EXAMEN EN COMMISSION
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MERCREDI 15 NOVEMBRE 2017
La commission de la culture, de l'éducation et de la communication examine les rapports pour avis des programmes « Livre et industries culturelles », « Audiovisuel » et compte de concours financier « Avances à l'audiovisuel public » de la Mission « Médias, Livre et industries culturelles ».
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Mme Françoise Laborde, rapporteure pour avis des crédits du programme « Livre et industries culturelles » . - Le programme 334 « livre et industries culturelles » de la mission « Médias, livre et industries culturelles » rassemble les crédits destinés, pour l'essentiel, au soutien public au livre et à la lecture mais également, pour 5,6 % seulement des montants inscrits, aux secteurs de la musique enregistrée et du jeu vidéo, ainsi qu'au fonctionnement de la Haute autorité pour la diffusion des oeuvres et la protection des droits sur Internet, la Hadopi.
En 2018, ce sont 262 millions d'euros en autorisations d'engagement et 271 millions d'euros en crédits de paiement qui bénéficieront au livre et aux industries culturelles, soit, à périmètre constant, en considérant les dispositifs d'éducation artistique et culturelle désormais imputés sur le programme 224 « transmission des savoirs et démocratisation de la culture » de la mission « Culture », une augmentation de 2 % en crédits de paiement.
Vous l'aurez compris, c'est au livre et à la promotion de la lecture que profite la quasi-totalité des crédits du programme (94,4 % précisément, soit 255,4 millions d'euros), raison pour laquelle j'y consacrerai l'essentiel de mon intervention.
Dans ce cadre, 215 millions d'euros correspondent à la subvention pour charge de service public de la Bibliothèque nationale de France (BnF) et de la Bibliothèque publique d'information (Bpi) attachée au Centre Pompidou. Je ne m'appesantirai pas sur la description d'une charge budgétaire destinée à financer des dépenses contraintes de fonctionnement de ces opérateurs. En revanche, il me semble utile, compte tenu des récents déboires rencontrés par la BnF, de vous dresser un rapide bilan des travaux financés par ces établissements sous forme de crédits d'investissement.
Le site Richelieu constitue le berceau historique de la BnF. Depuis la fin des années 1990, avec l'ouverture du site François Mitterrand, le bâtiment accueille les collections spécialisées de la bibliothèque, ainsi que l'Institut national d'histoire de l'art et l'École nationale des chartes. L'état dégradé des lieux nécessitait de lourds travaux, qui furent lancés en 2010 pour la première zone le long de la rue Richelieu. Alors que la première convention de mandat en date du 13 novembre 2006 faisait état d'un coût prévisionnel des travaux de 149,1 millions d'euros, l'avenant n° 10 conclu en juin dernier annonçait finalement un coût de 233,2 millions d'euros, dont 189,7 millions d'euros à la charge du ministère de la culture.
Bon an mal an, les travaux se sont terminés il y a quelques mois, permettant l'inauguration de la première zone le 11 janvier dernier par le Président de la République. Ce fut aussi long que coûteux, mais il semblerait que l'ensemble soit une réussite, notamment la salle de lecture Labrouste. Je crois, madame la présidente, qu'un déplacement de la commission sur place est prévu prochainement ?
Désormais, la seconde phase de travaux, qui devrait se clore en 2020, a débuté le long de la rue Vivienne au début de l'année 2017. 18 millions d'euros de crédits de paiement lui sont destinés dans le présent projet de budget, complétés par le recours aux fonds propres de la BnF et au mécénat pour l'aménagement de la salle Ovale, de la galerie Mansart et du salon Louis XV. Souhaitons à l'opérateur un chantier moins perturbé que lors de la première phase de travaux. Souhaitons-le également à la Bpi, qui débutera en 2019 un grand projet de rénovation destiné à dynamiser sa fréquentation et à améliorer la qualité des services proposés.
Bien que les crédits qui y sont consacrés n'appartiennent pas au programme 334, permettez-moi, pour clore le sujet des bibliothèques, d'évoquer les suites de l'excellent rapport de notre collègue Sylvie Robert sur l'aménagement des horaires d'ouverture au public.
La France dispose d'un réseau de plus de 16 000 bibliothèques et points d'accès au livre, qui couvre 77 % des communes de plus de 2 000 habitants et près de 90 % des habitants, soit une couverture du territoire très satisfaisante à l'échelle européenne. Pourtant, et même si 91 % des Français déclarent avoir déjà fréquenté une bibliothèque, le taux d'usagers réguliers ne dépasse pas 25 % et il s'effondre si on exclut du panel les jeunes en âge scolaire et les seniors. La faute en incombe en grande partie aux horaires d'ouverture très contraignants de ces établissements, notamment le soir et en fin de semaine. C'est dire combien l'adaptation et l'extension des horaires d'ouverture, proposées par notre collègue Sylvie Robert dans son rapport remis en août 2015, sont essentielles au développement de la lecture chez nos concitoyens.
Plusieurs collectivités se sont déjà engagées en ce sens une vingtaine en 2016 dont Brest, Caen, Le Havre et Paris et ont d'ores et déjà observé une augmentation significative de la fréquentation de leur(s) établissement(s). En application d'une circulaire interministérielle en date du 15 juin 2016, elles bénéficient d'une aide temporaire au fonctionnement prise sur les crédits de la dotation générale de décentralisation, laquelle, pour l'ensemble des bibliothèques, s'élève à 80,4 millions d'euros pour 2018. Ce montant n'a pas été relevé depuis la mise en place du dispositif, alors que notre collègue en estimait le coût à 5 millions d'euros, ce qui laisse à craindre un moindre financement d'autres projets de rénovation ou de construction.
Il est donc temps que la mission confiée conjointement à l'Inspection générale des affaires culturelles (IGAC) et à l'Inspection générale de l'administration (IGA) sur le chiffrage de la mesure rende ses conclusions et que les conséquences budgétaires en soient tirées, sans quoi le risque que le financement d'une partie du dispositif repose sur les collectivités territoriales est plus que probable. La réflexion confiée à Erik Orsenna sur l'accès aux services offerts par les bibliothèques devrait également apporter des précisions utiles sur l'adéquation des moyens aux besoins.
Le soutien au livre et à la lecture dépasse bien sûr le cadre des bibliothèques. Avec un chiffre d'affaires de 2,8 milliards d'euros en 2016, le marché du livre, protégé depuis 1981 par le prix unique et un taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) réduit, demeure stable, malgré d'importants écarts selon les catégories d'ouvrages. À titre d'illustration, si la littérature génère encore plus de 20 % du chiffre d'affaires des éditeurs, son rendement continue à diminuer (- 3,9 % en 2016), tandis que l'édition scolaire, réforme du collège oblige, montre un fort dynamisme (+ 38,9 %). Le numérique, en augmentation constante mais raisonnée, représente désormais près de 9 % du marché. L'édition française est également foisonnante avec 390 nouveaux romans à l'automne 2017.
Nulle industrie ne peut se développer sans réseau de vente : c'est dire l'importance des 3 200 librairies indépendantes, qui réalisent 50 % des ventes d'ouvrages, tant pour les acteurs du livre que pour la vitalité des territoires. Il convient à cet égard de saluer la réussite du Plan Librairie, mis en oeuvre par le précédent gouvernement et doté de 8 millions d'euros destinés à soutenir le financement et la transmission de ces commerces, parmi les moins rentables des centres-villes. Pour autant, les chiffres médiocres du premier semestre 2017, qui affichent un recul de 9 % des achats en librairie, laissent encore craindre une détérioration de ce marché.
Plus que jamais, les dispositifs de soutien aux libraires, aux éditeurs et aux auteurs doivent donc être sanctuarisés. Gérés par le Centre national du livre (CNL), ils sont toutefois dépendants des recettes de l'opérateur. Or, depuis plusieurs années, le rendement décevant des taxes qui lui sont affectées, respectivement sur le chiffre d'affaires des éditeurs et sur les ventes de matériels d'impression et de reproduction, ne permet pas au CNL d'atteindre le plafond de recettes de 34,7 millions d'euros fixé en loi de finances et l'oblige à renforcer la sélectivité de ses interventions. Si l'IGAC et le Conseil d'État ont été chargés de définir un nouveau modèle de financement pour l'opérateur, il se fait toujours attendre, ce que je déplore.
Je ne développerai pas plus avant les dispositifs d'aide à la musique enregistrée et au jeu vidéo, qui bénéficient, crédits d'impôts mis à part, de 15,1 millions d'euros en 2018 sous forme de dispositifs de soutien de projets sur sélection. Grâce au digital et au développement des pratiques de streaming, l'industrie musicale semble enfin sortie du marasme, sans toutefois avoir réussi à vaincre le fléau du piratage. Je vous en reparlerai dans un instant. Quant au jeu vidéo, la qualité et la diversité de l'industrie française, aidée par un dispositif fiscal attractif, sont mondialement reconnues malgré une concurrence internationale féroce.
Un développement en revanche sur le cinéma, qui auparavant était traité par notre collègue David Assouline dans le cadre de son avis relatif à la création : le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) étant évoqué parmi les opérateurs du programme 334, il a finalement été décidé de rattacher le cinéma au présent avis, même si, vous le savez, cette industrie ne bénéficie d'aucun crédit en projet de loi de finances.
Les taxes affectées au CNC devraient, en 2018, se stabiliser à 673,5 millions d'euros auxquels s'ajouteront 42 millions d'euros mobilisés sur la réserve de solidarité pluriannuelle, soit 724 millions d'euros au bénéfice du cinéma. C'est 2,4 % de plus qu'en 2017.
Rien d'étonnant à ce que la production française, irriguée par différentes aides et de généreux crédits d'impôt, affiche une santé éclatante : en 2016, ce sont 221 films d'initiative française qui ont été aidés pour un devis médian de 2,8 millions d'euros, contribuant ainsi à une diversité artistique et culturelle remarquable.
La réforme du crédit d'impôt cinéma intervenue en loi de finances pour 2016 a d'ores et déjà produit sur l'emploi des résultats supérieurs aux prévisions les plus optimistes grâce à la relocalisation sur le territoire français de l'équivalent de 600 jours de tournage. Le CNC estime à 210 millions d'euros les dépenses ainsi relocalisées, correspondant à la création de 15 000 emplois intermittents.
La perfection serait de ce monde en matière de soutien public à une industrie culturelle si n'était intervenue, le 27 octobre dernier, une décision du Conseil constitutionnel remettant en cause les fondements juridiques de la taxe sur les éditeurs (298,5 millions d'euros de recettes en 2018 pour le CNC tout de même). Dans sa grande sagesse, le juge constitutionnel a donné jusqu'au 1 er juillet 2018 au législateur pour sécuriser le dispositif et a exclu le remboursement aux éditeurs des sommes ainsi perçues. Un chantier urgent nous attend donc.
Par ailleurs, si les entrées en salles caracolent encore, en 2016, à 213 millions, plaçant la France au premier rang européen, ce résultat, manifestement excellent, ne doit pas faire oublier que la part des films français ne dépasse pas 36 % des entrées et, qu'aux côtés des grands succès populaires comme Les Tuche 2 , près de la moitié des films français ne réunit pas plus de 20 000 spectateurs. Ce constat mitigé est transposable à l'exportation, dont les résultats, décevants en 2016 (- 9,6 % de chiffre d'affaires) malgré un renforcement de l'aide qui y est dédiée, dépendent grandement de la présence d'un film « locomotive ».
Ma présentation ne serait pas complète sans l'évocation des 9 millions d'euros de subvention à la Hadopi. Stable, cette enveloppe permettra à l'opérateur de poursuivre sa mission de lutte contre le piratage et de promotion de l'offre légale. Après les déboires budgétaires de l'institution, nous pouvons nous en réjouir. Il n'empêche : la lutte contre le piratage doit s'exercer au plus près des nouvelles pratiques. Que dire dès lors d'un opérateur dont la mission se limite au téléchargement « pair à pair », peu en vogue aujourd'hui, sans traiter les ravages du streaming ? La Hadopi elle-même, consciente de ce décalage, a commandé une étude sur les évolutions envisageables de la riposte graduée. Il serait à cet égard intéressant, pour prolonger notre réflexion à la suite des travaux de nos anciens collègues Corinne Bouchoux et Loïc Hervé en 2015, d'entendre son président quand les conclusions en seront connues.
Enfin, il conviendra de demeurer attentifs, dans les prochaines semaines, à l'aboutissement de l'examen, par le Parlement européen, de la réforme du droit d'auteur et notamment aux mesures qui seront proposées en terme de lutte contre le piratage et au profit du maintien du dispositif français d'exploitation des livres indisponibles ReLire, jugé aujourd'hui contraire au droit européen.
Pour conclure, je propose, d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme 334 « livre et industries culturelles » de la mission « Médias, livre et industries culturelles », tels que prévus par le présent projet de loi de finances pour 2018.
Mme Sylvie Robert . - Je vous remercie pour votre interprétation sur le périmètre des crédits et sur les éléments de réflexion prospectifs. Je partage votre avis sur les bibliothèques : aujourd'hui, la question des horaires d'ouverture revient pour une bonne part aux collectivités territoriales, puisque c'est essentiellement une question de masse salariale. J'ai remarqué que la DGD n'avait pas évolué. Pourtant, un signe du Gouvernement d'augmenter cette DGD pour aider les communes à élargir leurs horaires d'ouverture serait de bon augure. J'attends de la ministre un geste politique et symbolique en ce sens. Je partage aussi votre vigilance sur les librairies, qui ont une place particulière dans nos territoires. Le plan Librairie mis en place, a été efficace mais, là encore, l'équilibre est fragile et les premiers résultats pour 2017 sont préoccupants. Enfin, nous serons très attentifs sur l'avenir européen du dispositif « ReLIRE ». De la même façon, nous partageons votre constat et votre vigilance dans le domaine du cinéma. En conséquence, notre groupe émettra un avis favorable sur ces crédits.
Mme Colette Mélot . - Ce rapport nous apporte de nouvelles pistes de réflexion. La réalité de ce secteur est stable. Pour avoir travaillé dans ce domaine, j'y retrouve mes propres préoccupations. En ce qui concerne la BnF, nous attendons vivement la fin des travaux du Quadrilatère Richelieu que je souhaiterai prochainement visiter. Je rejoins l'observation de Sylvie Robert sur une ouverture plus large des bibliothèques. Mais j'ai conscience qu'une ouverture supplémentaire, le soir ou le dimanche, a un coût important qui nécessite une aide supplémentaire à la collectivité. Concernant le marché du livre, on ne peut que constater une croissance du numérique et, aujourd'hui, beaucoup d'usagers commandent leurs livres sur Internet. On ne peut pas aller contre ce phénomène. Pourtant les librairies situées en centre-ville sont déterminantes. Concernant la musique et les jeux vidéo, il y a là aussi une stabilité. Je pense également qu'il serait intéressant d'entendre le président de la Hadopi. Nous attendons de connaître la suite de la réforme européenne du droit d'auteur. Toutes ces observations m'amènent à vous dire que le groupe LIRT donnera un avis favorable à l'adoption de ces crédits.
M. Michel Laugier . - J'ai bien compris que les crédits du programme 334 étaient principalement consacrés à la BnF et, s'agissant des investissements, du Quadrilatère Richelieu. La subvention de la BnF participe au redressement des comptes publics, sa dotation pour 2018 subissant une baisse de 2,5 % de même que ses emplois diminuent. Bien que l'extension des horaires d'ouverture des bibliothèques soit une promesse du candidat Macron, elle ne relève pas de ce programme et n'est pas encore budgétée. En revanche, 2018 sera marquée par le grand débat national sur la lecture dans le cadre de la mission confiée à d'Erik Orsenna. Le budget de la Hadopi est stable par rapport aux années précédentes où son existence même était menacée. La question de l'adaptation de ses missions aux évolutions technologiques demeure cependant entière. Au vue de toutes ces remarques, l'avis du groupe centriste sera favorable.
Mme Mireille Jouve . - Nous partageons les propositions de Sylvie Robert sur les amplitudes horaires des bibliothèques même si cela pose des problèmes dans les petites communes qui doivent faire face à des difficultés de fonctionnement. Le groupe RDSE émettra un avis favorable à l'adoption de ces crédits.
Mme Laure Darcos . - Nous sommes tous dans l'attente des conclusions de la mission confiée à Erik Orsenna. Je souhaiterai revenir sur la question des oeuvres indisponibles qui est un sujet que je suis depuis longtemps. En 2009, Google a proposé à la BnF, la numérisation de quelques 700 000 livres qui allaient devenir indisponibles. En 2012, les différents partenaires (CNL, éditeurs, auteurs et BnF) ont mis en place un système de numérisation avec l'autorisation des ayants droit désormais rejeté au niveau Europe. La BnF a tout de même fini la numérisation de ces livres et, aujourd'hui, il existe une plate-forme qui les vend. Y a-t-il encore aujourd'hui des crédits alloués à cette opération ? C'est important car il existe une réelle demande pour ces oeuvres et cela relève d'une véritable politique patrimoniale.
M. Pierre Laurent . - Le groupe CRC s'abstiendra sur ces crédits pour marquer à la fois la baisse du budget et le manque d'ambition pour ce secteur, qui reste très fragile qu'il s'agisse des bibliothèques, des librairies ou du CNL. Nous avons besoin d'un geste national en faveur de la lecture car nous nous trouvons face à un problème d'inégalité territoriale. La question de l'accès à la lecture est cruciale et il est nécessaire d'avoir sur le sujet un engagement national. Je regrette le manque d'ambition dans ce secteur. Enfin, la question de la sécurisation juridique de la taxe éditeurs du CNC constitue un enjeu majeur et nous serons très vigilent sur ce point.
Mme Françoise Laborde . - Je vous remercie de vos commentaires plutôt positifs même s'il n'y a pas une ambition phénoménale dans ce budget. Les crédits montrent une stabilité dans le secteur. La volonté d'ouvrir plus les bibliothèques risque de se confronter à des problèmes financiers, si on n'y apporte pas les crédits nécessaires. Nous reparlerons certainement de la mission Orsenna à ce sujet. Le Parlement européen doit se prononcer fin janvier sur le projet « ReLIRE » et nous attendons avec impatience sa décision.
En réponse à Colette Mélot, dont je salue l'implication comme rapporteur pour avis de ce secteur ces dernières années, la loi dite « Anti-Amazon » de 2014 a protégé les libraires et eux-mêmes se créant des plates-formes. Il reste cependant préférable d'aller chez son libraire !
En réponse à Michel Laugier sur le budget de la Hadopi, nous attendons là aussi les conclusions d'une mission confiée à deux conseillers d'État.
Concernant les oeuvres indisponibles évoquées par Laure Darcos, il n'y a pas aujourd'hui de budget pour de nouvelles numérisations, cette question étant également en attente devant le Parlement européen dans le paquet « droits d'auteur ». La vente de livres numérisés par une plate-forme est encore autorisée, mais en janvier prochain, nous saurons si nous avons le droit de continuer de diffuser et de vendre ces livres numérisés. L'année 2018 sera décisive !
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Permettez-moi de vous rappeler mes chers collègues qu'à l'époque où Google avait fait des avances à la BnF pour la numérisation de son fonds, notre commission avait auditionné le président de la BnF et s'était prononcée clairement contre ce que j'appellerais la « Google-isation » de ses fonds.
Par ailleurs, sachez que j'ai récemment reçu Erik Orsenna dans le cadre de sa mission sur l'ouverture des bibliothèques. À cette occasion je lui ai rappelé notre attachement à l'ouverture le dimanche avec toutefois, en contrepartie, la nécessité de prévoir des crédits budgétaires dédiés pour les collectivités territoriales.
M. Jean-Pierre Leleux . - Trois points méritent toute notre vigilance.
Tout d'abord, je suis convaincu que si rien n'est acté rapidement sur la chronologie des médias, nous encourrons un réel risque d'explosion du secteur du cinéma.
S'agissant ensuite du marché du livre, la transition vers le numérique représente un enjeu capital. Je déplore que ce marché soit de la sorte dominé par des géants américains comme Amazon et Apple, et que nous ne disposions pas d'une plateforme de vente aussi performante.
Enfin, le piratage demeure, à mes yeux, « l'ennemi numéro un » de nombreux secteurs : comment les conclusions du très intéressant rapport Bouchoux-Hervé pourraient-elles être mises en oeuvre ?
- Présidence de M. Jean-Claude Carle, vice-président -
Mme Samia Ghali . - Je rejoins les propos de Pierre Laurent et de Sylvie Robert sur les bibliothèques et tiens à souligner notre pauvreté, dans certains quartiers, tant dans les plages horaires d'ouverture que dans le volume de l'offre proposée aux lecteurs.
Pas plus tard qu'hier, le Président de la République, a annoncé qu'il allait multiplier les médiathèques dans les quartiers difficiles : quels moyens seront-ils mis en oeuvre pour cette politique qui me semble capitale, notamment pour lutter contre le décrochage scolaire de certains enfants ?
En 2008 et 2009, lors de nos débats autour de la « loi Hadopi », j'avais eu l'occasion de rappeler que l'accès à la culture demeure onéreux et que le piratage constitue, soyons réalistes, un accès à la culture pour nos concitoyens les plus défavorisés. Le secteur de la musique est le seul à s'être correctement adapté à cette nouvelle donne en permettant des achats ciblés de morceaux, sans obliger à acquérir l'ensemble de l'album.
Enfin, permettez-moi de rappeler que l'ouverture d'esprit et la culture sont des armes pour combattre l'intégrisme.
M. Pierre Ouzoulias . - La BnF ne devrait-elle pas s'aligner en termes d'horaires sur ses homologues dans le monde ? Il me semble en effet que ses horaires d'ouverture sont particulièrement restreints.
M. David Assouline . - Je demande à la commission de diffuser un vade mecum à l'ensemble de ses membres afin de clarifier l'objet de nos votes en commission sur les différentes missions et programmes du projet de loi de finances. Il règne encore trop de confusion.
M. Jean-Claude Carle, président . - En réponse à David Assouline, il me semble que la convocation que vous avez reçue était suffisamment claire.
Mme Françoise Laborde, rapporteure . - En réponse à Jean-Pierre Leleux au sujet de la chronologie des médias, la ministre a rappelé récemment devant notre commission que les acteurs du secteur avaient six mois pour se mettre d'accord, faute de quoi une solution législative serait proposée. S'agissant des géants de la vente du livre, je reconnais que la résistance n'est pas aisée dans un monde de l'immédiateté. Enfin, au sujet du piratage, je crois savoir que le rapport Bouchoux-Hervé est actuellement étudié avec beaucoup d'attention par les deux conseillers d'État en mission sur la réponse graduée.
En réponse à Samia Ghali, les annonces du Président de la République s'agissant des médiathèques dans les quartiers difficiles devraient être financées par des crédits de la politique de la ville et par la dotation générale de décentralisation. Apprenez à cet égard que depuis 1986, cette dotation a permis de créer plus de 2,8 millions de m 2 de bibliothèque. L'accès à la culture est un enjeu majeur mais les communes trouvent des moyens innovants de mettre la culture à disposition de leurs concitoyens comme par exemple dans ma commune de Blagnac, où des livres sont mis à disposition des habitants dans les anciennes cabines téléphoniques. Ce dispositif est utilisé et, je tiens à le souligner, n'a fait l'objet d'aucun vandalisme. Je suis, bien sûr, favorable, comme Pierre Ouzoulias, à une ouverture plus large de la BnF.
Enfin, pour répondre à David Assouline, je reconnais que trois rapports pour une même mission c'est un peu compliqué à suivre... Je rappelle aussi que chaque rapporteur opère une sélection dans les sujets à traiter, c'est d'ailleurs ce qui fait l'intérêt de nos travaux.
M. Jean-Claude Carle, président . - Je vous rappelle que le vote de notre avis sur les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » aura lieu le 29 novembre prochain.
MERCREDI 29 NOVEMBRE 2017
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Mes chers collègues, je vous rappelle que, le 15 novembre dernier, nous avons entendu nos collègues Jean-Pierre Leleux et Françoise Laborde respectivement sur les crédits de l'audiovisuel public et sur ceux du livre et des industries culturelles. Tous deux ont proposé que notre commission y donne un avis favorable. Il en est de même pour notre collègue Michel Laugier, rapporteur pour avis des crédits de la presse. En conséquence, l'ensemble de la mission « Médias, livre et industries culturelles » s'est vu proposer un avis favorable par nos différents rapporteurs.
Mme Françoise Laborde, rapporteure . - Le 15 novembre dernier, en vous présentant les crédits du programme 334 « livre et industries culturelles » de la mission « Médias, livre et industries culturelles », j'avais évoqué la censure, par la décision du Conseil constitutionnel en date du 27 octobre 2017, de la taxe sur les éditeurs versée au CNC, au motif qu'elle ne pouvait porter sur les sommes perçues par les régies publicitaires, même si les chaînes privées encaissent l'essentiel des revenus desdites régies. Le Conseil écartait cependant tout remboursement des sommes ainsi récoltées et laissait au Législateur jusqu'au 1 er juillet 2018 pour modifier son dispositif. Soucieux de sécuriser rapidement une recette essentielle pour le CNC (298,5 millions prévus en 2018), le Gouvernement a apporté les précisions juridiques nécessaires à l'article 20 du projet de loi de finances rectificative pour 2017.
Ce texte sécurise également, à l'article 19, la taxe sur la diffusion en vidéo physique et en ligne de contenus audiovisuels et la taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2017 .