LES CRÉDITS HORS TITRE 2
Le programme 212 hors crédits de personnel (titre 2) regroupe les fonctions transverses de direction et de soutien mutualisés du ministère des armées, correspondant aux missions portées par le Secrétariat général de l'administration, notamment dans les domaines de l'immobilier, des systèmes d'information, de l'action sociale et de la communication . Hors fonds de concours et attributions de produits, le total des crédits budgétaires du programme 212 hors titre 2 s'élève en 2019 à 2 847,81 M€ en autorisations d'engagement (-1%) et à 2 643,54 M€ en crédits de paiement (+3%) .
Cette évolution reflète celle des crédits de la politique immobilière qui représentent les deux tiers du total. La politique immobilière, doit bénéficier, en outre, de ressources issues des cessions immobilières du ministère des armées. Celui-ci disposera en 2019 d'un droit à consommer de 50 M€ sur le compte d'affectation spéciale « Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l'État », principalement pour entreprendre des travaux lourds, structurants ou réglementaires.
Les cessions immobilières parisiennes , financièrement les plus profitables, sont maintenant bien avancées. Le compte d'affectation spéciale devrait néanmoins encore bénéficier, au cours des prochaines années, de la cession d'une fraction restante de l'Ilot Saint-Germain et du bâtiment de l'ancien hôpital du Val de Grâce, dont l'avenir est toujours à l'étude.
Évolution des crédits du programme 212 hors titre 2 par actions
M€ |
LFI 18 |
PLF 19 |
Évolutions |
||||
ACTIONS |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
|
04 |
Politique immobilière |
2 116,08 |
1 744,16 |
2 049,88 |
1 785,39 |
-3% |
2% |
05 |
Systèmes d'information, d'administration et de gestion |
148,33 |
137,67 |
174,52 |
168,42 |
18% |
22% |
06 |
Accompagnement de la politique des ressources humaines |
152,08 |
153,03 |
152,57 |
152,62 |
0% |
0% |
08 |
Politique culturelle et éducative |
30,20 |
37,56 |
28,91 |
46,10 |
-4% |
23% |
10 |
Restructurations |
75,04 |
66,54 |
52,11 |
73,67 |
-31% |
11% |
11 |
Pilotage, soutien et communication |
368,97 |
419,78 |
389,82 |
417,33 |
6% |
-1% |
Total HT2 |
2 890,71 |
2 558,74 |
2 847,81 |
2 643,54 |
-1% |
3% |
|
dont fonctionnement T3 |
948,03 |
944,70 |
980,93 |
968,58 |
3% |
3% |
|
dont investissement T5 |
1 909,95 |
1 556,49 |
1 848,86 |
1 625,26 |
-3% |
4% |
|
dont intervention T6 |
24,82 |
24,78 |
15,08 |
19,06 |
-39% |
-23% |
|
dont opérations financières T7 |
7,92 |
32,77 |
2,94 |
30,64 |
-63% |
-7% |
Source : réponse au questionnaire de vos rapporteurs pour avis.
I. LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE DES ARMÉES : UN SECTEUR SOUS TENSION
Les crédits de la politique immobilière doivent permettre l'adaptation des infrastructures d'accueil et de soutien à la nouvelle génération d'équipements, tout en rendant possible une amélioration de l'état du patrimoine immobilier et des conditions de vie du personnel. Malgré les insuffisances de la LPM, les attentes sont fortes, et ne doivent pas être déçues.
A. DES CRÉDITS STABILISÉS APRÈS UNE FORTE AUGMENTATION
1. Un budget dans le prolongement du précédent
En 2019, les crédits de l'action 4 « Politique immobilière » s'élèvent à 1 785 M€ en crédits de paiement (+2%) et à 2050 M€ en autorisations d'engagement (-3%). Les crédits de paiement relatifs à l'investissement de l'action 4 s'élèvent à 1 449,5 M€, se stabilisant au même niveau que ceux de la loi de finances initiales pour 2018 (+3%), qui avait prévu une augmentation exceptionnelle.
Il convient de prendre également en compte les crédits de politique immobilière de l'action 10 « restructurations», qui portent le total des crédits de politique immobilière à 1 845 M€ en crédits de paiement (+3%) et à 2 094 M€ en autorisations d'engagement (-4%) .
Évolution des crédits totaux de la politique immobilière entre 2017 et 2019
En M€ |
LFI 2017 |
LFI 2018 |
PLF 2019 |
|||
(hors Fonds de concours et Attribution de produits) |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
Fonctionnement et activités spécifiques |
308 |
312 |
318 |
318 |
321 |
321 |
Dissuasion |
131 |
86 |
126 |
114 |
92 |
139 |
Infrastructure de défense |
1 324 |
975 |
1 732 |
1 362 |
1 681 |
1 385 |
Total |
1 763 |
1 373 |
2 176 |
1 794 |
2 094 |
1 845 |
En M€ |
LFI 2017 |
LFI 2018 |
PLF 2019 |
|||
(Fonds de concours et Attributions de produits) |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
Infrastructure de défense |
16 |
16 |
18 |
18 |
5 |
5 |
Source : réponse au questionnaire de vos rapporteurs pour avis.
Le budget 2019 s'inscrit donc dans la continuité du précédent , qui avait été marqué par une augmentation sans précédent des crédits de politique immobilière, de 413 M€ en autorisations d'engagement et de 421 M€ en crédits de paiement. Il confirme ainsi l'effort engagé en 2018 , qui est, pour l'essentiel, reconduit, mais sans produire d'effort supplémentaire.
Outre les évolutions des programmes d'infrastructure d'importance stratégique, le budget 2019 se caractérise par un effort au profit des opérations de réhabilitation supérieures à 500 000 €, dites de « maintenance lourde », dont la dotation augmente de 12% en autorisation d'engagement et de 34% en crédits de paiement.
2. Une augmentation difficilement soutenable malgré les besoins
Vos rapporteurs ont auditionné le Directeur central du service d'infrastructure de la défense (SID), afin d'analyser les conséquences, pour les services de soutien du ministère des armées, de la forte impulsion donnée l'an dernier à la politique immobilière .
Les auditions de votre commission ont par ailleurs confirmé une difficulté à dépenser les moyens supplémentaires de la politique immobilière. Le Secrétaire général de l'administration a ainsi indiqué :
« Nous avons malgré tout quelques difficultés pour encaisser une augmentation de 400 millions d'euros d'un seul coup. Nous essayons de ne pas laisser de crédits sur la table, mais nous avons commencé l'année avec un report de charges de plus de 210 millions d'euros dans ce domaine. Même si nous allons réduire le report de charges, il existe cependant des incertitudes autour de 60 millions d'euros concernant les crédits d'infrastructure pour la fin de l'année. » 7 ( * )
a) Une logique d'efficience qui atteint ses limites
Le service d'infrastructure de la défense (SID) comptait 11 500 employés en 2005. Il en compte aujourd'hui 6 700. Cet effectif, considéré comme un « socle », ne progressera pas sur la durée de la LPM.
Le SID a été bâti depuis 2005 dans la perspective d'un milliard d'euros de dépenses immobilières annuelles. Or la LPM fixe un objectif de plus de 2 milliards d'euros par an. Ce service est donc sous forte tension, d'autant que la moitié de son personnel civil partira à la retraite dans les cinq prochaines années, ce qui signifie que 400 recrutements par an sont nécessaires.
Cette situation est très contraignante , compte tenu de l'augmentation du plan de charge du SID et d'un renforcement de ses missions dans les domaines cyber, nucléaire et en matière d'installations classées.
Le SID s'est récemment réorganisé , pour tenir compte des contraintes sur ses effectifs et de l'existence de besoins spécifiques, nécessitant une professionnalisation accrue. Il est apparu nécessaire de mutualiser en pôles les compétences et les expériences afin de capitaliser pour l'ensemble du réseau sur les compétences concentrées localement. Chacun des sept établissements du SID en métropole, ainsi que le Centre d'études technique de la défense s'est vu ainsi attribuer le rôle de référent dans un ou plusieurs domaines stratégiques identifiés.
Les bénéfices attendus sont, outre une professionnalisation accrue dans des domaines stratégiques, une « standardisation » et une optimisation des réponses apportées dans chaque domaine, une augmentation de l'efficience, un renforcement de l'assistance au commandement dans les domaines concernés et la mise en place d'une gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC) pour chacun des domaines.
Le SID continue aujourd'hui à se réorganiser dans une logique d'efficience . La rationalisation des régies sera poursuivie avec un redéploiement des catégories d'emploi : les catégories d'emplois de niveaux I et II augmenteront sensiblement tandis que la proportion des ouvriers d'État diminuera du fait notamment de l'externalisation de l'entretien-maintenance.
Vos rapporteurs jugent que la stratégie d'efficience atteint aujourd'hui ses limites . On ne pourra pas faire toujours davantage avec des moyens en diminution.
b) Déconcentration et externalisation : des réponses insuffisantes
Dans le cadre du projet de service SID 2020, il a été expérimenté dès 2015 le concept d'« unité de soutien d'infrastructure de la défense nouvelle génération » (USID-NG) sur les bases de défense de Marseille et de Grenoble, par l'ESID de Lyon et l'état-major de la zone de défense Sud-Est.
USID-NG repose sur la déconcentration de la conduite de certaines opérations d'investissement, techniquement simples, au niveau des échelons locaux.
Le retour d'expérience de la déconcentration aux échelons locaux de la conduite des petites opérations d'investissement en infrastructure sur les Bases de défense de Marseille et de Grenoble a permis de mesurer les gains potentiels offerts par ce dispositif pour la satisfaction des besoins en infrastructure des formations de l'armée de terre.
Le comité ministériel pour la modernisation de l'administration a donc validé en avril 2016 la généralisation de ce principe de déconcentration. Cette généralisation est actée pour les opérations technico-opérationnelles « terre » et non technico-opérationnelles retenues en programmation et dont la gestion est déléguée à l'état-major de zone de défense par l'état-major de l'armée de terre et le centre interarmées de coordination du soutien. Une expérimentation similaire de ce principe de déconcentration aux échelons locaux pour la conduite des petites opérations d'investissement en infrastructure a été lancée sur les bases de défense de Lyon - Mont-Verdun et d'Istres, entre l'établissement du SID de Lyon et le commandement des forces aériennes de Bordeaux.
La convention dite « SPIRALE » (Soutien de proximité de l'infrastructure pour les réparations, les aménagements légers et l'entretien) entre l'armée de Terre et le SID , de juin 2018, doit permettre de redonner plus généralement des leviers d'action aux chefs de corps pour des travaux simples et l'entretien des casernes.
La déconcentration des petits travaux est une réponse encourageante à la saturation des services de soutien.
Par ailleurs, le SID contractualise chaque année pour plus d'1 Md€ avec les entreprises du BTP, dont environ 50% de PME-PMI. L'externalisation constitue donc un mode d'intervention usuel.
L'externalisation permet de concentrer la ressource interne sur les opérations à haute valeur ajoutée ou très spécifiques au ministère des armées.
L'objectif poursuivi dans le cadre du projet de service SID 2020 vise à accroître le recours à la maîtrise d'oeuvre privée pour les opérations inscrites en programmation pluriannuelle, afin de réserver la maîtrise d'oeuvre interne pour la réalisation d'opérations urgentes et maîtriser les coûts dans les domaines des infrastructures techniques de la défense : protection, dépôts de munitions, installations aéroportuaires et navales, infrastructures de soutien de la propulsion nucléaire, installations de préparation opérationnelles et de tir, soutien technique spécifique.
L'objectif visé en 2020 est de réaliser 65% du montant du plan de commande en maîtrise d'oeuvre privée. Le recours à cette dernière n'a toutefois atteint que 37% en 2017.
Par ailleurs, le SID ambitionne également de recourir à d'autres modes de contractualisation que sont l'assistance à maîtrise d'ouvrage pour la conduite d'opérations et le mandat de maîtrise d'ouvrage.
Dans le domaine de la maintenance, la part de l'externalisation s'accroît régulièrement depuis 2008 pour compenser la réduction des effectifs des régies.
L'externalisation est un processus dont il convient de souligner les limites, en termes de délais et de prise en compte des besoins et de leurs évolutions.
En tout état de cause, vos rapporteurs estiment donc que la déconcentration et l'externalisation sont des réponses insuffisantes à la montée en puissance de la politique immobilière. Les services de soutien doivent être renforcés.
Les évolutions des soutiens ne remettent pas en cause leur mutualisation dans le cadre des bases de défense (BDD) qui passeront au 1 er janvier de 51 à 45. Cette mutualisation était souhaitable , mais peut-être aurait-on pu réfléchir à un réemploi intelligent d'une partie des effectifs plutôt que de les rendre de façon précipitée.
Carte des bases de défense en métropole à compter du 1er janvier 2019
Source : réponse au questionnaire de vos rapporteurs pour avis.
* 7 Audition de M. Jean-Paul Bodin, secrétaire général pour l'administration, par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées le 24 octobre 2018.