B. UN IMPÉRATIF : ACTIVER LES CRÉDITS LOGEMENT ET CONTRECARRER LA BAISSE DE LA CONSTRUCTION AINSI QUE DE LA RÉHABILITATION
S'agissant du logement, le fait essentiel est que, depuis plusieurs années, on constate la baisse des chiffres de la construction dans les outre-mer. Ce constat a même fini par reléguer au second plan la question de l'évolution des crédits de la Ligne budgétaire unique (LBU) puisque les dotations ne sont pas suffisamment consommées. Comme l'a indiqué la ministre, pour 2020, les crédits de paiement de la LBU baissent de plus de 13 %, à 190 millions d'euros, pour « s'ajuster » à cette sous-consommation.
Or, le logement est la base de la vie familiale et c'est un facteur d'attractivité pour les étudiants ; le logement des seniors est également une préoccupation croissante, en particulier aux Antilles qui connaissent un vieillissement démographique accéléré. Économiquement, le BTP est un secteur vital pour nos outre-mer et il s'écroule sur certains territoires comme La Réunion.
Que faire pour inverser cette tendance baissière dramatique ?
Je rappelle tout d'abord, que pour répondre aux besoins, l'objectif a été fixé de façon claire et réaliste au moment du vote de la loi dite égalité réelle : 15 000 logements par an construits ou réhabilités - j'insiste sur ce terme. C'est un point de repère opérationnel et qui avait été considéré comme minimaliste par certains ; mais on ne l'atteint pas et, plus inquiétant encore, on s'en éloigne : 9267 en 2017 et 8508 en 2018.
Ensuite, la délégation aux outre-mer a élaboré des propositions de fond pour adapter les normes de construction et les matériaux à la spécificité des outre-mer. Le Gouvernement y est attentif pour réduire les coûts et prendre en compte le vieillissement accéléré des infrastructures en climat tropical.
Nos avis budgétaires ont également préconisé, année après année, un parcours administratif des dossiers de construction plus fluide, car les remontées de terrain signalent des blocages, des lenteurs et des labyrinthes qui accaparent trop de temps.
Pour 2020, l'accent est mis sur le renforcement de l'ingénierie et le présent projet de budget propose d'y consacrer au total 13 millions d'euros. Pour donner un contenu concret à ce terme d' « ingénierie » souvent prononcé comme une formule magique, j'ai auditionné les opérateurs de terrain, et, en particulier la Caisse des dépôts qui augmente ses participations dans le capital des organismes locaux.
J'en tire trois principales préconisations :
- la situation du logement ultramarin est critique et exige des mesures fortes de gestion du parc existant et de mobilisation du potentiel de construction. Dans ce contexte, nous n'avons guère d'autre choix que de parier sur la compétence et la « signature » d'opérateurs dont l'efficacité reconnue permettra sans doute un raccourcissement des procédures d'instruction administrative des dossiers ;
- sur certains territoires, la priorité donnée au développement de l'offre s'est sans doute effectuée au détriment de l'entretien et de la réhabilitation du parc, dans un contexte climatique difficile. Face à des taux d'inoccupation excessifs, la réhabilitation et la sécurisation des logements existants est une priorité et nous l'avons inscrite, comme telle, dans la loi ;
- enfin, la dynamique de reprise doit associer les opérateurs locaux pour bénéficier de leur savoir-faire irremplaçable et de leur capacité à territorialiser les projets de construction. S'agissant des PME du BTP en très grande difficulté, le « small business act ultramarin » (« Stratégie du bon achat ») que nous avons introduite en loi EROM devra être activé pour les associer systématiquement aux opérations de grande ampleur.
En conclusion, ce budget 2020 était mal parti en octobre mais il bénéficie, à ce stade, de perspectives de rattrapage en loi de financement de la sécurité sociale, avec un élargissement des seuils d'exonération, et à l'occasion du débat sur le projet de loi de finances pour 2020. Le soutien positif de la ministre des outre-mer à ce rééquilibrage justifie, à mon sens, notre encouragement sous forme d'un avis favorable.
Ma conviction profonde est que l'offensive économique crée du lien social et de la confiance, à condition d'être portée par un élan territorial ultramarin et « accompagnée » par un État qui doit refreiner ses tentations centralisatrices.