IV. TRANSITION ÉNERGÉTIQUE ET SURVEILLANCE DE LA ZEE : DES DÉFIS MAJEURS
A. LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE ET LA QUALITÉ DE L'AIR
L'organisation maritime internationale (OMI) a fixé des objectifs environnementaux ambitieux et prévoit une réduction des émissions totales de gaz à effet de serre de l'industrie maritime d'au moins 50 % d'ici 2050 et des émissions de CO 2 d'au moins 40 % d'ici 2030 et jusqu'à 70 % d'ici 2050.
Dans ce cadre, le GNL constitue une solution transitoire intéressante , vers une propulsion décarbonée à terme. Selon les estimations, le GNL permet aujourd'hui de réduire de 99 % les émissions d'oxydes de soufre et de particules fines , jusqu'à 85 % des émissions d'oxyde d'azote et de l'ordre de 20 % des émissions de dioxyde de carbone.
L'an dernier, l'article 56 de la loi du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 avait permis de créer un dispositif de suramortissement fiscal pour les investissements réalisés par les armateurs dans le cadre de l'achat de navires neufs fonctionnant à l'hydrogène et au GNL ainsi que l'achat de biens destinés au traitement des gaz d'échappement (« scrubber ») et à l'alimentation électrique des navires au cours d'une escale. À la suite de la notification de la mesure à la Commission européenne , des ajustements sont nécessaires, la Commission considérant l'assiette de la mesure trop large. Aussi, à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2020 en première lecture à l'Assemblée nationale, les députés ont adopté un amendement du rapporteur général de la commission des finances qui réduit l'assiette de cette mesure , désormais fondée sur la différence de valeur entre un navire neuf propulsé au GNL ou avec des technologies décarbonées et celle d'un navire doté d'une propulsion classique. Pour compenser cette réduction de l'assiette et maintenir une intensité d'aide équivalente, le taux proposé est revu à la hausse. Cette mesure constitue l'article 13 bis du projet de loi de finances pour 2020.
Le secteur privé doit maintenant accompagner ce mouvement . La CMA-CGM a annoncé en septembre dernier, au chantier naval Shanghai Jiangnan-Changxing, la mise à l'eau du plus grand porte-conteneurs du monde (23 000 EVP) propulsé au gaz naturel liquéfié (GNL) , dans le prolongement de la décision du groupe annoncée en 2017 de commander une série de neuf porte-conteneurs de grande dimension (400 mètres de long, 61 mètres de large) propulsés au GNL. Cette nouvelle série de navires sera immatriculée au registre international français (RIF). En outre, récemment, onze banques ont adhéré à un programme baptisé « Poséidon » et se sont engagées à mobiliser un portefeuille de prêts dédiés à l'industrie maritime à hauteur d'environ 100 milliards de dollars. Enfin, les commandes de systèmes de confinement pour le transport par voie maritime et le stockage en conditions cryogéniques du GNL ont fortement augmenté ces derniers mois, ce qui témoigne d'une dynamique positive .
Le sujet de la transition énergétique dans le secteur maritime rejoint l'enjeu de la préservation de la qualité de l'air dans les villes portuaires , exposées aux paquebots de croisière. Les collectivités territoriales se mobilisent et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a par exemple annoncé un plan d'investissements de 30 millions d'euros pour électrifier les quais des ports de Marseille, Nice et Toulon. L'ensemble des quais de Nice et Toulon devraient être équipés en 2023 et ceux de Marseille à la même date pour les ferries et en 2025 pour les paquebots de croisière.
Sur ce sujet, l'article 16 ter du projet de loi de finances pour 2020 vise à appliquer à l'électricité fournie aux navires, lorsqu'ils sont stationnés à quai dans les ports, un tarif réduit de TICFE à 0,50 euro /MWh (au lieu de 22,50 euros /MWh), soit le même tarif dont bénéficient les personnes qui exercent une activité de transport par train, métro, tramway, câble, autobus hybride rechargeable ou électrique ou trolleybus. Cette mesure doit soutenir le développement de l'électricité à quai et l'amélioration de la qualité de l'air dans les villes portuaires. À cet égard, le rapporteur rappelle son soutien à l'initiative portée par la France pour créer une zone « SECA » en Méditerranée mais souligne la nécessité d'une concertation étroite avec l'ensemble des partenaires européens. Des discussions devraient s'engager à l'automne 2020 au sein de l'OMI et pourraient conduire à une adoption de la mesure en 2022 selon le ministère. L'ensemble des États riverains du bassin doivent être en capacité de mettre en oeuvre et de contrôle cette réglementation.