif souhaité. À titre d'exemple, la région Ile-de-France s'est prononcée en faveur de l'instauration d'une vignette mais l'ordonnance relative à la CEA crée une contribution kilométrique de type péage.
Il existe par ailleurs de fortes divergences entre les régions de transit , telle que l'Ile-de-France, qui voient plutôt d'un bon oeil ce type de dispositif et les régions périphériques , à l'exemple de la Bretagne, hostile au principe d'une telle contribution.
Les régions de transit souffrent des conséquences en termes de congestion ou d'usure de leurs voies routières de la circulation de véhicules lourds qui utilisent leur réseau en délestage.
À contrario, les régions périphériques, moins concernées par le transit de véhicules lourds, redoutent l'effet de la mesure sur leur économie.
2. L'expérimentation sur laquelle doit s'appuyer le dispositif n'est pas créée par le présent projet de loi
Le rapporteur note une certaine incohérence législative à proposer une habilitation permettant de créer un dispositif qui a vocation à s'inscrire dans le cadre d'une expérimentation dont la création est prévue par un autre projet de loi qui sera examiné après le présent texte.
3. La nature de la contribution est très floue à ce stade
L'habilitation prévue par l'article est très large et ne donne aucun détail sur la nature et les caractéristiques de la contribution dont il prévoit la création. Il est permis de supposer, comme l'a affirmé l'administration, qu'elle s'inspirera du dispositif prévu pour la CEA mais cette supposition restera à confirmer.
4. Les modalités de collecte et de contrôle sont incertaines
Les modalités de collecte et de contrôle de la contribution font également partie des inconnues . Un système électronique de type satellitaire a été évoqué par l'administration mais il ne semble pas que cette question ait donné lieu à une expertise approfondie. Le coût de gestion d'une telle contribution est un autre sujet de préoccupation qui devra être éclairci.
S'il indique que la disposition ne méconnait ni la norme constitutionnelle, ni les normes conventionnelles, dans son avis, le Conseil d'État a souligné les difficultés potentielles pouvant résulter des dispositions de l'article 32. L'ordonnance devra notamment préciser la répartition des recettes issues de cette contribution, notamment lorsque un département déciderait d'étendre le dispositif sur certaines portions de son réseau routier. Il est bien entendu indispensable que le département soit destinataire de la part des recettes de la contribution provenant de la circulation réalisée sur les voies dont il a la charge.
5. Les objectifs visés par la contribution sont à préciser
D'après le but mentionné à la fin du premier alinéa de l'article, la contribution devrait poursuivre deux objectifs . Elle aurait d'une part vocation à couvrir les coûts spécifiques à l'usage du réseau et d'autre part à internaliser certaines externalités négatives . Sur cette question-là aussi des précisions seront attendues .
L'ordonnance relative à la CEA prévoit notamment des majorations des taux kilométriques pour tenir compte des coûts sociaux engendrés par la pollution atmosphérique et sonore . S'il est vrai qu'une étude récente de la direction générale du Trésor 26 ( * ) conclut que les prélèvements sur les usagers de la route en général ne couvrent pas leurs externalités négatives, la multiplication des objectifs fixés à une contribution peut nuire à son efficacité.
6. Des effets indésirables sont à craindre
L'étude d'impact souligne l'un des travers qui pourrait résulter d'une telle contribution appliquée aux poids lourds de plus de 3,5 tonnes. Pour contourner le dispositif, une partie de l'activité de transport de marchandises pourrait être reportée sur les véhicules utilitaires légers (VUL) au risque de provoquer des effets contreproductifs, en termes environnementaux ou de congestion, et de neutraliser les objectifs poursuivis par la création de cette contribution.
Ce risque de report devrait être évalué de façon sérieuse .
B. DES CONTRIBUTIONS RÉGIONALES DE NATURES DIVERSES POURRAIENT CRÉER UN « MAQUIS FISCAL » INEXTRICABLE SOURCE D'UNE GRANDE COMPLEXITÉ POUR LES TRANSPORTEURS
Le souci d'adapter les réglementations aux spécificités et aux besoins des territoires est une intention louable. Néanmoins, en matière de fiscalité portant sur la circulation des véhicules de transport routier, une trop grande hétérogénéité des dispositifs applicables, ou non, d'une région à une autre pourrait se traduire par une situation d'une rare complexité .
Les transporteurs routiers s'inquiètent légitimement des coûts de gestion qui pourraient résulter du manque de lisibilité d' un dispositif qui pourrait être appliqué dans certains territoires et pas dans d'autres et qui, de surcroît, pourrait être très différent d'une région à une autre . Au sein même d'une région, des voies départementales pourraient être concernées et pas d'autres.
Des effets de bord et de report de trafic multiples sont à attendre. Les transporteurs chercheront à optimiser leurs plans de transports pour réduire leurs coûts. Les itinéraires pourraient ainsi s'en trouver rallongés au détriment, notamment, des objectifs de réduction des émissions de CO 2 des transports.
Si, comme le laisse entendre l'administration, l'ordonnance relative à la CEA préfigure le dispositif qui sera mis en place dans le cadre du présent article, elle laisse entrevoir la grande hétérogénéité fiscale qui pourrait résulter du dispositif. En effet, comme indiqué supra , la CEA dispose de très larges marges de manoeuvre pour déterminer les véhicules taxables, les taux kilométriques ainsi que leurs modulations et majorations, ou encore les réductions et exonérations du dispositif.
La question de l'interopérabilité des dispositifs de contrôle embarqués entre les régions volontaires, voire avec les pays voisins qui ont instauré de telles contributions, se pose également avec acuité. Si cette opérabilité n'était pas garantie, la complexité d'application de la mesure en serait encore sensiblement accrue.
Même si le principe apparaît nécessaire en cas de report de trafic, la complexité du dispositif sera renforcée par la possibilité, donnée aux départements, d'étendre la contribution sur certaines des voies de leur réseau routier. L'ordonnance devra préciser les modalités de cette extension afin d' assurer un minimum de lisibilité au dispositif. La question des reports de trafics provoqués sur les infrastructures routières d'un département limitrophe d'une région ayant mis en oeuvre la contribution devra aussi être prise en considération.
L'expérience a montré que pour ce genre de dispositif, la transparence dans l'affectation des recettes est un facteur essentiel d'acceptation sociale. Cette contribution régionale, ne pourra, bien entendu, pas être conditionnée à un fléchage décidé au niveau national.
Le rapporteur fait toute confiance aux régions qui seraient volontaires pour affecter les recettes de cette contribution au financement des infrastructures ou, par exemple, à la transition énergétique du transport routier. Certaines d'entre elles ont d'ailleurs déjà pris cet engagement.
C. LES CONSÉQUENCES SOCIO-ÉCONOMIQUES DE CETTE MESURE N'ONT PAS PU ÊTRE RIGOUREUSEMENT ÉVALUÉES
Fragile, composé majoritairement de petites et moyennes entreprises (PME) et disposant de marges faibles , le secteur du transport de marchandises français représente environ 600 000 emplois . Il est par ailleurs très exposé à la concurrence internationale . Cette contribution pourrait impacter la rentabilité du secteur . Cependant, faute d'avoir une idée précise du dispositif envisagé, l'étude d'impact ne propose aucune évaluation sérieuse des conséquences socio-économiques de la mesure. Elle renvoie ce travail à l'ordonnance : « L'analyse précise des conséquences attendues de la mesure sera effectuée dans la fiche d'impact exposant les dispositions de l'ordonnance » . Le rapporteur se montrera très attentif à cette étude d'impact .
La question de l'incidence de la contribution , et notamment de sa répartition entre les transporteurs et les donneurs d'ordre sera notamment essentielle. Dans la mesure où le secteur des transports est majoritairement composé de PME dont le pouvoir de négociation peut être restreint en face des donneurs d'ordre, l'ordonnance devrait imposer que cette contribution figure en pied de facture .
La présente disposition présente de nombreuses limites et incertitudes. Quand bien même elle pourrait répondre à des attentes légitimes de certaines régions, elle risque de se traduire par une extrême complexité qui pourrait provoquer des effets contreproductifs, y compris en termes environnementaux ou de reports de trafic, et porter atteinte à la rentabilité du secteur du transport routier.
Le rapporteur souligne qu'il est indispensable que l'ordonnance qui sera prise en application de la présente disposition éclaire l'ensemble des points d'incertitude soulevés par ce dispositif expérimental.
Décision de la commission : la commission des finances n'a pas proposé de modifications au présent article.
ARTICLE
35
Objectif, à horizon 2025, que le transport aérien
s'acquitte d'un prix du carbone suffisant en privilégiant un dispositif
européen
I. I. UNE SÉRIE DE DISPOSITIFS EUROPÉENS ET INTERNATIONAUX CONTRIBUENT DÉJÀ PARTIELLEMENT À CE QUE LE TRANSPORT AÉRIEN S'ACQUITTE D'UN PRIX DU CARBONE
A. AUX ÉCHELLES EUROPÉENNE ET INTERNATIONALE, LE SYSTÈME D'ÉCHANGE DE QUOTAS D'ÉMISSIONS EUROPÉEN ET LE DISPOSITIF CORSIA ONT POUR OBJET DE FAIRE EN SORTE QUE LE SECTEUR DU TRANSPORT AÉRIEN S'ACQUITTE D'UN PRIX DU CARBONE
1. Au niveau européen, pour les vols intérieurs à l'Espace économique européen (EEE), le secteur aérien participe au marché d'échange des quotas d'émissions (EU-ETS)
C'est en 2012 , en application de la directive n° 2008/101/CE du 19 novembre 2008 que le secteur aérien a été intégré au mécanisme EU-ETS , créé lui-même en 2005 en vertu de la directive n° 2003/87/CE du 13 octobre 2003. Si le droit européen prévoit en principe que ce dispositif concerne tous les « vols au départ ou à l'arrivée d'un aérodrome situé sur le territoire d'un État membre » , en pratique, en raison des contestations d'États étrangers, et en application de la décision dite « stop the clock », une dérogation suspend l'application du dispositif EU-ETS aux vols internationaux au départ ou à destination d'aéroports situés dans des États qui n'appartiennent pas à l'Espace économique européen (EEE).
Le système de l'EU-ETS repose sur des objectifs d'émissions établis au niveau européen puis distribués aux différents États membres responsables de leur attribution aux différents opérateurs de transport aérien.
Une partie significative des quotas d'émissions attribués au secteur aérien dans le cadre de l'EU-ETS sont gratuits. En 2019, 44 % des quotas ont été ainsi alloués gratuitement. Aussi, aujourd'hui, dans le cadre de l'EU-ETS, du fait des quotas gratuits, le secteur aérien européen s'acquitte globalement d'un prix du carbone qui ne représente qu'un peu plus de la moitié du prix fixé sur le marché d'échange des quotas d'émissions et pour les seuls vols intérieurs à l'EEE.
Dans le cadre du « green deal », la Commission européenne envisage de supprimer progressivement les quotas gratuits attribués au secteur aérien. Cette perspective est notamment défendue par la France . Son application permettrait, mécaniquement, de faire en sorte que globalement, le secteur aérien européen, pour les vols intérieurs à l'EEE, s'acquitte d'un prix du carbone qui correspondrait au prix du carbone constaté sur le marché du carbone de référence , à savoir, le marché d'échanges de quotas d'émissions européen EU-ETS.
2. Au niveau international, le dispositif CORSIA doit permettre aux compagnies aériennes de compenser les émissions de leurs vols internationaux
La crise sanitaire et ses effets sur le trafic aérien ont conduit à décaler l'entrée en vigueur du système CORSIA, initialement prévue en 2021. Adopté en 2016 dans le cadre de l'organisation de l'aviation civile internationale (OACI), conformément à son objectif de croissance neutre carbone ( carbon neutral growth ), le système CORSIA oblige les compagnies aériennes à compenser les émissions de leurs vols internationaux qui excèdent le niveau de 2019.
Le trafic aérien ne devrait pas retrouver son niveau d'avant-crise avant 2024. Le système CORSIA ne trouvera donc pas sa pertinence avant plusieurs années. Par ailleurs, à l'échelle internationale, le prix de la tonne de carbone sur le marché de la compensation s'établit actuellement à environ 5 euros. Aussi, le signal prix devrait être modeste.
3. En vertu de la convention internationale de Chicago, les vols internationaux bénéficient d'une exonération fiscale sur le kérosène
L'article 24 de la convention internationale sur l'aviation civile de Chicago (1944) prévoit l'exonération fiscale du kérosène pour les vols internationaux. Cette exonération est également prévue par le droit de l'Union européenne 27 ( * ) .
B. DES DISPOSITIFS NATIONAUX DE FISCALITÉ ENVIRONNEMENTALE S'APPLIQUENT AU SECTEUR DU TRANSPORT AÉRIEN
1. La taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA) et sa composante qualifiée « d'éco-contribution »
La taxe de solidarité sur les billets d'avion (TSBA) , prévue au VI de l'article 302 bis K du code général des impôts, est une taxe additionnelle à la taxe de l'aviation civile (TAC) mentionnée aux paragraphes I à V du même code. Elle a été instituée par l'article 22 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005.
La TSBA est due par les entreprises de transport aérien public. À l'instar de la TAC, elle est assise sur le nombre de passagers embarqués au départ de la France .
Son tarif varie en fonction de la destination finale du passager et des conditions économiques et commerciales accordées par le transporteur . Elle n'est pas perçue lorsque le passager est en correspondance.
L'article 72 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 a créé un dispositif qualifié « d'éco-contribution » destiné à faire en sorte que le secteur du transport aérien participe davantage aux efforts de lutte contre le réchauffement climatique. En pratique, ce dispositif s'est matérialisé par une hausse des tarifs de la TSBA qui n'a pas été créée dans un environnement de protection de l'environnement mais de financement de l'organisme international Unitaid
2. Le secteur aérien français se voit appliquer diverses taxes
Outre la TSBA et son éco-contribution, le transport aérien français doit s'acquitter de trois taxes spécifiques :
- la taxe d'aéroport ;
- la taxe de l'aviation civile (TAC) ;
- la taxe sur les nuisances sonores aériennes.
C. LA CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT AVAIT PROPOSÉ UNE « ÉCO CONTRIBUTION KILOMÉTRIQUE RENFORCÉE » QUI SE SERAIT TRADUITE PAR UNE AUGMENTATION TRÈS SENSIBLE DES TARIFS DE LA TSBA
La proposition SD-E1 de la convention citoyenne pour le climat suggérait d'augmenter très sensiblement la composante qualifiée « d'éco contribution » de la TSBA . Cette contribution aurait été multipliée par 20 pour atteindre un niveau de quatre milliards d'euros.
Une telle mesure, prise au niveau national, aurait eu pour conséquence d'affaiblir structurellement la compétitivité du secteur aérien français.
II. À L'ARTICLE 35, L'ÉTAT SE FIXE L'OBJECTIF, QU'À COMPTER DE 2025, LE TRANSPORT AÉRIEN S'ACQUITTE D'UN PRIX DU CARBONE SUFFISANT, DE PRÉFÉRENCE AU MOYEN D'UN DISPOSITIF EUROPÉEN
L'article 35 est une disposition à caractère programmatique . Le I. de l'article prévoit qu' afin de participer à la diminution des émissions de gaz à effet de serre, l'État se donne pour « objectif que le transport aérien s'acquitte d'un prix du carbone suffisant à partir de 2025 » .
Ce prix du carbone « suffisant » devra être « au moins équivalent au prix moyen constaté sur le marché du carbone pertinent » .
L'article précise, en outre, que cet objectif devra être atteint « en privilégiant la mise en place d'un dispositif européen » .
Le II. de l'article ajoute que le Gouvernement devra remettre au Parlement, dans un délai d'un an, un premier rapport portant sur « la mise en place du prix du carbone » mentionné dans l'objectif cité au premier alinéa.
Pour mettre en place ce dispositif de prix du carbone dans le secteur aérien, le rapport , dont le contenu a été enrichi par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, doit prendre en compte plusieurs paramètres :
- la compétitivité ;
- la préservation des emplois ;
- la capacité d'investissement dans la transition écologique du secteur aérien ;
- le désenclavement des territoires ;
- la continuité territoriale entre les collectivités d'outre-mer et le territoire métropolitain.
La mise en place d'un dispositif à l'échelle européenne est l'option privilégiée. Néanmoins, si elle n'était pas réalisable, le rapport doit étudier les dispositions nationales qui pourraient se substituer au mécanisme européen pour permettre d'atteindre l'objectif fixé par le présent article. Parmi les dispositions nationales qui pourraient être prises, le rapport doit envisager la perspective d'une augmentation du tarif de la taxe de solidarité sur les billets d'avions . L'article ajoute que le dispositif national étudié dans le rapport ne pourrait être mis en place qu' « à partir du moment où le trafic aérien de, vers et à l'intérieur du territoire français atteindrait, en nombre de passagers, le trafic de l'année 2019 ».
Enfin, le III. de l'article 35, introduit par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, prévoit que, dans un délai d'un an, le Gouvernement présente au Parlement un deuxième rapport portant « sur l'accompagnement du secteur du transport aérien dans sa stratégie de réduction de son empreinte carbone » . Les modalités d'accompagnement envisagées dans le rapport doivent notamment encourager « le développement d'une filière biocarburants » .
III. L'OBJECTIF PROPOSÉ À L'ARTICLE 35, QUI DOIT ÊTRE ENVISAGÉ DE FAÇON À NE PAS DÉGRADER LA COMPÉTITIVITÉ DU SECTEUR DU TRANSPORT AÉRIEN FRANÇAIS, POSE DES QUESTIONS DE DÉFINITION ET D'ARTICULATION ENTRE PLUSIEURS DISPOSITIFS NATIONAUX, EUROPÉENS ET INTERNATIONAUX QUI PARTAGENT LA MÊME PHILOSOPHIE
A. ALORS QU'IL EST DUREMENT FRAPPÉ PAR LA CRISE, LE SECTEUR DU TRANSPORT AÉRIEN, STRATÉGIQUE POUR NOTRE PAYS, A ENGAGÉ UNE TRANSITION ÉNERGÉTIQUE AMBITIEUSE QUI DOIT À TERME LE RÉVOLUTIONNER
1. Si l'objectif de réduction des émissions du transport aérien est louable, il doit s'envisager en ayant le souci de préserver la compétitivité de ce secteur stratégique pour la France
Depuis le début de l'année 2020 le secteur aérien est très durement impacté par la crise sanitaire et ses conséquences sur le trafic. Or, par-delà son caractère stratégique, l'aviation civile contribue au PIB français à hauteur de 4,3 % et représente environ 320 000 emplois directs. Le transport aérien représente 4 % des émissions de CO 2 du pays 28 ( * ) .
L'enjeu relatif à la réduction des émissions de gaz à effets de serre du secteur aérien est une question importante et il peut être en partie traité par l'instauration d'un signal prix efficace. Néanmoins, le dispositif qui sera proposé ne doit pas méconnaître les enjeux économiques, sociaux et territoriaux associés à ce secteur stratégique.
Il est impératif que le premier rapport, prévu au II. de l'article, mesure avec la plus grande précision possible les conséquences des différents mécanismes susceptibles d'être mobilisés . Cette étude d'impact détaillée devra évaluer de façon rigoureuse les incidences de chacun des dispositifs sur la demande, le trafic et les émissions de CO 2 mais aussi sur les emplois, les compétences, la compétitivité et la connectivité des territoires .
2. Le secteur aérien est engagé dans une transition écologique ambitieuse que l'État a tout intérêt à accompagner
Le secteur du transport aérien a engagé sa transition écologique . L'ensemble de l'écosystème du secteur a pris des engagements dans le cadre de la feuille de route « destination 2050 » qui propose une trajectoire pour atteindre la neutralité carbone du transport aérien européen en 2050 .
L'État a mis en oeuvre de premières mesures pour accompagner cet effort de transition salutaire. Un dispositif de suramortissement est destiné à accélérer le verdissement du parc d'engins de pistes aéroportuaires tandis que le plan de relance a dédié 1,5 milliards d'euros pour encourager le développement d'avions « verts ».
Le second rapport proposé au III. du présent article pourra utilement évaluer le besoin de mesures de soutien complémentaires en faveur de la transition écologique du secteur du transport aérien.
Il apparaît nécessaire de soutenir de façon volontariste le développement des carburants d'aviation durables , également appelés SAF (Sustainable aviation fuel). En effet, en attendant les innovations de rupture telles que l'avion à hydrogène, les SAF ont un potentiel indéniable pour contribuer de façon significative à réduire les émissions du transport aérien.
Toutefois, aujourd'hui, leur coût est prohibitif 29 ( * ) et la plupart des acteurs du secteur appellent à un engagement plus déterminé du Gouvernement français et de l'Union européenne pour accompagner la création d'une véritable filière des SAF en France. La constitution d'une telle filière implique d'y consacrer des fonds mais aussi, et surtout de procéder à une large concertation réunissant l'ensemble des acteurs du secteur, des compagnies aux aéroports en passant, bien sûr, par les énergéticiens.
La feuille de route publiée en 2020 par le Gouvernement, avec sa trajectoire de déploiement à court, moyen et long terme, constitue une première étape. Les suites de l'appel à manifestation d'intérêt lancé en 2020 pour soutenir le développement d'une filière de biocarburants feront l'objet de toute l'attention du rapporteur de même que la stratégie « produits biosourcés et carburants durables » inclue dans le PIA4 .
Le rapporteur note avec intérêt la réflexion conduite par le Gouvernement sur ce sujet qu'il porte aussi au niveau européen dans le cadre de l'initiative ReFuelEU-aviation . À cet égard, il est bienvenu que le second rapport , mentionné au III. de l'article ait vocation à éclairer la représentation nationale sur les moyens par lesquels le Gouvernement entend accompagner résolument « le développement d'une filière biocarburants » . L'extension de la taxe incitative à l'utilisation d'énergies renouvelables dans les transports (TIRUERT) 30 ( * ) à l'aérien à compter du 1 er janvier 2022 rend absolument nécessaire un développement accéléré d'une telle filière.
L'intérêt des carburants d'aviation
durables ou SAF (
Sustainable aviation fuel
)
dans la transition
écologique du secteur aérien
Il apparaît, qu'au-delà d'autre pistes comme le renouvellement des flottes, caractérisées par des gains incrémentaux, génération après génération, en termes de consommation de kérosène, ou des ruptures technologies à plus long terme, qu'à brève échéance, les recours à des carburants plus durables constituent le principal levier qui s'offre au secteur pour engager sa décarbonation.
Source : réponse de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) au questionnaire du rapporteur
B. L'OBJECTIF PROGRAMMATIQUE DU PRÉSENT ARTICLE MÉRITE D'ÊTRE EXPLICITÉ ET POSE LA QUESTION DE L'ARTICULATION DES DISPOSITIFS EXISTANTS OU EN DEVENIR QUI PARTAGENT LA MÊME VOCATION
Le rapport devra préciser sous quelle(s) forme(s) le secteur aérien pourrait s'acquitter d'un « prix du carbone » et quels mécanismes, taxes ou autres dispositifs pourraient servir à créer le signal prix attendu . Ce prix du carbone devrait-il être explicitement lié aux émissions de CO 2 ? Dans cette hypothèse, le marché d'échanges des droits d'émission EU-ETS, seul mécanisme de tarification explicite du carbone, pourrait être considéré comme l'outil le plus approprié. D'autres outils et éléments de fiscalité, peu ou pas corrélés aux émissions de CO 2 pourraient-ils être intégrés dans le calcul de ce prix du carbone ? Pour que le signal prix soit efficace et ait un véritable effet incitatif, il semble cohérent de privilégier la meilleure corrélation possible avec l'externalité négative ayant vocation à être internalisée dans les coûts du transport aérien, en l'occurrence, les émissions de CO 2 .
Un mécanisme incitatif corrélé aux émissions pousserait les compagnies aériennes à renouveler leurs flottes d'aéronefs ou à investir dans les carburants alternatifs. Par les comportements vertueux qu'il induirait, un tel mécanisme permettrait de poursuivre le but d'une réduction des émissions de CO 2 sans que celle-ci ne repose sur la décroissance du trafic . À l'inverse, une fiscalité décolérée des émissions et non incitative tendrait à réduire les émissions du secteur par la baisse du trafic au risque de mettre en péril la santé financière des compagnies.
Le rapport devra également préciser ce qui peut être considéré comme un prix du carbone « suffisant » s'agissant du transport aérien. Ce concept signifie qu'un prix du carbone optimal devra être déterminé. L'article précise que ce prix suffisant doit être « au moins équivalent au prix moyen constaté sur le marché du carbone pertinent » . Là encore, le rapport devra par exemple préciser si le prix du marché d'échange des quotas d'émissions européen EU-ETS pourra être considéré comme le prix du carbone suffisant auquel le secteur aérien devra s'acquitter.
Enfin, le rapport devra aussi apporter des précisions concernant l'articulation des divers dispositifs ayant vocation à donner un signal prix destiné à internaliser les émissions de CO 2 . L'articulation devra notamment être précisée en ce qui concerne l'EU-ETS, CORSIA ou encore, si la mesure est adoptée, la compensation obligatoire sur les vols intérieurs prévue à l'article 38 du présent projet de loi.
C. CET OBJECTIF DEVRA NÉCESSAIREMENT ÊTRE MIS EN oeUVRE À MINIMA À L'ÉCHELLE EUROPÉENNE, POUR NE PAS PROVOQUER DES DISTORSIONS DE CONCURRENCE AU DÉSAVANTAGE DU SECTEUR DU TRANSPORT AÉRIEN NATIONAL
1. Plusieurs rapports démontrent que le niveau de fiscalité qui pèse sur le secteur aérien français est déjà significatif
En France, le niveau de fiscalité qui pèse sur le secteur du transport aérien est significatif. En 2014, le rapport de notre ancien collègue Bruno Le Roux avait objectivé cette réalité. Elle a également été démontrée dans un rapport présenté devant la commission des finances par la Cour des comptes en 2016 31 ( * ) . En 2019, le conseil des prélèvements obligatoires l'a une nouvelle fois confirmée. Il signalait notamment que plusieurs études tendaient à démontrer « qu'à l'inverse de plusieurs autres pays européens, les prélèvements spécifiques sur le secteur couvrent déjà quasi-intégralement l'ensemble des externalités négatives du transport aérien en France ».
Réalisé par Air-France en 2019, le graphique ci-dessous illustre le fait que les prélèvements obligatoires représentent 55 % du prix d'un billet d'avion Paris-Nice.
Source : Air France
Certaines des taxes acquittées par le secteur aérien français sont considérées par le commissariat général au développement durable (CGDD) 32 ( * ) comme étant des taxes environnementales au sens de la nomenclature d'Eurostat. Il en va ainsi de la TAC et de la TSBA.
2. L'hypothèse d'une mesure nationale doit être écartée
En raison du caractère très concurrentiel du secteur, les compagnies ne pourraient probablement pas répercuter sur le prix des billets une augmentation de la fiscalité décidée au niveau national . Aussi, une mesure limitée au territoire français et qui se traduirait par un accroissement du niveau de la fiscalité, telle que la hausse de TSBA suggérée au présent article, se traduirait nécessairement par une perte de compétitivité dommageable du secteur du transport aérien national.
Par ailleurs, le fonctionnement de la TSBA ne correspond pas aux caractéristiques d'une taxe environnementale qui aurait vocation à donner un tarif au CO 2 émis par le transport aérien. Ses caractéristiques correspondent bien davantage à celles d'une taxe de rendement budgétaire.
Il apparaît primordial, comme le suggère l'article 35, que le système qui sera mis en place soit un dispositif européen.
À ce titre, l'étude d'impact de l'article 35 suggère deux pistes :
- une augmentation harmonisée de la fiscalité sur le kérosène sur les vols intérieurs ;
- et/ou la suppression des quotas gratuits attribués dans le cadre du marché EU-ETS.
Toute séduisante qu'elle soit, l'hypothèse d'une augmentation harmonisée, à l'échelle européenne, de la fiscalité sur le kérosène pose plusieurs difficultés , notamment car, en raison de la forte concurrence sur les trajets intercontinentaux en correspondance, elle introduirait des distorsions entre compagnies européennes et extra-communautaires au détriment des premières. Par ailleurs, ces effets distorsifs pourraient se trouver amplifiés par la pratique du « suremport de carburant » qui permettrait aux compagnies aériennes extra-communautaires de contourner partiellement le dispositif.
Un dispositif EU-ETS réformé semble apparaître, à ce stade, comme la piste la plus prometteuse . Le rapporteur a bien noté qu'une révision du marché EU-ETS devrait être engagée à l'été 2021 afin notamment :
- de consolider l'articulation entre le dispositif européen et le mécanisme mondial de compensation des émissions CORSIA ;
- d'acter l'accélération de la réduction des quotas d'émission alloués gratuitement aux opérateurs.
La France défend une position tendant à une réduction et une extinction rapide des quotas gratuits attribués dans le cadre du marché EU-ETS. Comme indiqué supra , une réforme de ce type permettrait, mécaniquement, d'atteindre l'objectif visé au présent article. Toutefois, si son caractère européen est salutaire, une mesure de cette nature ne sera pas sans conséquences sur la rentabilité des compagnies .
Une piste qui pourrait également être creusée tient à une affectation des recettes complémentaires qui seraient issues de la suppression des quotas gratuits à la transition écologique du transport aérien européen.
Le rapporteur souscrit pleinement à l'ambition de transition écologique du secteur aérien. La réduction de ses émissions doit demeurer une priorité . La création d'un signal prix efficace peut faire partie des solutions à envisager à condition qu'il ne génère pas de distorsions de concurrence défavorables à l'économie française ou au détriment du transport aérien européen vis-à-vis des compagnies extra-communautaires. Aussi, le dispositif envisagé devra nécessairement être déployé, à minima à l'échelle européenne . Par ailleurs, le meilleur moyen de parvenir à réduire les émissions du secteur pour parvenir, à terme, à la neutralité carbone, reste le soutien aux innovations que ce soit en direction des technologies de ruptures telles que l'avion à hydrogène, ou, à plus court terme , le déploiement et l'incorporation massive de carburants d'aviation durables.
Décision de la commission : la commission des finances n'a pas proposé de modifications au présent article.
ARTICLE
60 bis (nouveau)
Rapports sur les conditions de mise en oeuvre
du
chèque alimentation durable
I. I. LE « CHÈQUE ALIMENTATION DURABLE », UNE PROPOSITION DE LA CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT VISANT À FACILITER L'ACCÈS À UNE ALIMENTATION SAINE, DURABLE ET DE QUALITÉ
A. LA CRISE SANITAIRE A ACCENTUÉ LES DIFFICULTÉS DE NOMBREUX MÉNAGES FRANÇAIS À ACCÉDER À UNE ALIMENTATION SAINE ET DE QUALITÉ
1. L'aide alimentaire met à disposition des plus démunis des denrées distribuées par des réseaux associatifs nationaux ou locaux
Comme l'indiquent nos collègues Arnaud Bazin et Éric Bocquet dans un rapport d'information de 2018 fait au nom de la commission des finances 33 ( * ) , l'aide alimentaire est un dispositif vital qui a bénéficié à 5,5 millions de personnes en 2017 , représentant une masse financière estimée à près d'1,5 milliard d'euros, dont un tiers de financements publics (aides européennes, dépenses budgétaires de l'État et des collectivités territoriales, dépenses fiscales), un tiers de financements privés (dons en nature et numéraires des particuliers et entreprises), et un tiers correspondant à la valorisation du bénévolat au sein des associations intervenant dans le domaine de l'aide alimentaire.
Or, les conséquences sociales de la crise se font ressentir sur le secteur de l'aide alimentaire, avec un public plus large, et une organisation qu'il a fallu adapter aux exigences sanitaires. Cette situation a justifié en 2020 l'adoption de deux plans d'urgence , représentant respectivement 39 millions d'euros et 55 millions d'euros, financés par la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.
La mission « Plan de relance » finance par ailleurs un fonds d'aide aux associations de lutte contre la pauvreté, doté de 100 millions d'euros en AE et 49,5 millions d'euros en CP . Ce fonds doit par exemple permettre de soutenir des projets de modernisation des dispositifs d'accès aux biens essentiels afin qu'ils soient mieux adaptés aux besoins des personnes.
2. Des difficultés d'accès à une alimentation saine et équilibrée exacerbées par la crise de la Covid-19
La crise de la Covid-19 a mis en exergue les difficultés de nombreux ménages français à s'alimenter sur une base équilibrée, qu'il s'agisse du public étudiant ou des familles ayant eu à supporter une charge financière plus importante pour le déjeuner des enfants, en particulier lors des confinements qui se sont succédés.
Ainsi, comme l'a rappelé la direction générale de l'alimentation du ministère de l'agriculture dans sa réponse au questionnaire du rapporteur, d'après l'INSEE, le budget alimentation moyen des 10 % de ménages aux niveaux de vie les plus faibles est de l'ordre de 200 à 250 euros par mois en 2017. D'après la DREES, les étudiants dépensent quant à eux en moyenne 250 euros par mois pour leur alimentation.
B. LE CHÈQUE ALIMENTAIRE, UNE PROPOSITION DE LA CONVENTION CITOYENNE POUR LE CLIMAT
L'une des ambitions du groupe « se nourrir » de la convention citoyenne pour le climat vise à ce que chacun puisse « accéder à une alimentation saine, durable et de qualité, grâce à une agriculture, une pêche, une industrie agroalimentaire, respectueuses du climat, des écosystèmes et de la biodiversité ».
Pour ce faire, l'une des propositions de la convention citoyenne (proposition SN6.1.5) consiste à mettre en place des chèques alimentaires pour les plus démunis, à utiliser dans les associations pour le maintien d'une agriculture paysanne (AMAP) ou pour des produits bios.
Le rapport de la convention précise le public et les types de produits qu'elle souhaiterait voir éligibles au chèque : celui-ci serait ainsi réservé aux ménages les plus modestes, et pourrait être utilisé uniquement pour des produits durables , qu'ils soient issus de l'agroécologie ou des circuits courts.
Cette proposition recoupe une recommandation assez proche de la convention citoyenne (la proposition SN5.2.3), visant à « concevoir une nouvelle solidarité nationale alimentaire pour permettre aux ménages modestes d'avoir accès à une alimentation durable ». Pour cela, la convention recommande « la création de chèques alimentaires qui pourront être utilisés pour acquérir des produits durables (issus de l'agroécologie, des circuits courts) ».
Il est à noter qu'il n'existe pas de définition légale ou réglementaire de l'alimentation durable.
La définition de « l'alimentation durable »
L'ADEME définit l'alimentation durable comme « l'ensemble des pratiques alimentaires qui visent à nourrir les êtres humains en qualité et en quantité suffisante, aujourd'hui et demain, dans le respect de l'environnement, en étant accessible économiquement et rémunératrice sur l'ensemble de la chaîne alimentaire ».
De même, le Groupe d'experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition (HLPE) du Comité de la sécurité alimentaire mondiale définit un système alimentaire durable comme étant « un système alimentaire qui garantit à chacun la sécurité alimentaire et la nutrition sans compromettre les bases économiques, sociales et environnementales nécessaires à la sécurité alimentaire et à la nutrition des générations futures ».
Source : réponse de la DGAL au questionnaire du rapporteur
Ainsi, la convention citoyenne évoque plusieurs types de publics éligibles, des plus démunis aux ménages modestes. Si dans les deux propositions, les produits éligibles envisagés sont les « produits durables », la première cible l'utilisation dans les AMAP, ce qui n'est pas le cas de la seconde.
Enfin, le Président de la République s'est engagé auprès des conventionnels en décembre 2020 à la mise en oeuvre d'un chèque alimentaire.
II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE PRÉVOIT LA REMISE DE DEUX RAPPORTS AU PARLEMENT SUR LE « CHÈQUE ALIMENTATION DURABLE »
L'article 60 bis du projet de loi résulte d'un amendement adopté par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, à l'initiative de notre collègue député Mounir Mahjoubi, adopté avec un avis favorable du Gouvernement.
Il prévoit la remise au Parlement par le Gouvernement de deux rapports :
- le premier est un rapport intermédiaire, qui serait remis dans un délai de deux mois à compter de la promulgation de la présente loi. Il porterait sur les modalités et les délais d'instauration d'un « chèque alimentation durable » ainsi que sur les actions mises en place en la matière ;
- le second serait remis dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, et évoquerait les conditions de la mise en oeuvre du « chèque alimentation durable », notamment les personnes bénéficiaires, les produits éligibles, la valeur faciale, la durée et le financement de ce dispositif .
Compte tenu du calendrier d'examen du projet de loi par le Parlement, le rapport final pourrait ainsi être remis au Parlement en cours d'examen du projet de loi de finances pour 2022, voire a posteriori .
III. UN DISPOSITIF AUX CONTOURS INDÉFINIS ET DONT LES ENJEUX BUDGÉTAIRES RESTENT INCONNUS À CE STADE
A. LE CHÈQUE ALIMENTAIRE : UN OUTIL AU SERVICE DE MULTIPLES OBJECTIFS
Comme l'indique la direction générale de l'alimentation (DGAL) du ministère de l'agriculture et de l'alimentation dans sa réponse au questionnaire du rapporteur, le Gouvernement entend faire de ce chèque « un moyen de structurer les filières sur les territoires, d'améliorer l'impact de l'agriculture sur l'environnement et de réduire les inégalités sociales et nutritionnelles ».
Tel qu'il est présenté par le Gouvernement, ce dispositif poursuit plusieurs objectifs. Le premier consiste à structurer les filières agricoles , au niveau local ; cet objectif va de pair avec celui visant à accompagner la montée en gamme de l'agriculture française, afin de limiter ses effets sur l'environnement. Enfin, le chèque alimentaire vise un objectif de justice sociale : il entend réduire les inégalités d'accès à une alimentation saine et durable en permettant aux plus modestes d'acquérir des produits de qualité, issus par exemple de l'agriculture biologique.
L'objectif de réduction des inégalités nutritionnelles est louable : la précarité alimentaire a en effet souvent été analysée sous un angle quantitatif, sans que l'accent soit porté sur la qualité nutritionnelle des produits proposés.
Le rapporteur émet cependant d'importantes réserves sur la capacité d'un tel dispositif à structurer les filières agricoles au niveau local. En effet, comme l'a confirmé le cabinet du ministre de l'agriculture et de l'alimentation, afin de respecter les règles de la concurrence européenne, il ne pourra être donné d'avantages à certains opérateurs : le chèque ne pourra donc pas être réservé à certains types de commerces par exemple, ni aux produits spécifiquement d'origine française. Le dispositif entend ainsi offrir un soutien à la demande, sans toutefois qu'elle profite à l'offre française. Si l'objectif est bien de favoriser les circuits courts en apporter un soutien à la demande de produits frais ou bios, il apparaît difficile dans les faits de cibler la production agricole française.
B. LES CONTOURS DU DISPOSITIF RESTENT À CE STADE TRÈS FLOUS...
Le présent article prévoit la remise de deux rapports au Parlement, l'un deux mois après la promulgation de la loi, l'autre six mois après cette dernière. Le premier doit présenter au Parlement les principes du dispositif, et le second proposer une « feuille de route opérationnelle », comme l'indique la DGAL.
À ce stade, les contours du dispositif restent très flous, et si le Gouvernement prétend vouloir mettre en place ce dispositif dans les meilleurs délais, il n'est pas certain que sa traduction opérationnelle puisse être proposée dès le prochain projet de loi de finances, d'autant que le second rapport devrait être remis à la fin de l'année, soit après (ou pendant !) l'examen du budget pour 2022 par le Parlement. Le rapporteur n'a pas obtenu d'éléments précis s'agissant du calendrier de mise en oeuvre de ce chèque, les arbitrages tant budgétaires que de mise en oeuvre de cette réforme n'ayant pas été rendus. Toutefois, interrogée par le rapporteur, la direction générale de l'alimentation (DGAL) du ministère de l'agriculture et de l'alimentation précise que le chèque alimentaire n'a pas vocation à se substituer à l'aide alimentaire existante, en particulier celle des banques alimentaires .
Plusieurs possibilités restent envisagées à ce jour, s'agissant tant des bénéficiaires du chèque, selon le niveau de revenus et la composition des foyers, que de ses modalités de distribution et des produits éligibles.
Les jeunes de 18 à 25 ans, largement impactés par la crise actuelle, pourraient être le public cible du dispositif. Ce ciblage permettrait de les soutenir dans leurs achats de première nécessité et d'instaurer de bonnes habitudes alimentaires. Parmi cette catégorie de population, un ciblage plus fin n'est pas exclu (étudiants boursiers, non étudiants, voire bénéficiaires des aides au logement, etc.).
S'agissant des produits éligibles, une liste de produits entrant dans le cadre de l'alimentation durable serait définie , « en privilégiant les produits frais, de saison, locaux, sous signe de qualité ou comportant un label écologique (agriculture biologique, haute valeur environnementale) ». Le rapporteur a interrogé le ministère de l'agriculture sur la capacité des agriculteurs français de toute taille à répondre à cette demande soutenue par la puissance publique ; les bénéficiaires s'approvisionneraient en réalité par le biais de distributeurs référencés, répondant à un cahier des charges établi par l'État.
S'agissant des modalités de distribution , elles ne sont pas clairement définies à ce stade et plusieurs scenarii restent à l'étude. Afin de cibler un public jeune, une mise en oeuvre par le biais d'une plateforme numérique , est évoquée par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, sur laquelle le bénéficiaire constituerait des paniers, qu'il choisirait de faire livrer à domicile ou en point de collecte. D'autres modalités de distribution ont été évoquées par le ministère de l'économie et des finances (par exemple, par le biais des centres communaux d'action sociale). En tout état de cause, ces éléments seront précisés dans le cadre des rapports prévus par le présent article.
C. EN L'ABSENCE D'ARBITRAGE BUDGÉTAIRE, IL EST DIFFICILE DE SE PRONONCER SUR L'OPPORTUNITÉ DU DISPOSITIF DONT LE COÛT POUR L'ÉTAT POURRAIT VARIER DE PLUSIEURS MILLIONS À PLUSIEURS MILLIARDS D'EUROS
Si le calendrier de mise en oeuvre du dispositif reste flou, les évaluations du coût du dispositif le sont encore davantage . Les arbitrages financiers sur le chèque n'ont pas encore été rendus, pas plus que ceux portant sur les conditions de déploiement du dispositif.
Le coût du dispositif dépendra en réalité du public cible, des produits éligibles ainsi que du montant et de la fréquence de versement du chèque : la valeur du chèque pourrait être comprise entre 30 et 50 euros mensuels par bénéficiaire ; le public cible apparaît lui aussi très variable selon les hypothèses retenues :
- par exemple, si tous les adultes de 18 à 25 ans bénéficiant des APL étaient retenus, 1 million de personnes seraient éligibles ;
- si seuls les étudiants boursiers en difficulté sont retenus, le public cible s'élève à 380 000 personnes.
Ainsi, selon les hypothèses, le coût du dispositif varie entre quelques centaines de millions d'euros à 1 ou 2 milliards d'euros annuels .
Il paraît difficilement envisageable de faire porter le coût de ce dispositif, dont il n'est pas précisé à ce stade s'il serait pérenne ou temporaire, au seul ministère de l'agriculture et de l'alimentation. Le portage financier de ce dispositif n'a, lui non plus, pas fait l'objet d'arbitrage à ce stade.
Compte tenu de ces éléments, le rapporteur ne souhaite pas s'opposer aux rapports proposés par le présent article, qui devraient garantir l'information du Parlement sur les différentes hypothèses envisagées pour la mise en place du dispositif, mais restera attentif à son éventuelle traduction budgétaire dans le cadre de l'examen des prochains projets de lois de finances.
Décision de la commission : la commission des finances n'a pas proposé de modifications au présent article.
ARTICLES 62 et 63
Redevance sur les engrais minéraux pour
atteindre l'objectif de réduction de 13 % des émissions
d'ammoniac en 2030 par rapport à 2005
et l'objectif de
réduction de 15 % des émissions de protoxyde d'azote en 2030 par
rapport à 2015
I. I. COMPTE TENU DE LEUR IMPACT SUR LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ET LA QUALITÉ DE L'AIR, DES OBJECTIFS DE RÉDUCTION D'ÉMISSIONS DE PROTOXYDE D'AZOTE ET D'AMMONIAC SONT FIXÉS AU NIVEAU EUROPÉEN ET AU NIVEAU NATIONAL
A. LES ÉMISSIONS D'AZOTE SOUS FORME MINÉRALE DANS L'ENVIRONNEMENT ONT UN IMPACT SUR LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ET SUR LA QUALITÉ DE L'AIR
Dans la mesure où il est un élément nutritif indispensable à la croissance des plantes, l'azote est un élément essentiel pour l'agriculture. L'azote peut être présent dans le sol sous forme organique, ce qui représente sa forme majoritaire (détritus végétaux ou animaux, micro-organismes, etc.) ou sous forme minérale (nitrate NO3-, ammonium NH4+, ammoniac NH 3 , urée).
D'après les données fournies par la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, en 2017, la France a utilisé 2,2 millions de tonnes d'azote minéral, soit l'équivalent de 77 kg d'azote par hectare (contre 83 kg d'azote par hectare en 2008). Compte-tenu de l'importance de ses surfaces agricoles, la France est le premier consommateur d'azote minéral de l'Union européenne en valeur absolue ; rapporté à la surface agricole, la France est en dixième position au sein de l'Union européenne.
Si les matières fertilisantes sont ainsi des intrants indispensables à l'agriculture, les émissions d'azote, qui les accompagnent, sous forme minérale dans l'environnement comportent de nombreux effets . La transformation de l'azote dans l'air agit ainsi sur le réchauffement global de l'atmosphère , en émettant du protoxyde d'azote (N20), un puissant gaz à effet de serre 34 ( * ) , mais a également un impact important sur la qualité de l'air , générant des oxydes d'azote (NOX) et de l'ammoniac (NH 3 ), qui sont des polluants atmosphériques.
En effet, comme l'a indiqué ATMO France au rapporteur , les périodes d'épandage d'engrais minéraux et organiques sont des périodes hautes d'émissions de NH 3 . Lors de périodes de montées de température et de conditions d'humidité favorables, notamment au printemps, le NH 3 se combine avec les NOx stagnant dans les villes et issus du transport routier, générant des particules fines contribuant à l'aggravation du risque de pics de pollution - il est à noter que l'utilisation des matières fertilisantes a également un impact sur l'eau 35 ( * ) et sur la biodiversité.
Ainsi, en premier lieu, d'après le CITEPA 36 ( * ) , 94 % des émissions d'ammoniac en France sont d'origine agricole 37 ( * ) . D'après ATMO France, la France est le deuxième pays le plus émetteur d'ammoniac (17 % du total de l'Union européenne), après la Turquie.
Émissions d'ammoniac en France liées à l'agriculture en 2019
(en kilotonnes)
Source : commission des finances d'après les données d'ATMO France
Les pratiques de fertilisation représentent ainsi 46 % des émissions d'ammoniac de l'agriculture , soit 20 % liés à l'épandage de matières organiques et 26 % à la fertilisation minérale . Toutefois, il importe de noter que toutes les matières minérales ne sont pas équivalentes en matière d'émission d'ammoniac ; par exemple, l'urée et les solutions azotées sont les matières minérales les plus émettrices. En outre, s'agissant des matières organiques, si le potentiel de volatilisation augmente avec la quantité d'azote présent sous forme ammoniacale, la volatilisation dépend aussi de plusieurs paramètres (mode d'épandage, période d'apport, climat, type de sols, etc.).
En deuxième lieu, toujours d'après le CITEPA, le protoxyde d'azote représente 10 % des émissions de gaz à effet de serre de notre pays. 88 % des émissions de protoxyde d'azote sont d'origine agricole. En outre, la fertilisation azotée est à l'origine de 37 % des émissions de l'agriculture. Les émissions sont liées aux phénomènes microbiens dans les sols cultivés, en lien avec l'utilisation d'engrais azotés minéraux et organiques. Ainsi, ces émissions ne dépendent pas du type d'engrais utilisé, mais de l'utilisation d'engrais. Toutefois, d'après le CITEPA, les émissions de protoxyde d'azote du secteur agricole ont diminué de 9,7 % entre 1990 et 2019.
B. AFIN DE LIMITER CES EFFETS NÉFASTES SUR L'ENVIRONNEMENT, DES OBJECTIFS DE RÉDUCTION D'ÉMISSIONS DE PROTOXYDE D'AZOTE ET D'AMMONIAC, AU NIVEAU EUROPÉEN ET AU NIVEAU NATIONAL
1. Des objectifs de réduction d'émission sont fixés au niveau national et européen
S'agissant de l'ammoniac , des objectifs sont fixés au niveau européen et repris au niveau national. Ainsi, la directive 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques (dite directive « NEC » - National Emission Ceilings ) fixe des objectifs de réduction d'émissions pour 2020 et pour 2030 par rapport à 2005 : les objectifs sont, pour 2020, une réduction de 4 % à atteindre chaque année par rapport à 2005 et pour 2030, une réduction de 13 % à atteindre chaque année. Actuellement, les objectifs de réduction d'émissions sont donc fixés par périodes pluriannuelles.
Le plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (PREPA) 38 ( * ) pour 2017-2021 reprend ces objectifs européens au niveau national. La France s'est également fixé un objectif intermédiaire de réduction des émissions de 8 % à l'horizon 2025. Dans la continuité de ce plan, l'ADEME a publié un guide de bonnes pratiques agricoles pour l'amélioration de la qualité de l'air diffusé auprès des professionnels agricoles qui recense l'ensemble des pratiques permettant de réduire les émissions d'ammoniac en particulier, au niveau du bâtiment d'élevage, du stockage et de l'épandage.
S'agissant du protoxyde d'azote , le droit européen ne fixe pas à ce jour d'objectif de réduction des émissions. L'Union européenne dispose néanmoins d'une législation visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 40 % d'ici à 2030, sans qu'un gaz à effet de serre ne soit visé en particulier. Cet objectif devrait d'ailleurs être renforcé, dans le cadre de la loi climatique européenne, en vue de porter porte l'objectif de réduction des émissions nettes à 55 % en 2030.
Au niveau national, la France s'est fixée, dans le cadre de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat, l'objectif d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050. La Stratégie nationale Bas carbone (SNBC) décline les objectifs de réduction de gaz à effet de serre par secteur d'activité. Le décret n° 2020-457 du 21 avril 2020 relatif aux budgets carbone nationaux et à la stratégie nationale bas-carbone définit par secteur les « budgets carbone » qui constituent les plafonds d'émissions de gaz à effet de serre de la France pour plusieurs périodes, 2019-2023, 2024-28 et 2029-33.
Pour le secteur agricole, l'atteinte de la neutralité carbone à l'horizon 2050 implique de diviser les émissions du secteur par 2 par rapport à 1990. Pour ce secteur, le quatrième budget carbone 2028-2033 est de 72 Mt CO 2 eq dont 31 Mt CO 2 eq pour le protoxyde d'azote, ce qui impose une diminution des émissions de protoxyde d'azote de 15 % en 2030 par rapport à 2015.
2. ... à horizon 2030, ces objectifs seraient difficilement atteignables sans mesures supplémentaires
Alors que la tendance historique observée des émissions d'ammoniac ne semblait pas permettre de remplir les objectifs de 2020, ceux-ci ont été atteints, notamment, comme l'indique la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) en réponse au questionnaire du rapporteur spécial, « suite à une baisse soudaine du nombre de bovins en 2019 et 2020 ». Toutefois, la DGEC indique également que « la cible 2030 est quant à elle non atteignable sans politique et mesures supplémentaires ». L'étude d'impact des articles 62 et 63 précise que « limiter l'utilisation et la progression des formes d'engrais les plus émissives est le seul scenario permettant de respecter les objectifs de réduction ».
Concernant les émissions de protoxyde d'azote, la DGEC indique que les processus biogéochimiques du sol à l'origine des émissions s'inscrivent dans une temporalité longue. La tendance (plutôt à la baisse) des émissions entre 1990 et 2018 (environ -9 %) ne permet toutefois « pas de statuer sur le respect ou non des objectifs de réduction de la France ». L'étude d'impact des articles 62 et 63 indique par ailleurs que les émissions de protoxyde d'azote d'origine agricole « enregistrent une légère baisse, sans assurer une dynamique de baisse de long terme ».
C. LA CONVENTION CITOYENNE PROPOSE LA MISE EN PLACE D'UNE REDEVANCE POUR L'ACQUISITION D'ENGRAIS MINÉRAUX AZOTÉS
Compte tenu de l'impact des engrais azotés sur les émissions de gaz à effet de serre en agriculture, et en matière de pollution de l'air, la Convention citoyenne pour le climat propose la mise en place d'une redevance pour l'acquisition d'engrais minéraux azotés (qu'ils soient produits en France ou à l'étranger) afin de réduire leur utilisation, voire d'assurer leur substitution.
Toutefois, le rapport de la Convention ne fournit aucune analyse de l'impact de la redevance qu'elle appelle de ses voeux sur l'efficacité environnementale et sur la productivité de l'agriculture française. Les enjeux économiques d'une telle taxation sont pourtant évoqués, par le prisme des expériences non concluantes menées par d'autres pays européens et des tentatives menées par la France.
Points d'attention de la convention citoyenne
sur la
taxation des engrais azotés
« Un moyen pratiquement pas utilisé en Europe : cinq pays européens ont instauré par le passé des mesures de taxation des engrais azotés : la Finlande, la Suède, l'Autriche, la Norvège et les Pays-Bas. Ces expériences ont été par la suite abandonnées, en général au moment de l'adhésion du pays concerné à l'Union européenne, dans un objectif de réduction des distorsions fiscales. L'augmentation d'une taxe existante ou l'introduction d'un dispositif nouveau serait de nature à nuire à la compétitivité de l'agriculture française et donc difficilement acceptable .
La redevance pour pollutions diffuses toucherait l'ensemble de l'engrais azoté distribué et épandu par les agriculteurs et c'est à ce stade que se font principalement les émissions de GES. Le législateur a introduit à l'article L. 213-10-8 du code de l'environnement une redevance pour pollutions diffuses que doit acquitter tout acquéreur de produits phytopharmaceutiques. Le produit de la redevance bénéficie aux agences de l'eau sous réserve d'un prélèvement annuel, plafonné à 41 millions d'euros, opéré au profit de l'office français de la biodiversité.
Une redevance similaire pourrait être créée pour les engrais azotés. Depuis une quinzaine d'années, des propositions d'amendements sont faites en ce sens sans succès. Deux amendements visant le même objet avaient été déposés lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2019, sans être cependant adoptés. L'argumentation avancée par le rapporteur spécial dans l'hémicycle pour rejeter la proposition reposant sur l'absence d'étude d'impact sur la trésorerie des agriculteurs et la distorsion de concurrence qui en découlerait par rapport aux autres pays européens. »
Source : rapport de la convention citoyenne pour le climat, volet « se nourrir »
Le comité légistique a ainsi proposé différentes options aux membres du groupe thématique « se nourrir », qui ont souhaité exclure une augmentation de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) au profit d'une redevance pour pollutions diffuses, cette solution leur semblant plus efficace pour cibler les engrais azotés produits à l'étranger.
II. LE PROJET DE LOI ENVISAGE UNE TAXATION DES ENGRAIS MINÉRAUX AZOTÉS SI PLUSIEURS CONDITIONS NE SONT PAS RESPECTÉES, ET PROPOSE UN RAPPORT AU PARLEMENT ANALYSANT LES CONDITIONS DE MISE EN PLACE DE CETTE TAXE
L'article 62 du projet de loi indique qu'il est « envisagé de mettre en place une redevance sur les engrais azotés minéraux » si plusieurs conditions ne sont pas remplies. Cette redevance vise à atteindre l'objectif de réduction de 13 % des émissions d'ammoniac en 2030 par rapport à 2005 et l'objectif de réduction de 15 % des émissions de protoxyde d'azote en 2030 par rapport à 2015. Les objectifs de réduction d'émissions fixés actuellement par le droit européen et le droit national en matière d'ammoniac et par le droit français pour le protoxyde d'azote seraient ainsi inscrits dans la loi.
Cette redevance serait mise en place uniquement si deux critères ne sont pas atteints :
- si les objectifs annuels de réduction de ces émissions, fixés en application de l'article 63, du présent projet de loi ne sont pas atteints pendant deux années consécutives ;
- et sous réserve de l'absence de dispositions équivalentes dans le droit de l'Union européenne.
Alors qu'actuellement, les objectifs de réduction d'émissions sont fixés par périodes pluriannuelles, le I de l'article 63 propose en effet qu'un décret définisse une trajectoire annuelle de réduction des émissions de protoxyde d'azote et d'ammoniac du secteur agricole permettant d'atteindre progressivement les objectifs fixés à horizon 2030. Par voie d'amendement, l'Assemblée nationale a complété l'article 63, en prévoyant que dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, puis annuellement, le Gouvernement présente au Parlement un rapport consacré au suivi de la trajectoire de réduction des émissions d'ammoniac et de protoxyde d'azote du secteur agricole et des moyens mis en oeuvre pour la respecter .
Enfin, l'article 62 du projet de loi prévoit également la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement, dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, dont le contenu a été complété par l'Assemblée nationale :
- analysant les conditions, notamment de taux, d'assiette et d'affectation des recettes à la transition agroécologique 39 ( * ) , dans lesquelles cette redevance pourrait être instaurée afin de permettre une mise en conformité rapide à la trajectoire de réduction de ces émissions ;
- étudiant l'opportunité de fixer des taux différenciés en fonction des facteurs d'émission d'ammoniac des différents types d'engrais, comme souhaité par la commission spéciale de l'Assemblée nationale ;
- établissant un inventaire des technologies et des outils d'aide à la décision et à l'exploitation , ainsi que la liste des financements publics destinés à la recherche, à l'acquisition de matériel, à la formation, à l'accompagnement et, plus largement, à toute démarche permettant la réduction des quantités d'engrais azotés minéraux utilisées, tant pour la promotion de leur utilisation raisonnée que pour le changement des pratiques culturales ; cette rédaction résulte d'un amendement de la commission spéciale de l'Assemblée nationale ;
- étudiant enfin l'impact écologique et économique de la création et de la mise en oeuvre de certificats d'économies d'engrais azotés , cette mention résultant d'un amendement adopté en séance publique par l'Assemblée nationale.
III. UNE TAXATION DES ENGRAIS MINÉRAUX AZOTÉS HYPOTHÉTIQUE ET DONT L'IMPACT SUR LA RÉDUCTION DES ÉMISSIONS N'EST PAS ÉVIDENT EN L'ABSENCE DE TRANSFORMATION AGRICOLE
A. UNE TAXATION DES ENGRAIS MINÉRAUX AZOTÉS CONDITIONNÉE À UN DOUBLE CRITÈRE
L'article 62 prévoit que si, pendant deux années consécutives, les objectifs annuels de réduction définis par décret (décret instauré par l'article 63) n'ont pas été tenus et sous réserve de l'absence de dispositions équivalentes dans le droit de l'Union européenne, « il est envisagé » de mettre en place une redevance sur les engrais minéraux azotés.
Le rapporteur considère que cette phrase revêt un faible aspect normatif. Toutefois, le Conseil d'État a estimé dans son avis sur le présent projet de loi que le Gouvernement encourait un risque d'inconstitutionnalité en prévoyant le caractère obligatoire de cette taxation pour le futur, constituant une injonction à faire au Gouvernement.
Le Gouvernement a opté pour un double critère conditionnant la mise en oeuvre de la redevance, choisissant ainsi de mobiliser la fiscalité sur les engrais azotés uniquement si d'autres moyens n'ont pas fait leur preuve pour réduire les émissions concernées.
Le premier critère, celui du non-respect de la trajectoire pendant deux années consécutives, tient compte des fluctuations possibles liées à la conjoncture économique ou à des aléas climatiques.
Le second témoigne d'une volonté de porter le sujet de la taxation des engrais azotés au niveau européen.
Si ces objectifs ne sont pas tenus, et si l'Union européenne n'a pas légiféré sur le sujet, à partir de 2024, le Gouvernement proposera une redevance à compter du 1 er janvier 2025 sur les engrais minéraux azotés avec différenciation du taux selon la forme de l'engrais minéral azoté.
Or, il n'existe pas actuellement de taxation des engrais azotés dans les autres pays européens. La taxation de l'azote, soit via les engrais minéraux, soit via le surplus d'azote, a pu exister par le passé dans certains pays d'Europe du Nord (Finlande en 1976, Suède en 1985, Autriche en 1986, Norvège en 1988, puis plus récemment Danemark en 1998 et Pays-Bas en 1998), mais elle a été abandonnée pour différentes raisons (intégration dans l'Union européenne, crise agricole, contentieux, manque d'efficacité, etc.).
Ainsi, compte tenu des échecs des taxations nationales en Europe sur ce sujet, le rapporteur considère que l'initiative d'une telle taxation doit relever de l'Union européenne, afin de ne pas porter préjudice à la compétitivité de la « Ferme France » (cf. infra ). Une telle taxation nationale doit résulter exclusivement d'une obligation européenne imposée à tous les États membres. C'est l'objet de l'amendement COM-1932 de la commission des finances, également présenté par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et la commission des affaires économiques.
Si la fixation d'une trajectoire annuelle proposée à l'article 63, plus fine que la trajectoire pluriannuelle existant actuellement, est louable, il n'est pas certain que les services soient en mesure de présenter un rapport annuel au Parlement sur le respect ou non de la trajectoire de réductions des émissions .
Un rapport annuel ne permettrait d'ailleurs pas de refléter les changements de pratiques des agriculteurs : par exemple, comme le rappelle le CITEPA dans sa réponse au questionnaire du rapporteur, les changements de mode de pratiques d'épandage, qu'il soit minéral ou organique, font l'objet d'une enquête tous les six ans.
Par conséquent, la commission des finances propose par l'amendement COM-1933 la suppression de ce rapport annuel, et la fixation d'une trajectoire pluriannuelle de réduction des émissions, déclinée par des objectifs annuels. Cet amendement est également présenté par la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et la commission des affaires économiques.
B. MAIS L'EFFICACITÉ MÊME DE CETTE TAXATION SUR LA RÉDUCTION DES ÉMISSIONS DES ENGRAIS AZOTÉS RESTE INCERTAINE, TANDIS QU'ELLE ENTRAÎNERAIT TRÈS CERTAINEMENT UNE BAISSE DE L'EXCÉDENT BRUT D'EXPLOITATION DU SECTEUR AGRICOLE
Quand bien même cette taxation pourrait entrer en vigueur, au niveau européen puis au niveau national, il y a lieu de s'interroger sur son efficacité, qui dépendra dans tous les cas de l'assiette et des taux de taxation retenus.
En effet, les études économiques menées depuis les années 1980 ont montré que la demande d'engrais azotés s'est révélée globalement peu sensible aux variations de prix des engrais : sur la base d'expériences étrangères, une étude montre qu'une augmentation de 1 % du prix de l'engrais conduisait à une baisse de 0,08 % de la demande 40 ( * ) . La direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises du ministère de l'agriculture et de l'alimentation indique ainsi que la demande d'engrais azotés est plus sensible au prix et au rendement des cultures qu'au prix des produits phytosanitaires.
Elle a également porté à la connaissance du rapporteur l'existence de travaux récents ayant simulé l'impact d'une augmentation importante (de 100 à 300 %) du prix des engrais azotés d'origine minérale à l'échelle européenne 41 ( * ) : une augmentation du prix de 300 % se traduirait par une baisse modérée de la consommation d'engrais azotés (élasticité prix moyen de - 0,11) mais par une réduction de 8,6 % des émissions agricoles de gaz à effets de serre : « les auteurs soulignent des effets très contrastés selon les régions, et l'impact significatif sur la réallocation des terres entre productions du fait de la hausse de prix de l'engrais, avec par exemple des surfaces allouées au blé diminuant fortement au profit des prairies permanentes et des friches ».
La mise en oeuvre d'une taxation des engrais minéraux azotés, même à l'échelle européenne, aurait ainsi des conséquences variées , allant au-delà d'une baisse des niveaux d'émissions d'ammoniac et de protoxyde d'azote : elle pourrait ainsi entraîner une modification significative de la base agricole européenne.
Il a également été mentionné au cours des auditions du rapporteur que l'objectif d'une telle taxation n'est pas tant de limiter la quantité d'engrais utilisé que de limiter les surplus utilisés (par exemple, pour pallier la volatilisation de l'azote dans l'air). Une telle taxation des surplus d'azote uniquement s'avèrerait très complexe à mettre en oeuvre et pourrait générer des coûts de gestion importants.
Dans son rapport, la Convention citoyenne pour le climat a avancé un montant de la taxe à 20 euros par tonne d'azote la première année puis de 40 euros par tonne la deuxième année, sur la base de la quantité d'azote contenue dans les produits. Or, toutes les matières minérales ne sont pas équivalentes en matière d'émission d'ammoniac. La DGPE a procédé à une simulation de l'impact d'une telle taxation : une taxe de 20 euros la tonne d'azote représente environ 2,8 % du prix des engrais azotés en 2019 : « sur la base du Registre d'Information Comptable Agricole (RICA) de 2018 et sous l'hypothèse de comportements et de revenus inchangés par rapport à 2018, une taxe à 0,02 centimes par kg d'azote représenterait en moyenne toute exploitation confondue une baisse de l'excédent brut d'exploitation de 0,2 % et du résultat courant avant impôts de 0,5 %. Les systèmes de cultures les plus impactés seraient les céréales et oléo-protéagineux qui verraient une baisse de l'excédent brut d'exploitation de 0,6 % et du résultat courant avant impôts de 1,3 % ».
C. DES LEVIERS D'ACTION RESTENT À MAXIMISER AFIN DE RÉDUIRE LES ÉMISSIONS : METTRE EN PLACE UN PLAN D'ACTION NATIONAL PARAÎT INDISPENSABLE POUR ACCOMPAGNER LES AGRICULTEURS DANS CETTE VOIE
L'objectif d'une telle taxation est bien évidemment de dissuader l'emploi des engrais minéraux de synthèse et de rendre les engrais minéraux les moins émissifs d'ammoniac plus compétitifs que les engrais minéraux les plus émissifs et ainsi favoriser un effet de substitution.
Pour l'éviter, il faudra donc, parallèlement aux efforts pour parvenir à une taxation au niveau européen, maximiser les leviers d'action pour réduire les émissions d'ammoniac ou de protoxyde d'azote . Des solutions agronomiques permettant une réduction de l'utilisation d'engrais de synthèse existent et sont souvent méconnues :
- l'optimisation de la fertilisation et, plus globalement, du cycle de l'azote pour réduire au maximum les excédents azotés ; la substitution par les engrais organiques ou des matières fertilisantes moins émissives ;
- l'utilisation d'équipements d'épandage moins émissifs ;
- la modification des systèmes de cultures afin d'y intégrer des légumineuses (permettant la fixation symbiotique de l'azote) seules ou en mélange ou favoriser les cultures à bas niveau d'intrant .
Il importe donc de valoriser ces solutions et d'accompagner les agriculteurs pour les mettre en oeuvre. L'amendement COM-1932 adopté par la commission des finances, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et la commission des affaires économiques propose donc la mise en place par l'État, à l'image du plan Écophyto, d'un plan « Eco'Azot » rassemblant l'ensemble des mesures mises en place pour réduire les émissions liées à ces intrants et mettant en avant les bonnes pratiques. Ces mesures d'accompagnement, attendues par les agriculteurs, permettraient d'aider les filières dans l'atteinte des objectifs fixés par les trajectoires, d'autant plus que les agriculteurs peuvent bénéficier de soutien public pour mettre en oeuvre ces leviers d'action.
Outils de soutien public pour la réduction
de
l'utilisation d'engrais de synthèse
Les différents instruments de la PAC sont mobilisés pour une gestion durable de l'azote :
• les soutiens couplés à la production de protéine végétale ;
• le plan pour la compétitivité et l'adaptation des exploitations (matériels d'épandage, outils d'aide à la décision et à l'agriculture de précision,...) ;
• le paiement vert, les mesures agro-environnementales et climatiques, les aides à l'agriculture biologique ;
• le système de conseil agricole ;
• le partenariat européen pour l'innovation en agriculture.
Récemment, le plan « France relance » a intégré :
• 100 millions d'euros pour la production de protéine végétale ;
• un volet « Investissements Agroéquipements » : sur les 206 millions d'euros d'aides, environ 50 millions d'euros concerne le matériel d'épandage moins émissif.
Source : réponse la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises au questionnaire du rapporteur
L'amendement prévoit ainsi qu'à défaut de réussite de ces mesures d'accompagnement, et si les objectifs de réduction des émissions ne sont pas atteints pendant au moins trois années consécutives, il pourra être envisagé de mettre en place une redevance, au niveau européen. Un rapport du Gouvernement au Parlement devra préciser les modalités de mise en oeuvre de cette éventuelle redevance européenne, qui serait alors déclinée au niveau national.
Décision de la commission : la commission des finances a proposé de modifier les présents articles par les amendements COM-1932 et COM-1933 .
* 1 Une réduction des émissions totales de l'Union de 55 % d'ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990.
* 2 Objectif fixé au I. de l'article 73 de la loi n° 2019-1428.
* 3 Ou 123gCO 2 /km selon la norme WLTP.
* 4 Introduit par les amendements n° 6357 déposé par M. Zulesi, et n° 7205 déposé par des députés du groupe La République en marche.
* 5 Derrière la Norvège (59,9 g), les Pays-Bas (98,4 g), Malte (105,3 g), le Portugal (109,4 g) et le Danemark (111,9 g).
* 6 Derrière la Norvège (50,5 %), l'Islande (32,3 %), les Pays-Bas (13,4 %) et la Suède (8,5 %).
* 7 150 ventes de bus électrique en France en 2020 pour un marché de 100 000 véhicules vendus dans le monde.
* 8 Les autres gouvernements étant, dans l'ordre des échéances temporelles : la Norvège en 2025, les Pays-Bas, l'Islande, l'Irlande, la Slovénie et la Suède en 2030, l'Ecosse en 2032, le Danemark et le Royaume-Uni en 2035, l'Espagne en 2040 et l'État du Baden Würtemberg en 2050.
* 9 Les Pays-Bas et le Norvège ont fixé des objectifs de 100% de ventes de bus urbain neuf zéro émissions en 2025. La Norvège a déterminé des objectifs de part de marché de véhicules lourds neufs zéro émissions à horizon 2030 : 75 % pour les autocars longue distance et 50 % pour les camions.
* 10 « Conditions nécessaires à un rétrofit économe, sûr et bénéfique pour l'environnement » .
* 11 En 2020, de retards de déploiement ont été constatés en raison de la crise sanitaire et du report des élections municipales.
* 12 Entre 29 et 40 TWh dont 5 TWh pour les seuls véhicules lourds.
* 13 Qui pourrait atteindre 23 % en 2035 puis 43 % en 2050.
* 14 Un véhicule à essence immatriculé avant 2006 ou un véhicule diesel immatriculé avant 2011.
* 15 Les amendements n° 1735, n° 2952, n° 3753, n° 4802, n° 4826 et n° 5223.
* 16 Majoré de 1 000 euros pour la Guadeloupe, la Guyane, Mayotte et la Réunion.
* 17 Pour un minimum de deux ans.
* 18 Dans la mesure où le carburant représente environ 25 % du prix du transport.
* 19 58 stations en fonctionnement.
* 20 156 stations en fonctionnement et 42 nouvelles devraient être déployées avant la fin de l'année.
* 21 FNTR, OTRE et TLF.
* 22 Pour une présentation du dispositif, voir le commentaire de l'article 30 du présent projet de loi.
* 23 Idem.
* 24 À son article 7.
* 25 Par des systèmes satellitaires ou d'ondes électromagnétiques.
* 26 « Les usagers de la route paient-ils le juste prix de leurs circulations » (avril 2021).
* 27 En vertu de la directive n° 2003/96/CE du 27 octobre 2003.
* 28 2 à 3 % au niveau mondial.
* 29 De 3 à 5 fois plus cher que le kérosène classique.
* 30 La loi de finances pour 2021 a remplacé l'ancienne taxe incitative relative à l'incorporation des biocarburants (TRIB) par la taxe incitative à l'utilisation d'énergies renouvelables dans les transports (TIRUERT) qui doit, à compter du 1 er janvier 2022 inclure l'aérien dans son périmètre.
* 31 L'efficience des dépenses fiscales relatives au développement durable - communication à la commission des finances du Sénat - Cour des comptes - septembre 2016. Voir le rapport d'information n° 110 (2016-2017) de M. Albéric de MONTGOLFIER, fait au nom de la commission des finances, déposé le 8 novembre 2016.
* 32 Dans son état des lieux de la fiscalité environnementale publié en 2017.
* 33 Rapport d'information d'Arnaud Bazin et Éric Bocquet, fait au nom de la commission des finances du Sénat, « Un dispositif vital, un financement menacé ? Un modèle associatif fondé sur le bénévolat à préserver » (octobre 2018).
* 34 Son pouvoir de réchauffement global (PRG) sur 100 ans est 310 fois plus élevé qu'une masse équivalente de dioxyde de carbone.
* 35 L'utilisation des matières fertilisantes est ainsi encadrée par la réglementation « Nitrates » (Directive nitrates 91/676/CEE du 12 décembre 1991) qui vise notamment à prévenir les émissions dans l'eau. Comme le rappelle la DPGE, dans les zones vulnérables, qui représentent 68 % de la surface agricole utile nationale, les agriculteurs doivent respecter des mesures définies au sein d'un programme d'actions national, déclinées voire renforcées au regard des contextes régionaux au sein des programmes d'actions régionaux. Dans les zones non vulnérables, les agriculteurs suivent, de manière volontaire, un code de bonnes pratiques agricoles.
* 36 https://www.citepa.org/wp-content/uploads/Citepa_Rapport-Secten_ed2020_v1_09072020.pdf
* 37 Les émissions de ces polluants ne sont pas mesurées par métrologie car de nature très diffuse. Elles sont calculées à partir de quantités connues (cheptel, tonnes d'engrais vendues...) sur lesquelles un facteur d'émission unitaire est appliqué.
* 38 Arrêté du 10 mai 2017 établissant le plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques.
* 39 Cette mention de l'affectation des recettes résulte d'un amendement adopté par la commission spéciale de l'Assemblée nationale.
* 40 Bel, F., d'Aubigny, G. D., Lacroix, A., & Mollard, A. (2004). Efficacité et limites d'une taxe sur les engrais azotés : éléments d'analyse à partir de seize pays européens. Économie prévision, (5), 99-113.
* 41 Ollier et Jayet. Effets d'une taxe sur les engrais minéraux azotés sur leur consommation, sur l'usage des sols et sur les émissions de gaz à effet de serre.