II. PROGRAMME 174 « ÉNERGIE, CLIMAT ET APRÈS-MINES » : UNE CONTRACTION DU BUDGET DE L'APRÈS-MINES EN LIGNE AVEC L'ÉVOLUTION DÉMOGRAPHIQUE, UNE ENVELOPPE SPÉCIALE À CONSOLIDER IMPÉRATIVEMENT ET UNE DÉPENSE FISCALE STABILISÉE MAIS QUI RESTE INSUFFISAMMENT ÉVALUÉE

Le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » est dédié à 92 % à la gestion de « l'après-mines » (391 millions d'euros sur les 427 millions du programme) dont les crédits diminuent chaque année à mesure de la baisse naturelle du nombre des bénéficiaires.

En 2018, la démographie du régime explique à elle seule la contraction des crédits du programme (-6,3 %) tandis que les trois autres actions financées (« Lutte contre le changement climatique », « Politique de l'énergie » et dépenses de soutien) afficheront des hausses significatives, bien que portant sur des montants nettement plus modestes.

On rappellera qu'à la suite des lois de finances rectificatives pour 2015 et 2016, le programme 174 a aussi servi de support à un abondement exceptionnel de 700 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 400 millions d'euros de crédits de paiement pour financer l'« enveloppe spéciale transition énergétique » (ESTE), dont le présent projet de loi acte la « liquidation » au détour d'une simple phrase, avant que le projet de loi de finances rectificative pour 2017 n'y revienne à nouveau.

Depuis sa création, l'enveloppe spéciale aura été marquée par l'opacité des montages financiers mis en oeuvre pour l'alimenter, voire par un défaut de sincérité et d'exhaustivité des lois de finances initiales, qui n'auront pas permis au Parlement d'exercer la plénitude de ses prérogatives budgétaires. Il s'agit désormais de respecter la parole de l'État malgré les errements du passé.

Enfin, sont rattachées au programme près de 2,8 milliards de dépenses fiscales réparties en deux postes principaux : le crédit d'impôt transition énergétique (CITE) et les taux réduits en faveur des industries intensives en énergie.

Programme 174
(en euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

2016

2017

2018

2016

2017

2018

Gestion économique
et sociale
de l'après-mines

473 986 000

-5,9 %

422 907 573

-10,8 %

390 742 250

-7,6 %

476 326 000

-6,0 %

423 607 573

-11,1 %

390 742 250

-7,8 %

Lutte contre
le changement climatique

27 949 546

-8,2 %

27 425 762

-1,9 %

30 795 000

+12,3 %
-5,9 % à
iso-périmètre

27 949 546

-8,2 %

27 425 762

-1,9 %

30 845 000

+12,5 %
-5,8 % à
iso-périmètre

Politique de l'énergie

4 143 723

-22,7 %

3 983 900

-3,9 %

4 456 501

+11,9 %

4 158 209

-28,2 %

3 983 900

-4,2 %

4 406 501

+10,6 %

Soutien

1 151 842

-1,4 %

1 126 563

-2,2 %

1 300 000

+15,4 %

1 151 842

-1,4 %

1 126 563

-2,2 %

1 300 000

+15,4 %

Total

507 231 111

-6,2 %

455 443 798

-10,2 %

427 293 751

-6,2 %

509 585 597

-6,4 %

456 143 798

-10,5 %

427 293 751

-6,3 %

Sources : projets annuels de performances des projets de loi de finances pour 2017 et 2018
et lois de finances rectificatives pour 2015 et 2016

A. DES CRÉDITS QUI BAISSENT LOGIQUEMENT EN RAISON DU POIDS PRÉPONDÉRANT DE L'APRÈS-MINES

1. Gestion de l'après-mines : une baisse de la dotation cohérente avec l'évolution démographique
a) Les dispositions sociales

En 2018, l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM) sera dotée de 351 millions d'euros pour financer, au titre de ses dépenses d'intervention, deux missions principales :

- les avantages en nature (chauffage et logement) prévus par le statut du mineur, à hauteur de 272,5 millions (contre 289,8 millions dans le budget rectificatif 2017), ainsi que les prestations de pré-retraite et prestations assimilées , pour 53,1 millions (contre 65,1 millions en 2017) ;

- les obligations de l'employeur qu'elle assume depuis 2008 auprès des anciens salariés des Charbonnages de France (CdF) qui sont encore sous contrat de travail, soit 107 agents fin 2016 60 ( * ) , pour un coût évalué à 10 millions en 2018.

Au 31 décembre 2016, l'ANGDM gérait les droits de 116 709 bénéficiaires dont l'âge moyen atteignait 75 ans pour les ayants-droit et 84 ans pour les conjoints survivants.

Dans son volet social, l'action finance aussi :

- les dépenses de retraites anticipées acquittées par la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines (CANSSM) pour le compte de l'État aux anciens mineurs dans le cadre des plans sociaux mis en place lors des fermetures de CdF, des Mines de potasse d'Alsace (MDPA) et des mines de Salsigne, pour un montant qui atteindra encore 4,8 millions en 2018 ;

- les pensions des agents français des établissements publics, offices et sociétés concessionnaires de services publics d'Algérie, du Maroc et de Tunisie versées par la Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG), pour 8,4 millions.

b) La réhabilitation des sites

En 2018, 21,8 millions d'euros (contre 17,5 millions inscrits l'an dernier) seront consacrés aux dépenses liées à la liquidation des Mines de potasse d'Alsace (MDPA), engagée en 2009. Ils ont vocation à couvrir les coûts de la structure de liquidation, l'entretien des bâtiments de surface et des installations souterraines et doivent surtout permettre de préparer la fermeture du site de stockage de déchets ultimes de Stocamine , qui explique à elle seule la croissance de l'enveloppe dédiée.

Après avoir connu de nombreuses difficultés 61 ( * ) , ce dernier chantier de réhabilitation devrait être marqué, en 2018, par le début des opérations de confinement des déchets.

c) Les contentieux sociaux de Charbonnages de France

Enfin, à raison de la liquidation définitive de CdF au 31 décembre 2017, le transfert à l'État des droits et obligations conduit à inscrire 4,25 millions au budget 2018, un montant correspondant au coût estimé des contentieux dits « sociaux » de CdF essentiellement liés à la reconnaissance de maladies professionnelles.

2. « Lutte contre le changement climatique » : des crédits en hausse en raison de l'ajout d'une nouvelle mission de contrôle des véhicules

Malgré la priorité affichée par le Gouvernement dans le cadre de la COP21, les derniers exercices budgétaires ont été marqués par la forte contraction de l'enveloppe dédiée à la lutte contre le changement climatique (- 20,6 % entre 2015 et 2017).

À périmètre constant , la baisse serait encore de près de 6 % en 2018 si une nouvelle mission de surveillance du marché automobile n'était pas rattachée à l'action, alors que son objet consistera au moins autant à s'assurer du respect des normes de sécurité que de celles applicables en matière d'émissions de polluants. En intégrant cette compétence, dont le coût est estimé à 5 millions d'euros, les crédits progresseront de 12,5 %.

Dans le cadre du renforcement du contrôle des véhicules automobiles envisagé au niveau européen 62 ( * ) , le futur service à compétence nationale devrait effectuer des prélèvements de véhicules et de pièces détachées pour en vérifier la conformité.

Au-delà de cette mission nouvelle, le financement du dispositif national de surveillance de la qualité de l'air demeure l'objet principal de l'action, à hauteur de 24,5 millions d'euros, soit 70 % de l'enveloppe totale malgré une nouvelle baisse de 11,7 % par rapport à l'an dernier 63 ( * ) .

Ce dispositif est composé :

- au niveau local, des associations agréées de surveillance de la qualité de l'air (AASQA) chargées de collecter les données sur la qualité de l'air, d'informer le public et de soutenir les pouvoirs publics et financées par l'État (pour 17 millions, subvention en baisse de 9 %), les collectivités et des industriels (dont les dons sont déductibles de la taxe générale sur les activités polluantes) ;

- au plan national, du Laboratoire central de surveillance de la qualité de l'air (LCSQA), qui assure la coordination scientifique et technique du réseau (4,6 millions, comme en 2017), et du Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (CITEPA), en charge des inventaires annuels d'émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques dont la subvention augmente de 12,5 %, à 1,35 million.

Comme les années précédentes, votre rapporteur regrette que l'efficacité de cette politique ne soit approchée que sous l'angle des émissions de gaz à effet de serre par habitant 64 ( * ) et non par la réduction des autres polluants atmosphériques , alors que la France est loin d'être exemplaire en la matière, s'agissant notamment des particules fines 65 ( * ) .

Votre rapporteur observe par ailleurs que la hausse de 0,9 % des émissions de gaz à effet de serre par habitant entre 2015 et 2016 s'explique certes par le faible prix des énergies fossiles qui pousse à la consommation mais aussi par l'indisponibilité de certaines centrales nucléaires en 2016 qui a conduit à recourir davantage à des moyens de production fossiles, ce qui atteste, s'il en était encore besoin, de l'atout que représente le parc électronucléaire français dans la lutte contre le changement climatique .

3. « Politique de l'énergie » : des dépenses limitées et disparates

Sous un intitulé très ambitieux, l'action « Politique de l'énergie » finance en réalité des dépenses de fonctionnement très diverses et limitées dans leur montant (4,4 millions d'euros, soit 1 % du programme) qui s'inscrivent cette année en hausse (+10,6 %) en raison de l'ajout de deux nouveaux postes de dépenses : la réalisation d'études pour préparer la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) (pour 230 000 euros), d'une part, et la sécurisation de petits barrages dont la concession est échue mais qui n'ont pu trouver d'acheteur faute de rentabilité dans le contexte actuel de prix bas de l'électricité sur les marchés (pour 340 000 euros), d'autre part.

Les autres postes de dépenses de l'action sont quant à eux stables ou en baisse :

- la subvention versée à l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), qui ne constitue en réalité qu'une très faible part de ses ressources 66 ( * ) , diminue de 6 %, à 2,6 millions d'euros. Elle est destinée à financer les deux missions d'intérêt général de l'agence : l'inventaire triennal des déchets radioactifs et l'assainissement de sites pollués ou la reprise de déchets « orphelins » ;

- le contrôle de la qualité des carburants , pour 650 000 euros, en baisse de 6,8 % ;

- les frais de fonctionnement , stables, du Conseil supérieur de l'énergie (CSE), pour 217 000 euros, et du comité local d'information et de suivi du laboratoire souterrain de recherche de Bure, préalable à la réalisation à la réalisation du centre industriel de stockage géologique de déchets radioactifs (Cigéo), et financé à parité par l'État et les opérateurs du nucléaire concerné (EDF, Areva et le CEA) (157 500 euros chacun) ;

- enfin, des frais divers d'études et de coopération (pour 180 000 euros au total).

On rappellera qu'en réalité, l'essentiel des moyens budgétaires dédiés à la politique énergétique est porté par le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » qui finance, pour 3 milliards d'euros , la masse salariale du ministère (dont 56,4 millions pour les personnels ouvrant aux politiques du programme 174) et de trois autorités indépendantes 67 ( * ) , ainsi que les dépenses dites de « soutien » (moyens de fonctionnement, immobilier, formation, etc.). En complément, quelques crédits de soutien (personnels mis à disposition, informatique métier, formation, frais de mission et communication) sont logés au sein du programme 174, pour un montant d'1,3 million.


* 60 Dont 69 seulement sont encore en situation d'activité professionnelle (et mis à disposition du Bureau des recherches géologiques et minières, des Mines de Potasse d'Alsace, de l'ANGDM ou des cokes de Drocourt).

* 61 Dès avant la fermeture du site, un incendie était survenu au fonds en septembre 2002, ne permettant plus d'accueillir de nouveaux déchets. Pour définir un scénario de fermeture, plusieurs expertises ont été réalisées mais une nouvelle concertation a dû être organisée pour répondre aux inquiétudes exprimées sur le plan local, tandis que des difficultés techniques (décollement du toit des galeries, risques d'éboulement) ralentissaient les premières opérations de retrait des déchets. Un nouveau scénario de fermeture a finalement été validé et l'arrêté préfectoral actant les conditions de cette fermeture a été signé en mars 2017.

* 62 Projet de règlement relatif à la réception et à la surveillance du marché des véhicules à moteur et de leurs remorques, ainsi que des systèmes, composants et entités techniques distinctes destinés à ces véhicules.

* 63 Sont financées en outre diverses études liées à la lutte contre l'effet de serre (900 000 euros), à la réduction des polluants atmosphériques et au renforcement de la qualité de l'air (450 000 euros) et aux plans de protection de l'atmosphère (900 000 euros) ainsi qu'à la location de centres de contrôle technique des véhicules (280 000 euros).

* 64 Qui dépendent aussi pour beaucoup des aléas climatiques de l'année considérée.

* 65 Comme en attestent les eux avis motivés de la Commission européenne adressés à la France pour non-respect des valeurs limites en particules fines et en dioxyde d'azote ainsi que l'arrêt du Conseil d'État du 12 juillet 2017 enjoignant l'État à prendre des mesures pour faire respecter les normes de qualité de l'air d'ici au 31 mars 2018.

* 66 Le budget de l'Andra (349,5 millions d'euros en 2016) est alimenté, pour l'essentiel, par une ressource fiscale affectée - la taxe dite « de recherche » additionnelle à la taxe sur les installations nucléaires de base (INB) - et des ressources propres - contrats commerciaux pour l'enlèvement des déchets et l'exploitation et la surveillance des centres de stockage.

* 67 Commission nationale du débat public (CNDP), Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (ACNUSA) et, depuis 2017, Commission de régulation de l'énergie (CRE).

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