CHAPITRE III - ENCOURAGER LE DÉVELOPPEMENT DURABLE DES TERRITOIRES LITTORAUX

Article 9 bis (art. L. 215-8 du code de l'urbanisme) - Ouverture aux établissements publics fonciers d'État du droit de préemption dans les espaces naturels sensibles

L'article 9 bis de la proposition de loi tend à étendre le droit de préemption des établissements publics fonciers d'État (EPFE) aux espaces naturels sensibles.

Il est issu d'un amendement de Mme Pascale Got, rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale, adopté en séance publique avec l'avis favorable du Gouvernement.

Régis par les articles L. 321-1 à L. 321-13 du code de l'urbanisme, les EPFE « mettent en place des stratégies foncières afin de mobiliser du foncier, (de) favoriser le développement durable et la lutte contre l'étalement urbain (et de) contribuer à la réalisation de logements, notamment de logements sociaux » 128 ( * ) .

Concrètement, les EPFE acquièrent des terrains et procèdent à leur remise en état, en particulier lorsque des travaux de dépollution s'avèrent nécessaires. Ils cèdent ensuite ces terrains à d'autres opérateurs - comme les communes par exemple - pour leur permettre d'y réaliser des projets immobiliers.

Il existe, à ce jour, dix EPFE 129 ( * ) . Ils se distinguent des établissements publics fonciers locaux (EPFL) qui assistent les collectivités territoriales et leurs groupements dans leur stratégie foncière et immobilière.

Les communes peuvent déléguer aux établissements publics fonciers d'État leur droit de préemption dans les zones urbaines et les zones d'urbanisation future ( « droit de préemption urbain » , article L. 213-3 du code de l'urbanisme 130 ( * ) ). À titre d'exemple, l'EPFE Provence-Alpes-Côte d'Azur a préempté plusieurs bâtiments en 2014 afin de faciliter la réhabilitation de logements privés et la construction de logements sociaux à Nice 131 ( * ) .

Actuellement, la délégation du droit de préemption aux EPFE n'est pas possible dans les espaces naturels sensibles (ENS), zones gérées par les départements.

Les espaces naturels sensibles

Ces espaces sont délimités par le département pour mettre en oeuvre une politique de protection, de gestion et d'ouverture au public de terrains sensibles, boisés ou non, destinée à préserver la qualité des sites, des paysages, des milieux naturels et des champs naturels d'expansion des crues et à assurer la sauvegarde des habitats naturels.

Source : article L. 113-8 du code de l'urbanisme

Pour mener leur action dans les espaces naturels sensibles, les départements peuvent y créer des zones de préemption (article L. 215-1 du code de l'urbanisme), après avoir consulté les communes et les organisations professionnelles agricoles et forestières concernées. La procédure de préemption doit être motivée par un objectif de préservation de la qualité des espaces naturels sensibles et non par d'autres finalités comme l'amélioration des conditions d'accès à une berge 132 ( * ) .

Les départements peuvent également déléguer leur droit de préemption aux personnes morales mentionnées à l'article L. 215-8 du code de l'urbanisme : l'État, une collectivité territoriale, le conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, un établissement public chargé d'un parc national ou d'un parc naturel régional, l'agence des espaces verts de la région d'Ile-de-France ou un établissement public foncier local.

L'article 9 bis tend à compléter cette liste en y ajoutant les établissements publics fonciers d'État . Il permettrait ainsi d'aligner leur régime sur celui des établissements publics fonciers locaux.

Cette disposition serait particulièrement opportune dans les zones littorales couvertes par un établissement public foncier d'État (EPFE) mais pas par un établissement public foncier local (EPFL). Tel est par exemple le cas de la Normandie, du Poitou-Charentes ou de la Vendée.

Votre commission a donné un avis favorable à l'adoption de l'article 9 bis .

Article 10 (art. L. 3211-16-1 [nouveau] du code général de la propriété des personnes publiques) - Interdiction d'aliéner les immeubles du domaine privé dans les zones d'activité résiliente et temporaire

L'article 10 de la proposition de loi vise à interdire l'aliénation des immeubles du domaine privé des personnes publiques et des sociétés d'économie mixte lorsque ces biens se situent dans une zone d'activité résiliente et temporaire (ZART) 133 ( * ) .

1. Le domaine privé des personnes publiques

Conformément à son article L. 1, le code général de la propriété des personnes publiques s'applique à l'État, aux collectivités territoriales, à leurs groupements ainsi qu'aux établissements publics.

Leurs biens répondent à deux régimes juridiques distincts.

1.1. Le domaine public

Le régime de la domanialité publique s'applique aux biens appartenant aux personnes publiques précitées et affectés à l'usage direct du public ou à un service public 134 ( * ) .

Il s'organise autour de trois grands principes : inaliénabilité - les biens du domaine public ne peuvent pas être vendus avant déclassement -, imprescriptibilité - ils ne peuvent pas faire l'objet d'une prescription acquisitive - et insaisissabilité - les voies d'exécution de droit privé 135 ( * ) ne sont pas applicables.

Les biens du domaine public peuvent toutefois faire l'objet d' échanges avec des personnes publiques ou privées 136 ( * ) , par dérogation au principe d'inaliénabilité. Les cessions entre des personnes publiques sont permises, sans déclassement préalable, lorsque les biens concernés « sont destinés à l'exercice de compétences de la personne publique qui les acquiert et relèveront de son domaine public » 137 ( * ) .

1.2. Le domaine privé

La domanialité privée est définie « en creux » : elle comprend les biens « qui ne relèvent pas du domaine public » 138 ( * ) .

Les meubles et immeubles du domaine privé des personnes publiques sont principalement régis par les règles du droit civil 139 ( * ) .

Des protections particulières sont toutefois prévues : le domaine privé est insaisissable 140 ( * ) et les redevances qu'il engendre sont soumises aux règles de la comptabilité publique 141 ( * ) .

Ces biens peuvent être cédés à des personnes publiques ou privées sans déclassement préalable 142 ( * ) . Ils peuvent aussi être échangés, à l'exception des chemins ruraux 143 ( * ) .

Certaines dispositions législatives réduisent néanmoins la marge de manoeuvre des personnes publiques sur leur domaine privé :

- l'article R. 3211-2 du code général de la propriété des personnes publiques soumet la plupart des aliénations de l'État à des procédures de publicité et de mise en concurrence ;

- l'article L. 3211-5 du même code dispose que les bois et forêts de l'État ne peuvent être aliénés, sauf disposition législative contraire ou lorsque la superficie des terrains concernés est inférieure à 150 hectares 144 ( * ) ;

- les biens du domaine privé ne peuvent pas être cédés « à vil prix » , c'est-à-dire en dessous de la valeur réelle 145 ( * ) , sauf motif d'intérêt général 146 ( * ) .

2. Le dispositif applicable aux biens immobiliers situés dans les zones d'activité résiliente et temporaire (ZART)

2.1. Les biens situés dans les ZART

Les ZART comprendraient des biens menacés par le recul du trait de côte.

Plusieurs cas de figure seraient possibles :

a) ces biens appartiennent à une personne privée.

Le propriétaire pourrait alors céder son bien à une personne privée ou à une personne publique, cette dernière bénéficiant d'un droit de « priorité » , conformément à la procédure de préemption prévue à l'article 11 de la proposition de loi. Le propriétaire pourrait ensuite conclure un bail réel immobilier littoral (BRILi, article 12) avec la personne publique pour conserver la jouissance du bien ;

b) les biens relèvent du domaine public. Ils seraient inaliénables, sauf cession à une personne publique ou échange ;

c) les biens appartiennent au domaine privé d'une personne publique et pourraient être, en l'état actuel du droit, cédés ou échangés.

2.2. Le dispositif proposé

L'article 10 de la proposition de loi concerne ce dernier cas : les personnes publiques et les sociétés d'économie mixte auraient l'interdiction de vendre à un particulier un bien de leur domaine privé situé dans une zone d'activité résiliente et temporaire (ZART) . Cette interdiction serait de facto étendue au domaine public 147 ( * ) (nouvel article L. 3211-16-1 du code général de la propriété des personnes publiques).

D'après les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, cette mesure poursuit deux objectifs concrets. Elle vise, tout d'abord, à anticiper la submersion des biens de la ZART et leur future incorporation au domaine public maritime de l'État 148 ( * ) . Il s'agit, ensuite, d' inciter les personnes publiques à conserver la propriété des biens menacés par le recul du trait de côte et à conclure des baux réels immobiliers littoraux (BRILi) avec les particuliers.

Le périmètre de l'article 10 serait identique à celui de l'article L. 1 du code général de la propriété des personnes publiques, à deux exceptions près :

a) parmi les établissements publics, seuls les groupements de collectivités territoriales et les établissements publics fonciers seraient concernés par l'interdiction d'aliénation posée par l'article 10, ce qui exclurait les autres établissements publics et notamment les établissements d'aménagement ou le conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres ;

b) l'article 10 serait applicable aux sociétés d'économie mixte , dont les biens relèvent pourtant du code de commerce et non du code général de la propriété des personnes publiques.

Deux dérogations à ce principe d'interdiction des aliénations dans les zones d'activité résiliente et temporaire (ZART) seraient toutefois prévues.

En premier lieu, les personnes morales concernées par l'article 10 pourraient céder ou s'échanger entre elles les biens situés dans une ZART.

En second lieu, elles pourraient céder ces mêmes biens au conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres ou les échanger avec ce dernier.

Le conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres (CELRL)

Régi par les articles L. 322-1 à L. 322-14 du code de l'environnement, ce conservatoire a été créé en 1975 pour mener « une politique spécifique d'aménagement, de protection et de mise en valeur » du littoral.

Établissement public à caractère administratif, le conservatoire du littoral est placé sous la tutelle du ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer. Il est géré par un conseil d'administration composé d'élus locaux et nationaux, pour un budget annuel d'environ 50 millions d'euros . Sur le terrain, les politiques du conservatoire du littoral sont mises en oeuvre par neuf conseils de rivages 149 ( * ) .

Les missions du conservatoire concernent notamment la protection des équilibres biologiques et écologiques et le développement des activités économiques liées à la proximité de l'eau. Pour les remplir, il intervient dans le domaine foncier en acquérant des terrains littoraux afin de les préserver.

Le conservatoire du littoral gère aujourd'hui 700 sites , soit 166 000 hectares 150 ( * ) .

3. La position de votre commission

L'article 10 de la proposition de loi soulève un problème de constitutionnalité : il porterait une atteinte disproportionnée au droit de propriété des personnes publiques , principe constitutionnel garanti par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 151 ( * ) .

En l'état du droit, un seul cas comparable existe : l'interdiction pour l'État de vendre ses forêts domaniales. Toutefois, même dans cette hypothèse, des aliénations demeurent toutefois possibles, notamment lorsque la superficie des terrains est inférieure à 150 hectares (Cf. supra) .

En outre, rien n'empêche les personnes publiques de vendre les biens de leur domaine privé situés dans une zone à risques (avalanches, mouvements de terrain, etc. ), tout en remplissant leurs obligations d'information auprès des acheteurs 152 ( * ) . En pratique, les personnes publiques utilisent cette possibilité avec un grand sens des responsabilités : en cette matière, il convient de privilégier la souplesse et l'adaptation aux circonstances locales, non l'interdiction pure et simple de toute aliénation.

Certes, les biens d'une ZART auraient vocation, à moyen terme, à intégrer le domaine public maritime de l'État. Le délai de submersion peut toutefois s'étendre sur plusieurs décennies et les collectivités territoriales doivent pouvoir gérer les biens de leur domaine privé comme elles l'entendent, conformément au principe de libre administration .

Enfin, l'article 10 présente une difficulté juridique supplémentaire : il mentionnerait les sociétés d'économie mixte alors que ces dernières ne sont pas couvertes par le périmètre du code général de la propriété des personnes publiques. Il exclurait, à l'inverse, la plupart des établissements publics alors que ces derniers sont soumis aux règles du domaine.

Dans ce contexte, votre commission a adopté l'amendement de suppression COM-13 . Elle a, en conséquence, donné un avis défavorable à l'adoption de l'article 10.

Article 11 (Section 2 du chapitre VII du titre VI du livre V et articles L. 567-2 et L.567-3 [nouveaux] du code de l'environnement) - Actions et opérations d'aménagement, procédures de préemption et réserves foncières pour s'adapter au recul du trait de côte

L'article 11 de la proposition de loi mentionne trois catégories de mesures pouvant être mises en oeuvre pour s'adapter, sur le plan de l'urbanisme, au recul du trait de côte : les actions et opérations d'aménagement, la constitution de réserves foncières et les procédures de préemption (nouveaux articles L. 567-2 et L. 567-3 du code de l'environnement).

D'après l'exposé des motifs de la proposition de loi, « l'anticipation des risques ne peut en effet avoir lieu sans un projet de territoire et il est nécessaire d'encourager le recours aux outils d'aménagement du territoire pour traiter cette question » .

Ces mesures compléteraient la création des zones d'activité résiliente et temporaire (ZART, article 3) et des baux réels immobiliers littoraux (BRILi, article 12).

1. Les actions ou opérations d'aménagement et les réserves foncières

Mentionnées à l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, les actions ou opérations d'aménagement visent notamment à « mettre en oeuvre un projet urbain (...), (à) organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques (...), (à) réaliser des équipements collectifs (...), (à) sauvegarder ou (à) mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti » .

À ce stade, il est difficile de déterminer avec précision les actions ou opérations concernées par l'article 11 de la proposition de loi. Il pourrait s'agir, à titre d'exemple, de la réalisation d'ouvrages de « défense contre les inondations et contre la mer » permettant de ralentir le recul du trait de côte (digues, ensablement, etc .).

Les articles L. 221-1 à L. 221-3 du code de l'urbanisme permettent à certaines personnes publiques 153 ( * ) d'acquérir des immeubles pour « constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation d'une action ou d'une opération d'aménagement » . En attendant la réalisation du projet, les personnes publiques doivent assurer une « gestion raisonnable » des terrains « réservés » , dont les conditions de cession sont strictement encadrées 154 ( * ) .

En l'espèce, il s'agirait probablement de constituer des réserves foncières dans des zones exposées au recul du trait de côte et d'y prévoir, à moyen terme, la réalisation d'ouvrages de protection contre les inondations et contre la mer.

S'agissant des actions ou opérations d'aménagement et des réserves foncières, l'article 11 de la proposition de loi se borne donc à rappeler la possibilité d'utiliser ces outils pour réduire la vulnérabilité des territoires face au risque de recul du trait de côte.

2. L'application du droit de préemption

Les dispositions relatives au droit de préemption ont une portée plus précise : elles visent à encourager les personnes publiques à faire usage du droit de préemption dans les zones d'activité résiliente et temporaire (ZART).

2.1. Le droit de préemption en l'état du droit

Les procédures de préemption permettent à une personne publique d'acquérir, en priorité, un bien mis en vente par une personne privée ou faisant l'objet d'une donation entre vifs. Elles se distinguent de l'expropriation, procédure dans laquelle le bien est cédé à une personne publique sans avoir été préalablement mis en vente.

En l'état du droit, il existe plusieurs catégories de préemptions .

Le code rural et de la pêche maritime permet, tout d'abord, aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) de préempter des biens à usage agricole pour remplir des objectifs fixés au niveau législatif (maintien des activités agricoles, lutte contre la spéculation foncière, protection de la forêt, etc .) 155 ( * ) .

Parallèlement, le titre II du code de l'urbanisme mentionne quatre autres procédures de préemption.

En premier lieu, les communes peuvent préempter des fonds et des baux commerciaux dans un « périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité » défini par une délibération du conseil municipal 156 ( * ) .

En deuxième lieu, une collectivité publique ou le concessionnaire d'une opération d'aménagement sont autorisés à préempter des biens situés dans une zone d'aménagement différé (ZAD) créée par le préfet 157 ( * ) .

En troisième lieu, les départements ou le conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres recourent à la procédure de préemption pour « mettre en oeuvre une politique de protection, de gestion et d'ouverture au public des espaces naturels sensibles » 158 ( * ) .

En dernier lieu, le droit de préemption urbain (DPU) autorise les communes à préempter des biens dans les zones urbaines et d'urbanisation future délimitées par un plan local d'urbanisme. Il s'étend à d'autres espaces limitativement énumérés comme les zones de rétention temporaire d'eau 159 ( * ) .

Chacune de ces procédures répond à une procédure spécifique qui vise, notamment, à concilier l'objectif d'intérêt général poursuivi par la préemption et la protection des intérêts des personnes dont le bien est préempté .

L'évaluation du prix du bien est strictement encadrée. Dans l'exemple de la préemption urbaine, le propriétaire met son bien en vente à un prix qu'il détermine. Il remplit une déclaration d'intention d'aliéner (DIA) 160 ( * ) qui vise à informer les autorités publiques de la vente et à leur permettre de formuler une offre dans un délai de deux mois.

À défaut d'accord amiable entre le vendeur et la personne publique, le tribunal de grande instance fixe le prix de l'opération selon les règles applicables en matière d'expropriation 161 ( * ) . Le juge évalue la consistance du bien. D'après les informations recueillies par votre rapporteur pour avis, cette évaluation ne prend pas toujours en compte les risques naturels auxquels sont soumis les biens préemptés.

En tout état de cause, le vendeur peut renoncer à céder son bien à tout moment de la procédure, notamment si le prix fixé par le juge ne lui convient pas 162 ( * ) .

2.2. Le dispositif de préemption proposé

L'article 11 de la proposition de loi tend à fixer le principe selon lequel « la préemption est possible dans toute zone d'activité résiliente et temporaire » (ZART).

Lors de ses travaux, votre rapporteur pour avis a constaté deux interprétations divergentes concernant cet article :

- certaines personnes interrogées considèrent qu'il créerait ex nihilo une nouvelle procédure de préemption au sein des ZART . Si tel était le cas, cette disposition serait entachée d'une incompétence négative dans la mesure où elle ne définit ni les personnes publiques compétentes pour exercer le droit de préemption ni les garanties apportées aux particuliers ;

- d'autres personnes interrogées estiment que l'article 11 vise plus précisément à appliquer, dans les ZART, des procédures de préemption existantes, sous réserve de quelques adaptations.

Votre rapporteur pour avis privilégie cette seconde interprétation, même s'il reviendra au Gouvernement de confirmer ce point en séance publique.

L'article 11 se réfère, en effet, aux procédures du livre II du code de l'urbanisme 163 ( * ) . Dès lors, les procédures suivantes seraient possibles dans les ZART : préemption commerciale, création de zones d'aménagement différé (ZAD), préemption des espaces naturels sensibles et droit de préemption urbain.

Pour préempter un bien situé dans une ZART, les personnes publiques devraient respecter les procédures définies par le code de l'urbanisme. À titre d'exemple, le droit de préemption urbain pourrait être mis en oeuvre dans une ZART, dans l'hypothèse où les biens concernés se situent dans une zone urbaine ou d'urbanisation future.

Les procédures de préemption dans les ZART présenteraient toutefois deux spécificités .

Première spécificité, le contrat de cession comporterait une clause précisant si une priorité est accordée au vendeur en cas de conclusion ultérieure d'un bail réel immobilier littoral (BRILi) .

Concrètement, il s'agit d'encourager un particulier dont le bien est menacé par le recul du trait de côte de le mettre en vente, puis de le céder à une personne publique dans le cadre d'une procédure de préemption, puis, enfin, d'en garder l'usage en concluant un BRILi.

Cette disposition ne soulève aucune difficulté juridique , les règles communautaires de mise en concurrence ne s'appliquant pas aux contrats d'occupation domaniale, comme l'a rappelé notre collègue François Pillet dans son rapport sur le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique 164 ( * ) .

Votre rapporteur pour avis souligne toutefois que cette disposition semble contradictoire avec la volonté affichée par le Gouvernement d'aller plus loin que le droit communautaire et de prévoir des procédures de mise en concurrence pour l'ensemble des contrats d'occupation domaniale 165 ( * ) .

Seconde spécificité, le juge fixant le prix de la préemption devrait prendre en compte le risque de recul du trait de côte ainsi que l'affectation du bien dans une ZART et réduire le montant de son évaluation en conséquence.

Cette « décote » permettrait aux personnes publiques d' acquérir les biens menacés à moindre frais et de disposer de davantage de marges de manoeuvre financières pour préempter les biens d'une ZART.

La décote ne serait toutefois appliquée qu'aux personnes ayant acheté un bien alors que l'inclusion de celui-ci dans une ZART était d'ores et déjà prévue.

Elle ne concernerait pas les biens affectés à une activité agricole. Cette différence de traitement pourrait être justifiée par les spécificités des exploitations agricoles et par la volonté du législateur de ne pas remettre en cause leur équilibre financier.

Au bénéfice de ces observations, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption de l'article 11.

Article 12 (section 3 et 4 du chapitre VII du titre VI du livre V et articles L. 567-4 à L. 567-29 [nouveaux] du code de l'environnement) - Régime juridique du bail réel immobilier littoral

L'article 12 de la proposition de loi tend à instaurer un nouveau type de contrat de bail dont il définit le régime et qu'il qualifie de « bail réel immobilier littoral » (BRILi) . Ce dernier faciliterait le maintien d'activités dans des zones menacées par le recul du trait de côte 166 ( * ) .

Pour mémoire, un bail est un contrat de location dans lequel le bailleur s'engage pour un temps déterminé à permettre à une personne, le preneur , de jouir d'un bien moyennant le paiement d'un prix.

Si le contrat de bail est régi par les dispositions civiles de droit commun, le législateur a développé plusieurs régimes spécifiques de baux immobiliers (baux commerciaux, baux ruraux, baux d'habitation, etc. ). Ce mouvement s'est accéléré ces dernières années avec la création d'un « bail rural environnemental » en 2006, d'un « bail réel immobilier » en 2014 ou encore d'un « bail réel solidaire » en 2016.

Plutôt que de laisser la définition des stipulations contractuelles à la libre volonté des parties, le législateur a opté pour un encadrement de la conclusion des baux afin de rétablir l'équilibre entre les parties et les obliger à prendre en compte des intérêts extérieurs. Comme le rappelle Mme Pascale Got, rapporteur de l'Assemblée nationale, « la prise en compte des préoccupations d'ordre environnemental a ainsi conduit à transformer le bail en instrument de gestion des risques » 167 ( * ) .

Le BRILi serait défini au sein d'une nouvelle section 3 du chapitre VII du titre VI du livre V du code de l'environnement.

Il s'agirait d'un contrat de bail soumis au droit privé . Il serait conclu entre , d'une part, une personne physique ou morale (preneur) et, d'autre part, une société publique locale compétente en matière d'aménagement ou de construction ou une personne publique dont la liste serait énumérée de manière limitative (bailleur) : État, collectivités territoriales et leurs groupements (syndicats mixtes, établissements publics de coopération intercommunale, etc. ), établissements publics fonciers ou Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres (nouvel article L. 567-4 du code de l'environnement).

À la différence du contrat de bail de droit commun, le BRILi confèrerait un droit réel , c'est-à-dire un droit sur le bien, et non un droit personnel. Sur le modèle du bail emphytéotique ou du bail à construction, un bail réel confère au preneur un droit sur la chose qui est l'objet du contrat : concrètement, si le bail de droit commun fait peser sur le bailleur une obligation personnelle de laisser le preneur jouir paisiblement du bien, le bail « réel » permet au preneur de jouir directement du bien sans devoir recourir à l'intervention d'une autre personne, ce qui le rapproche du propriétaire sans pour autant en faire le titulaire du droit de propriété.

Le BRILi porterait sur des immeubles ne pouvant faire l'objet d'un bail emphytéotique administratif ou d'occupations constitutives de droit réel : il s'appliquerait aux biens immobiliers situés sur le domaine privé des personnes publiques concernées ou aux biens d'une société publique locale, alors que le bail emphytéotique administratif est réservé au domaine public des collectivités territoriales et les occupations constitutives de droit réel au domaine public artificiel des personnes publiques.

Enfin, le champ du BRILi serait particulièrement circonscrit puisqu'il serait réservé aux biens des bailleurs se situant dans des zones d'activité résiliente et temporaire (ZART) 168 ( * ) . La définition d'une ZART aurait donc pour effet de créer un périmètre au sein duquel le bailleur pourrait faire usage du bail réel immobilier littoral aussi longtemps que le recul du trait de côte rendrait possible l'exercice d'activités.

Par détermination de la loi, ce contrat relèverait du droit privé , bien qu'il puisse être conclu par une personne publique. Cette qualification paraît cohérente car il s'applique à des biens du domaine privé régis, sous réserve de règles particulières, par le droit civil 169 ( * ) .

Le régime du bail réel immobilier littoral serait fixé par les nouveaux articles L. 567-5 et suivants du code de l'environnement. Ces règles seraient d'ordre public : sauf disposition législative contraire, les stipulations contractuelles ne pourraient y déroger. D'ailleurs, toute clause contraire serait réputée non écrite.

Votre commission a convenu de l'utilité d'un tel instrument contractuel dans la mesure où les baux actuellement ouverts aux personnes publiques ne leur permettent ni de conférer à un preneur un droit réel sur les biens en cause ni de prendre en compte le risque de recul du trait de côte.

Toutefois, elle a souhaité apporter des garanties supplémentaires au bailleur au regard des circonstances particulières qui résultent de la survenance, à terme, d'un risque naturel conduisant à la disparition du bien.

En outre, dans un souci de sécurité juridique et de clarification du texte transmis par l'Assemblée nationale, votre commission a adopté un amendement COM-14 de son rapporteur pour avis, simplifiant et précisant la rédaction de l'article 12 .

1. La durée et la fin du contrat de bail réel immobilier littoral (BRILi)

Dans le texte adopté par l'Assemblée nationale, la durée du BRILi serait librement fixée par les parties pour un période comprise entre 5 et 99 ans (nouvel article L. 567-5 du code de l'environnement). La durée minimale serait particulièrement limitée puisque les autres baux réels fixent généralement un minimum de 18 ans.

En tout état de cause, le terme du contrat devrait être fixé , au plus tard, à la fin de la durée définie par le plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRNP) pendant laquelle des constructions pourraient être implantées, déplacées ou utilisées au sein de la zone d'activité résiliente et temporaire (ZART).

La durée du BRILi pourrait être prorogée par accord express des parties dans les mêmes conditions qu'au moment de la conclusion du bail 170 ( * ) . Cette durée serait liée à la survenance du recul du trait de côte : cet évènement naturel pourrait mettre fin au contrat de bail en raison de la disparition du bien objet du contrat 171 ( * ) .

Dès lors, le bail prendrait fin à l'issue de la durée initialement prévue par le contrat (normalement avant la survenance du risque) ou par la survenance du risque constatée par un arrêté de péril permanent (intervenant en ce cas avant la date envisagée).

Votre commission a adopté l'amendement COM-15 de son rapporteur pour avis afin de distinguer clairement la prorogation et la reconduction du contrat de bail , la prorogation devant maintenir la durée du contrat de bail dans le délai maximal de 99 ans imposé lors de la conclusion. Au bout de ces 99 ans, il serait nécessaire de renégocier un nouveau contrat.

Il ne pourrait être mis fin de facto au bail réel immobilier littoral du seul fait du délaissement du bien par le preneur (nouvel article L. 567-19 du code de l'environnement). Avant le terme fixé initialement, seule une possibilité de résiliation judiciaire du contrat de bail serait ouverte aux parties (nouvel article L. 567-7). En ce cas, le juge civil pourrait être saisi :

- en l'absence d'exécution par le preneur de ses obligations contractuelles, notamment en cas de défaut de paiement du prix non régularisé six mois après une mise en demeure, le bailleur pourrait demander la résiliation judiciaire du bail (nouvel article L. 567-26) ;

- en cas de destruction des constructions et ouvrages accidentelle mais non due à la réalisation du risque de recul du trait de côte, le preneur comme le bailleur pourraient demander en justice la résiliation du bail et une indemnisation (nouvel article L. 567-27).

Votre commission a adopté un amendement COM-23 de son rapporteur visant à supprimer le nouvel article L. 567-27 du code de l'environnement, qui obligerait les parties à « déterminer les conséquences de la destruction accidentelle des constructions et ouvrages, à l'exclusion de celle résultant de la réalisation anticipée du recul du trait de côte. »

Cet article semble redondant avec le nouvel article L. 567-15, qui contraindrait le preneur à maintenir les constructions en bon état d'entretien et le dispenserait de les reconstruire en cas de destruction fortuite, de force majeure, ou de vice de construction antérieur à la conclusion du bail. Le nouvel article L. 567-27 apparaît, en outre, contradictoire avec d'autres dispositions contraignant les parties à déterminer les conséquences de la réalisation anticipée du trait de côte (nouveaux articles L. 567-8 et L. 567-12).

Enfin, il n'est pas justifié d'établir un lien entre l'absence de cette clause sur les conséquences d'une éventuelle destruction accidentelle et la possibilité de demander la résiliation du bail en justice. La saisine du juge est un droit fondamental qui s'exerce en cas de litige entre les parties et ne saurait être restreint par de telles limitations.

L'expiration du BRILi aurait pour effet d'éteindre les servitudes passives, privilèges, hypothèques et charges dont le preneur serait à l'origine (nouvel article L. 567-28).

2. Les droits et obligations du bailleur

Les obligations du bailleur à l'égard du preneur seraient celles auxquelles est tenu un vendeur d'immeuble à l'égard d'un acheteur (nouvel article L. 567-6). À ce titre, il aurait une obligation d'information se traduisant notamment par la réalisation de plusieurs diagnostics techniques 172 ( * ) . Seraient également à sa charge une obligation de délivrance du bien, une garantie contre l'éviction par un tiers ainsi qu'une garantie contre les vices cachés.

Votre commission a adopté un amendement COM-17 de son rapporteur pour avis afin de préciser les obligations auxquelles le bailleur est tenu, par renvoi aux obligations imposées aux propriétaires par le chapitre IV du titre VI du livre III du code civil et par la section 2 du chapitre unique du titre VII du livre II du code de la construction et de l'habitation.

En outre, une obligation particulière existerait en cas de réalisation du risque de recul du trait de côte. Dans cette hypothèse, les frais de démolition des constructions seraient à la charge du bailleur si elles lui appartiennent ou s'il a obligé le preneur à les édifier durant le bail. Ces deux obligations pourraient néanmoins faire l'objet de stipulations contraires, librement décidées par les parties (nouvel article L. 567-8 du code de l'environnement).

Enfin, le bailleur ne pourrait bénéficier d'une clause lui permettant de résilier unilatéralement le contrat (nouvel article L. 567-7), alors qu'une telle faculté lui est ouverte pour les contrats d'occupation du domaine public.

Votre commission a adopté un amendement COM-16 de son rapporteur pour avis étendant l'interdiction de résiliation unilatérale au preneur (nouvel article L. 567-5-1). Cette précaution lui a paru assurer un meilleur équilibre contractuel entre le preneur et le bailleur . En effet, les parties au BRILi s'engageraient dans une relation contractuelle particulière de telle sorte qu'elles doivent pouvoir disposer d'une prévisibilité suffisante sur son exécution, sans que le bailleur soit à la merci d'un retrait unilatéral du preneur, a fortiori si le risque de recul du trait de côte se précise.

3. Les droits et obligations du preneur

Pour sa part, le preneur serait tenu à des obligations traditionnelles : respect des servitudes (nouvel article L. 567-13), obligation d'entretien et de maintien en bon état (nouvel article L. 567-15), acquittement des charges, taxes et impôts liés à l'immeuble (nouvel article L. 567-17), droit d'hypothéquer le bien (nouvel article L. 567-16).

En contrepartie, il aurait la libre jouissance du bien immobilier , sous réserve des activités accessoires que le contrat de bail interdirait ou des changements d'activités qu'il subordonnerait à l'accord du bailleur (nouvel article L. 567-14).

Le preneur serait également tenu d'acquitter un loyer versé à la date convenu entre les parties. Ce loyer pourrait être constitué :

- d'un versement numéraire ;

- d'un transfert de la propriété totale ou partielle d'immeubles ou de titres donnant vocation à la propriété ou à la jouissance d'immeubles ;

- de la réalisation de travaux, constructions ou ouvrages sur un autre immeuble du bailleur.

Ces modes de paiement pourraient être combinés.

Les personnes publiques sont soumises, pour leurs biens relevant du domaine public et du domaine privé, à l'interdiction de consentir des libéralités 173 ( * ) qui se rattache à la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen. Il en résulte qu'elles ne peuvent pas fixer un loyer ne correspondant pas à la valeur réelle du bien, sauf pour un motif d'intérêt général.

Dès lors, votre commission a adopté un amendement COM-20 de son rapporteur pour avis supprimant la mention selon laquelle le montant du loyer est « librement convenu » par les parties afin que l'interprétation qui serait faite de cette mention ne donne pas l'impression que la fixation du loyer échappe aux règles constitutionnelles de gestion des biens publics .

4. La cession ou l'apport en société du droit au bail

Le preneur pourrait céder son droit au bail réel immobilier littoral (BRILi) ou l'apporter en société. Le cessionnaire ou la société se substituerait alors au preneur pour les obligations et droits contractuels le liant avec le bailleur. Le preneur « initial » resterait uniquement garant des obligations relatives à l'achèvement des constructions et ouvrages que le bailleur lui aurait imposés contractuellement de réaliser (nouvel article L. 567-20 du code de l'environnement).

À peine de nullité, la cession devrait respecter une procédure spécialement définie : le preneur ferait part à son cessionnaire d'une « offre préalable d'acquisition » , valable pour une période d'au moins trente jours à compter de sa réception par le cessionnaire. Ce dernier ne pourrait l'accepter qu'après un délai de dix jours à compter de la réception de l'offre. Le preneur bénéficierait également de la protection offerte par les articles L. 271-1 à L. 271-3 du code de la construction et de l'habitation 174 ( * ) .

Le texte de l'Assemblée nationale distingue, au risque de la confusion, la cession du droit au bail de celle du bail. En outre, cette faculté ne serait subordonnée qu'à l'information du bailleur par le preneur mais à l'agrément du bailleur lorsque la cession ou l'apport en société porterait sur une partie de l'immeuble.

Votre commission a donc adopté l'amendement COM-21 de son rapporteur pour avis de manière à clarifier cette disposition : l'accord du bailleur serait nécessaire pour toute cession du droit au bail, qu'elle concerne une partie du bien ou sa totalité.

La substitution de preneur constitue, en effet, un fait suffisamment important pour qu'il nécessite l'accord du bailleur.

5. La faculté pour le preneur de consentir des baux et titres d'occupation

Le preneur ne pourrait pas consentir un BRILi sur le même immeuble à une autre personne, quand bien même le bailleur en serait d'accord (nouvel article L. 567-9 du code de l'environnement). Il pourrait, en revanche, consentir des baux et titres d'occupation ne conférant pas des droits réels sur cet immeuble (nouvel article L. 567-23).

Votre commission a approuvé ces restrictions sous réserve de l'adoption d'un amendement COM-18 présenté par son rapporteur pour avis afin de clarifier la rédaction du texte de l'Assemblée nationale et de préciser, au nouvel article L. 567-9, que, de manière générale, le preneur ne peut pas consentir, de lui-même, à un autre preneur un bail ou un titre d'occupation conférant des droits réels sur l'immeuble concerné et les constructions édifiées, interdiction qui intégrerait le bail réel immobilier littoral.

Les autres types de titres d'occupation et de baux (notamment les contrats de location) conclus par le preneur avec une tierce personne seraient donc possibles sous réserve de respecter plusieurs formalités :

- la reproduction de dispositions légales, la mention de la date d'extinction du bail et de son effet sur le contrat conclu ainsi que le risque d'extinction anticipée ;

- l'apposition d'une mention manuscrite du preneur selon laquelle il sait devoir quitter les lieux à la date de la réalisation du risque naturel ou, en tout état de cause, à la fin du bail.

Ces formalités seraient prescrites à peine de nullité. Toutefois, pour les baux d'habitation, la violation des procédures pourrait conduire :

- au versement au preneur d'une indemnité équivalente à six mois de loyers, si le risque s'est réalisé ;

- au droit pour le preneur de se maintenir au terme du bail dans les lieux jusqu'à la réalisation du risque et, au plus tard, pendant 36 mois, moyennant le versement d'une indemnité équivalente au dernier loyer exigible, si le risque ne s'est pas produit.

Dans ce dernier cas, le bailleur du BRILi pourrait engager la responsabilité civile du preneur ayant consenti un bail non constitutif de droit réel à une tierce personne.

Votre commission a constaté que le texte de l'Assemblée nationale ne précisait pas l'articulation entre la procédure de nullité et le maintien dans l'habitation : concrètement, pour un bail d'habitation, une partie pourrait-elle choisir soit d'invoquer la nullité, soit de solliciter l'indemnité ou le maintien dans les lieux ? La nullité s'imposerait-t-elle par priorité ? La nullité serait-elle exclue pour les baux d'habitation en raison de règles propres en cas de violation des formalités légales ?

Dans l'attente d'éclaircissements sur cette articulation, elle a donc adopté un amendement COM-22 de son rapporteur pour avis afin de maintenir, à ce stade, la seule sanction de nullité.

6. La propriété des constructions liées au bien immobilier

Le texte de l'Assemblée nationale précise le régime de la propriété des constructions qui feraient l'objet d'un bail réel immobilier littoral (nouvel article L. 567-11 du code de l'environnement).

Les constructions existantes resteraient la propriété du bailleur. Parallèlement, le preneur serait autorisé, sous réserve d'une simple information préalable du bailleur, à édifier de nouvelles constructions sur l'emprise du bien et à surélever, réhabiliter, améliorer, rénover ou démolir les constructions existantes et celles édifiées par lui. La seule limite à cette faculté serait de ne pas opérer de changement diminuant la valeur de l'immeuble. Pour les constructions nouvelles, le preneur devrait, en outre, constituer une garantie financière de la remise en état du bien immobilier au terme du bail.

Les obligations de remise en l'état du preneur à l'issue du contrat différeraient selon que le risque se réalise ou non avant le terme prévu du bail.

En cas de réalisation du risque avant ce terme, le déplacement ou la démolition des constructions et améliorations qu'il avait édifiées seraient à sa charge.

En l'absence de réalisation du risque, ces constructions et améliorations seraient cédées au bailleur à un prix équivalent à la valeur d'augmentation du fonds ou aux coûts des matériaux et de la main d'oeuvre pondéré par l'état des constructions et améliorations.

L'ensemble de ces règles relatives au partage de propriété pourraient être modifiées par des stipulations contraires.

Votre commission a approuvé ces règles en proposant toutefois de supprimer, par l'adoption d'un amendement COM-19 de son rapporteur pour avis, les dispositions relatives aux modalités de fixation du prix d'achat des biens repris par le bailleur au terme du contrat. Elle a préféré s'en remettre à l'accord des parties.

À l'initiative de Mme Pascale Got, rapporteur de l'Assemblée nationale, les modalités d'application du nouveau chapitre VII du titre VI du livre V du code de l'environnement, introduit par les articles 2, 11 et 12 de la proposition de loi, seraient renvoyées à un décret en Conseil d'État (article L. 567-29).

Sous réserve de l'adoption de ses amendements, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption de l'article 12.

* *

*

Au bénéfice de ces observations et sous réserve de l'adoption de ses amendements, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption des articles de la proposition de loi dont elle s'est saisie.


* 128 Article L. 321-1 du code de l'urbanisme.

* 129 Cf. , pour plus de précisions, le rapport n° 82 (2016-2017) de M. Mathieu Darnaud, fait au nom de la commission des lois du Sénat sur le projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain, p. 102-104, consultable à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/rap/l16-082/l16-0821.pdf.

* 130 Cf. le commentaire de l'article 11 pour plus de précisions sur le droit de préemption urbain.

* 131 Les décisions de préemption correspondantes sont consultables au lien suivant : www.epfpaca.com.

* 132 Conseil d'État, 22 février 2002, Association de riverains pour la gestion et la sauvegarde du bassin hydrographique du Trieux, du Leff et de leur milieu vivant (Pontrieux) et M. et Mme X. c/ département des Côtes d'Armor , n° 208769.

* 133 Zones qui seraient créées par l'article 3 de la proposition de loi.

* 134 Article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 135 Et notamment les saisies immobilières.

* 136 Un déclassement préalable du bien est cependant nécessaire lorsqu'il est échangé avec une personne privée (article L. 3112-3 du code général de la propriété des personnes publiques).

* 137 Article L. 3112-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 138 Article L. 2211-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 139 Article L. 2221-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 140 Article L. 2311-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 141 Articles L. 2321-1 à L. 2323-14 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 142 Article L. 3211-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 143 Article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime.

* 144 À la différence des forêts des collectivités territoriales qui peuvent être cédées à partir des règles de droit commun.

* 145 Cf., par exemple, Conseil d'État, Commune Fougerolles , 3 novembre 1997, n° 169473.

* 146 À titre d'exemple, l'État peut vendre un terrain privé à un prix inférieur à la valeur vénale lorsque le terrain est destiné à la construction de logements sociaux (article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques).

* 147 La vente des biens publics nécessiterait leur déclassement et leur intégration dans le domaine privé, conformément au droit commun de la domanialité publique. Ces biens resteraient toutefois inaliénables même après déclassement, conformément au présent article.

* 148 Domaine régi par les articles L. 2111-4 et L. 2111-5 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 149 La liste des conseils de rivage est fixée par l'article R. 322-30 du code de l'environnement.

* 150 Source : conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres.

* 151 Cf., à titre d'exemple, le considérant n° 3 de la décision du Conseil constitutionnel « Région Centre et région Poitou-Charentes » du 17 décembre 2010, n° 2010-67/86 QPC.

* 152 Cf. le commentaire de l'article 5 bis pour plus de précisions sur ces obligations d'information.

* 153 L'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements y ayant vocation, les syndicats mixtes, les établissements publics fonciers de l'État et les établissements publics fonciers locaux.

* 154 La cession d'une réserve foncière n'est possible qu'entre personnes publiques ou pour réaliser les opérations pour lesquelles la réserve a été constituée.

* 155 Articles L. 143-1 à L. 143-16 du code rural et de la pêche maritime.

* 156 Articles L. 214-1 à L. 214-3 du code de l'urbanisme.

* 157 Articles L. 212-1 à L. 212-5 du code de l'urbanisme. Cf. , pour plus de précisions sur les ZAD, le rapport n° 82 (2016-2017) de M. Mathieu Darnaud, fait au nom de la commission des lois du Sénat sur le projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain, p. 96-103, consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l16-082/l16-0821.pdf).

* 158 Articles L. 215-1 à L. 215-24 du code de l'urbanisme. Cf. le commentaire de l'article 9 bis pour plus de précisions concernant la préemption dans les espaces naturels sensibles.

* 159 Articles L. 211-1 à L. 211-7 du code de l'urbanisme.

* 160 Formulaire disponible au lien suivant :

https://www.formulaires.modernisation.gouv.fr/gf/cerfa_10072.do.

* 161 Articles L. 211-5 et L. 213-4 du code de l'urbanisme.

* 162 Article L. 213-8 du code de l'urbanisme.

* 163 Le droit de préemption des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) ne serait donc pas concerné par le présent article.

* 164 Rapport n° 712 (2015-2016) fait au nom de la commission des lois, p. 119 à 123, consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l15-712-1/l15-712-11.pdf.

* 165 Adopté contre l'avis du Sénat, l'article 34 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 habilite d'ailleurs le Gouvernement a légiféré par ordonnance pour « prévoir des obligations de publicité et de mise en concurrence préalables » applicables aux contrats d'occupation domaniale.

* 166 Cf. l'exposé général pour plus de précisions.

* 167 Rapport n° 4241 du 23 novembre 2016, p. 62, consultable à l'adresse suivante :

http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rapports/r4241.pdf.

* 168 Cf. le commentaire de l'article 3 pour plus de précisions sur ces zones.

* 169 Article L. 2221-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

* 170 Absence de reconduction tacite, fixation dans le respect du délai maximal et cumulé de 99 ans, fixation au maximum du terme à la fin de la durée définie par le PPRNP.

* 171 Cf. l'exposé général pour un exemple concret.

* 172 Cf. le commentaire de l'article 5 bis de la proposition de loi pour plus de précisions.

* 173 Cette interdiction a été affirmée par la jurisprudence (Conseil d'État, 17 mars 1893, Chemins de fer de l'Est ).

* 174 Notamment en matière de délai de rétractation.

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