Avis n° 142 (2019-2020) de M. Jean-Pierre VIAL et Mme Marie-Françoise PEROL-DUMONT , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 21 novembre 2019
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LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE
VOS RAPPORTEURS POUR AVIS
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I. LES GRANDES ORIENTATIONS DU PLF 2020
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A. UN OBJECTIF DE 0,55% DU RNB CONSACRÉ
À L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT QUI SANS DOUTE DIFFICILE
À ATTEINDRE
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B. UNE AUGMENTATION DES DONS-PROJETS AU SEIN DU
PROGRAMME 209 « SOLIDARITÉ À L'ÉGARD DES PAYS EN
DÉVELOPPEMENT »
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C. DES CRÉDITS DU PROGRAMME 110 (AIDE
ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE AU DÉVELOPPEMENT) QUI AUGMENTENT
POUR FAIRE FACE À LA RECONSTITUTION DE FONDS MULTILATÉRAUX DE
DÉVELOPPEMENT
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A. UN OBJECTIF DE 0,55% DU RNB CONSACRÉ
À L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT QUI SANS DOUTE DIFFICILE
À ATTEINDRE
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II. DEUX AXES ESSENTIELS POUR LA FUTURE LOI
D'ORIENTATION : LA PRIORITÉ « AFRIQUE » ET LE
RENFORCEMENT DE L'ÉVALUATION
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A. LA PRIORITÉ
« AFRIQUE »
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1. Des financements en hausse
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2. La déclinaison par l'AFD de la
priorité africaine
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3. Des difficultés particulières au
Sahel
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a) Une Région qui concentre les
difficultés
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b) Les efforts de l'AFD pour devenir plus agile et
plus rapide
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c) Le rôle important du Centre de crise et de
soutien du Quai d'Orsay
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(1) Une mission essentielle
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(2) Quelle articulation avec l'AFD ?
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d) L'Alliance Sahel, une initiative qui vise
à améliorer la coordination de l'aide
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a) Une Région qui concentre les
difficultés
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4. La nécessité de travailler en
réseau avec l'ensemble des acteurs français du
développement
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1. Des financements en hausse
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B. UN DISPOSITIF D'ÉVALUATION À
AMÉLIORER
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A. LA PRIORITÉ
« AFRIQUE »
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I. LES GRANDES ORIENTATIONS DU PLF 2020
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EXAMEN EN COMMISSION
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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
N° 142 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020 |
Enregistré à la Présidence du Sénat le 21 novembre 2019 |
AVIS PRÉSENTÉ au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2020 , |
TOME IV AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT : Aide économique et financière au développement (Programme 110) et Solidarité à l'égard des pays en développement (Programme 209) |
Par M. Jean-Pierre VIAL et Mme Marie-Françoise PEROL-DUMONT, Sénateurs |
(1) Cette commission est composée de : M. Christian Cambon, président ; MM. Pascal Allizard, Bernard Cazeau, Olivier Cigolotti, Robert del Picchia, Jean?Noël Guérini, Joël Guerriau, Pierre Laurent, Cédric Perrin, Gilbert Roger, Jean?Marc Todeschini, vice?présidents ; Mme Joëlle Garriaud?Maylam, M. Philippe Paul, Mme Marie?Françoise Perol?Dumont, M. Olivier Cadic, secrétaires ; MM. Jean?Marie Bockel, Gilbert Bouchet, Michel Boutant, Alain Cazabonne, Pierre Charon, Mme Hélène Conway?Mouret, MM. Édouard Courtial, René Danesi, Gilbert?Luc Devinaz, Jean?Paul Émorine, Bernard Fournier, Mme Sylvie Goy?Chavent, MM. Jean?Pierre Grand, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, MM. Jean?Louis Lagourgue, Robert Laufoaulu, Ronan Le Gleut, Jacques Le Nay, Rachel Mazuir, François Patriat, Gérard Poadja, Ladislas Poniatowski, Mmes Christine Prunaud, Isabelle Raimond?Pavero, MM. Stéphane Ravier, Hugues Saury, Bruno Sido, Rachid Temal, Raymond Vall, André Vallini, Yannick Vaugrenard, Jean?Pierre Vial, Richard Yung. |
Voir les numéros : Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 2272 , 2291 , 2292 , 2298 , 2301 à 2306 , 2365 , 2368 et T.A. 348 Sénat : 139 et 140 à 146 (2019-2020) |
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE
VOS RAPPORTEURS POUR
AVIS
La Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Aide publique au développement ». Elle formule les observations suivantes : 1. - Les crédits de la mission « Aide publique au développement » (programmes 209 et 110) progressent depuis plusieurs années et devraient atteindre 3,27 milliards d'euros en 2020 contre 3,06 milliards d'euros en LFI 2019, soit une progression d'environ 6,5%. Parallèlement, les engagements de l'AFD continuent à croître, celle-ci devant générer en 2020 près de 2 milliards d'aide publique au développement (APD) à elle-seule, notamment grâce à ses prêts concessionnels. Au total, l'APD déclarée par la France passera de 10,6 milliards d'euros en 2019 à près de 12 milliards en 2020, soit une progression de 0,43 à 0,46% du RNB. Cette progression sera due à une hausse de 150 millions de la mission APD, mais également à une augmentation de 100 millions d'euros des dépenses de la prise en charge des réfugiés et surtout à un accroissement de 600 millions d'euros de l'APD générée par les prêts de l'AFD, alors que cette hausse n'a été que de 240 millions d'euros entre 2018 et 2019. 2. - Pour atteindre les 0,55% du RNB souhaités par le Président de la République d'ici 2022, des augmentations encore nettement plus fortes des crédits budgétaires seront nécessaires au cours des dernières années du quinquennat. En tout état de cause, la commission souhaite disposer d'une programmation budgétaire solide et détaillée pour les années à venir . Il est nécessaire qu'une telle programmation figure au sein de la future loi d'orientation et de programmation relative à l'aide publique au développement, dont la présentation a été reportée tout au long de l'année 2019. En outre, cette montée en puissance de l'APD française devra respecter les orientations définies par le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) et par les deux assemblées : priorité à l'Afrique subsaharienne et en particulier au Sahel, renforcement des dons et de la composante bilatérale de l'APD française. 3 . - Avec près de 3,27 milliards d'euros pour la mission APD en 2020 dont 2,1 milliards sur les 5 milliards gérés par le ministère des affaires étrangères tous programmes confondus, il est nécessaire que la stratégie et le pilotage de l'aide publique au développement, actuellement brouillés par la répartition de la responsabilité des crédits entre deux ministères et un opérateur principal, l'AFD, soient clarifiés. Au-delà de la création d'un ministère de plein exercice, la commission souhaite une amélioration du pilotage par le renforcement des structures existantes : CICID, le Conseil national pour le développement et la solidarité internationale (CNDSI) et le Conseil d'orientation stratégique de l'AFD. Il convient également de renforcer la tutelle des ministères chargés des affaires étrangères et des finances sur l'opérateur. 4 . - Si la priorité « Afrique » de l'aide française s'est notamment traduite par un accroissement des crédits en dons dont dispose l'AFD depuis 2018, il est impératif de maintenir cet effort au cours des prochaines années. Or les autorisations d'engagements de l'AFD sont en diminution dans le PLF 2020 par rapport au PLF 2019. Au sein de l'Afrique subsaharienne, plusieurs pays du Sahel sont en situation difficile et les effets de l'aide tardent à se manifester malgré les efforts des bailleurs. Ceux-ci, et notamment pour la France l'AFD à travers le fonds Minka, le Centre de crise et de soutien du quai d'Orsay et les autres acteurs de l' « approche globale », ont tenté d'améliorer la rapidité et l'efficacité de leurs interventions. Toutefois, bien qu'en augmentation (avec une augmentation substantielle du Fonds d'urgence humanitaire), les moyens dont dispose le Centre de crise sont encore insuffisants comparés à ceux des pays européens comparables. 5. - Concernant Expertise France , en 2019, hors « initiative 5% », la commande publique devrait représenter 11% du chiffre d'affaires de l'opérateur, soit 25,9 M€. La part du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères s'élève à 82% de cette commande publique et celle de la Direction générale du Trésor à 15%, le reste venant pour l'essentiel du Ministère des solidarités et de la santé. Ces chiffres devraient peu évoluer en 2020. Le financement ministériel de l'agence est donc encore assez peu diversifié, ce qui reflète en creux la persistance de l'éclatement des opérateurs d'expertise internationale . Or il est important que l'agence bénéficie d'une commande publique stable et diversifiée afin de renforcer son modèle économique. Si l'adossement à l'Agence française de développement a été présenté comme une « solution miracle » pour la viabilité économique d'Expertise France, et si les financements en provenance de l'AFD ont effectivement progressé au cours des deux dernières années, il ne peut s'agir que d'une partie de la réponse. Il faut notamment éviter que ne s'installe une relation exclusive avec l'AFD, qui priverait progressivement Expertise France de son accès à l'expertise des ministères. 6. - En ce qui concerne les nécessaires progrès de l'évaluation , qui ne reçoit pour le moment qu'un montant de crédits budgétaires relativement limité, la commission a estimé que le dispositif d'évaluation britannique, dont l' « Independant committee on aid impact » (ICAI) est la pièce maîtresse, constitue une référence valable pour créer le nouveau dispositif d'évaluation qui doit être inscrit au sein de la future loi d'orientation relative à la politique de solidarité internationale. Ce nouveau dispositif devra comporte les mêmes garanties d'efficacité que le dispositif britannique : une indépendance des membres de la commission d'évaluation vis-à-vis des ministères et de l'opérateur et un budget de fonctionnement suffisant pour celle-ci ; une obligation pour la commission d'évaluation de rendre compte devant l'Assemblée nationale et le Sénat en présence d'un représentant du ou des ministères de tutelles ; la possibilité pour les commissions du Parlement de valider le programme d'évaluation de l'instance ou d'avoir un droit de tirage sur celui-ci. À l'issue de sa réunion du mercredi 6 novembre 2019, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Aide publique au développement ». |
I. LES GRANDES ORIENTATIONS DU PLF 2020
Malgré les augmentations de crédits relativement importantes prévues pour la mission APD, il sera difficile d'atteindre les 0,55% du RNB prévus pour 2022.
A. UN OBJECTIF DE 0,55% DU RNB CONSACRÉ À L'AIDE PUBLIQUE AU DÉVELOPPEMENT QUI SANS DOUTE DIFFICILE À ATTEINDRE
Les crédits de la mission « Aide publique au développement française » progressent depuis plusieurs années et devraient atteindre 3,27 milliards d'euros en 2020 contre 3,06 milliards d'euros en LFI 2019, soit une progression d'environ 6,5%.
Parallèlement, les moyens de l'agence française de développement (AFD) continuent à croître :
Toutefois, pour atteindre les 0,55% du RNB souhaités par le Président de la République, il est prévu une augmentation de 634 millions d'euros en 2021 et de près de 900 millions d'euros en 2022. Les dernières marches vers l'objectif des 0,55% sont donc d'une hauteur considérable.
L'Aide publique au développement française totale (comprenant les dépenses éligibles dans d'autres missions budgétaires, les dépenses du fonds de solidarité pour le développement (FSD) ainsi que les prêts de l'AFD a atteint fin 2012 12 milliards d'euros, en augmentation progressive depuis 2015 mais encore loin derrière celles de l'Allemagne et du Royaume-Uni :
Évolution de l'APD des 10 principaux contributeurs de l'APD sur les 5 dernières années en volume
De même, le taux APD/RNB de la France stagne à 0,43 :
Évolution de l'APD des 10 principaux contributeurs
du CAD sur les
5 dernières années en part du revenu
national brut
B. UNE AUGMENTATION DES DONS-PROJETS AU SEIN DU PROGRAMME 209 « SOLIDARITÉ À L'ÉGARD DES PAYS EN DÉVELOPPEMENT »
Les crédits de paiement consacrés aux dons de l'Agence française de développement (AFD) continueront d'augmenter en 2020, passant de 328 M€ en 2019 (LFI) à 475 M€ (portés par le programme 209 pour 289,5 M€ et le FSD pour 185,5 M€) en 2020. Au sein de ces dons-projets, le Fonds « Paix et résilience » (Minka) de l'AFD, créé en 2017 et doté de 100 M€ par an, et qui a permis le lancement d' « initiatives » sur quatre des principaux bassins de crise d'intérêt pour la France (Syrie et pourtour syrien, région du Lac Tchad, RCA, Sahel), sera augmenté pour atteindre 200 M€ par an (en AE), conformément aux conclusions du CICID du 8 février 2018.
Un objectif de doublement entre 2017 et 2022 des fonds transitant par la société civile ayant également été fixé par le CICID, l'enveloppe du dispositif Initiatives des OSC, géré par l'AFD, passe de 97,8 M€ en 2019 à 110 M€ d'AE en 2020 (104 M€ de CP).
En revanche, les autorisations d'engagement de l'AFD pour faire de nouveaux dons dans les années à venir diminuent fortement par rapport à 2019, avec une baisse de 594 millions d'euros. Peut-être cette diminution est-elle en partie le reflet d'une difficulté d'absorption des montants très élevés de l'année 2019. En tout état de cause, elle jette un doute sur la capacité de remontée en puissance des dons-projet et de rééquilibrage prêts/dons .
Concernant les fonds de stabilisation gérés par le Centre de crise et de soutien du Quai d'Orsay, qui joue un rôle essentiel en matière de stabilisation des pays en situation de crise , le Fonds d'urgence humanitaire (FUH) seront portés à 80,7 M€ pour l'exercice budgétaire 2020 contre 45,7M€ pour 2019 . Il convient toutefois de souligner que les crédits de gestion de crise restent faibles en France par rapport à ceux des pays comparables, le choix ayant été fait de confier des fonds de stabilisation à l'AFD, opérateur de développement. Au total, en intégrant l'aide alimentaire et l' « aide budgétaire post-conflit et sorties de crises », les crédits consacrés à la « Gestion et sortie de crise » passent de 100 M€ à 155 M€.
L'opération budgétaire « Coopération décentralisée» est créditée pour de 11,5 M€, en augmentation de 1,7 M€ (+24%) par rapport à la LFI 2019 (9,3 M€).
Par ailleurs, en 2020, la contribution française au Partenariat mondial pour l'éducation (PME) sera de 73,7 M€ (12 M€ sur le programme 209 et 61,7 M€ sur le FSD), conformément à la volonté de réinvestissement du secteur de l'éducation exprimée de longue date par le Parlement. La France s'est ainsi engagée auprès du PME à hauteur de 200 M€ pour la période 2018-2020, soit une multiplication par plus de dix de la contribution française antérieure (17 M€ sur 2015-2017).
Enfin, la facilité pour les réfugiés en Turquie créée par le Conseil européen e, 2015 se voit attribuer 44,500 M€ afin d'apporter un soutien aux réfugiés dans le pays, via des actions notamment en matière d'aide humanitaire, d'éducation, de gestion des migrations, de santé, d'infrastructures dans les communes d'accueil et de soutien socio-économique.
C. DES CRÉDITS DU PROGRAMME 110 (AIDE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE AU DÉVELOPPEMENT) QUI AUGMENTENT POUR FAIRE FACE À LA RECONSTITUTION DE FONDS MULTILATÉRAUX DE DÉVELOPPEMENT
Tandis que les crédits de paiement n'augmentent que faiblement, les autorisations d'engagement (AE) du programme 110 passent de 1,3 à 4,5 milliards d'euros. Cette augmentation très forte provient de la reconstitution de fons multilatéraux auxquels la France apporte sa contribution :
- la reconstitution du Fonds vert pour la période 2019-2023 a été lancée en octobre 2018 et sera finalisée le 25 octobre 2019 lors de la conférence de reconstitution qui se tiendra à Paris. Le Président de la République a annoncé lors du Sommet du G7 à Biarritz le doublement de la contribution française au Fonds vert pour le climat, portant ainsi l'engagement français à 1 548 M€ sur 2019-2023. La contribution française comprendra une partie don et un prêt très concessionnel, lequel ne dépassera pas 20% de la contribution totale. Dans le cadre de ce partage, 735 M€ d'AE et 23 M€ de CP sont prévus sur le programme 110 en 2020 ;
- les négociations pour la prochaine reconstitution de l'Association internationale de développement (AID), instrument de la Banque mondiale à destination des pays les plus pauvres, sont actuellement en cours et un montant de 1401 M€ d'AE est provisionné au PLF 2020 ;
- pour la quinzième reconstitution du Fonds africain de développement (FAD) de la Banque africaine de développement , dont les négociations sont également en cours, un montant de 504 M€ d'AE, ainsi que 168 M€ de CP pour un premier versement en 2020, sont provisionnés afin de permettre d'accompagner une croissance du fonds, conformément à la priorité africaine de la politique française d'aide ;
Par ailleurs, on observe une importante croissance des crédits pour bonification de prêts de l'AFD , En 2018 et 2019, la progression des AE (370 M€ en 2018 ; 994,5 M€ en 2019) correspond au début de mise en oeuvre de la trajectoire de croissance d'activité de l'agence en vue de contribuer à l'atteinte de l'objectif de 0,55 % du RNB consacré à l'APD en 2022. Pour l'année 2020, les AE demandées s'élèvent à 1,138 Md€, contre 995 M€ en 2019, en cohérence avec la poursuite de la montée en charge de l'activité de prêts de l'Agence .
II. DEUX AXES ESSENTIELS POUR LA FUTURE LOI D'ORIENTATION : LA PRIORITÉ « AFRIQUE » ET LE RENFORCEMENT DE L'ÉVALUATION
A. LA PRIORITÉ « AFRIQUE »
Le CICID de février 2018 a placé le développement de l'Afrique au centre des objectifs de l'aide publique au développement française.
1. Des financements en hausse
L'évolution de l'APD bilatérale nette de la France dans les pays d'Afrique subsaharienne ces cinq dernières années est déclinée par instruments ci-dessous :
Afrique subsaharienne, en millions d'euros |
||||||
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018* |
2018** |
|
APD bilatérale nette |
1 493 |
1 579 |
1 390 |
1 464 |
1 959 |
1794 |
Dons hors Annulations de dette et refinancements |
1 173 |
1 212 |
1 114 |
1 093 |
1 224 |
1 224 |
Prêts bruts |
802 |
825 |
850 |
965 |
1 145 |
1145 |
Prêts nets |
314 |
317 |
272 |
369 |
735 |
570 |
Annulations de dette et refinancements nets |
6 |
116 |
4 |
22 |
0 |
0 |
APD multilatérale imputée |
1 152 |
1 368 |
1 195 |
1 563 |
nd |
nd |
Source : OCDE (CAD 2a) et DG Trésor
Note : Inclue les dépenses classées au niveau régional en Afrique. Les données 2018 sont en cours de validation par les services de l'OCDE.
* Données selon l'ancienne méthode de comptabilisation, en flux nets.
** Données selon la nouvelle méthode de comptabilisation, en équivalent don. La réforme de l'équivalent-don (EqD), passée en 2018, prévoit de comptabiliser les prêts de manière plus adéquate pour les pays en développement. Elle implique une nouvelle méthodologie de calcul qui revoit généralement à la baisse les montants versés pour des prêts bilatéraux publics.
Pour les pays prioritaires 1 ( * ) de l'aide française, donc les plus pauvres, l'évolution des financements est la suivante :
Pays prioritaires, en millions d'euros |
||||||
2014 |
2015 |
2016 |
2017 |
2018* |
2018** |
|
APD bilatérale nette |
724 |
767 |
613 |
764 |
812 |
763 |
Dons hors Annulations de dette et refinancements |
558 |
553 |
509 |
565 |
638 |
638 |
Prêts bruts |
240 |
207 |
186 |
269 |
229 |
229 |
Prêts nets |
163 |
122 |
102 |
198 |
173 |
124 |
Annulations de dette et refinancements nets |
3 |
116 |
2 |
1 |
1 |
1 |
APD multilatérale imputée |
365 |
497 |
400 |
592 |
nd |
nd |
Source : OCDE (CAD 2a) et DG Trésor
Note : Les données 2018 sont en cours de validation par les services de l'OCDE.
* Données selon l'ancienne méthode de comptabilisation, en flux nets.
** Données selon la nouvelle méthode de comptabilisation.
Au total, malgré la priorité africaine affichée, on n'observe pas jusqu'en 2018 de hausse très forte des engagements dans les pays les plus pauvres d'Afrique .
En ce qui concerne l'Afrique saharienne, la progression de l'APD bilatérale est relativement forte entre 2017 et 2018, mais cette catégorie regroupe des pays au développement très inégal dont certains ont fait des progrès importants au cours des dernières années. La progression vient surtout des prêts supplémentaires accordés par l'AFD, les dons ne progressant pas de manière massive.
Cette progression modérée des dons explique que les engagements auprès des pays prioritaires, qui sont quasiment tous des pays pauvres d'Afrique subsaharienne, ne connaisse pas non plus de progression spectaculaire , passant de 764 millions d'euros à 812 millions d'euros entre 2017 et 2018.
On peut toutefois espérer que les augmentations de crédits intervenus entre le PLF 2018 et le PLF 2019 permettent d'accroître les sommes effectivement disponibles pour les pays prioritaires .
En effet, en 2019, l'AFD a reçu un milliard d'euros de subventions supplémentaires (programme 209). Sur cette enveloppe additionnelle, près de 870 millions d'euros ont été alloués à l'activité de l'AFD en Afrique, dont près de 45 % pour la région Grand Sahel . Une ventilation sectorielle précise pour l'utilisation de la subvention supplémentaire a été fixée à l'AFD, 85 % des moyens devant être concentrés sur les cinq secteurs priorisés par le CICID (dont 200 M€ pour le traitement des crises et des fragilités et 200 M€ sur les thématiques climat et biodiversité) et près de 500 M€ pour les thématiques sociales, au premier rang desquelles figurent l'éducation (200 M€), la santé (100 M€) et l'égalité femmes-hommes (100 M€).
Répartition des subventions en Afrique en 2019 (millions d'euros) :
Secteurs CICD |
Agriculture & sécurité alimentaire |
EEA |
Education |
Environnement |
Hors Secteur |
Infrastructures |
Santé |
Secteurs Productifs |
TOTAL |
Total Prévisionnel 2019 |
163,2 |
87,5 |
239,6 |
18,5 |
148,7 |
61,6 |
97,6 |
52,9 |
869,6 |
En % |
19% |
10% |
28% |
2% |
17% |
7% |
11% |
6% |
100% |
2. La déclinaison par l'AFD de la priorité africaine
Sur la période 2014-2018, le groupe AFD a réalisé un volume d'autorisations d'engagement de 21,9 Md€ en Afrique, dont 17,7 Md€ en Afrique subsaharienne, lui permettant d'honorer l'engagement pris par le président François Hollande en décembre 2013 (20 Md€ au continent d'ici 2018).
L'Afrique représente 80 % du total de l'effort financier global de l'Etat français déployé par l'AFD et 50 % des engagements financiers annuels de cette dernière, soit 4,7 Md€ d'autorisations d'engagements (hors Proparco) en 2018. Par ailleurs, l'Afrique doit être le premier bénéficiaire du milliard d'euros de subventions supplémentaires « débloqué » en 2019.
Le secteur des infrastructures est le premier secteur d'intervention de l'AFD en Afrique , avec 1,5 Md€, représentant 31 % des financements octroyés sur le continent en 2018, contre 51 % en 2017. Le secteur productif représente aussi une part importante des financements sur le continent africain à hauteur de 26 % (financements des banques et du secteur financier et des industries manufacturières). Ces deux secteurs principaux représentent au total plus de la moitié des financements AFD sur le continent. Les secteurs sociaux - éducation et santé - ne représentent que 11 % des autorisations en 2018. Néanmoins, l'activité dans ces secteurs, pour un montant de 501 M€, est en nette progression par rapport à 2017, puisqu'elle a été multipliée par plus de trois (169 M€, soit 4 % des autorisations sur le continent en 2017). En 2018, les interventions dans ces secteurs restaient contraintes par le niveau des ressources en subvention.
Le problème de la dette des pays africains et
ses conséquences
Depuis 2010, les ratios d'endettement public et extérieur des économies africaines ont globalement augmenté de façon rapide : le taux d'endettement extérieur de l'Afrique est passé de 22 % du RNB en 2010 à 34 % du RNB en 2017, et de 73 % des exportations de biens et services à 144 % sur la même période. Le taux d'endettement public, qui inclut la dette intérieure, a suivi une trajectoire similaire, de 33 % du PIB en 2010 à 55 % du PIB en 2017 (contre 87 % en zone euro et 235 % au Japon). En juillet 2019, sur les 35 pays d'Afrique répertoriés dans les analyses de viabilité de la dette des pays à faible revenu (AVD-PFR) réalisées par le FMI et la Banque mondiale, 13 étaient classés en risque modéré de surendettement contre 10 en 2009, et 11 en risque élevé. L'augmentation du nombre de pays en risque modéré et élevé de surendettement se traduit par une baisse du nombre de pays dans lesquels l'AFD peut intervenir en prêts souverains. Cela conduit à une concentration de son exposition souveraine sur un nombre restreint de pays, notamment de pays prioritaires (PP) à risque modéré de surendettement. D'autre part, le classement des pays en risque modéré recouvre des situations économiques très hétérogènes et les AVD-PFR sont particulièrement sensibles à l'évolution du contexte macroéconomique et au classement en termes de qualité des institutions (indice CPIA ) ainsi qu'aux hypothèses des scénarios de base et des stress tests, ce qui accroît le risque pour l'AFD d'une concentration de son activité souveraine sur ces pays . Conformément à la doctrine dite Lagarde, l'AFD n'octroie pas de prêts à des pays en risque élevé de surendettement afin de ne pas contribuer au surendettement de ces pays, mais aussi de ne pas accumuler, par l'octroi de prêts dont les perspectives de remboursement seraient limitées, des risques excessifs pour les finances publiques françaises. L'exposition de l'AFD est par ailleurs pilotée en fonction de la capacité d'endettement des pays. Le volume de financement en prêts que l'AFD peut consentir est donc limité sur certaines contreparties à risques pour lesquelles les financements en subventions sont privilégiés. |
En 2019, l'AFD concentre ses interventions les plus concessionnelles sur les pays les moins avancés (PMA), avec un accent particulier sur les secteurs sociaux (santé, éducation...). Un plan d'actions ciblé sur les pays du Sahel a par ailleurs été approuvé par le Conseil d'administration de l'AFD en octobre 2015. Parallèlement au soutien aux pays les plus pauvres, un petit nombre de pays à revenu intermédiaire (PRI) continuera de bénéficier de ressources en dons à travers les mécanismes de réduction de leur dette (RCI, Cameroun, Congo). Pour les autres PRI, l'octroi de dons ne financera que des prestations techniques. Les interventions porteront principalement sur des thématiques de soutien à la croissance, notamment dans des secteurs dans lesquels l'expertise française peut être valorisée.
L'AFD compte également s'appuyer sur le plan d'investissement extérieur de l'Union européenne (PIE), qui soutient les investissements en Afrique et dans le voisinage de l'UE. Le PIE repose sur trois piliers : un fonds européen pour le développement durable (FEDD), qui combine des structures de placement existantes (AIP et FIV) à une nouvelle facilité de garantie ; l'assistance technique ; et l'évolution de l'environnement des affaires.
3. Des difficultés particulières au Sahel
a) Une Région qui concentre les difficultés
Ainsi que l'a souligné Jean-Marc Châtaigner, envoyé spécial pour le Sahel et chargé à ce titre d'une mission de coordination entre les ambassadeurs des pays impliqués au Sahel et des membres du G5 Sahel, lors de son audition par vos rapporteurs, le Sahel est en quelque sorte « l'ultime frontière du développement » . Le Niger, par exemple, qui est passé de 3,6 millions d'habitants à l'indépendance à 23 millions aujourd'hui et sans doute 100 millions de personnes en 2100, reste au dernier rang de l'indice de développement humain (IDH) notamment en raison de l'éducation.
Les travaux du PNUD sur les causes du djihad mettent en avant l'insatisfaction en matière de sécurité et de justice, un sentiment d'injustice et une menace ressentie face à l'uniforme des forces de sécurité intérieures ou extérieures, enfin un désir d'ascension économique : avoir une voiture, une arme... et seulement en dernier le motif religieux.
Par ailleurs, comme l'a souligné lors de de son audition Michel EDDI, directeur du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), outre le choc démographique, le Sahel va subir de plein fouet le changement climatique , car c'est dans la zone intertropicale que les effets de celui-ci sont les plus puissants. Ceci aura des conséquences très importantes sur les agricultures du Sahel. Dès lors, il est nécessaire de trouver un modèle agricole qui diminue son impact sur l'environnement tout en assurant la subsistance d'une population en croissance.
Au total, au Sahel, une grande partie de l'aide publique au développement n'est pas allée au-delà de l'accompagnement de la croissance démographique . Elle a toutefois sans doute permis à des pays comme le Niger de « tenir »et a évité des désastres humanitaires. Des initiatives en matière agricole ont parfois également eu de bons résultats. Il importe toutefois de réussir le « passage à l'échelle » des projets et de moins les concentrer dans les zones urbaines, car c'est dans les zones « périphériques » que les crises prennent actuellement naissance.
b) Les efforts de l'AFD pour devenir plus agile et plus rapide
Le fonds MINKA a été créé par instruction du CICID de novembre 2016 pour accélérer et rendre plus efficace la réponse aux crises en matière de développement. Il s'agissait de répondre à la sollicitation du gouvernement, des parlementaires, voire des armées dans une optique d' « approche globale », afin d'obtenir plus rapidement des résultats tangibles pour la population des pays en crise et ainsi rendre plus facile la reconstruction politique et plus difficile l'action des éventuels groupes terroristes.
Le fonds « Minka » La facilité d'atténuation des vulnérabilités (depuis renommée « Fonds paix et résilience - Minka ») a été créée en mars 2017 par l'AFD sur instruction du CICID du 30 novembre 2016 afin de « renforcer encore l'action de la France pour la paix et la stabilité internationale et d'investir dans la prévention des crises (en particulier sanitaires, politiques, environnementales, sociales), par une action en amont sur les fragilités dont elles se nourrissent ». Aussi, le fonds Minka représente l'un des principaux instruments de mise en oeuvre de la stratégie française « Prévention, Résilience et Paix durable. Approche globale de réponse à la fragilisation des Etats et des sociétés ». La doctrine d'emploi de Minka est adaptée aux contextes de crises, tant sur le plan stratégique, qu'opérationnel. Le Fonds a vocation à contribuer directement au retour à la paix, en cherchant à agir sur les déterminants de la crise et sur la restauration du lien social. Pour être éligible à un financement Minka, un projet doit cibler directement et principalement les causes profondes (ex : sentiment de marginalisation de certains groupes sociaux, faible légitimité de l'Etat) ou immédiates (ex : conflits fonciers, attractivité de groupes armés auprès d'une jeunesse désoeuvrée) de la crise. Minka finance également des projets visant, en prévention, à atténuer les effets d'une crise ou, au minimum, veillant à ne pas aggraver le conflit (approche « ne pas nuire »). Selon les conclusions du CICID 2016 et la note au Conseil d'Administration de l'AFD de mars 2017, les ressources Minka sont octroyées selon quatre paramètres cumulatifs : a) exposition élevée de la zone considérée à des chocs majeurs (endogènes ou exogènes) ; b) faible capacité à y faire face ; c) degré de propagation élevé des tensions ou des chocs ; d) avantage comparatif de la France et de l'AFD pour y jouer un rôle. Il privilégie les réponses structurantes, le plus souvent à l'échelle régionale, les crises ayant souvent des causes et/ou des effets transfrontaliers. Aussi, le Conseil d'Administration de l'AFD a autorisé le déploiement de Minka sur quatre initiatives régionales : i/ Sahel, ii/ Lac Tchad (crise Boko Haram), iii/ crise centrafricaine, iv/pourtour syrien et zones de l'Irak libérées de Daech (cf. annexe). Il existe aussi depuis 2018 une fenêtre de garantie pour le secteur privé en zones de crise (ARIZ TPE Minka). En tant qu'outil de financement de développement dédié à la prévention et à la sortie de crise et mettant l'accent sur des réponses structurantes, Minka est un outil de financement du développement inscrit sur le long terme. Il s'agit par exemple de restaurer la confiance entre gouvernants et gouvernés (grâce par exemple à la restauration de services de bases), et/ou entre groupes sociaux (grâce par exemple à des projets bénéficiant de manière inclusive aux réfugiés et aux communautés hôtes). Ainsi, conformément à l'approche globale promue au sein de la stratégie française « Prévention, Résilience et Paix durable », les actions financées par Minka se distinguent des actions humanitaires, de stabilisation, et de sécurité, qu'il complète. Une approche concertée avec les acteurs de l'Equipe France et les autres partenaires humanitaires et de développement est indispensable pour partager un diagnostic conjoint, des objectifs convergents, et être bien positionné pour influencer la trajectoire des crises. Le Fonds Minka de l'AFD a été doté à hauteur de 100 M€ en 2017, 120 M€ en 2018, et 172,5 M€ en 2019 (hors rémunération pour cette dernière année alors qu'elle était incluse en 2017 et 2018). La ventilation du +1 Md€ en don-projet en 2019 a par ailleurs permis de dédier des crédits supplémentaires au traitement des crises et fragilité. Ce seront donc près de 250 M€ en don qui ont été fléchés pour le traitement des crises et des fragilités en 2019. Le PLF 2020 prévoit une enveloppe de 200 M€ dédiée à la facilité Minka en 2020, conformément aux instructions du dernier CICID. |
Il était alors envisageable de confier le nouveau fonds soit à l'AFD, soit au Centre de crise et de soutien du Quai d'Orsay, celui-ci ayant déjà l'expérience des projets de stabilisation menés en urgence dans des situations de guerre ou de crise. C'est finalement l'AFD qui a été chargée de gérer ces crédits.
Dès lors, l'agence s'est efforcée d'utiliser les moyens à sa disposition, voire de modifier certaines de ses pratiques afin de pouvoir agir de manière plus rapide et plus agile. Le fonds Minka a ainsi été doté de procédures d'instruction et d'exécution de projets révisée reposant sur :
- la priorité donnée aux projets Minka dans les processus internes de l'agence ;
- l'utilisation de manière systématique de l'ensemble des flexibilités autorisées dans le cycle d'instruction ;
- l'introduction de flexibilités supplémentaires notamment en matière de passation de marchés, de recours à la maîtrise d'ouvrage directe AFD ou encore d'amendements des projets.
Ainsi, les gestionnaires du fonds ont essayé d'assouplir certaines contraintes liées à la mise en oeuvre ordinaire des projets de l'AFD , l'objectif final recherché étant d'obtenir des délais d'instruction et de décaissement plus serrés et des réalisations dans les six premiers mois après octroi, soit un rythme au moins deux fois plus rapide que pour les projets « ordinaires ».
L'ensemble des personnes entendues par vos rapporteurs ont toutefois souligné que cet objectif n'avait pas été suffisamment atteint . Selon l'AFD, les raisons en sont multiples :
- les délais de décaissements et donc de premiers résultats peuvent rester longs dans certains cas , notamment s'agissant de recours aux maitrises d'ouvrage publiques (34% des octrois 2017-18), souvent faibles et peu présentes dans ces zones d'intervention difficiles. Minka ne souhaite toutefois pas délaisser ce canal conformément aux engagements de la France en matière d'efficacité de l'aide (Déclaration de Paris, 2005) ;
-un autre défi vient des exigences règlementaires auxquelles l'AFD est soumise en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme , qui peuvent rendre plus complexe le financement de certains opérateurs - et en particulier les OSC et les organisations internationales.
Devant ces difficultés, l'AFD a adopté en mai 2019 des nouvelles procédures, ainsi que des modes de travail associant ONG, maîtrises d'ouvrage publiques et un renforcement ciblé des capacités en direction de ces dernières, afin de renforcer la mise en oeuvre des projets Minka.
L'encadré ci-dessous présente des projets Minka mis en oeuvre à un rythme plus rapide que les projets « ordinaires » de l'AFD :
Le projet « améliorer la sécurité alimentaire dans les régions de Bambari et Berberati » en RCA (SAMBBA, 3,4 M€ sur 2017-2019) a été conçu en trois mois avec des objectifs de court et moyen terme. Il soutient la transition d'une phase de réponse aux besoins urgents des populations vers un relèvement agricole (6 400 ménages et 20 groupements de femmes ciblés), en trouvant des pistes d'ancrage communautaire à celui-ci. Le projet SAMBBA est mis en oeuvre par un consortium d'ONG, d'une part, et par les services de l'agriculture et de l'élevage de l'Etat centrafricain, d'autre part. Il s'agit d'appuyer la remise en fonction du système étatique de suivi et de conseil agricole ainsi que la pérennisation des activités des éleveurs et des agriculteurs bénéficiaires. Actuellement, grâce à SAMBBA, 525 producteurs bénéficient d'un appui via 21 Champs Écoles Paysans pour améliorer leurs connaissances techniques et 200 femmes sont mobilisées chaque semaine pour des ateliers d'échanges pour lutter contre la malnutrition chronique. Le projet « redressement Tillabéry » au Niger a été signé en décembre 2018 et un premier versement a été effectué en janvier 2019. Le partenaire de mise en oeuvre, la haute autorité pour la consolidation de la paix (HACP), est un organe de l'Etat nigérien oeuvrant pour la stabilisation et la consolidation de la paix et qui a la capacité de coordonner les ONG locales sur place. Financé à hauteur de 8 M€, le programme vise à améliorer l'accès aux ressources et intrants nécessaires à l'activité pastorale dans 8 communes de la région (50 ouvrages hydrauliques pour un accès à l'eau potable pour 38.000 personnes, et des activités pastorales bénéficiant à 70.000 personnes). Après le lancement de l'appel d'offre pour le recrutement de l'ONG opératrice, les activités ont démarré en avril 2019. |
Par ailleurs, les relations et la coopération entre l'AFD et Barkhane se sont améliorées selon Jean-Marc Châtaigner, envoyé spécial pour le Sahel. Un conseiller de l'AFD est placé auprès de Barkhane afin de fluidifier les échanges d'information, et le représentant spécial réunit lui-même l'ensemble des acteurs dans une « Task force » sur le développement du Sahel.
c) Le rôle important du Centre de crise et de soutien du Quai d'Orsay
(1) Une mission essentielle
Le principal acteur français des crises internationales est le Centre de crise et de soutien (CDCS) du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, qui, outre ses missions relatives à la sécurité des Français à l'étranger, de conseils aux voyageurs, et de point d'entrée du ministère pour toute crise, remplit une mission d'aide humanitaire et de stabilisation. Sa temporalité d'intervention est alors d'environ 0-18 mois sur le continuum de crise.
Lors d'une crise (en particulier une catastrophe naturelle), le CDCS coordonne ainsi la réponse humanitaire d'urgence française, en lien avec les autres ministères concernés (Intérieur, Santé, Défense) et les ONG. En cas de crise prolongée, (liée à un conflit, avec un afflux massif de réfugiés par exemple), le CDCS coopère pour l'essentiel de sa mission avec les ONG pour mener des projets plus longs (3 mois à 1 an) afin de répondre aux besoins des populations.
La stabilisation, quant à elle, se définit par rapport à ses objectifs politiques. Elle s'inscrit dans une dynamique post-conflit et vise à créer les conditions de la sortie de crise, ce qui passe par le relèvement de l'Etat dans ses fonctions régaliennes, le tout dans un cadre défini par la politique étrangère de la France, avec présence éventuelle de forces françaises.
Les modes opératoires du CDCS spécialement adaptés au contexte de crise sont les suivants :
- des financements rapidement mobilisables (procédure de décaissement accélérée en phase avec le rythme de l'action militaire et les besoins des ONG) ;
- une capacité à instruire des micro-projets dans des zones circonscrites ;
- une capacité à mener des projets de stabilisation à impact rapide au profit des populations en lien avec les opérations militaires ;
- une capacité à prendre des risques, ce qui distingue également fortement le CDCS des organismes de développement.
Le principal outil dont dispose le CDCS pour cette double mission est le Fonds d'urgence humanitaire (FUH), auquel s'ajoutent des enveloppes spéciales en fonction des crises. Ainsi, en 2019, le CDCS a pu mettre en oeuvre 43,4 millions d'euros du FUH, 5,5 millions d'euros d'aide budgétaire de sortie de crise et 43 millions d'euros d'enveloppe additionnelle pour la Syrie, soit au total 91,8 millions d'euros.
Cette somme est en nette progression par rapport à 2018 (86,7 millions d'euros) et 2017 (60 millions d'euros). Pour 2019, le FUH va bénéficier d'une hausse substantielle de ses crédits, qui passent à 80,7 millions d'euros .
Toutefois, ces sommes restent très inférieures à celle consacrée par nos partenaires aux mêmes missions : l'Allemagne consacre environ 1,85 milliards d'euros à l'aide humanitaire et à la stabilisation, avec une équipe de 180 agents, et le Royaume-Uni 2,4 milliards d'euros (en 2018) via le ministère du développement international (DFID) et la « Stabilization Unit » interministérielle, avec 120 agents et 700 experts projetables.
(2) Quelle articulation avec l'AFD ?
Ainsi que décrit ci-dessus, l'AFD bénéficie, pour ses interventions dans les pays fragiles, du fonds Minka doté de 200 millions d'euros en 2019. Cette intervention de l'agence dans le champ des crises rendait nécessaire une formalisation de l'articulation de ses missions avec celles de du CDCS. Des progrès ont effectivement été accomplis avec des réunions régulières et la création de deux groupes de travail (« alerte précoce » et « stabilisation-développement au Sahel ») réunissant le ministère des armées, l'AFD et le CDCS. Il s'agit ainsi de permettre l'utilisation optimale des points forts du CDCS et de l'AFD : conception et mise en oeuvre d'interventions humanitaires et de stabilisation en zone de crise pour le premier, prévention des crises et développement post-crise pour la seconde.
Cette répartition suppose toutefois en réalité un renforcement des moyens du CDCS, ceux-ci étant pour le moment très inférieurs à ceux de ses homologues européens.
En 2017 avait déjà eu lieu le transfert de la ligne budgétaire consacrée au déminage de l'AFD au CDCS et le financement de l'enveloppe exceptionnelle consacrée aux territoires libérés de Daech sur crédits du programme 209 initialement fléchés vers l'AFD. Vos rapporteurs considèrent qu'une partie des crédits consacrés au fonds Minka devraient, dans le même esprit, revenir au CDCS.
d) L'Alliance Sahel, une initiative qui vise à améliorer la coordination de l'aide
Sous l'impulsion de la France, l'Alliance Sahel , plateforme de bailleurs, a été lancée par le Président Macron et la Chancelière Merkel le 13 juillet 2017 pour une meilleure coordination de l'aide dans la zone. Elle constitue ainsi la plateforme principale de coordination des bailleurs intervenant dans la région Sahélienne (en premier lieu UE, Allemagne, France, Banque mondiale, Banque Africaine de Développement, PNUD, mais également Royaume-Uni, Espagne, États-Unis, Norvège, Danemark, à titre de nouveaux membres ou d'observateurs).
L'Alliance Sahel vise l'obtention de résultats de développement concrets sur les zones les plus fragiles et vulnérables (généralement périphériques et/ou transfrontalières) en favorisant une meilleure articulation des programmes de ses membres avec les problématiques humanitaires et de sécurité. Elle privilégie une approche en termes de redevabilité et d'efficacité de l'APD, ainsi que de transparence et d'évaluation des actions mises en oeuvre, en lien étroit avec les gouvernements partenaires et les sociétés civiles concernées.
Elle repose sur quatre piliers :
a. une concentration des efforts dans six secteurs prioritaires d'intervention : i) employabilité des jeunes (éducation et formation) ; ii) agriculture, développement rural et sécurité alimentaire ; iii) énergie et climat ; iv) gouvernance ; v) décentralisation et services de base ; vi) sécurité et développement ;
b. une meilleure prise en compte des enjeux de sécurité : intégrer la contrainte sécuritaire dans la mise en oeuvre des projets de développement et renforcer les services de sécurité des États ;
c. une objectivation des résultats : les membres de l'Alliance se sont engagés collectivement sur un nombre restreint d'objectifs précis à atteindre en 1, 3 ou 5 ans, partagés avec les pays bénéficiaires, par thématique, mesurables et définis à l'échelle de la région ;
d. une amélioration des modes opératoires : les membres sont prêts à examiner tout ce qu'il est possible de faire pour accélérer l'obtention des résultats de développement, en considérant l'ensemble des instruments disponibles, les propositions d'innovations et d'implication de nouveaux acteurs (des ONG locales, des approches communautaires, des partenaires privés...).
Entendus par vos rapporteurs, Jean-Marc Gravellini, responsable de l'unité de coordination de l'Alliance Sahel, a indiqué que les projets portés par l'Alliance représentaient, fin 2018, 11 milliards d'euros dont 8 milliards d'euros déjà en cours d'exécution et 3 milliards d'euros de projets nouveaux en cours d'instruction. L'ensemble des 11 milliards devraient être décaissés en 2022.
Des partenaires qui doivent davantage se coordonner L'Alliance Sahel doit constituer une initiative « moteur » dans l'intensification des liens entre les institutions de coopération et de développement françaises et allemandes. Ainsi, la mise en oeuvre de l'Alliance Sahel permet un dialogue renforcé avec le ministère allemand du développement international (BMZ) ; la KfW demeure également l'interlocuteur de l'AFD pour ses opérations dans la région. La Banque mondiale et l'AFD renforcent également leur coopération dans les pays du G5 Sahel, en particulier autour de deux programmes phares, l'un dans la région transfrontalière du Lac Tchad, l'autre dans la région de Konna au Mali. D'autres programmes font par ailleurs l'objet d'échanges renforcés, notamment au Niger autour de Tillabéry. Le Royaume-Uni, au travers du DFID, a rejoint l'Alliance Sahel en mars 2018, ayant par ailleurs souligné son intérêt pour y conduire les réflexions autour de la thématique du genre, thématique co-animée aujourd'hui par le DFID et l'AFD. De plus, une coordination bilatérale entre la France et le Royaume-Uni est assurée par les rencontres annuelles de haut niveau (Sommet trilatéral DFID/MEAE/AFD) et les plans d'action qui en découlent. Ainsi, en 2018, le Sahel fait l'objet d'un axe de coopération renforcée entre le DFID et l'AFD, aussi bien en termes de partage de connaissance et de production intellectuelle (genre, 3D, éducation) qu'en termes de partenariat opérationnel (cofinancement avec la Banque mondiale et le DFID du Programme de protection sociale adaptative au Sahel - 64M Eur DFID, 6M Eur AFD). La coordination entre la banque africaine de développement (BAD) et l'AFD se décline également à travers l'Alliance Sahel. La BAD dispose d'un Bureau de coordination des États en transition, chargé du développement et de la mise en oeuvre de la Facilité d'appui à la transition, qui s'adresse aux États fragiles et en crise dont les pays sahéliens. Ce bureau est l'interlocuteur désigné de l'Alliance Sahel. La coopération avec la BAD est toutefois restée en 2018 en-deçà du niveau attendu, du fait notamment que la BAD est en cours de réorganisation. La Commission européenne est également membre de l'Alliance Sahel, et, à ce titre, une coordination régulière est assurée avec l'AFD. |
Autre aspect de l'Alliance Sahel dont vos rapporteurs soulignent l'aspect essentiel, la coordination accrue de bailleurs est aussi l'occasion de faire passer des messages plus forts aux pays du G5 : comme l'a souligné Jean-Marc Gravellini, il s'agit ainsi d'un instrument de dialogue politique. Ce dialogue doit à l'évidence porter sur les points suivants :
- la situation démographique , qui n'est pas soutenable à moyen terme ;
- les nécessaires réformes administratives ;
- l'absence ou le recul de l'Etat dans certains territoires.
Enfin, l'Alliance Sahel s'efforce de travailler dans les zones les plus impactées par les problèmes sécuritaires, sans administrations déconcentrées, sans élections régulières et où les pouvoirs locaux sont souvent peu légitimes. À cette fin, elle tente de promouvoir des interventions avec les ONG locales, les collectivités locales et les petits entrepreneurs.
Interrogé par vos rapporteurs sur la dégradation de la situation au Sahel malgré l'action des partenaires internationaux, M. Gravellini a fait valoir a contrario l'exemple de la Mauritanie, qui a su, grâce à une action résolue des autorités centrales, retrouver la stabilité et la sécurité nécessaires à tout développement. Cette volonté politique n'existe cependant pas au même degré, pour le moment, dans l'ensemble des pays du Sahel.
Ces difficultés soulèvent ainsi la question difficile de l'introduction d'une certaine dose de conditionnalité dans l'aide . Plusieurs éléments rendent cependant difficile une telle évolution : la nature même des institutions d'aide qui, à l'instar de l'AFD ou de la Banque mondiale, sont souvent des banques et cherchent donc avant tout à placer leurs prêts ; l'histoire des relations de la France avec l'Afrique qui rend parfois ce genre de discours plus difficile à tenir, difficulté que n'ont pas des plus petits pays, ou, dans la région sahélienne, les pays anglo-saxons.
4. La nécessité de travailler en réseau avec l'ensemble des acteurs français du développement
Bien que l'AFD dispose d'un savoir-faire reconnu dans de nombreux domaines, elle ne représente à elle seule qu'une faible part des financements, de la capacité d'action et de l'expertise nécessaires pour répondre aux besoins des pays en développement, en particulier en Afrique sub-saharienne. En ce sens, vos rapporteurs se félicitent que, dans son dernier projet stratégique pour la période 2018-2022, l'AFD se considère désormais comme une « plate-forme bilatérale de la politique française », afin d' « accueillir, fédérer et projeter vers les pays émergents et en développement tous ceux qui peuvent apporter des ressources, de l'expertise et des capacités d'action. ».
Il reste cependant du chemin à parcourir pour concrétiser cette nouvelle orientation. Plusieurs acteurs du développement ou de l'approche globale rencontrés par vos rapporteurs (collectivités locales engagées dans la coopération décentralisée, militaires engagés au Sahel...) ont en effet souligné les difficultés qu'ils avaient parfois à coopérer avec l'agence , notamment parce que celle-ci, conformément aux pratiques habituelles d'une banque de développement, soutient en priorité des projets de grande ampleur, complexes, long à instruire et à mettre en oeuvre.
En outre, la contraction du réseau des coopérants français au fil des années a également fait perdre à la France une certaine influence tandis que d'autres pays, comme l'Allemagne, continuent à entretenir de larges effectifs de coopérants. Dès lors, il est parfois plus aisé pour ces multiples acteurs de coopérer avec les organismes issus de ce pays. Ainsi, l'ADEME, dont vos rapporteurs ont entendu le directeur, est certes soutenue par l'AFD mais doit bien constater que l'influence de la coopération allemande (GIZ) sur les normes des pays où elle intervient, en particulier autour de la Méditerranée, en fait un partenaire incontournable .
De même, Expertise France, relais naturel de l'expertise française, devrait pouvoir s'appuyer davantage sur l'AFD pour projeter cette expertise en Afrique subsaharienne. À cet égard, il est impératif que le rapprochement des deux agences permette d'améliorer cette projection d'expertise et de développer les relations entre Expertise France et les autres acteurs de l' « équipe de France du développement ».
B. UN DISPOSITIF D'ÉVALUATION À AMÉLIORER
Selon le rapport de l'OCDE de la dernière « revue des pairs » de l'APD française : « La France devrait développer et intégrer la gestion axée sur les résultats dans l'ensemble de ses programmes de coopération au développement, afin que les résultats obtenus (du niveau projet au niveau central) servent à améliorer la redevabilité, le pilotage, la communication et l'apprentissage. » L'OCDE dessine ainsi un programme de réforme de l'évaluation de l'APD française qui, s'il était suivi, permettrait une meilleure information des parlementaires et des citoyens sur les résultats que l'aide permet d'atteindre dans les pays qui en bénéficient. Une telle évolution donnerait ainsi davantage de sens à la politique de développement menée par notre pays et permettrait de disposer d'éléments de nature à éclairer des débats trop souvent focalisés sur des éléments purement financiers.
1. Une évaluation interne utile mais éclatée
Actuellement, l'évaluation interne des projets d'aide publique au développement est assurée en France par trois pôles distincts :
- l'unité d'évaluation des activités de développement (UEAD) du ministère de l'Économie et des Finances (quatre à cinq évaluation par an) ;
- le pôle de l'évaluation et de la performance du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères (quatre à cinq évaluations par an également) ;
- le département de l'évaluation et de l'apprentissage (EVA) de l'Agence française de développement, qui réalise environ 35 évaluations par an.
Ces trois entités rendent compte à leurs directions générales respectives et au Parlement et pilotent des évaluations soit individuellement, soit conjointement.
Concrètement, les évaluations pilotées par ces services sont en général réalisées par des cabinets de conseil sélectionnés sur appels d'offres, sous la direction d'une équipe de responsables administratifs des ministères concernés et de l'AFD. Les évaluations sont encadrées par un groupe de référence garantissant une pluralité de points de vue (parlementaires, représentants de la société civiles, du monde de recherche, autres administrations..) et elles font l'objet d'une restitution publique. Elles sont effectuées avec sérieux et compétence et peuvent permettre aux services d'améliorer leurs pratiques, mais elles présentent aussi de nombreuses limites et aboutissent souvent à des conclusions un peu stéréotypées, mettant l'accent sur la réussite globale du projet ou programme concerné mais relevant des marges de progression comme la nécessité de meilleurs effets d'apprentissage, une meilleure coordination, etc.
Les évaluations réalisées par l'AFD Le dispositif d'évaluation de l'AFD comprend trois niveaux : le premier, impliquant des évaluateurs externes, concerne les projets conduits par les agences. Le second niveau, qui comprend des évaluations plus approfondies, concerne un ensemble de programmes dans la durée, comme l'aide au développement de la France au Vietnam. Des cabinets de conseil y sont associés. Enfin, l'AFD conduit des évaluations scientifiques d'impact, conduits avec des centres de recherche comme l'Institut de recherche pour le développement (IRD) ou le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), comme au Congo, où les critères de biodiversité et de développement durable sont pris en compte. Des évaluations plus partenariales, comme avec la Kreditanstalt für Wiederaufbau (KFW), et, au sein du réseau International Development Finance Club (IDFC), entre organismes bancaires, sont également réalisées. Nous allons changer ainsi nos méthodes. L'AFD a également récemment publié un rapport d'ensemble sur ses évaluations, avec un focus sur la biodiversité. |
2. Une évaluation externe encore insuffisante
Le suivi externe de la politique d'aide au développement est réalisé par plusieurs acteurs :
- comme pour l'ensemble des politiques de l'Etat, la Cour des comptes peut contrôler tel ou tel aspect ou acteur de la politique d'aide publique au développement ;
- L'Assemblée nationale ainsi que le Sénat produisent des rapports de contrôle de la politique du gouvernement en matière d'aide publique au développement ;
- l'OCDE ( Comité d'aide au développement) organise un contrôle par les pairs des dispositifs nationaux d'aide au développement ;
- les ONG effectuent également un suivi régulier et interviennent publiquement sur la politique d'aide au développement : la coordination française « Coordination SUD » intervient ainsi dans le débat sur l'APD en y apportant ses analyses sur les stratégies, les programmes ainsi que les aspects budgétaires.
Toutefois, la France est en retard en ce qui concerne la transparence de l'aide et malgré d'importants efforts de l'AFD, qui a rendu disponible une brève description de l'ensemble de ses projets sur son site Internet, l'ONG Publish What You Fund ne classait en 2018 la France au 32ème rang sur 45 en matière de transparence de l'aide.
Par ailleurs, l'évaluation reproduit elle-même l'éclatement du pilotage de la politique d'aie publique au développement française entre deux ministères et un établissement public, ce qui rend plus difficile des appréhensions transversales ou globales de cette politique.
En outre, comme l'a souligné le rapport d'Hervé
Berville en 2018, c'est la nature même de l'évaluation
réalisée qui apparaît insatisfaisante :
«
le suivi de la politique d'aide publique au
développement constitue rarement une évaluation à
proprement parler. Une évaluation est une analyse ayant pour objet
d'apprécier l'efficacité d'une politique en comparant ses
résultats aux objectifs assignés et aux moyens mis en oeuvre. Or,
les différentes instances françaises mentionnées
précédemment concentrent leur analyse sur les processus de
gestion, l'organisation institutionnelle et les enjeux financiers et
budgétaires (...) les différentes évaluations
menées abordent peu la cohérence externe, l'efficacité,
l'efficience, l'impact et la durabilité des interventions
françaises et ne suivent pas systématiquement le cadre de la
chaîne d'évaluation
».
Si la loi du 7 juillet 2014 a prévu la mise en place d'un observatoire de la politique de développement et de solidarité internationale afin de permettre une évaluation plus indépendante, cette instance s'est peu réunie et ne dispose pas de l'expertise et des moyens nécessaires.
3. Le dispositif britannique d'évaluation, un exemple pour la France ?
En 2015, le Royaume-Uni a adopté une loi fixant à 0,7% la part du RNB consacrée à l'aide publique au développement, conformément aux recommandations des organisations internationales. Parallèlement, elle a créé un dispositif d'évaluation original de cette politique, en créant un organisme dédié, l'Independant committee on aid impact (ICAI). Vos rapporteurs se sont rendus à Londres en juillet 2019 afin de prendre connaissance des caractéristiques de ce dispositif en rencontrant notamment Mme Tamsyn Barton, directrice de l'ICAI, des parlementaires de la commission de l'aide au développement de la chambre des communes et des représentants du ministère du développement international (DFID).
L'ICAI a été explicitement créée comme une sorte de contrepartie à la fixation de l'objectif des 0,7% du RNB dans la loi , celui-ci impliquant une forte hausse des moyens consacrés à l'aide publique au développement. Il s'agissait ainsi de donner des gages au public et aux opposants politiques de cette hausse de crédits, leur garantissant que chaque livre investie le serait sous le regard d'un organisme indépendant à même d'en vérifier le bon usage et l'efficacité.
L'ICAI est ainsi conçu comme un organisme indépendant du Gouvernement et dont la mission est de rendre des comptes au Parlement, plus précisément à la Commission parlementaire chargée du développement (International Development select Committee, IDSC).
L'ICAI est dirigée par trois commissaires, dispose d'un secrétariat de dix membres et fait appel à des consultants externes pour conduire les évaluations sous la direction des commissaires. Les consultants co-contractants sont au nombre de quatre, et les contrats sont signés pour quatre ans. Le secrétariat de l'ICAI travaille sur une base quotidienne avec ces co-contractants.
Les Commissaires de l'ICAI ont en principe une compétence en matière d'APD. Ils sont nommés par le ministre du développement international, représenté en réalité par un directeur général du ministère, assisté par la commission parlementaire chargée du développement. A titre d'exemple, l'un des commissaires était auparavant auditeur à la Banque africaine de développement, le second avait été parlementaire pendant 14 ans au sein de la commission parlementaire du développement international, tandis que la commissaire en chef avait travaillé dans le secteur de l'APD : ONG, Gouvernement, BERD, etc.
Aspect important, les sujets de contrôle de l'ICAI sont choisis par elle-même, mais avec l'accord de la Commission parlementaire . L'ICAI a produit 28 rapports au cours du dernier exercice, dont les deux tiers ont été estampillés « vert » (satisfaisant) ou orange (assez satisfaisant) et un tiers rouge (moins que satisfaisant). Les résultats pressentis sont mis en commun avec le DFID, avec lequel il peut y avoir également quelques réunions complémentaires. Les rapports sont présentés devant la Commission parlementaire chargée du développement, qui auditionne simultanément l'ICAI et le ministre environ une fois par mois. Les recommandations des rapports doivent donner lieu à une réponse du ministère détaillant les mesures prises et l'ICAI peut exiger de nouvelles réponses tant qu'elle n'est pas satisfaite (droit de suivi). La Commission parlementaire ne peut pas changer la note attribuée à un projet, les rapports étant rendus publics. Pour ses études, l'ICAI ne passe pas seulement en revue le DFID, mais les 18 départements ministériels différents pouvant mener des actions en matière de développement international.
Selon les parlementaires membres de la Sous-commission de l'ICAI au sein de la Commission du développement international, l'ICAI constitue « une ressource extraordinaire » pour les parlementaires. En particulier, la discussion entre l'ICAI et le DFID devant la Commission permet d'aller beaucoup plus loin dans le contrôle du DFID que les parlementaires ne pourraient le faire par l'exercice ordinaire de leur contrôle.
Afin de mener ses évaluations, L'ICAI mobilise notamment les critères établis par l'OCDE. En général, les meilleures notes sont obtenues sur la pertinence et l'efficacité, les moins bonnes sur le « learning » (les effets d'apprentissage).
Selon la commissaire en chef de l'ICAI, celle-ci considère les objectifs des programmes d'aide au développement comme des postulats, évalue l'atteinte des résultats que les ministères se sont fixés et ne prétend pas dire précisément comment faire pour atteindre ces résultats. Toutefois, la distinction entre évaluation de la mise en oeuvre d'une politique et évaluation de cette politique elle-même n'est pas aussi tranchée dans la réalité.
Plusieurs des personnes rencontrées lors du déplacement à Londres ont indiqué qu'actuellement, une partie de la droite britannique conteste en la nécessité d'une APD à 0,7% du RNB. Les rapports de l'ICAI peuvent être mobilisés à l'appui de ces critiques.
En revanche, selon ses représentants, l'ICAI n'est pas encore assez connue du public. Elle essaie de communiquer de manière plus proactive avec les médias.
L'ICAI n'est cependant pas exempte de critiques :
- le budget de l'ICAI est de 15,07 millions de livres sur 4 ans, dont 9 millions pour les co-contractants, est contrôlé par le DFID, de même que ses membres sont nommés par celui-ci. Dès lors, des Think Tanks comme le Center for global developpement, dont vos rapporteurs ont rencontré des représentants, estiment que le DFID exerce en réalité une « influence politique subtile » sur l'ICAI, notamment pour le choix des sujets d'évaluation.
- il existe un débat sur la nature souhaitable de la mission de l'ICAI : doit-elle se cantonner à des réflexions très techniques, ou bien doit-elle au contraire avoir une vision stratégique ? Récemment, le DFID a élaboré une stratégie relative à la croissance des pays en développement que l'ICAI a évaluée. Selon le CGD, il faut toutefois éviter que l'organe de contrôle devienne un organe stratégique ;
- le DFID considère que la multiplication des évaluations accaparent le DFID au détriment de son action propre, d'autant qu'il arrive souvent que les recommandations soient trop vagues ou insuffisamment réalistes pour être réellement applicables.
Le DFID et la politique britannique d'aide au développement Le DFID, ministère du développement international, a été détaché du ministère des affaires étrangères et érigé en ministère indépendant en 1997, afin de manifester l'autonomie des objectifs de la politique de développement (essentiellement la lutte contre la pauvreté) par rapport à ceux de la politique étrangère britannique. Le principal objectif assigné à ce nouveau ministère est la réduction de la pauvreté. Un ministre du développement est également nommé. En 2002, une loi sur le développement international entérine l'objectif de réduction de la pauvreté et promeut la totale déliaison de l'aide. Puis, en 2015 est adoptée une loi qui fixe la part (dépense d'APD)/RNB à 0,7%. L'APD britannique représente 14,4 millions de livres dont le DFID gère 75 % environ. Cette part est en diminution constante au cours des dernières années, les autres ministères étant parvenus à capter une partie des abondants crédits de l'aide au développement en présentant des projets pouvant être considérés comme se rattachant cette politique. Environ 2/3 de ces montants sont de l'aide bilatérale, environ 1/3 de l'aide de l'aide multilatérale. L'essentiel de l'aide est composée de dons. Des interrogations existent sur la possibilité de faire davantage de prêts souverains. L'aide du DFID doit concerner pour 50% les États fragiles ou affaiblis par des conflits. Elle doit se conformer aux « 5P » : planet, people, peace, prosperity, partnerships. |
Au total, le dispositif d'évaluation britannique, dont l'ICAI constitue la pièce maîtresse, constitue selon vos rapporteurs une référence valable pour penser un nouveau dispositif d'évaluation qui aurait vocation à être inscrit au sein de la future loi d'orientation relative à la politique de solidarité internationale.
Selon les informations recueillies par la commission, le projet actuel du Gouvernement, qui devrait être intégré à la révision de la loi d'orientation sur la solidarité internationale, prévoira un « droit de tirage » des administrations sera prévu pour leur permettre de faire réaliser les évaluations dont elles auraient besoin. Il est nécessaire que le Parlement dispose lui aussi au minimum d'un tel « droit de tirage » afin de pouvoir mieux exercer le contrôle de la politique d'aide au développement.
4. Le coût budgétaire actuel de l'évaluation
Les crédits actuellement consacrés à l'évaluation de l'APD restent modestes. Le programme 110 comporte une ligne « Évaluation des opérations relevant de l'aide au développement » de 0,57 millions d'euros en 2020, contre 0,53 M€ en en 2019, et 0,48 M€ en 2018. Les crédits du MEAE disponibles au sein du programme 185 pour l'évaluation, qui peuvent également bénéficier aux actions menées dans le cadre du programme 209 de la mission « Aide publique au développement », se montent à 0,47 millions d'euros en 2020 contre 0,54 en 2019 et 0,46 en 2017.
En revanche, les crédits consacrés à l'évaluation par l'AFD augmentent régulièrement : Progression des crédits et des crédits de projets couverts (voir question 67 en 2020 et 66 en 2019).
La commission observe toutefois qu'aucune enveloppe spécifique n'est prévue au sein du budget 2020 pour le fonctionnement de la nouvelle commission d'évaluation qui pourrait être créée par la future loi d'orientation au début de 2020, et qui aura besoin de crédits de fonctionnement pour passer les marchés d'étude nécessaires à ses évaluations.
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours de sa réunion du 6 novembre 2019, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous la présidence de M. Christian Cambon, président, a procédé à l'examen des crédits des programmes 110 - Aide économique et financière au développement - et 209 - Solidarité à l'égard des pays en développement - de la mission « Aide publique au développement » du projet de loi de finances pour 2020.
M. Jean-Pierre Vial, corapporteur pour avis des programmes 110 et 209 . - Sur la trajectoire budgétaire, les crédits de la mission « Aide publique au développement » (APD) progressent depuis plusieurs années et devraient atteindre 3,27 milliards d'euros en 2020, contre 3,06 milliards d'euros en loi de finances 2019, soit une progression d'environ 6,5 %.
Parallèlement, les engagements de l'Agence française de développement (AFD) continuent à croître, celle-ci devant générer en 2020 près de 2 milliards d'euros d'aide à elle seule grâce à ses prêts concessionnels.
Au total, l'APD, qui comprend beaucoup d'autres crédits comme l'aide aux réfugiés, passera de 10,6 milliards d'euros en 2019 à près de 12 milliards en 2020, soit une progression de 0,43 % à 0,46 % du revenu national brut (RNB). Cette progression sera essentiellement due à une hausse de 150 millions d'euros de la mission APD, à une augmentation de 100 millions d'euros des dépenses de la prise en charge des réfugiés, mais surtout à un accroissement de 600 millions d'euros de l'APD générée par les prêts de l'AFD, alors que cette hausse n'a été que de 240 millions d'euros entre 2018 et 2019.
Mieux encore, pour atteindre les 0,55 % du RNB souhaités par le Président de la République d'ici à 2022, il faudra des augmentations encore nettement plus fortes des crédits budgétaires.
À vrai dire, cet objectif paraît difficile à atteindre en 2022. Le Gouvernement évoque d'ailleurs désormais l'annulation de la dette d'un pays africain pour l'atteindre, ce qui par définition ne fonctionnera qu'une seule année. Selon nous, l'important est surtout de disposer d'une programmation budgétaire solide et détaillée pour les années à venir, afin de savoir exactement où nous allons. Nous le répétons, il est nécessaire qu'une telle programmation figure au sein de la future loi d'orientation. Nous devrons aussi être attentifs à ce que cette montée en charge de l'APD française respecte les orientations définies par le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), qui elles-mêmes tenaient compte des souhaits du Parlement : priorité Afrique, renforcement des dons et de la composante bilatérale de l'APD française afin de cibler plus efficacement les pays prioritaires.
J'en viens au renforcement du pilotage politique de l'APD. Avec près de 3,27 milliards d'euros pour la mission APD en 2020, dont 2,1 milliards d'euros sur les 5 milliards d'euros gérés par le ministère des affaires étrangères tous programmes confondus, il n'est pas acceptable que nous restions dans le flou entretenu par la séparation en deux ministères et un opérateur très puissant, l'AFD. Au-delà de la création d'un ministère de plein exercice, nous appelons à un raffermissement du pilotage par le renforcement des structures existantes : le CICID bien sûr, mais aussi le Conseil national pour le développement et la solidarité internationale (CNDSI) et le Conseil d'orientation stratégique de l'AFD. Il faut aussi un exercice plus efficace de la tutelle des ministères des affaires étrangères et des finances. Ce message, que nous martelons depuis des mois, commence à porter : le ministre et le directeur général de l'AFD lui-même évoquent régulièrement ce nécessaire renforcement du pilotage.
Troisième point essentiel, la concrétisation de la priorité Afrique, que le Président de la République a érigée au début de son mandat et que nous partageons.
À cet égard, le milliard d'euros de subventions supplémentaires reçus par l'AFD en 2019 devrait enfin permettre d'accroître les sommes effectivement disponibles pour les pays les plus pauvres.
On observe toutefois déjà un tassement des autorisations d'engagement en dons de l'AFD, qui passent d'environ 1,5 milliard d'euros à 900 millions d'euros dans le PLF 2020. Cela reste un montant élevé par rapport aux années précédentes, mais cela signifie que les décaissements risquent de cesser d'augmenter au cours des exercices suivants.
Au sein de l'Afrique subsaharienne, le Sahel, « dernière frontière du développement », comme l'a nommé Jean-Marc Châtaignier, l'envoyé spécial du Président de la République, est encore plus prioritaire.
C'est donc dans cette région marquée par le terrorisme, où l'aide publique au développement n'a fait qu'accompagner jusqu'à présent la croissance démographique, qu'il nous faut réussir cette « approche globale » tant évoquée. Du côté de l'aide au développement, l'une des réponses a été de confier à l'AFD un fonds appelé Minka, doté de 100 millions d'euros à l'origine et de 200 millions d'euros à partir de 2020. L'idée était de pouvoir intervenir rapidement au bénéfice des populations pour stabiliser les zones de crise.
Or cet objectif n'avait pas été vraiment atteint. Selon l'AFD, les raisons en sont multiples : les délais de décaissements peuvent rester longs s'agissant de recours aux maitrises d'ouvrage publiques souvent faibles dans ces zones. Un autre défi vient des exigences règlementaires auxquelles l'AFD est soumise en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.
En outre, plusieurs acteurs du développement (collectivités territoriales engagées dans la coopération décentralisée, militaires engagés au Sahel...) soulignent les difficultés qu'ils ont parfois à coopérer avec l'agence, notamment parce que celle-ci soutient en priorité des projets de grande ampleur, complexes, longs à instruire et à mettre en oeuvre.
La contraction du réseau des coopérants nous a également fait perdre une certaine influence. Il est parfois plus aisé pour les acteurs français de coopérer avec les organismes issus d'autres pays. Ainsi, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) est certes soutenue par l'AFD, mais doit constater le caractère incontournable de la coopération allemande (GIZ) sur les normes des pays où elle intervient, en particulier autour de la Méditerranée.
De même, Expertise France, relais naturel de l'expertise française, devrait pouvoir s'appuyer davantage sur l'AFD pour projeter cette expertise en Afrique subsaharienne. Il est impératif que le rapprochement des deux agences permette de progresser sur ce point.
Devant ces difficultés, il est positif que l'AFD ait décidé de devenir une plateforme de l'aide publique au développement, comme elle l'affirme désormais. De même, selon Jean-Marc Châtaigner, les relations et la coopération entre l'AFD et Barkhane se sont quelque peu améliorées. Un conseiller de l'AFD est ainsi placé auprès de Barkhane. En outre, s'agissant de l'intervention dans les pays en crise, l'AFD a adopté en mai 2019 des nouvelles procédures plus collaboratives. Il faut poursuivre cet effort.
Un autre aspect important sur lequel il faut selon nous insister est le rôle du Centre de crise et de soutien (CDCS) du Quai d'Orsay, dont le PLF 2020 prévoit un renforcement des moyens, toutefois encore insuffisant.
Les modes opératoires du CDCS sont en effet bien adaptés au contexte de crise, bien plus que ceux de l'AFD : financements rapidement mobilisables en phase avec le rythme de l'action militaire et les besoins des ONG, capacité à instruire des microprojets dans des zones circonscrites, capacité à prendre des risques. Le principal outil dont dispose le CDCS est le Fonds d'urgence humanitaire (FUH). En 2019, le CDCS a pu mettre en oeuvre 43,4 millions d'euros du FUH. Pour 2020, le FUH va bénéficier d'une hausse substantielle, passant à 80,7 millions d'euros.
Toutefois, ces sommes restent très inférieures à celles consacrées par nos partenaires aux mêmes missions : l'Allemagne consacre environ 1,85 milliard d'euros à l'aide humanitaire et à la stabilisation ; le Royaume-Uni, 2,4 milliards d'euros.
En outre, l'attribution du fonds Minka à l'AFD et non au CDCS rend nécessaire une meilleure formalisation de l'articulation des missions des deux organismes. Cette meilleure coordination suppose un renforcement supplémentaire des moyens du CDCS.
Le dernier point essentiel s'agissant de la priorité sahélienne concerne l'Alliance Sahel, qui est censée améliorer la coordination et l'efficacité de l'aide. Nous avons entendu Jean-Marc Gravellini, responsable de l'unité de coordination de l'Alliance Sahel, que nous avons interrogé sur la dégradation de la situation sécuritaire au Sahel malgré les efforts de l'Alliance. Il nous a fait valoir a contrario l'exemple de la Mauritanie, qui a su, grâce à une action résolue des autorités centrales, retrouver la stabilité et la sécurité. Il estime que cette volonté politique n'existe pas au même degré, pour le moment, dans l'ensemble des pays du Sahel, ce qui soulève la question difficile de l'introduction d'une certaine dose de conditionnalité dans notre aide. Plusieurs éléments rendent cependant difficile une telle évolution, notamment la nature même des banques de développement qui cherchent avant tout à placer leurs prêts.
En conclusion, je vous propose de donner un avis favorable aux crédits de la mission APD pour 2020, en attendant l'inscription de la loi d'orientation qui devra nous permettre de nous prononcer de manière plus précise et plus exigeante sur cette politique de solidarité internationale.
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, corapporteure pour avis des programmes 110 et 209 . - Je commencerai par faire le point sur la situation d'Expertise France au regard des données du PLF 2020 et du rapprochement prévu avec l'AFD. Le PLF 2020 prévoit une double subvention pour Expertise France, en provenance, d'une part, du programme 110, d'autre part, du programme 209.
Le programme 110 attribue à l'opérateur une dotation de seulement 5,35 millions d'euros en 2020, contre 5,85 millions d'euros en 2019, ce qui correspond à un maintien de la commande publique à un niveau assez bas de 3,85 millions d'euros et à une subvention de transformation qui perd 500 000 euros pour s'établir à 1,5 million d'euros. Il est toutefois prévu un nouveau financement additionnel en 2020 : 6 millions d'euros seront attribués à l'AFD et à Expertise France dans le cadre d'un renforcement des administrations fiscales de pays d'Afrique subsaharienne.
Parallèlement, le programme 209 prévoit le maintien de la subvention de soutien à l'opérateur de 3,7 millions d'euros, qui seront consacrés à la consolidation de l'établissement ainsi qu'à un soutien des activités de service public réalisées par l'agence, notamment sur financement communautaire. Comme l'année dernière, le programme prévoit également des crédits d'intervention santé pour 3,2 millions d'euros. Enfin, le gros du financement de l'agence par le ministère des affaires étrangères provient de la compensation du transfert à Expertise France des experts techniques internationaux, soit 30 millions d'euros.
L'initiative 5 %, mise en place par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) dans le cadre du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, représente par ailleurs 32 millions d'euros de commande passée à Expertise France en 2019, pour un niveau d'exécution de 20,4 millions d'euros, ce qui représente 9 % du chiffre d'affaires de l'opérateur. La trajectoire de cette commande pour la période 2020-2022 sera définie prochainement en fonction des résultats de la conférence de reconstitution du Fonds Mondial qui s'est tenue les 9 et 10 octobre dernier.
Au total, en 2019, si l'on omet l'initiative 5 %, la commande publique devrait représenter 11 % du chiffre d'affaires de l'opérateur, soit 25,9 millions d'euros mis en oeuvre par Expertise France. La part du MEAE s'élève à 82 % de cette commande publique et celle de la DGT à 15 %, le reste venant pour l'essentiel du ministère des solidarités et de la santé. Ces chiffres devraient peu évoluer en 2020. Le financement ministériel de l'agence est donc encore assez peu diversifié, ce qui reflète en creux la persistance de l'éclatement des opérateurs d'expertise internationale.
Or il est important que l'agence bénéficie d'une commande publique stable et diversifiée afin de renforcer son modèle économique. Rappelons en effet que la croissance de l'agence s'est fondée principalement sur la recherche de financements européens, peu rémunérateurs, tandis que la commande publique est restée relativement faible. Or les principaux concurrents européens d'Expertise France s'appuient en général sur un socle de commande publique élevé qui garantit un modèle économique pérenne.
Ainsi, si l'adossement à l'Agence française de développement a été présenté comme une solution miracle pour la viabilité économique d'Expertise France et si les financements en provenance de l'AFD ont bien progressé au cours des deux dernières années, il ne peut s'agir en réalité que d'une partie de la réponse. Il faut notamment éviter que s'installe une relation exclusive avec l'agence, qui priverait progressivement Expertise France de son accès à l'expertise des ministères et la ferait dépendre exclusivement d'un opérateur dont la culture reste encore très éloignée de la sienne.
Le modèle économique d'Expertise France doit donc être consolidé à l'aune des exemples étrangers et avec un soutien renouvelé de l'État pour compenser les dépenses liées aux missions de service public.
Nous devrons en conséquence être particulièrement attentifs au nouveau contrat d'objectifs et de moyens (COM) pour la période 2020-2022, sur lequel nous serons appelés à nous prononcer. Il serait souhaitable que ce COM nous soit présenté très rapidement par le Gouvernement.
La question d'une amélioration de l'évaluation de l'aide publique au développement est fondamentale, compte tenu de la progression rapide des moyens consacrés à cette politique.
Au sein du PLF 2020, les crédits consacrés à l'évaluation de l'APD restent modestes. Le programme 110 comporte une ligne Évaluation des opérations relevant de l'aide au développement de 0,57 million d'euros en 2020, contre 0,53 million d'euros en 2019 et 0,48 million d'euros en 2018. Les crédits du MEAE disponibles au sein du programme 185 pour l'évaluation, qui peuvent bénéficier aux actions menées dans le cadre du programme 209 de la mission « Aide publique au développement », se montent à 0,47 million d'euros en 2020, contre 0,54 en 2019 et 0,46 en 2017.
En revanche, il faut souligner que les crédits consacrés à l'évaluation par l'AFD augmentent régulièrement. Ils se montent désormais à environ 5 millions d'euros.
Nous observons par ailleurs qu'aucune enveloppe spécifique n'est prévue au sein du budget pour 2020 pour le fonctionnement de la nouvelle commission d'évaluation qui pourrait être créée par la future loi d'orientation, laquelle aura besoin de crédits de fonctionnement pour passer les marchés d'études nécessaires à ses évaluations.
À ce propos, mon collègue Jean-Pierre Vial et moi-même nous sommes rendus à Londres en juillet dernier pour étudier le système britannique d'évaluation de l'aide au développement. Rappelons que, en 2015, le Royaume-Uni a adopté une loi fixant à 0,7 % la part du revenu national brut consacrée à l'aide publique au développement. Parallèlement a été créé un dispositif d'évaluation original, avec un organisme dédié, l'Independant Commission on Aid Impact (ICAI). L'ICAI a explicitement été créée en contrepartie de la fixation de l'objectif des 0,7 % du RNB dans la loi. Il s'est agi de garantir aux citoyens que chaque livre investie le serait sous le regard d'un organisme indépendant à même d'en vérifier le bon usage et l'efficacité.
L'ICAI est ainsi conçue comme un organisme indépendant du Gouvernement, dont la mission est de rendre des comptes à la commission parlementaire chargée du développement (International Development select Committee, IDSC). Elle est dirigée par trois commissaires, dispose d'un secrétariat de dix membres et fait appel à des consultants externes pour conduire les évaluations. Aspect important, les sujets de contrôle de l'ICAI sont choisis avec l'accord de la commission parlementaire.
Les rapports de la commission sont estampillés « verts » lorsqu'ils sont satisfaisants, « orange » lorsqu'ils sont satisfaisants et « rouges » lorsqu'ils sont moins que satisfaisants, ce qui est le cas d'environ un tiers d'entre eux. C'est extrêmement pédagogique. Ces rapports sont présentés devant la commission parlementaire chargée du développement, qui auditionne simultanément l'ICAI et le ministre environ une fois par mois. Les recommandations des rapports doivent donner lieu à une réponse du ministère détaillant les mesures prises. L'ICAI peut exiger de nouvelles réponses tant qu'elle n'est pas satisfaite.
Selon les parlementaires membres de la commission du développement international que nous avons pu interroger, l'ICAI constitue une ressource extraordinaire. En particulier, le fait qu'une discussion ait lieu entre l'ICAI et le ministère devant la commission permet d'aller beaucoup plus loin dans le suivi de la politique d'aide publique au développement, les parlementaires ne pouvant le faire dans l'exercice ordinaire de leur contrôle.
Au total, le dispositif d'évaluation britannique, dont l'ICAI est la pièce maîtresse, constitue selon nous une référence valable pour penser le nouveau dispositif d'évaluation qui doit être inscrit dans le futur projet de loi d'orientation relatif à la politique de solidarité internationale. Nous devrons donc veiller à ce que ce dispositif comporte les mêmes garanties d'efficacité que le dispositif britannique : une indépendance des membres de la commission d'évaluation vis-à-vis du ministère et un budget de fonctionnement suffisant pour celle-ci ; une obligation pour la commission d'évaluation de rendre compte devant l'Assemblée nationale et le Sénat, en présence d'un représentant du ou des ministères de tutelle ; la possibilité pour les commissions du Parlement de valider le programme d'évaluation de l'instance ou d'avoir un droit de tirage.
En conclusion, je vous propose de donner un avis favorable aux crédits de la mission APD, tout en formulant différentes réserves. Nous avons hésité, au sein de notre groupe, à nous abstenir, compte tenu de certains choix qui ont été faits et que nous ne validons pas. Néanmoins, l'augmentation des crédits étant significative, nous voterons ces crédits, tout en demeurant vigilants.
Mme Isabelle Raimond-Pavero . - Le rapprochement entre Expertise France et l'AFD n'a pas suffi pour le moment pour consolider le modèle économique d'Expertise France. Le Gouvernement aurait été bien inspiré de suivre vos différentes préconisations et d'intégrer tous les opérateurs indépendants.
M. Joël Guerriau . - Le microcrédit ne sert-il pas à financer le terrorisme ?
M. Ronan Le Gleut . - La France finance des projets en Chine pour la préservation de la biodiversité, l'égalité entre les hommes et les femmes, par exemple. Sachant que, selon le Fonds monétaire international (FMI), le PIB de la Chine s'élève à 25 270 milliards de dollars internationaux et qu'il est donc plus élevé que celui de l'Union européenne, qui est de 22 milliards de dollars, sachant en outre que le PIB de la France est de 2 900 milliards, soit dix fois moins que la Chine, le financement de ces projets est-il une priorité ?
M. Pierre Laurent . - Nous sommes loin d'atteindre le taux de 0,55 %, et encore moins celui 0,7 %, qui devrait être notre objectif. Une fois de plus, le budget n'est pas à la hauteur. En outre, nous ne savons toujours pas quand nous serons saisis du projet de loi de programmation envisagé. La loi de programmation militaire est à la hauteur, nous avons renforcé nos opérations extérieures et, c'est un corollaire, nos exportations d'armements. En revanche, les moyens de notre diplomatie sont faibles, en recul et menacés. Enfin, nous avons un retard persistant en matière d'aide publique au développement. Au total, la présence de la France à l'international est disproportionnée par rapport à l'effort politique, culturel, économique qui devrait être le nôtre.
Nous voterons donc contre ce budget, et contre le budget précédent.
Mme Christine Prunaud . - L'un des buts de l'aide publique au développement est d'aider l'Europe à maintenir des réfugiés en Turquie, moyennant monnaie. Qu'en est-il ? Pour nous, l'aide publique au développement, ce n'est pas cela.
M. Ladislas Poniatowski . - Alors que le budget de l'AFD s'élève à 14 milliards d'euros, contre 5 milliards d'euros pour celui du ministère des affaires étrangères, cela signifie-t-il que le directeur de l'AFD est plus important que le ministre des affaires étrangères ?
Au Royaume-Uni, un dialogue a lieu entre une commission indépendante, les parlementaires et le ministre, ce qui n'est pas le cas en France. Ne devrions-nous pas nous interroger à cet égard et contrôler davantage la rigueur de la gestion de l'AFD ?
M. Jean-Pierre Vial, corapporteur pour avis . - Si nous avons manifesté notre désappointement concernant les reports successifs du projet de loi d'orientation, c'est bien parce que nous attendons de pouvoir poser un certain nombre de questions lors de son examen, notamment celle que soulève notre collègue Ladislas Poniatowski.
Cela étant, il faut comparer ce qui comparable. Une part essentielle des 14 milliards d'euros du budget de l'AFD correspond à son activité de banquier et ce sont donc des prêts. Cela n'ôte rien à notre devoir de vigilance. Concernant la Chine, de gros investissements en dons ne seraient plus possibles aujourd'hui. Cela montre bien le recentrage de l'activité et le rôle de prêteur de l'AFD. On peut considérer au total que les deux tiers des 14 milliards d'euros relèvent de l'activité de banquier de l'AFD, le budget propre de l'agence étant plutôt de l'ordre de 2 milliards d'euros.
Se pose effectivement la question du contrôle politique. Entre le modèle allemand, sur lequel l'AFD s'est calé, et le modèle britannique - soyons clairs : nous n'épouserons ni l'un ni l'autre -, n'y aurait-il pas une solution intermédiaire, un modèle français en matière d'orientation politique et d'évaluation ?
Au sujet du terrorisme et du microcrédit, l'AFD, en tant que banquier, est soumis à des procédures classiques de traçabilité. Pour les fonds d'urgence, c'est moins évident : des procédures de suivi rigoureuses s'imposent donc.
Force est de constater que la trajectoire n'est pas respectée. Pour 2020, la perspective d'intégrer l'annulation de la dette d'un pays africain est un moyen détourné de satisfaire cette obligation, nous l'avons dit. Il revient au Gouvernement de montrer que objectif de 2022 sera respecté, mais nous pouvons sincèrement en douter.
En matière d'aide au développement, il y a l'enveloppe financière, mais aussi la nature, le contrôle et l'efficacité de l'aide, d'où la nécessaire coordination entre les acteurs. Ainsi, le centre de crise du Quai d'Orsay intervient au Sahel, où il y a beaucoup de coopération décentralisée avec les pays limitrophes. Nous avons constaté que le manque de coordination pouvait entraîner des contradictions dans les politiques mises en oeuvre.
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, corapporteure pour avis. - Nous partageons les interrogations qui émergent ; nous avons d'ailleurs hésité à nous abstenir.
La remarque d'Isabelle Raimond-Pavero est tout à fait juste. Il ne s'agissait nullement de brimer les ministères concernés, mais de respecter la logique de la loi de 2014. Une deuxième vague de fusions était nécessaire. La question du rapprochement avec Expertise France ne venait en principe qu'après. Nous avons fait passer la charrue avant les boeufs, ce qui nuit à l'efficacité. Il faut faire avec.
Concernant l'intervention de Ronan Le Gleut sur la Chine, je précise qu'il s'agit de prêts aux taux du marché et non de dons. Il y a donc un retour sur investissements.
Pierre Laurent a évoqué la soutenabilité de la trajectoire. À l'évidence, après le tour de passe-passe éventuel des annulations de dettes, nous nous retrouverons face à la dure réalité. La soutenabilité est donc sujette à caution. Il n'en reste pas moins une hausse inédite de plus de 128 millions d'euros des crédits de paiement. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons de voter ces crédits.
Pour conclure sur le modèle, il n'est pas convenable d'attendre ainsi la loi d'orientation. C'est à se demander si elle verra le jour avant le renouvellement sénatorial, voire la fin du quinquennat ! Il nous faudra rester extrêmement attentifs et disposer d'un modèle d'évaluation qui se situe entre les modèles britannique et allemand. En prenant les idées les plus pertinentes des deux, le Parlement pourrait revenir dans le jeu.
M. Jean-Pierre Vial, corapporteur pour avis . - La question des réfugiés, que je n'ai pas abordée, comporte deux volets. Les financements proviennent de différentes sources, notamment européenne, comme nous le voyons en Turquie. Selon les pays se superposent en outre des aides dédiées directement aux réfugiés, des politiques antiterroristes ou d'accompagnement d'actions militaires. On nous demande plus de clarté. Il nous faudra donc identifier les aides spécifiquement dédiées aux réfugiés, mais également les interactions. Nous auditionnerons prochainement l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). L'accompagnement des populations de migrants doit être lié aux actions de développement.
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, corapporteure pour avis . - Pour répondre à Ladislas Poniatowski, il est nécessaire que le ministre reprenne toute sa place pour le pilotage de l'AFD. C'est ce que permet le modèle anglais.
M. Christian Cambon, président . - À l'occasion de l'examen de la loi d'orientation, nous devrons être extrêmement clairs et convaincants sur ces sujets. L'absence de contrôle politique, l'insuffisance de l'évaluation posent problème, d'autant que les sommes sont considérables.
Je vous rappelle que les 76 rapporteurs budgétaires disposeront de trois minutes de temps de parole. Je vous invite donc, groupe par groupe, à défendre nos idées.
La commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Aide publique au développement ».
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
Mardi 15 octobre 2019 :
- M. Jean-Marc Gravellini , coordinateur, Alliance Sahel.
Mercredi 23 octobre 2019 :
- Mme Odile Renaud-Basso , directrice générale du Trésor.
Mardi 29 octobre 2019 :
- M. Yann Illiaquer , chargé d'analyse et de plaidoyer, Coordination sud ;
- Mme Claire Baudot , Action Santé Mondiale ;
- M. Gautier Centlivre , Solidarité Sida ;
- M. Louis-Nicolas Jandeaux , Oxfam France ;
- M. Nicolas Wit , directeur général adjoint et Mme Constance Koukoui, cheffe du service Animation géographique et thématique, Cité Unies France.
Mercredi 30 octobre 2019 :
- M. Rémy Rioux , directeur général de l'Agence française de développement (AFD).
* 1 Tous des pays d'Afrique sub-saharienne sauf un (Haïti) : Bénin, Burkina Faso, Burundi, Comores, Djibouti, Éthiopie, Gambie, Guinée, Haïti, Libéria, Madagascar, Mali, Mauritanie, Niger, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Sénégal, Tchad, Togo.