Avis n° 145 (2016-2017) de M. Jérôme BIGNON , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 24 novembre 2016
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AVANT-PROPOS
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EXPOSÉ GÉNÉRAL
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I. LE PROGRAMME 113 « PAYSAGES, EAU ET
BIODIVERSITÉ »
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A. DES CRÉDITS EN LÉGÈRE
AUGMENTATION
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1. Un programme qui évolue
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2. Des crédits en augmentation
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a) Une hausse des crédits consacrés
aux espaces et milieux marins
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b) La politique de l'eau obérée par
le maintien du prélèvement de 175 millions d'euros sur les
agences de l'eau, dont les missions ont été étendues
à la biodiversité terrestre
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c) La mise en oeuvre d'une gouvernance
rénovée de la biodiversité
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d) Parcs naturels régionaux, réserves
naturelles et Natura 2000 en légère hausse
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e) Connaissance et préservation de la
biodiversité : une enveloppe en baisse malgré les nouvelles
dispositions de la loi pour la reconquête de la
biodiversité
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f) Les dépenses fiscales associées au
programme 113
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a) Une hausse des crédits consacrés
aux espaces et milieux marins
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1. Un programme qui évolue
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B. LA BUDGÉTISATION DE L'AGENCE
FRANÇAISE POUR LA BIODIVERSITÉ
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C. LE RENFORCEMENT DES MOYENS POUR LES MILIEUX
MARINS
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A. DES CRÉDITS EN LÉGÈRE
AUGMENTATION
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II. LE PROGRAMME 159 « EXPERTISE,
INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET
MÉTÉOROLOGIE »
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A. UN PÉRIMÈTRE QUI ÉVOLUE,
DES CRÉDITS EN LÉGÈRE BAISSE
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B. LE CENTRE D'ÉTUDES ET D'EXPERTISE SUR LES
RISQUES, L'ENVIRONNEMENT, LA MOBILITÉ ET L'AMÉNAGEMENT
(CEREMA) : UNE TRIPLE AMBITION
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1. Un nouvel établissement public
chargé de l'expertise sur les risques, l'environnement, la
mobilité et l'aménagement
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2. Des missions nombreuses et vastes au service de
« transitions de grande ampleur »...
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3. ... qui aboutissent à des projets
concrets
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4. Des moyens en baisse qui mettent à mal
le projet stratégique de l'établissement
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1. Un nouvel établissement public
chargé de l'expertise sur les risques, l'environnement, la
mobilité et l'aménagement
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A. UN PÉRIMÈTRE QUI ÉVOLUE,
DES CRÉDITS EN LÉGÈRE BAISSE
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III. LE PROGRAMME 174 « ÉNERGIE,
CLIMAT ET APRÈS-MINES »
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I. LE PROGRAMME 113 « PAYSAGES, EAU ET
BIODIVERSITÉ »
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D. EXAMEN EN COMMISSION
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LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
N° 145
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017
Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2016 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi de finances pour 2017 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
TOME I
BIODIVERSITÉ - TRANSITION ÉNERGÉTIQUE
Par M. Jérôme BIGNON,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Hervé Maurey , président ; MM. Guillaume Arnell, Pierre Camani, Gérard Cornu, Ronan Dantec, Mme Évelyne Didier, M. Jean-Jacques Filleul, Mme Odette Herviaux, MM. Louis Nègre, Rémy Pointereau, Charles Revet , vice-présidents ; MM. Alain Fouché, Jean-François Longeot, Gérard Miquel , secrétaires ; MM. Claude Bérit-Débat, Jérôme Bignon, Mme Annick Billon, M. Jean Bizet, Mme Nicole Bonnefoy, MM. Patrick Chaize, Jacques Cornano, Michel Fontaine, Mme Gélita Hoarau, M. Benoît Huré, Mme Chantal Jouanno, MM. Jean-Claude Leroy, Philippe Madrelle, Didier Mandelli, Jean-François Mayet, Pierre Médevielle, Louis-Jean de Nicolaÿ, Cyril Pellevat, Hervé Poher, David Rachline, Michel Raison, Jean-François Rapin, Jean-Yves Roux, Mme Nelly Tocqueville, M. Michel Vaspart . |
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 4061, 4125 à 4132 et T.A. 833
Sénat : 139 et 140 à 146 (2016-2017)
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable s'est saisie pour avis des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2017. Comme l'année dernière, cet avis se concentre, à travers le suivi de trois programmes spécifiques, sur les politiques liées à la biodiversité (à travers le programme 113), à la transition énergétique (à travers le programme 174) et à l'expertise, l'information géographique et la météorologie (à travers le programme 159).
Ces trois programmes regroupent 1,24 milliard d'euros, soit 12,8 % des crédits de l'ensemble de la mission , proportion qui diminue légèrement par rapport à l'exercice précédent, alors que les crédits de l'ensemble de la mission augmentent.
L'année 2016 a été riche d'actualités et de temps forts pour la biodiversité et le climat.
Premier marqueur important : la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a été adoptée après une longue procédure parlementaire de vingt-neuf mois et surtout, près de quarante ans après la dernière loi sur la nature, la loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature. Cette loi, dont le fil conducteur a été de consacrer une vision dynamique et moderne de la biodiversité, fondée sur une approche des « interactions » et de la « valorisation économique » des écosystèmes, a posé les jalons d'une nouvelle gouvernance, partenariale et territoriale autour d'un nouvel opérateur d'État, l'Agence française pour la biodiversité , et a mis l'accent sur l'importance de la biodiversité ultramarine. Elle a en outre, à l'initiative du Sénat, introduit des dispositions sur la brevetabilité du vivant, autorisé le Gouvernement à ratifier le protocole de Nagoya sur l'accès aux ressources génétiques et le partage des avantages, ou encore inscrit dans le code civil la réparation du préjudice écologique.
De ce texte important, les dispositions relatives à la création de la nouvelle Agence française pour la biodiversité , par fusion de quatre établissements publics existants (l'Agence des aires marines protégées, l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques, l'Atelier technique des espaces naturels et la Fédération nationale des parcs nationaux) impacte directement le projet de budget pour 2017, au sein du programme 113. La phase opérationnelle d'installation du nouvel opérateur a été lancée le 29 février 2016 lors d'un conseil d'administration transitoire. L'objectif fixé est une création de l'agence en janvier 2017 . C'est pourquoi le programme 113 du projet de loi de finances pour 2017 comprend une ligne de budgétisation de l'AFB.
Sur le climat, l'année 2016 a été marquée par le processus de ratification de l'accord de Paris du 12 décembre 2015 , dont l'objectif principal est de contenir l'élévation de la température moyenne de la planète nettement en-dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et de s'efforcer de la limiter à 1,5°C. La France a ratifié l'accord le 15 juin 2016 et ce dernier est entré en vigueur le 4 novembre, dans la mesure où la double condition de 55% des pays et des émissions de gaz à effet de serre a été dépassée.
Au temps de l'unanimité sur des objectifs ambitieux succède le temps de la mise en oeuvre de l'accord et de son financement, ce qui constitue tout l'enjeu de la COP 22 à Marrakech qui se déroule actuellement et dont revient une délégation de votre commission.
Le programme 174 « énergie, climat et après-mines » , dont les crédits doivent servir de support à la mise en oeuvre la politique énergétique et à la lutte contre le changement climatique , se doit donc de refléter le niveau d'ambition attendu.
Enfin, le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » a cette année un périmètre élargi puisque les crédits de l'ancien programme 170 « Météorologie » y ont été transférés, ainsi que ceux du Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) . Pierre Médevielle, rapporteur de l'avis « Prévention des risques » ayant fait un état des lieux complet l'année dernière sur les moyens de Météo-France, votre rapporteur pour avis a choisi d'approfondir cette année les missions et moyens du CEREMA , qui bénéficie de 213 millions d'euros de subvention pour charges de service public mais dont les effectifs baissent de 4,2 % .
Votre rapporteur pour avis souligne que ces trois programmes sont liés les uns aux autres par des objectifs communs . Ils répondent à des facettes différentes d'une même « crise » commune - les menaces pesant sur la biodiversité et sur nos ressources naturelles, le réchauffement climatique, le spectre d'une « sixième extinction » - qui imposent une profonde mutation des politiques publiques, et donc des moyens ambitieux pour y parvenir.
Si, d'une manière générale, les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » augmentent, votre rapporteur pour avis souligne que la hausse stricte de ces moyens n'est que de 0,9 % si l'on raisonne à périmètre constant.
Il est en outre particulièrement préoccupé, au regard des enjeux actuels sur la biodiversité, le changement climatique et la transition écologique, par les coupes effectuées dans les moyens des différents opérateurs du programme. En outre, les crédits relatifs à la transition énergétique, éparpillés au sein de différents programmes , ne semblent pas refléter une véritable priorité cohérente et construite.
Réunie le 16 novembre 2016, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, suivant son rapporteur, a émis un avis défavorable à l'adoption de ces crédits.
EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. LE PROGRAMME 113 « PAYSAGES, EAU ET BIODIVERSITÉ »
A. DES CRÉDITS EN LÉGÈRE AUGMENTATION
1. Un programme qui évolue
Le programme 113 connaît une évolution majeure dans le PLF 2017 : la création de l'Agence française pour la biodiversité (AFB) , créée par la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages. Ce nouvel établissement public administratif sera sous la tutelle de la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN) et fusionnera les 4 établissements publics existants suivants :
- l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (Onema) ;
- l'Atelier technique des espaces naturels (Gip ATEN) ;
- l'Agence des aires marines protégées ;
- Parcs nationaux de France.
Comme en 2016, le programme 113 se décline en 3 actions principales :
- l'action n° 1 « Sites, paysages, publicité » , qui concentre 2,4 % des crédits du programme, soit 6,77 millions d'euros (AE=CP) , c'est-à-dire une enveloppe stable par rapport à l'année précédente, et dont les crédits visent à financer la politique des paysages, la politique des sites et le classement au Patrimoine mondial ;
- l'action n° 2 « Logistique, formation et contentieux » , qui concentre 2 % des crédits du programme (dépenses de fonctionnement courant et dépenses de contentieux), soit 5,63 millions d'euros en 2017 (comme en 2016) ;
- et surtout l'action n° 7 « Gestion des milieux et biodiversité », la plus importante, qui concentre l'essentiel des crédits (95,6 %) , avec 267,38 millions d'euros (AE=CP), en augmentation par rapport à 2016.
L'essentiel des crédits est donc réservé au financement des actions de gestion et de préservation de la biodiversité, aquatique, marine et terrestre, permettant l'application des directives communautaires sur l'eau et la nature, la mise en oeuvre de la Stratégie nationale pour la biodiversité (SNB 2011-2020) et des feuilles de route issues des conférences environnementales.
Le pilotage du programme est assuré par le directeur général de l'aménagement, du logement et de la nature du ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer.
Ce programme a un double objectif .
Le premier est d'assurer la gestion intégrée de la ressource en eau . De ce point de vue, il convient de souligner que fin 2015, les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) ont été adoptés par chacun des six grands bassins hydrographiques en métropole et des cinq bassins outre-mer pour la période 2016-2021 .
Ces schémas déterminent la mise en oeuvre de la directive cadre européenne sur l'eau (DCE), qui fixe un objectif de recouvrement du bon état des eaux au plus tard en 2015.
Le deuxième objectif est de préserver et restaurer la biodiversité .
Votre rapporteur pour avis souligne sur ce point que l'indicateur de l'évolution de l'abondance des oiseaux communs tracé par le projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances diminue , ce qui montre une réduction des ressources et une dégradation qualitative et quantitative des milieux disponibles pour les oiseaux (l'impact du changement climatique est un autre facteur).
Le ministère indique attendre sur ce sujet des retombées importantes dans les prochaines années des mesures adoptées dans le cadre de la loi biodiversité.
Concernant l'indicateur des sites Natura 2000 en phase d'animation, leur nombre continue d'augmenter avec quasiment 90 % de sites Natura 2000 dotés d'un DOCOB en 2016.
Concernant l'effort de protection des espaces naturels terrestres et maritimes, les projets d'extension des réserves des Landes de Versigny et du banc d'Arguin doivent aboutir à la fin de l'année et la création d'un 11 ème parc national dans un écosystème forestier en plaine est prévue pour 2017.
Enfin, le pourcentage des eaux françaises sous protection quant à lui ne varie pas par rapport à 2014.
2. Des crédits en augmentation
Dans le projet de loi de finances initiale pour 2017, les crédits du programme 113 continuent à progresser. Alors qu'ils étaient déjà en légère augmentation dans le PLF 2016 (+1,46% en crédits de paiement par rapport au PLF 2015), ils augmentent à nouveau cette année de 1,4 %, soit 4 millions d'euros supplémentaires par rapport à l'année dernière . Cette augmentation vise notamment à financer diverses mesures sociales au sein des opérateurs du programme et concerne aussi un renforcement des moyens dédiés à la mise en oeuvre de la directive cadre stratégie pour le milieu marin .
Dans le détail, les crédits des actions 2 et 7 augmentent d'environ 1,5 % tandis que les crédits de l'action 1 diminuent de 3 %.
a) Une hausse des crédits consacrés aux espaces et milieux marins
L'action 7 est comme l'année précédente décomposée en six sous-actions - espaces et milieux marins, politique de l'eau, espaces naturels protégés, Natura 2000, connaissance et préservation de la biodiversité, ressources minérales non énergétiques - et est largement portée par des opérateurs. Les subventions pour charges de service public et les dotations en fonds propres de ces opérateurs s'élèvent à 138,67 millions d'euros pour 2017 et constituent ainsi plus de la moitié des crédits de l'action.
Les crédits consacrés aux espaces et milieux marins sont en hausse de 12 % par rapport à 2016 , avec près de 16 millions d'euros pour financer la mise en oeuvre de la directive cadre stratégie pour le milieu marin, les actions d'aménagement du domaine public maritime naturel et de gestion du trait de côte, des études de connaissance du milieu marin, la lutte contre la pollution marine 1 ( * ) et la gestion des ressources minérales naturelles (via notamment une subvention au BRGM ou encore l'élaboration des schémas régionaux de carrières).
b) La politique de l'eau obérée par le maintien du prélèvement de 175 millions d'euros sur les agences de l'eau, dont les missions ont été étendues à la biodiversité terrestre
13,5 millions d'euros sont consacrés à la politique de l'eau, décomposés de la manière suivante :
- 4,5 millions pour la police de l'eau (contrôles administratifs et judiciaires effectués par les services de l'État, analyse des rejets, suivi des pollutions, fourniture en matériels d'analyse et de contrôles), en très légère baisse par rapport à 2016 ;
- 1,08 million d'euros consacrés au bon état des eaux souterraines et superficielles ;
- 805 000 euros pour les plans d'action dans le domaine de l'eau ;
- 1,5 million d'euros de soutien à la politique de l'eau (application des directives européennes et appui à la publication des SAGE, animation et fonctionnement du Comité national de l'eau, aides à des associations nationales, financement d'actions internationales) ;
- 5,4 millions d'euros pour le domaine public fluvial non navigable (entretien et mise en sécurité des berges naturelles, plan national d'action pour la restauration de la continuité écologique de cours d'eau).
Pour 2017, la participation financière des agences de l'eau aux mesures de restauration de la continuité écologique des cours d'eau est programmée à hauteur de 5,58 millions d'euros, pour amorcer ou continuer les travaux sur un certain nombre de chantiers.
Participation financière des agences de l'eau aux mesures de restauration de la continuité écologique des cours d'eau
Source : PAP - PLF 2017
Votre rapporteur pour avis regrette que les agences de l'eau soient à nouveau prélevées cette année de 175 millions d'euros , comme prévu par l'article 32 de la loi de finances pour 2015 (prélèvement de 175 millions d'euros sur le fonds de roulement des agences en 2015, 2016 et 2017).
Il souligne que cette ponction intervient cette année dans un contexte particulier puisque les missions des agences de l'eau ont été étendues à la biodiversité terrestre par la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.
Les présidents des comités de bassin se sont d'ailleurs opposés au maintien de ce prélèvement lors de la réunion du comité national de l'eau du 4 octobre 2016.
Votre rapporteur pour avis estime que ce prélèvement devrait être supprimé dès cette année, en raison d'une situation qui diffère de celle de 2015 au moment où cette ponction exceptionnelle a été prévue.
c) La mise en oeuvre d'une gouvernance rénovée de la biodiversité
Les actions relatives à la trame verte et bleue et aux autres espaces protégés concentrent environ 40 millions d'euros de crédits , ce qui est à peu près stable par rapport à l'exercice budgétaire précédent. Les conditions de mise en oeuvre de cette politique ont évolué en 2016. Sur le plan de la déclinaison régionale, les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), issus de la loi NOTRe et encadrés par l'ordonnance du 27 juillet 2016 , ont vocation à absorber les schémas régionaux de cohérence écologique (SRCE). La gouvernance a également été rénovée puisque le suivi de cette politique sera assurée par le Comité national de la biodiversité , instauré par la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016, qui remplace une commission spécialisée et, au plan régional, par des comités régionaux de la biodiversité.
Environ 2 millions d'euros ont été mobilisés en 2016 par le ministère pour la Trame Verte et Bleue , dont 1 million d'euros pour la fin de l'élaboration des schémas régionaux de cohérence écologique. En 2017, les moyens financiers programmés pour la Trame Verte et Bleue sont d'environ 1,5 million d'euros et doivent permettre en priorité de financer des démonstrateurs de la mise en oeuvre concrète d'opérations de préservation et de restauration.
d) Parcs naturels régionaux, réserves naturelles et Natura 2000 en légère hausse
En 2017, le programme 113 consacrera aux parcs naturels régionaux une enveloppe de 8,46 millions d'euros en AE et 7,77 millions d'euros en CP , y compris les subventions destinées à leur instance fédératrice, la Fédération des parcs naturels régionaux de France (FPNRF). Aux réserves naturelles, une enveloppe de 21,4 millions d'euros est allouée. 3,86 millions d'euros sont attribués au soutien à la politique forestière et 430 000 euros à la politique de protection des zones humides et aquatiques, ainsi qu'une dotation d'un million d'euros en fonds propres pour les parcs nationaux.
Les crédits consacrés à Natura 2000 sont en légère hausse en crédits de paiement en 2017 avec 31,92 millions d'euros .
e) Connaissance et préservation de la biodiversité : une enveloppe en baisse malgré les nouvelles dispositions de la loi pour la reconquête de la biodiversité
Enfin, 29 millions d'euros sont alloués au financement d'actions de connaissance et de préservation de la biodiversité (réalisation d'inventaires et d'expertises pour plus de 16 millions d'euros, et préservation des espèces via les plans nationaux d'action, la préservation des récifs coralliens, la lutte contre les espèces exotiques envahissantes et la politique des grands prédateurs).
La loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages prévoit que l'État établisse, d'ici le 1 er janvier 2020, des plans nationaux d'actions en faveur des espèces endémiques de faune ou de flore sauvage particulièrement menacées (132 espèces dont 80 % sont présentes en outre-mer). Ce programme d'actions ciblé sur de telles espèces débutera dès 2017, renforçant les PNA déjà mis en oeuvre. Les actions spécifiques des conservatoires botaniques nationaux (CBN) pour la protection de la flore seront renforcées dans ce sens.
Cette enveloppe est en légère baisse par rapport à l'année dernière.
f) Les dépenses fiscales associées au programme 113
Concernant les dépenses fiscales associées au programme , il convient de noter que la loi n°2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a :
- recréé l'exonération de taxe foncière en faveur des zones humides, afin de créer une incitation à la gestion adaptée des zones humides ;
- modifié le dispositif de compensation par l'État des pertes subies par les collectivités territoriales du fait de l'exonération de taxe foncière en faveur des parcelles Natura 2000 : l'exonération est désormais totale ; les bénéficiaires s'engagent pour 5 ans dans une charte signée et adossée au document de gestion de l'espace naturel concerné ;
- créé une nouvelle exonération de taxe sur les propriétés foncières non bâties au profit des propriétaires qui ont choisi de conclure une obligation réelle environnementale.
CRÉDITS DU PROGRAMME 113
Autorisations d'engagement (AE) |
Crédits de paiement (CP) |
|||||
LFI 2016 (crédits votés) |
PLF 2017 (crédits demandés) |
Variation (%) |
LFI 2016 (crédits votés) |
PLF 2017 (crédits demandés) |
Variation (%) |
|
Action 1 Sites, paysages, publicité |
6,98 |
6,77 |
-3 % |
6,98 |
6,77 |
-3 % |
Action 2 Logistique, formation et contentieux |
5,55 |
5,63 |
+1,44 % |
5,55 |
5,63 |
+1,44 % |
Action 7 Gestion des milieux et biodiversité |
263,36 |
267,38 |
+1,5 % |
263,36 |
267,38 |
+1,5 % |
Total |
275,89 |
279,78 |
+1,4 % |
275,89 |
279,78 |
+1,4 % |
(en millions d'euros) - Source : PAP - PLF 2017
Alors que le programme 113 était marqué par une sous-consommation de ses crédits d'intervention par rapport aux ressources disponibles, la note d'analyse de la Cour des comptes sur l'exécution budgétaire de 2015 note une progression de ce taux de consommation. La Cour constate donc une amélioration de la gestion de ces crédits.
En 2017, le programme sera principalement axé sur la budgétisation de l'Agence française pour la biodiversité ainsi que sur le renforcement des moyens destinés à la mise en oeuvre de la directive-cadre « stratégie pour le milieu marin ».
B. LA BUDGÉTISATION DE L'AGENCE FRANÇAISE POUR LA BIODIVERSITÉ
1. Un programme fortement marqué par des subventions aux opérateurs rattachés
Le programme 113 est un programme porté par de nombreux opérateurs. C'est pourquoi 137,67 millions d'euros leurs sont dédiés, sous la forme de subvention pour charges de service public, auxquelles il faut ajouter un million d'euros de subvention d'investissement alloués aux parcs nationaux.
CRÉDITS ALLOUÉS AUX OPÉRATEURS DU PROGRAMME 113
Source : PAP - PLF 2017
Le montant de ces subventions aux opérateurs augmente de 2,88 millions d'euros par rapport à l'exercice précédent, augmentation principalement destinée à compenser le surcoût de la mise en oeuvre de mesures sociales dans ces établissements.
Mais cette année, le budget 2017 fait apparaître une subvention pour charges de service public spécifiquement allouée à la future Agence française pour la biodiversité d'un montant de 34,5 millions d'euros (AE=CP), en lieu et place des subventions des quatre établissements publics qu'elle fusionne.
2. Un nouvel opérateur, l'Agence française pour la biodiversité
Selon les informations transmises à votre rapporteur pour avis, l'Agence française pour la biodiversité (AFB), créée par la loi de reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, doit bénéficier d'un budget global de 225,5 millions d'euros .
Elle devra assurer la continuité des missions des quatre opérateurs fusionnés en son sein et se verra attribuer de nouvelles missions (notamment la gestion des trois parcs naturels marins créés en 2015 et 2016 ou la fourniture d'expertise en son sein et au bénéfice de tous les acteurs en situation d'agir pour la reconquête de la biodiversité). En outre, les parcs nationaux seront rattachés à l'agence.
Géographiquement, elle s'organisera autour de trois pôles à Brest, Montpellier et Vincennes pour les services centraux et sera présente sur les territoires via des directions régionales, les parcs naturels marins et les antennes de façade maritime.
Pour assurer ses missions, l'AFB bénéficiera de deux types de ressources :
- une subvention pour charges de service public versée par l'État à hauteur de 34,5 millions d'euros qui sera inscrite au programme 113 : ce montant résulte, pour 2017, du transfert des subventions pour charges de service public des quatre opérateurs fusionnés ;
- une contribution des agences de l'eau qui comprend, d'une part, une contribution plafonnée à 150 millions d'euros par an (l'ancienne contribution à l'Onema), d'autre part, un prélèvement annuel sur le produit de la redevance pollutions diffuses perçu par les agences de l'eau , plafonné à 41 millions d'euros et destiné au plan Ecophyto 2018.
Enfin, selon les informations transmises à votre rapporteur par les services du ministère, le plafond d'emplois de l'agence sera de 1 227 ETPT en 2017, dont 45 créations de postes . Votre rapporteur pour avis se réjouit de ces créations de postes, qui permettront d'assurer les nouvelles missions de l'agence par rapport aux opérateurs existants, et notamment la gestion des parcs naturels marins.
EMPLOIS DE L'AGENCE FRANÇAISE POUR LA BIODIVERSITÉ EN 2017 - 45 créations de postes ; - 75 ETP du Muséum national d'histoire naturelle intégrés sous plafond de l'AFB ; - 10 ETP intégrés sous plafond qui concernent 8 ETPT de la Fédération des conservatoires botaniques nationaux et 2 de Réserves naturelles de France ; - 163 ETPT ex-Agence des aires marines protégées ; - 870 ETPT ex-Office national de l'eau et des milieux aquatiques ; - 45 ETPT ex-Parcs nationaux de France ; -19 ETPT ex-GIP ATEN Source : Réponses au questionnaire budgétaire - PLF 2017 |
C. LE RENFORCEMENT DES MOYENS POUR LES MILIEUX MARINS
1. Des crédits supplémentaires pour la mise en oeuvre de la directive-cadre « stratégie pour le milieu marin »
La mise en oeuvre de la directive cadre « stratégie pour le milieu marin » 2 ( * ) - qui vise à l'atteinte, en 2020, du bon état écologique des milieux marins - obtient dans le PLF 2017 des crédits supplémentaires à hauteur de 1,6 million d'euros en plus par rapport à 2016 , sur une dépense totale de 7,65 millions d'euros .
Source : PAP - PLF 2017
Les obligations de résultats de cette directive imposent aux États membres de prendre des mesures réduisant les impacts des activités sur les milieux marins.
Ainsi, pour chaque sous-région marine 3 ( * ) , un plan d'action pour le milieu marin (PAMM) doit être élaboré et mis en oeuvre. Ce plan d'action comporte 5 éléments :
- une évaluation initiale de l'état écologique des eaux marines et de l'impact environnemental des activités humaines sur ces eaux ;
- la définition du bon état écologique pour ces mêmes eaux reposant sur des descripteurs qualitatifs ;
- la définition d'objectifs environnementaux et d'indicateurs associés en vue de parvenir à un bon état écologique du milieu marin ;
- un programme de surveillance en vue de l'évaluation permanente de l'état des eaux marines et de la mise à jour périodique des objectifs ;
- un programme de mesures (PDM) qui doit permettre de parvenir à un bon état écologique des eaux marines ou à conserver celui-ci.
Les PDM ont été adoptés le 8 avril 2016 lors de la 2 ème conférence nationale de l'océan, après avoir fait l'objet d'une consultation du public.
L'objectif en 2017 est de faire monter en puissance les programmes de surveillance et de mesures afin de pouvoir notifier à la Commission européenne la nouvelle évaluation de l'état du milieu marin en 2018.
Le ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer a noué, pour la mise en oeuvre de cette politique, des partenariats avec l'Institut français de la recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER), le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM) ou encore le Service hydrographique et océanographique de la Marine (SHOM), pour un montant total de 6,96 millions d'euros .
2. Des moyens à préserver pour la mise en oeuvre du plan national d'action pour la mer et le littoral et pour le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages
Le plan national d'action pour la mer et le littoral , finalisé en 2016, comporte 50% d'actions à portée environnementale.
Votre rapporteur pour avis approuve la suppression de la baisse de un million d'euros des ressources affectées au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages (CELRL) qui était initialement prévue dans la première partie du projet de loi, adoptée à l'Assemblée nationale à l'initiative de la rapporteure générale.
En effet, une préservation des moyens de cet établissement est souhaitable afin qu'il puisse être en mesure de maintenir le rythme d'acquisition de 2 500 à 3 000 ha/an, conformément au contrat d'objectifs signé avec l'État, ou encore de mettre l'accent sur les zones tampons permettant de prévenir les risques (submersion , érosion).
II. LE PROGRAMME 159 « EXPERTISE, INFORMATION GÉOGRAPHIQUE ET MÉTÉOROLOGIE »
A. UN PÉRIMÈTRE QUI ÉVOLUE, DES CRÉDITS EN LÉGÈRE BAISSE
1. La structuration d'un programme au périmètre centré sur l'expertise scientifique et technique des politiques menées par le ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer
Le périmètre du programme 159 évolue et s'étend à deux nouveaux opérateurs dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017.
Il regroupe désormais les subventions pour charges de service public de trois opérateurs :
- le Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) - nouveau ;
- l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) ;
- Météo-France - nouveau.
Dans la loi de finances pour 2016, le programme ne comportait que la subvention pour charges de service public versée à l'IGN.
En conséquence, le programme 170 « Météorologie » est supprimé et les crédits du CEREMA sont basculés du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durable» vers le programme 159.
Ces trois opérateurs, désormais rattachés au programme 159 et placés sous la tutelle de la Direction de la recherche et de l'innovation , ont en commun qu'ils interviennent sur des politiques transversales au service de la transition écologique, en s'appuyant fortement sur l'expertise scientifique et technique et avec une forte dimension territoriale.
Les trois nouvelles actions du programme 159 sont donc :
- l'action n°11 « Études et expertise en matière de développement durable » , concentrant 42,4% des crédits : cette action est intégralement constituée de la subvention pour charges de service public du CEREMA (213,19 millions d'euros) ;
- l'action n°12 « Information géographique et cartographique » , qui concentre 18,7% des crédits du programme (94,23 millions d'euros en AE et 94,3 en CP) et qui est constituée à 85% de la subvention pour charges de service public de l'IGN et des crédits dévolus au pilotage de la politique d'information géographique ; cette action reprend les anciennes actions 1, 2 et 3 qui constituaient le programme 159 dans le périmètre du PLF 2016 ;
- l'action n°13 « Météorologie » , qui concentre 38,8% des crédits (195,24 millions d'euros) du programme et représente le financement des compétences de l'État en matière de prévision et de recherche météorologiques et climatiques, confiées à l'établissement public administratif Météo-France.
L'État verse une subvention pour charges de service public à Météo-France pour que celui-ci exécute les prestations opérationnelles de prévisions météorologiques permettant l'anticipation, la prévention et la gestion des risques météorologiques et climatiques.
L'année 2017 correspondra, normalement, à la première année du nouveau contrat d'objectifs et de performance (COP) conclu par Météo-France avec l'État. Les actions de l'établissement vont s'articuler autour des grandes orientations suivantes :
• Mettre la logique de service au coeur des
priorités de Météo-France, en adaptant en permanence ses
actions aux besoins des interlocuteurs, en tournant l'expertise humaine vers
l'aide à la décision, et en tirant pleinement parti des
opportunités offertes par le numérique ;
• Faire progresser la connaissance, l'anticipation et
la gestion des risques météorologiques et climatiques, et
élargir les domaines thématiques accompagnés par l'action
de l'établissement, en s'appuyant sur les activités scientifiques
et techniques comme sur les dispositifs de vigilance et de gestion de crise
;
• Maintenir au meilleur niveau international la
recherche et les infrastructures essentielles de Météo-France
;
• Mobiliser les leviers d'efficience permis par les
évolutions scientifiques et techniques, pour satisfaire des ambitions
nouvelles au service de la société, tout en poursuivant une
gestion rigoureuse des ressources.
2. Des crédits légèrement en baisse
Alors que pour l'exercice précédent, le programme ne comprenait que la politique d'information géographique et cartographique, il se retrouve fortement abondé pour 2017 avec les deux nouvelles missions qui lui sont transférées, et notamment avec le transfert de la subvention pour charges de service public du CEREMA, qui représente cette année l'essentiel des crédits du programme.
RÉPARTITION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 159 PAR ACTION
Si l'on compare les crédits alloués à ces trois actions aux crédits alloués aux mêmes postes dans la loi de finances pour 2016, on constate que les crédits du programme baissent légèrement par rapport à l'année dernière .
Pour Météo-France , la subvention pour charges de service public s'élève à 195,24 millions d'euros pour 2017, en baisse de 3 millions d'euros par rapport à la LFI 2016 (soit -1,51% à périmètre constant avec 198,24 millions d'euros dans la LFI 2016). Cette évolution s'explique principalement par une maîtrise de la masse salariale de Météo-France (diminution du plafond d'emplois de 60 ETPT) et de ses dépenses de fonctionnement.
Quant aux crédits alloués à l'information géographique et cartographique , le projet de loi de finances 2017 les fixe à 94,24 millions d'euros , en diminution de 0,91 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2016. Cette baisse s'inscrit dans l'effort global de réduction des dépenses publiques. Dans le cadre du PLF 2017, la subvention pour charges de service public de l'IGN (99 % des crédits de l'action 12) se monte à 93,71 millions d'euros (94, 60 millions d'euros en LFI 2016), dont 0,5 million d'euros au titre des transferts de crédits résultant de l'ouverture des données publiques.
Enfin, pour le CEREMA, qui devient le poste le plus important du programme, le montant de la subvention pour charges de service public inscrit au PLF 2017 s'élève à 213,19 millions d'euros , en baisse par rapport au montant inscrit en LFI 2016 (217,6 millions d'euros) , traduisant la poursuite des efforts de l'établissement dans la maîtrise de ses dépenses.
CRÉDITS DU PROGRAMME 159
Autorisations d'engagement (AE) |
Crédits de paiement (CP) |
|||||
LFI 2016 (crédits votés à périmètre constant) |
PLF 2017 (crédits demandés) |
Variation (%) |
LFI 2016 (crédits votés à périmètre constant) |
PLF 2017 (crédits demandés) |
Variation (%) |
|
Action 11 Études et expertise en matière de développement durable 4 ( * ) |
217,58 |
213,19 |
-2 % |
217,58 |
213,19 |
-2 % |
Action 12 Information géographique et cartographique |
95,11 |
94,24 |
-0,9 % |
95,11 |
94,31 |
-0,84 % |
Action 13 Météorologie 5 ( * ) |
198,24 |
195,24 |
-1,52 % |
198,24 |
195,24 |
-5,66 % |
Total |
510,93 |
502,67 |
-1,62 % |
510,93 |
502,74 |
-1,6 % |
(en millions d'euros) - Source : PAP - PLF 2017
B. LE CENTRE D'ÉTUDES ET D'EXPERTISE SUR LES RISQUES, L'ENVIRONNEMENT, LA MOBILITÉ ET L'AMÉNAGEMENT (CEREMA) : UNE TRIPLE AMBITION
La subvention pour charges de service public allouée au CEREMA s'élevant à 213,19 millions d'euros , c'est-à-dire à près de 40% d'un programme qui dans la précédente maquette budgétaire n'était constitué que de la subvention à l'IGN, votre rapporteur pour avis a souhaité se pencher plus en détails sur les missions, le fonctionnement et l'organisation d'un établissement public , dont les crédits n'étaient pas imputés au programme 174 jusque-là et dont les trois orientations majeures sont de devenir un expert identifié par les collectivités territoriales comme un partenaire de proximité, de se positionner comme un centre de ressources et d'être porteur d'innovation.
1. Un nouvel établissement public chargé de l'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement
a) Un établissement public jeune né de la fusion de onze services de l'État
Le CEREMA est un établissement public administratif jeune d'à peine trois années puisqu'il est né le 1 er janvier 2014 . C'est la loi n°2013-431 du 28 mai 2013 portant diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transports qui l'a créé en tant que centre de ressources et d'expertises scientifiques et techniques interdisciplinaires apportant son concours à l'élaboration, la mise en oeuvre et l'évaluation des politiques publiques en matière d'aménagement, d'égalité des territoires et de développement durable.
Le CEREMA est né de la fusion de onze services de l'État :
- les huit centres d'études techniques de l'équipement (CETE) ;
- le Centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques (Certu) ;
- le Centre d'études techniques maritimes et fluviales (Cetmef) ;
- le Service d'études sur les transports, les routes et leurs aménagements (Sétra).
Il est placé sous la tutelle du ministère en charge du développement durable et des transports et du ministère en charge de l'urbanisme. Son siège administratif est situé à Bron.
b) Une gouvernance partagée
Sa gouvernance est partagée entre l'État et les collectivités territoriales, dont les représentants siègent conjointement au conseil d'administration et au conseil stratégique.
Le conseil d'administration comprend en outre des représentants du personnel et des personnalités qualifiées et est présidé par Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne.
Le conseil stratégique , chargé de préparer les travaux du conseil d'administration en matière de stratégie, s'est réuni pour la première fois le 22 avril 2015. Il est présidé par Yves Krattinger, président du conseil départemental de Haute-Saône.
L'établissement compte trois directions techniques et huit directions territoriales.
L'établissement public comprend 3 092 agents en son sein, dont 304 experts et chercheurs, 1 950 équipements scientifiques et techniques, 21 laboratoires et centres d'essais.
Son budget en 2015 était de 253 millions d'euros dont 28 millions d'euros de ressources propres , provenant à 37% des collectivités territoriales (majoritairement des départements).
2. Des missions nombreuses et vastes au service de « transitions de grande ampleur »...
a) Des missions nombreuses
Les articles 44 et 45 de la loi du 28 mai 2013 ont fixé au CEREMA six missions, huit activités et des concours .
ARTICLE 44 Il est créé un établissement public de l'État à caractère administratif dénommé « Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement » (CEREMA) . Il comprend un siège, des directions techniques et des implantations territoriales ayant une vocation nationale. L'établissement constitue un centre de ressources et d'expertises scientifiques et techniques interdisciplinaires apportant son concours à l'élaboration, la mise en oeuvre et l'évaluation des politiques publiques en matière d'aménagement, d'égalité des territoires et de développement durable , notamment dans les domaines de l'environnement, des transports et de leurs infrastructures, de la prévention des risques, de la sécurité routière et maritime, de la mer, de l'urbanisme, de la construction, de l'habitat et du logement, de l'énergie et du climat. L'établissement a pour missions : 1° De promouvoir et de faciliter des modes de gestion des territoires qui intègrent l'ensemble des facteurs environnementaux, économiques et sociaux ; 2° D'accompagner les acteurs publics et privés dans la transition vers une économie sobre en ressources et décarbonée, respectueuse de l'environnement et équitable ; 3° D'apporter à l'État et aux acteurs territoriaux un appui, en termes d'ingénierie et d'expertise technique sur les projets d'aménagement nécessitant notamment une approche pluridisciplinaire ou impliquant un effort de solidarité ; 4° D'assister les acteurs publics dans la gestion de leur patrimoine d'infrastructures de transport et de leur patrimoine immobilier ; 5° De renforcer la capacité des acteurs territoriaux à faire face aux risques auxquels sont soumis leurs territoires et leurs populations ; 6° De promouvoir aux échelons territorial, national, européen et international les règles de l'art et le savoir-faire développés dans le cadre de ses missions et en assurer la capitalisation. |
Article 45 Pour l'accomplissement de ses missions, l'établissement assure, essentiellement à la demande de l'État, des activités de conseil, d'assistance, d'études, de contrôle, d'innovation, d'expertise, d'essais et de recherche . Il peut prêter concours, dans ses domaines de compétences, aux services déconcentrés de l'État dans leurs missions d'assistance aux collectivités territoriales, notamment pour des raisons de solidarité nationale ou pour la mise en oeuvre des politiques publiques. À ces fins, l'État peut faire appel au Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement dans le cadre du 1° de l'article 3 du code des marchés publics. À titre accessoire, l'établissement peut réaliser les prestations définies au premier alinéa du présent article directement pour le compte de tiers autres que l'État. |
Votre rapporteur pour avis a constaté que le risque d'un « éparpillement » de ces vastes missions avait été transformé en une stratégie fondée sur des choix et la fixation de priorités.
Le projet stratégique de l'établissement pour 2015-2020 , que votre rapporteur pour avis a pu consulter, ajoute : « Sans cacher que chacune de ces spécificités contient potentiellement un risque de dispersion, il était affirmé, dès la naissance du CEREMA que ces spécificités contiennent quatre atouts essentiels que la stratégie du nouvel établissement doit renforcer et mettre à profit :
- son ancrage territorial, qui doit lui conférer une bonne connaissance des territoires, de leurs situations variées et de leurs acteurs, et lui donner la capacité, d'une part d'enrichir les politiques publiques et d'autre part d'accompagner leur déploiement sur le terrain ;
- sa capacité à tirer parti d'un large continuum des modes d'intervention (...) ;
- sa capacité à intégrer des apports pluridisciplinaires et des approches transversales pour élaborer une vision et des éclairages scientifiques et techniques sur des sujets complexes au carrefour de plusieurs domaines-métiers (...) ;
- ses nombreux échanges et partenariats. »
Mettre à profit sa proximité des territoires, exploiter les avantages que lui apporte l'étendue de ses missions transversales, intégrer les apports de toutes ses compétences et ses métiers et échanger avec différents acteurs, a donc constitué le fil rouge de la feuille de route du CEREMA, et en tout cas, du projet stratégique, approuvé lors du conseil d'administration du 29 avril 2015 .
Le CEREMA entend donc accompagner les territoires pour la réalisation de leurs projets dans neuf champs d'action complémentaires : l'aménagement et le développement des territoires, ville et stratégies urbaines, transition énergétique et climat, environnement et ressources naturelles, prévention des risques, bien-être et réduction des nuisances, mobilité et transport, infrastructures de transport, habitat et bâtiment. Les prestations qu'il propose peuvent être de l'expertise et de l'ingénierie, de l'évaluation, de la méthodologie, de la recherche ou encore de la certification.
b) Des priorités pour un établissement qui se veut de plus en plus tourné vers les collectivités territoriales
Malgré l'étendue du champ d'intervention du CEREMA, son conseil d'administration du 29 avril 2015 a permis de définir deux priorités , comme l'a rappelé le directeur général de l'établissement à votre rapporteur pour avis : l'égalité des territoires et la transition énergétique .
Parallèlement, les projets de gestion des infrastructures de transport, qui étaient historiquement les plus importants pour les services fusionnés et qui représentent encore 40 à 45% de l'activité de l'établissement, devront progressivement diminuer.
Votre rapporteur pour avis a pu interroger le directeur général sur la question des solutions que pouvaient apporter le CEREMA à des territoires ruraux le plus souvent démunis et en manque de moyens d'ingénierie et d'expertise. Il semble que le CEREMA soit clairement concerné par ce sujet, notamment dans la mesure où la loi de mai 2013 qui l'a créé mentionne explicitement la « solidarité nationale », mais les actions en ce sens sont pour l'instant trop ponctuelles, ou prennent la forme d'expérimentations. Le CEREMA, qui est encore en phase de construction, tente de trouver comment fonctionner avec les directions départementales des territoires (DDT) et essaye de tisser des façons de travailler qui pourraient être pérennes, avec un schéma positionnant les DDT en « front office » et le CEREMA en soutien.
Une des difficultés demeure néanmoins la tension qui existe entre la volonté de se tourner de plus en plus vers les collectivités territoriales et le lien avec l'État, qui reste le principal donneur d'ordre du CEREMA.
L'État conserve en effet des besoins importants d'expertise et les principaux bénéficiaires sont à ce niveau les directions d'administration centrale et les services déconcentrés des ministères de tutelle mais aussi les autres ministères et leurs services déconcentrés.
En ce qui concerne les collectivités territoriales, les départements sont les principaux bénéficiaires de l'activité du CEREMA, sur l'entretien et la modernisation des patrimoines dont ils sont gestionnaires, le réseau routier mais aussi le patrimoine bâti ainsi que sur les transports. Le CEREMA travaille avec les collectivités territoriales dans le cadre d'appels d'offre, mais également via des outils juridiques nouveaux, comme les partenariats public-public.
La priorité du CEREMA est clairement affirmée dans son projet stratégique : faire du lien avec les collectivités territoriales un des principaux marqueurs de son identité .
Votre rapporteur pour avis souscrit pleinement à cet objectif mais souligne que la baisse constante des moyens de cet établissement et surtout de ses effectifs ne permet pas de réussir à augmenter les ressources propres de manière significative ou, au mieux, oriente nécessairement les actions du CEREMA vers les collectivités territoriales les plus solvables. Même dans ce cas, la subvention pour charges de service public de l'établissement devrait permettre, pour une part, de financer ces projets avec les collectivités, ce qui ne peut être le cas aujourd'hui.
Votre rapporteur pour avis regrette d'ailleurs que dans son département, le volume des prestations commandées au CETE dans un premier temps puis au CEREMA par le conseil départemental de la Somme a tendance à diminuer. Aujourd'hui, pour la période 2016-2020, le CEREMA n'est titulaire que d'un seul marché relatif aux études, aux investigations et aux contrôles extérieurs sur les infrastructures routières, fluviales et maritimes du département de la Somme, pour un montant estimé des prestations de 25 000 euros par an.
3. ... qui aboutissent à des projets concrets
Le CEREMA a offert en 2015 un grand nombre de prestations, notamment pour les collectivités territoriales.
Votre rapporteur pour avis estime que quelques exemples de réalisations du CEREMA en 2015 sont révélateurs de la transversalité de son champ d'intervention.
Le CEREMA a ainsi réalisé, pour l'État et les collectivités un grand nombre d'expertises.
Source : Rapport d'activité 2015 du CEREMA
Premier exemple , la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) de Lorraine, maître d'ouvrage du projet d'autoroute A31 bis a sollicité le CEREMA afin de réaliser les études préparatoires au débat public sur ce projet . Environ 50 agents du CEREMA ont ainsi réalisé des études de trafic permettant de modéliser les conditions de circulation, les études de conception géométrique et d'accidentologie, les études environnementales (biodiversité, bruit, bilan carbone, etc.) ainsi que l'évaluation socio-économique. Le débat public a eu lieu entre avril et septembre 2015 : cinq à dix spécialistes du CEREMA étaient présents lors de chacune des douze réunions, afin d'assister la DREAL et de répondre aux questions techniques. La mission se poursuivra en 2017 avec des études plus approfondies permettant de comparer les différents tracés envisagés pour l'autoroute.
Deuxième exemple , le ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer a demandé au CEREMA, dans le cadre de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte, d'élaborer le premier indicateur national de l'érosion côtière .
Troisième exemple , le CEREMA a publié, dans le cadre d'une collaboration avec la direction régionale des infrastructures, des transports et de la mer (DRIEA) d'Île-de-France une étude destinée à aider les élus à planifier des aménagements en faveur de la sécurité des piétons en ville .
Il intervient également comme facilitateur pour les collectivités .
Il a ainsi élaboré, à la demande de la Délégation à la sécurité routière, une note d'information à destination des maires et de leurs services techniques afin de leur exposer les différents aménagements qui peuvent être réalisés autour des passages à niveau.
Autre exemple, les gestionnaires du port autonome de Strasbourg ont fait appel au CEREMA pour concevoir un plan pluriannuel de suivi des chaussées ainsi que des ouvrages d'art du port afin de maîtriser les dépenses en organisant l'entretien sur le long terme grâce à une évaluation des besoins selon l'urgence et les coûts.
En tant que centre de ressources , le CEREMA a déployé dans les départements, en partenariat avec la DGALN, un outil de gestion et de pilotage du parc de logements sociaux réservés à l'État, pouvant bénéficier aux publics défavorisés et mal logés.
Toujours à la demande de la DGALN, le CEREMA a également publié une plaquette sur l'aménagement numérique des territoires destinée aux élus et techniciens des collectivités.
Ses prestations s'intègrent même parfois dans le cadre, plus vaste, d'un projet de territoire .
Dans le cadre de la création de la métropole Aix-Marseille le CEREMA a par exemple mené une étude sur la ségrégation sociale et spatiale sur l'ensemble du territoire.
Il a également répondu à la commande de la direction départementale des territoires de la Mayenne de disposer d'une étude sur l'opportunité de développer l'urbanisation autour des axes de TER en milieu rural .
Le CEREMA intervient enfin sur le développement de projets innovants avec par exemple sa participation au premier pont mixte bois-béton français à Lantosque, dans l'arrière-pays niçois.
4. Des moyens en baisse qui mettent à mal le projet stratégique de l'établissement
Votre rapporteur pour avis a été alerté sur la question des moyens du CEREMA .
Le projet de loi de finances pour 2017 est caractérisé par un transfert de la subvention pour charges de service public de cet établissement du programme 217 vers le nouveau programme 159, pour un montant de 213,2 millions d'euros (représentant environ 85% de ses ressources). Ce montant est e n baisse par rapport à l'année dernière d'environ 4,4 millions d'euros . Cette baisse fait suite à une forte diminution de cette subvention en 2016, de l'ordre de 8 millions d'euros.
Quant aux effectifs, il est prévu de supprimer 125 ETP en 2017 , sur un total de 2 950 emplois. En 2016 déjà, 108 ETP avaient été supprimés.
Votre rapporteur pour avis considère que le changement de maquette budgétaire est une bonne chose dans la mesure où la subvention du CEREMA encourait le risque de servir de variable d'ajustement au sein du programme support 217. Il s'inquiète en revanche du rythme de la diminution de la subvention pour charges de service public, qui est plus élevé que celui de la réduction de la masse salariale. Ainsi, la part de la subvention hors masse salariale permettant de développer les activités de l'établissement est tombée de 21 millions d'euros à 8 millions d'euros entre 2015 et 2016.
Le plan de développement de l'établissement prévoit :
- une augmentation des ressources propres afin de passer de 24 millions d'euros en 2015 à 36 millions d'euros en 2020 ; il s'élève aujourd'hui à 28 millions d'euros ;
- une professionnalisation pour répondre aux appels d'offres de collectivités territoriales solvables ;
- un maintien de la subvention pour charges de service public permettant de financer en partie les projets avec les collectivités territoriales ;
- une amélioration de la notoriété du CEREMA auprès des collectivités territoriales.
Votre rapporteur pour avis estime, en ce qui concerne les ressources propres, que cet objectif ambitieux connaît une limite dans le rythme de réduction des effectifs , qui ne permet plus de faire fonctionner les équipes et qui pèse lourdement sur la viabilité de l'établissement.
Au-delà, il considère que la réduction trop importante et concomitante de la masse salariale et de la subvention pour charge de service public met en péril les missions et le fonctionnement de l'établissement, et surtout ne lui permettent pas de devenir un acteur incontournable d'accompagnement des collectivités territoriales rurales en expertise et ingénierie.
III. LE PROGRAMME 174 « ÉNERGIE, CLIMAT ET APRÈS-MINES »
A. UN PROGRAMME DONT PRÈS DE 93% DES CRÉDITS SONT DÉDIÉS À LA GESTION DE L'APRÈS-MINES
1. Des objectifs divers mais dont le principal est d'assurer leurs droits aux anciens mineurs
Le programme « Énergie, climat et après-mines » poursuit trois objectifs :
- la mise en oeuvre de la politique énergétique en veillant à ce qu'elle respecte les impératifs de coût, de sécurité d'approvisionnement et d'utilisation rationnelle de l'énergie ;
- la lutte contre le réchauffement climatique avec pour objectif la réduction des émissions de gaz à effet de serre et des polluants atmosphériques ;
- la garantie aux anciens mineurs de la préservation de leurs droits après l'arrêt de l'exploitation minière .
Le budget 2017 est marqué par :
- la mise en oeuvre du cadre communautaire pour le climat et l'énergie à horizon 2030 ;
- la mise en oeuvre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance : les objectifs du « paquet énergie-climat 2030 » consistent à réduire les émissions des gaz à effets de serre d'au moins 40 % par rapport à 1990, à porter la part des énergies renouvelables à au moins 27% et à améliorer l'efficacité énergétique d'au moins 27 % ;
- la poursuite et le renforcement de la politique d'amélioration de la qualité de l'air, avec notamment la transposition de la directive n° 2001/81/CE du 23 octobre 2001 fixant des plafonds d'émission nationaux pour certains polluants atmosphériques et de la directive sur la limitation des émissions de polluants atmosphériques liés aux installations de combustion de moyenne puissance ;
- l'adoption de la stratégie nationale « bas carbone », par décret n° 2015-1491 du 18 novembre 2015 ;
- les prestations sociales de l'après-mines : 121 454 bénéficiaires au 31 décembre 2015 .
2. Quatre actions aux enveloppes inégales
Ce programme ne connaît pas d'évolution de périmètre dans le PLF 2017. Il comprend toujours quatre actions , qui poursuivent deux objectifs :
- maîtriser l'énergie en réduisant la consommation et en développant l'usage des énergies renouvelables ;
- réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Mais ces objectifs ne reflètent pas la destination de la quasi-totalité des crédits du programme, qui sont en réalité alloués à l'action n° 4 « Gestion économique et sociale de l'après-mine » (92,8%) : ils permettent de garantir les droits sociaux et l'accompagnement des mineurs en cas de fermeture d'entreprises minières et ardoisières .
Cette action prend en charge le financement et le versement de prestations aux retraités ou retraités anticipés des mines fermées et de certaines mines et ardoisières en activité (prestations de chauffage et de logement, pensions de retraites anticipées, allocations de raccordement et de pré-raccordement, indemnités conventionnelles de cessation anticipée d'activité). L'action finance aussi les retraites de certains retraités des industries électriques et gazières (anciens agents français des établissements publics, offices et sociétés concessionnaires de services publics d'Algérie, du Maroc, de Tunisie et d'outre-mer).
Le budget de l'après-mines s'élève en 2017 à 424,3 millions d'euros en crédits de paiement .
La quasi-totalité de ce montant est destiné à l'Agence nationale pour la garantie des droits de mineurs (ANGDM) . Deux autres établissements publics sont concernés dans une moindre mesure : la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM) et la Caisse nationale de retraite des industries électriques et gazières (CNIEG).
Enfin, deux autres entités disposeront de moyens pour gérer les conséquences de l'après mines. Il s'agit des Mines de potasses d'Alsace (MDPA) pour le financement des travaux programmés sur la période 2013-2020 qui seront engagés pour la fermeture du site de stockage de déchets ultimes, et le Fonds d'industrialisation des bassins miniers (FIBM).
Le programme comprend trois autres actions, peu dotées :
- l'action n° 1 « Politique de l'énergie », qui dispose d'environ 4 millions d'euros en crédits de paiement : ces crédits financent les bons de commande du marché relatif au contrôle de la qualité des carburants en station-service et de la teneur en soufre de certains combustibles liquides en dépôts (en 2017, la France réalisera 600 prélèvements de carburant en métropole dans des stations-service ainsi qu'une quarantaine dans les DOM) ; ils permettent également à la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) de financer des études dans le domaine de l'énergie, de financer la présentation et la défense des dossiers de revendication auprès de la Commission des limites du plateau continental de l'ONU dans le cadre du programme Extraplac ; en outre, l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) dispose de 2,8 millions d'euros pour financer la réalisation de l'inventaire triennal des déchets radioactifs et l'intervention dans le cadre d'activités d'assainissement de sites ou de reprises de déchets orphelins lorsque le principe « pollueur payeur » ne peut être appliqué ;
- l'action n° 5 « Lutte contre le changement climatique », qui dispose de 27,5 millions d'euros en crédits de paiement , soit une baisse de 8% par rapport au PLF 2016 : financement des associations agréées pour la surveillance de la qualité de l'air (AASQA), du Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (CITEPA), des plans de protection de l'atmosphère (PPA), des mesures dans le domaine du changement climatique et de l'efficacité énergétique, études confiées à l'UTAC 6 ( * ) ;
- l'action n° 6 « Soutien », qui dispose d'une enveloppe de 1,15 million d'euros et qui assure le suivi et la rationalisation des dépenses par la mise en place d'un dialogue de gestion avec les services.
Le programme est placé sous la responsabilité du Directeur général de l'énergie et du climat .
B. UN PROGRAMME AUX CRÉDITS EN BAISSE
Le montant total des crédits demandés au titre du programme 174 pour 2017 s'élève à 456,27 millions d'euros en AE et 456,97 millions d'euros en CP , soit une baisse respectivement de 10 % et de 10,3 % par rapport à 2016 .
La baisse de la dotation de ce programme repose principalement sur la diminution annuelle du nombre des ayants droits de l'après-mines et plus particulièrement des crédits d'intervention de l'ANGDM.
CRÉDITS DU PROGRAMME 174
Autorisations d'engagement (AE) |
Crédits de paiement (CP) |
|||||
LFI 2016 (crédits votés) |
PLF 2017 (crédits demandés) |
Variation (%) |
LFI 2016 (crédits votés) |
PLF 2017 (crédits demandés) |
Variation (%) |
|
Action 1 Politique de l'énergie |
4,14 |
4,05 |
-2,18% |
4,16 |
4,05 |
-2,89% |
Action 4 Gestion économique et sociale de l'après-mines |
473,99 |
423,58 |
-10,64% |
506,9 |
476,33 |
-6% |
Action 5 Lutte contre le changement climatique |
27,95 |
27,52 |
-1,54% |
27,95 |
27,52 |
-1,54% |
Action 6 Soutien |
1,15 |
1,11 |
-3,48% |
1,15 |
1,11 |
-3,48% |
Total |
507,23 |
456,27 |
-10% |
509,59 |
456,97 |
-10,33% |
(en millions d'euros)
C. LA POLITIQUE DE LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE : DES CRÉDITS ÉCLATÉS AU SEIN DE DIFFÉRENTS PROGRAMMES ET DES MOYENS INSUFFISANTS
1. Les crédits éclatés de la transition énergétique
Les crédits dédiés à la transition énergétique ne sont en réalité que très marginalement portés par le programme 174 .
En effet, la maquette budgétaire du PLF 2017 fait apparaître un nouveau compte d'affectation spéciale (CAS) dédié à la transition énergétique , créé par l'article 5 de la loi n°2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015, qui retrace :
- en recettes , le produit de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité, une fraction de la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel, une fraction de la taxe intérieure sur les houilles, les lignites et les cokes, une fraction du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques ainsi que les versements du budget général ;
- en dépenses , principalement la compensation aux opérateurs du service public de l'électricité des charges imputables à leurs missions de service public de l'électricité.
Ce compte présente un équilibre pour 2017 à 6,98 milliards d'euros .
Mais on trouve également des crédits liés à la transition énergétique dans le programme 345 « Service public de l'énergie » de la mission Écologie, dont le montant s'élève à 2,5 milliards d'euros . Ce programme a été créé à la suite de la rebudgétisation de la contribution au service public de l'énergie et de la contribution au tarif spécial de solidarité du gaz , opérée par la loi de finances rectificative pour 2015. Ces crédits ont pour objectif de :
- financer la péréquation tarifaire ;
- protéger les consommateurs en situation de précarité énergétique ;
- soutenir les installations de cogénération au gaz pour faire des économies d'énergie ;
- financer le médiateur de l'énergie .
En outre, au-delà de la hausse des crédits destinés à financer les actions relatives à la biodiversité, dans le prolongement du vote de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, le projet de loi de finances pour 2017 comporte des mesures de mise en oeuvre de la transition énergétique.
En 2017, 6 milliards d'euros, soit 60 % des crédits de la mission « Investissements d'avenir » , qui formalise le troisième programme d'investissements d'avenir (Pia 3) dans le projet de loi de finances pour 2017, seront affectés à des projets qui contribuent à la croissance verte et seront financés par des obligations d'État « vertes » - green bonds - que la France sera le premier pays à émettre. Trois objectifs sont retenus :
- financer des solutions technologiques nouvelles liées à la transition énergétique, l'économie circulaire, la chimie verte, la préservation de la biodiversité, la maîtrise de la mobilité, l'amélioration du fonctionnement urbain ;
- imposer une éco-conditionnalité au soutien apporté aux projets, notamment dans l'industrie ;
- privilégier des projets qui contribuent indirectement aux économies d'énergie et au développement durable.
En outre, le Fonds de financement de la transition énergétique est abondé de 250 millions d'euros depuis la loi de finances rectificative de 2015 mais ne se voit doté d'aucun crédit supplémentaire pour 2017 .
2. La promesse non tenue du Fonds chaleur de l'ADEME
Le Fonds chaleur a été créé en 2008 dans le prolongement des engagements du Grenelle de l'environnement, afin de soutenir la production de chaleur à partir de sources renouvelables . Il a été doté d'une enveloppe de 1,2 milliard d'euros pour la période 2009-2013 , crédits qui ne sont pas inscrits au budget de l'État, dans la mesure où la gestion du fonds est déléguée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) dont les ressources proviennent pour l'essentiel des produits de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) affectés à l'agence.
Votre rapporteur pour avis avait déjà montré, dans son avis budgétaire en 2014, l'efficacité et l'utilité de ce fonds dont « l'effet levier » des investissements est très important et qui contribue à renforcer et à structurer la filière bois.
Il s'était à l'époque interrogé sur l'annonce faite par la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer de doubler les moyens de ce fonds à l'horizon 2017, afin d'atteindre 420 millions d'euros.
Cette année encore, il regrette que ce montant ne soit pas atteint et que cette annonce n'ait pas été suivie d'effet et que le soutien à la chaleur renouvelable par l'ADEME ne soit doté que de 221 millions d'euros en 2016 .
3. Des mesures d'accompagnement de la transition énergétique
L'article 10 du projet de loi de finances pour 2017 proroge d'un an la période d'application du crédit d'impôt pour la transition énergétique jusqu'au 31 décembre 2017. En revanche, la condition de ressources pour le cumul du CITE et de l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ), que le projet du Gouvernement supprimait, a été rétablie en séance publique à l'initiative des députés Gilles Carrez et Daniel Goldberg.
L'article 22 du projet de loi initial visait à augmenter les recettes du CAS transition énergétique mais par un amendement déposé en séance publique, le Gouvernement a exclu des recettes du Compte d'affectation spéciale transition énergétique la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) et la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN) , afin de répondre aux demandes de la Commission européenne concernant la conformité des dispositifs de soutien aux énergies renouvelables avec le régime des aides d'État et obtenir leur approbation rapide.
L'Assemblée nationale a adopté un article additionnel permettant d'étendre aux véhicules de société roulant à l'essence l'avantage fiscal jusqu'ici réservé aux véhicules de société roulant au diesel , à savoir une déductibilité de 80% de la TVA sur le carburant. Le nouvel article prévoit une convergence en cinq ans .
Elle a également adopté un article additionnel étendant l'amortissement fiscal supplémentaire exceptionnel sur les poids lourds fonctionnant au gaz naturel (GNV) et au biométhane carburant (bioGNV) aux véhicules de 3,5 tonnes , soit le segment des véhicules utilitaires légers (VUL) largement utilisés par le secteur de la logistique urbaine et de la livraison du dernier kilomètre.
Votre rapporteur regrette que l'ensemble de ces mesures, disparates et non cohérentes, ne reflètent pas la mise en oeuvre d'une priorité clairement affichée en faveur de la transition énergétique. L'abandon unilatéral de la fixation d'un prix-plancher au carbone, pourtant annoncée solennellement et sans aucune concertation par le Président de la République, achève de décrédibiliser un engagement trop timoré sur la mise en oeuvre d'une réelle politique de changement de paradigme vers une économie durable et « décarbonée ».
D. EXAMEN EN COMMISSION
I. AUDITION DE M. CHRISTOPHE AUBEL
Réunie le mercredi 16 novembre 2016, la commission a entendu M. Christophe Aubel, directeur de la phase d'installation de l'agence française pour la biodiversité
M. Rémy Pointereau , président . - Nous entendons ce matin M. Christophe Aubel, directeur de la phase d'installation de l'Agence française pour la biodiversité.
La loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages promulguée le 8 août 2016 nous a occupés une bonne partie de l'année dernière. Parmi ses principales mesures figure la création de l'Agence française pour la biodiversité, l'AFB, dont vous avez la charge d'organiser l'installation, depuis votre nomination par Madame Royal le 29 février dernier. Cette agence doit en principe devenir opérationnelle le 1er janvier 2017. Vous nous direz si cette date sera bien respectée et quelles sont les éventuelles difficultés que vous rencontrez dans le regroupement des organismes qui doivent être intégrés à l'agence, une opération certainement complexe.
M. Christophe Aubel, directeur de la phase d'installation de l'Agence française pour la biodiversité . - Je vous remercie de cette invitation qui va me permettre de vous faire un point d'avancement sur le projet d'Agence française pour la biodiversité (AFB). Ce projet est d'ailleurs plus qu'un projet mais bien une réalité puisque l'existence de l'agence est une affaire de peu de temps maintenant. Les délais sont tenus, nous sommes prêts, je vais essayer de vous le montrer. Il n'y aura pas de retard dans la mise en place de cette agence, qui est un chantier complexe de regroupement de quatre établissements.
Tout ceci a été rendu possible par la loi de reconquête de la biodiversité pour laquelle votre commission et le rapporteur ont joué un rôle important en bien des domaines. La promulgation de la loi a libéré les équipes et plus l'échéance se rapproche, plus elles sont mobilisées et plus les inquiétudes sont levées.
Pour commencer je veux rappeler les deux nécessités qui guident nos travaux et notre ambition. La première nécessité, c'est l'objet-même de l'agence, la biodiversité. Ce vivant qui nous entoure, mais que nous maltraitons. La biodiversité a longtemps été perçue comme quelque chose de sympathique, ou comme un patrimoine, c'est vrai, mais elle est plus que cela et la loi nous le dit désormais, la biodiversité est interaction. Nous sommes parties et dépendons de ces interactions qui ont rendu la terre vivable, qui nous offrent des ressources, qui nous rendent des services, sur lesquels nous avons, depuis toujours, construit notre bien-être et même notre développement.
Si j'avais le temps j'illustrerai mon propos avec le Viaduc de Millau, qui sans la biodiversité n'existerait pas. Et pourtant, malgré des succès réels, la biodiversité continue à s'éroder. Je renvoie là-dessus au bilan récent du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) sur les indicateurs de la stratégie nationale de transition écologique vers un développement durable (SNTEDD) : la biodiversité est le seul item dont tous les indicateurs sont dans le rouge. C'est le premier défi de l'agence : il faut agir mais pour agir, il faut franchir une étape et installer le sujet dans la société à hauteur des enjeux qu'il recouvre. Et nous devons le faire d'une manière positive, car la biodiversité est tout sauf un « empêcheur de », elle est au contraire pourvoyeuse de solution, d'innovation, d'activité, de bien être...
La seconde nécessité qui guide notre action découle de ce défi important. Pour le relever je ne connais qu'une méthode : celle du collectif. C'est la société dans son ensemble qui peut et doit se mobiliser, l'agence doit donc être un catalyseur, une agence qui certes fait par elle-même puisqu'elle dispose de moyens d'action, mais tout autant une agence qui aide à faire. L'AFB doit devenir la maison commune des acteurs, ceux qui agissent déjà, ceux qui ont envie d'agir mais ont besoin d'aide pour se lancer, et ceux qui ne savent pas qu'ils peuvent agir et pourtant le peuvent. Enfin, elle doit aussi être l'agence de nos concitoyens, être reconnue par eux et leur permettre à eux aussi d'être acteurs de ce sujet majeur pour notre avenir.
Je passe rapidement sur les deux premiers points que je voulais évoquer. D'abord le calendrier : nous tiendrons les délais, le décret de création est au Conseil d'État, il sera publié très prochainement et dans la foulée les arrêtées de nomination. Puis les personnels, au nombre de 1 200 : ils sont la force de l'agence, c'est sur leur compétence que repose ce projet. Nous avons mis en place, au printemps dernier, un dispositif de pré-positionnement qui touche à sa fin et va permettre à chacun de s'installer à son poste, de trouver une place dans la future structure.
En ce qui concerne la composition, je ne reviens pas sur les quatre établissements qui forment l'AFB, vous les connaissez : l'Agence des aires marines protégées (AAMP), l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), les Parcs nationaux de France (PNF) et l'Atelier technique des espaces naturels (ATEN). Mais il ne faut pas oublier que nous intégrons également les missions et personnels de la Fédération des conservatoires botaniques nationaux (FCBN), ainsi que 75 ETP du programme 113 qui sont actuellement basés au Muséum national d'histoire naturelle (MNHN), principalement au sein du Service du patrimoine naturel (SPN). Nous travaillons d'ores et déjà activement avec le Muséum, mais aussi avec le CNRS - c'est une nouveauté - à la constitution d'une unité mixte de service de façon à poursuivre les missions d'expertise publique du SPN.
En termes de missions, la loi en a fixé le cadre, ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre. Je vous en rappelle les grandes entrées : préservation, gestion et restauration de la biodiversité ; développement des connaissances, des ressources, des usages et des services écosystémiques ; gestion équilibrée et durable des eaux ; appui scientifique, technique et financier aux politiques publiques et privées, y compris soutien aux filières de croissances vertes et bleues ; lutte contre la biopiraterie.
Le champ est vaste, l'important est d'organiser la prise en charge de ces missions, dans un subtil équilibre à construire. Il faut d'abord assurer la continuité de service, donc continuer à faire aussi bien que ce que font les quatre établissements intégrés, c'est le premier objectif. Cela peut paraître une évidence mais comme dans toute réorganisation, il faut y veiller avec attention. C'est notre première préoccupation.
Concernant les nouvelles missions, nous prévoyons une prise en charge progressive, et c'est pour cela que nous nous donnons le temps de construire le contrat d'objectifs et de performance : nous allons le préparer pendant l'année 2017, c'est-à-dire qu'il ne démarrera pas avant 2018. Les missions sont vastes, nous devons d'abord les hiérarchiser et construire les bons indicateurs. Pour l'année 2017, nous élaborerons une feuille de route annuelle qui doit trouver le bon équilibre entre la continuité de service et les premières inflexions sur les nouvelles missions. On peut penser par exemple à la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) ou à l'Observatoire national de la biodiversité (ONB), qui sont très identifiés dans la loi comme devant faire partie de l'agence, et qu'aucun des quatre établissements ne prenait en charge. Nous allons progressivement construire cette montée en puissance sur tous les sujets en préparant le contrat d'objectifs.
Un mot sur les premières initiatives 2017. Les Ministres nous ont en effet demandé de prévoir de premières initiatives concrètes à lancer dès janvier, et de les présenter au conseil d'administration transitoire, qui regroupe les conseils d'administration des quatre établissements intégrés et qui n'est pas une instance décisionnelle - l'agence n'existant pas encore. L'objectif est de montrer que l'AFB n'est pas seulement un mécano institutionnel.
Ces initiatives sont organisées autour de trois axes : la sensibilisation du public sur un enjeu majeur ; des actions concrètes de reconquête de la biodiversité, par exemple des actions de restauration de milieux dégradés ou des actions d'aménagement dans les parcs naturels marins avec des mouillages écologiques ; enfin des actions de connaissance des enjeux dans les territoires. Sur ce dernier point, on peut citer par exemple le projet collaboratif « 65 millions d'observateurs » que nous soutiendrons, un programme de lancement d' « Atlas de la biodiversité communale », des actions de suivis des liens climat/biodiversité.
Pour mettre en oeuvre toutes ces missions, il a fallu réfléchir à l'organisation de la structure. Celle-ci comprend classiquement un secrétariat général, lieu indispensable des fonctions supports. Nous avons organisé les services centraux en quatre directions fonctionnelles.
La première est une direction d'appui aux politiques publiques. On y traitera de connaissance : système d'information sur la nature et les paysages, système d'information sur l'eau, système d'information sur la mer. Nous savons qu'il y a beaucoup d'attentes sur ces sujets de connaissance et leur mise à disposition. On y parlera également de stratégie nationale de la biodiversité, de directive-cadre stratégique pour le milieu marin, de Natura 2000 (à terre ou en mer), d'observatoire national de la biodiversité ou de directive-cadre sur l'eau.
La deuxième est une direction de la recherche, de l'expertise et du développement des connaissances. Elle comprend le lien R&D entre la recherche et les gestionnaires de terrain, en bénéficiant de l'expérience de l'ONEMA sur ce point. L'AFB n'est pas en tant que telle un institut de recherche, mais elle est bien placée pour faire le lien. Cette direction inclura un centre de ressources pour accompagner les acteurs et faire monter les sujets dans la société : trame verte et bleue, génie écologique, zones de captage, métiers de la biodiversité. Ce guichet permettra de diffuser l'information sur tous les sujets importants liés à la biodiversité. Enfin, cette direction s'occupera de formation. L'ATEN est d'ores et déjà un pôle de formation important des gestionnaires de biodiversité au sens large, par exemple des personnels des collectivités. L'ONEMA fait aussi de la formation, même si c'est moins connu : elle a un centre au Pa raclet dans la Somme.
La troisième est une direction à l'action territoriale, comprenant tout à la fois une direction de la police - un volet important des politiques publiques pour s'assurer du respect de la réglementation - et une direction pour les partenariats dans les territoires qui traitera à la fois de l'animation des réseaux des aires protégées (parcs naturels marins, parcs nationaux) et de l'animation du réseau des agences régionales pour la biodiversité, sur lesquelles je reviendrai.
Enfin, la quatrième est une direction de la communication et de la mobilisation citoyenne. Classiquement, dans les établissements publics, la direction de la communication est rattachée au secrétariat général pour faire la communication de l'établissement. Mais nous avons des missions particulières de sensibilisation, d'éducation à l'environnement et au développement durable : nous nous appuierons donc sur une direction fonctionnelle pour porter dans l'opinion la biodiversité et ses enjeux.
Ces services centraux sont répartis sur les trois sites de Vincennes, Brest et Montpellier. Mais cela ne représente qu'environ 350 personnes, ce qui signifie que la majorité de nos agents, soit 850 personnes, est ailleurs dans les territoires.
L'AFB n'est ni centralisée ni parisienne : elle comporte 10 directions régionales ou interrégionales (Bretagne et Pays-de-la-Loire, Normandie et Hauts-de-France, PACA et Corse restent ensemble) avec leurs services départementaux, 6 antennes de façade maritime, des parcs naturels marins.
En termes de gouvernance, nous voulons construire une maison commune, une agence partenariale, davantage « coeur de réseau » que « tête de réseau ».
Au premier étage figure le comité national de la biodiversité (CNB), créé par la loi et consulté sur les grands choix stratégiques de l'agence, qui doit devenir le conseil des parties prenantes. Nous ferons le même travail avec le comité national de l'eau et avec le Conseil national de la mer et des littoraux (CNML). Nous associerons les parties prenantes via ces conseils.
Au deuxième étage se trouvent les comités d'orientation, prévus dans la loi : eau, mer, outre-mer. Nous envisageons déjà de créer un quatrième comité d'orientation sur les espaces naturels. Ce sont les instances d'appui au conseil d'administration, celles qui travailleront sur le fond pour alimenter la stratégie de l'agence.
Au troisième étage on retrouve le conseil d'administration, dont le cadre est fixé par la loi : un collège État et personnalités qualifiées (50% des membres), un collège avec les acteurs socioéconomiques et les ONG gestionnaires, les élus locaux, les parlementaires, les représentants du personnel. Nous ne nous interdisons pas d'aller plus loin en mettant notamment en place une instance de concertation dédiée aux parcs nationaux, qui ne sont pas dans l'agence mais lui sont « rattachés ».
Un dernier mot sur les agences régionales pour la biodiversité (ARB) : la loi dispose que l'AFB et les régions « peuvent » créer des ARB. Il n'y a pas d'obligation ni de modèle imposé, notamment juridique : elles peuvent être constituées sous forme d'EPCE, de GIP, voire être une simple mise en réseau des acteurs sans création d'une structure juridique. Le but principal est avant tout la mise en synergie des acteurs et des territoires. On peut dire que la dynamique prend : sept régions ont engagé officiellement la démarche de création d'une ARB et trois autres y travaillent. Sachant que la loi a été promulguée en août, il me semble que c'est une résultat intéressant.
Voilà rapidement brossé l'état d'avancement du chantier. L'AFB est sur les rails. Elle sera opérationnelle dès sa création, en s'appuyant sur le socle solide des organismes qui la composent, et de ceux qui sont à ses côtés comme les parcs nationaux. Il le faut car il y a urgence à agir. C'est un rapport sénatorial de Pierre Laffitte et Claude Saunier qui l'a écrit, il y a une dizaine d'années : à côté du climat, la biodiversité est « l'autre choc » environnemental. Et la réponse au défi climatique ne peut aller sans une réponse au défi de la biodiversité.
M. Rémy Pointereau , président . - Merci Monsieur Aubel pour cette présentation très complète. Je cède d'abord la parole à notre collègue Jérôme Bignon qui fut rapporteur de la loi.
M. Jérôme Bignon . - Je salue votre travail Monsieur Aubel, et celui des équipes qui vous entourent. Je retrouve dans vos propos la contribution de notre commission, et donc du Sénat, à la structure de l'agence. Je pense à trois exemples en particulier. Premièrement, en ce qui concerne son articulation avec le Comité national de la biodiversité (CNB), à la fois pour respecter la culture administrative française et les contraintes d'efficacité inhérentes à la mise en place d'un établissement public, qui doit comporter un nombre restreint de membres au sein de son conseil d'administration. Deuxièmement, s'agissant des comités d'orientation, initialement mis en place pour répondre aux préoccupations exprimées par le milieu maritime qui craignait de perdre l'Agence des aires marines protégées, je me félicite que cette démarche ait été étendue aux outre-mer qui représentent 85% de la biodiversité de notre pays. Troisième point, la création des agences régionales est une faculté et non pas une obligation. J'avais eu à l'époque un débat très intéressant avec la ministre Ségolène Royal sur ce sujet et la raison a fini par l'emporter : pourquoi obliger plutôt que de laisser la plus grande souplesse aux territoires pour agir en fonction des réalités locales ?
Il y a parfois eu des divergences, un peu dogmatiques de part et d'autres, que nous n'avons pas toujours réussi à dépasser. Mais pour l'essentiel, l'empreinte du Sénat est patente dans ce texte, et nous avons fait un travail utile avec nos collègues députés.
Une question m'intéresse à l'heure où l'on se penche sur la constitution du conseil d'administration de l'AFB et les nominations nécessaires pour que la structure soit opérationnelle au 1 er janvier 2017- car il faut bien payer les 1200 personnels ! Comment vont être constitués les comités d'orientation ? Qui va venir ? Comment les membres seront-ils sélectionnés ? Selon quelles règles ? Seront-ils tous désignés en une seule fois ? Ces questions sont importantes pour l'Agence des aires marines protégées, et probablement aussi pour nos collègues d'outre-mer ! C'est une façon de donner une chance à ceux qui ne siégeront pas au conseil d'administration de l'AFB, compte tenu de ses effectifs limités.
M. Christophe Aubel . - Nous sommes en train d'y travailler et la réponse sera adaptée à chaque cas. Par exemple, pour le comité d'orientation « mer », tous les présidents des comités de gestion des parcs marins ainsi que d'autres acteurs, qui étaient au conseil d'administration de l'Agence des aires marines protégées mais ne seront pas tous au conseil d'administration de l'AFB, seront associés. Pour autant, ces comités d'orientation n'ont pas vocation à épouser strictement les contours des conseils d'administration des anciens établissements, nous pourrons y introduire d'autres personnalités qualifiées.
De même pour les « espaces naturels » sous plan de gestion en faveur de l'environnement, nous allons veiller à ce qu'un certain nombre de gestionnaires qui étaient membre de l'Atelier technique des espaces naturels (ATEN), soient représentés.
Nous suivons le même raisonnement sur la question de l'eau, pour essayer de trouver une formule qui ne soit pas une stricte reproduction du Comité national de l'eau : nous souhaitons que tous les comités de bassins puissent être représentés, puisqu'ils figuraient déjà largement au conseil d'administration de l'ONEMA.
Enfin, pour l'outre-mer, nous devons faire en sorte que tous les territoires soient représentés par des élus, la société civile ou des personnalités qualifiées qui en sont issues.
Nous sommes donc dans une réflexion à géométrie variable, pour assurer la meilleure représentation possible.
Mme Évelyne Didier . - Monsieur Aubel, merci de votre présentation, qui nous a éclairés sur le sens de votre travail. Je tenais à rappeler qu'on vous retrouve avec plaisir au Sénat, puisqu'il y a quelques années, nous avons oeuvré avec Jean-François Legrand et Marie Blandin, pour la création d'un mouvement pour la biodiversité. C'était, à l'époque, un sujet complètement confidentiel.
Ma première question concerne le travail avec l'Office national de la chasse et de la faune sauvage : cela a été un point dur au Sénat au cours de l'examen du texte. Comment envisagez-vous cette collaboration ? L'ONCFS sera-t-il associé à votre travail dans le cadre des observatoires ?
Deuxièmement, la lutte contre la biopiraterie : j'entendais récemment un reportage sur la plante stévia, qui a pendant longtemps été utilisée par les populations autochtones, mais qui est aujourd'hui complètement contrôlée par les multinationales. L'AFB peut-elle intervenir contre cette dépossession, peut-elle être saisie, quel est son rôle dans des cas comme celui-ci, qui sont extérieurs à notre territoire ?
Troisième question, le personnel : il y avait des craintes au cours de la discussion de la loi biodiversité au sujet du nombre de postes, de l'accroissement des missions et de l'harmonisation des carrières, pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
M. Philippe Madrelle . - Je vous remercie de votre exposé. Je voudrais solliciter quelques précisions. L'AFB est une des créations phares de la loi biodiversité, vous nous avez expliqué qu'une feuille de route était prévue pour 2017 et un contrat de performances pour 2018, vous êtes donc dans les starting blocks , je vois que la course est bien partie.
Le budget de 220,5 millions d'euros acté dans le projet de loi de finances pour 2017 vous semble-t-il adapté au bon fonctionnement de l'agence, compte tenu de l'extension de ses missions ? Par ailleurs, la création de 50 postes supplémentaires en plus des 1 200 existants est-elle suffisante à moyen terme ? L'agence, en développant sa présence sur les territoires, a-t-elle vocation à augmenter ses ressources en moyens humains et financiers ? Ces nouveaux postes auront-ils un rôle de coordination avec les agents issus des différentes structures ?
Par ailleurs, quels sont les outils concrets de l'agence ? Quel est son pouvoir de contrainte, voire de sanction, par exemple sur une question comme celle de l'accès aux ressources génétiques ? Avons-nous des éléments de comparaison avec d'autres pays européens possédant des structures similaires ?
Enfin, l'agence aura-t-elle un rôle dans le soutien aux nouvelles technologies et à l'innovation ? Peut-elle contribuer à l'aménagement durable des territoires ?
Mme Odette Herviaux . - Tout d'abord, je m'associe à l'hommage à Paul Vergès. Je me souviens de ses discours en tant que doyen du Sénat, il nous a prouvé que l'avance dans les idées n'a rien à voir avec l'âge.
Monsieur Aubel, je souhaite vous remercier, tous nos voeux vous accompagnent. J'ai quelques précisions à vous demander, sur des éléments concrets.
J'ai fait partie, avec un certain nombre de collègues, du conseil d'administration de l'Agence des aires marines protégées, et je ne vous cache pas qu'étant très attachés à la protection des aires littorales, nous étions inquiets devant la création de l'AFB. En effet, le fonctionnement relativement récent de l'Agence des aires maritimes protégées avait enfin trouvé un rythme de croisière et permettait de faire travailler ensemble tous les grands acteurs de la mer. Notre grande crainte était que la mer disparaisse dans la grande agence pour la biodiversité.
Pour avoir suivi depuis le début l'évolution du premier parc marin, le parc marin d'Iroise, on a pu voir que les ressources consacrées par l'AAMP n'étaient pas à la hauteur des ambitions. Que pensez-vous du grand nombre de parcs marins qui ont été aujourd'hui créés ? Sont-ils des parcs marins « sur papier » uniquement, sans personnel et sans ressources ? Comment envisagez-vous de leur donner du corps ?
Autre sujet, je fais également partie du Conseil national de la mer et du littoral. Nous travaillons à la mise en place d'une stratégie de la mer et des littoraux, et nous nous sommes aperçus qu'il y a une vraie nécessité d'équilibre entre les différents représentants des utilisateurs et des défenseurs de la biodiversité, puisque sans cet équilibre, trouvé par le dialogue, il ne peut pas y avoir de réussite. Cette volonté d'équilibre devra impérativement être préservée.
Par ailleurs, au cours des Grenelles I et II, nous avons eu un débat sur le terme de « restaurer » la biodiversité. J'accepte qu'on parle de « préserver », de « sauvegarder », de « favoriser » la biodiversité, mais le terme de « restaurer » pose une question : on remonte jusqu'à quand ? Quelles sont les espèces disparues qu'il faudrait restaurer ? Il faut être précis dans les termes employés.
Dernier point, je crois à l'adage que faute parfois de pouvoir se donner les moyens de sa politique, il faut faire la politique de ses moyens. Pensez-vous avoir les moyens d'appliquer les missions qui sont confiées à l'AFB ?
M. Claude Bérit-Débat . - Je reviens sur la remarque d'Evelyne Didier sur les relations avec l'Office national de la chasse et de la faune sauvage. L'ONCFS ne fait pas partie de l'AFB et n'a pas souhaité y être, mais vous nous avez exposé votre volonté de partenariat avec les différents acteurs. Avez-vous commencé à rencontrer les membres de l'ONCFS pour discuter de vos objectifs communs ?
Deuxièmement, je défends l'idée que la chasse joue un rôle important dans la préservation de la biodiversité. Qu'en pensez-vous ?
Troisième point, vous nous avez exposé les pouvoirs de police de l'AFB, notamment en matière de contrôle et de sanction. Vous savez que l'ONCFS dispose également d'un pouvoir de police, comment comptez-vous les coordonner ? Des rencontres sur le terrain sont-elles prévues pour mettre en place une coopération ?
Mme Annick Billon . - Je voudrais rebondir sur la question des moyens de l'agence. L'AFB se voit confier énormément de missions, je voudrais savoir quelles sont les garanties dont vous disposez aujourd'hui concernant les moyens pour appliquer ces missions. Sur la question de la chasse notamment, c'est un domaine qui rassemble de nombreux savoir-faire différents, une hiérarchisation des objectifs et des moyens est-elle prévue ?
Ensuite, vous décrivez l'AFB comme une agence de proximité pour les acteurs, mais il s'agit d'un organisme lourd, qui regroupe de très nombreux organismes aux objectifs très différents. Le risque est que la création de l'AFB produise une centralisation, qui éloigne des territoires la politique de sauvegarde de la biodiversité.
M. Jacques Cornano . - Je tiens à souligner que vous avez, dans votre exposé, salué les femmes et les hommes qui vont travailler au sein de l'AFB, puisque, comme vous l'avez dit, ce sont eux qui feront l'agence au quotidien.
J'attire votre attention sur l'importance de rencontrer les acteurs de terrain, et je vous recommande de rencontrer le président du parc national de mon territoire, la Guadeloupe, et surtout les nombreuses TPE qui travaillent sur le terrain. Certains de mes collègues ont eu l'occasion de rencontrer le docteur Henry Joseph, qui a apporté son point de vue intéressant sur ces questions.
Enfin, il faut rassurer les agents des aires marines protégées, qui s'inquiètent de l'action de l'AFB sur la protection de la mer.
M. Gérard Miquel . - Je voulais vous interroger sur le problème de la déprise agricole. Un certain nombre de territoires, qui étaient autrefois protégés, y sont aujourd'hui confrontés, et cela a des conséquences en matière de biodiversité. Certaines espèces disparaissent, d'autres prolifèrent, nous avons par exemple beaucoup de chevreuils et de sangliers. L'un des gros problèmes est l'embroussaillement de ces espaces, qui provoque des risques d'incendies. Avec le changement climatique, nous avons vu des incendies qui dévastent des milliers d'hectares, et la biodiversité disparaît alors complétement. À votre avis, quelles sont les solutions pour faire face à ce problème ? On se rend compte que lorsqu'on remet en culture et que l'on nettoie ces espaces, la biodiversité revient. Nous avons donc, dans mon département, mis en place des dispositifs de reconquête des espaces abandonnés, avec de la transhumance, des moutons qui viennent nettoyer ces lieux. Nous devons faire face à ces grandes problématiques si nous ne voulons pas voir nos territoires détruits par des incendies dans les années à venir.
M. Rémy Pointereau , président . - Comment voyez-vous le rôle de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques dans l'AFB ? Quelle sera l'attitude de ses agents, toujours répressive, plus pédagogique ?
M. Christophe Aubel . - Merci à tous pour vos questions précises sur des sujets divers, je vais essayer de répondre à toutes.
D'abord, un point sur les personnels. Vous avez évoqué plusieurs fois des craintes à ce sujet, ce qui est tout à fait légitime. D'abord, il a été dit que la création de l'AFB devait être l'occasion de la sortie du « quasi-statut », qui permet de sécuriser les personnels. Il n'en est rien, le décret va être publié avant la création de l'agence, nos personnels pourront donc en bénéficier. Par ailleurs, les craintes liées au positionnement et aux évolutions des postes de travail ont été adressées, dans le dialogue, par la création de fiches de postes et la mise en place d'outils d'accompagnement, au service d'un travail approfondi de positionnement de chacun au sein de la nouvelle agence. Nous sommes ainsi parvenus à dépasser les incertitudes de la loi elle-même, de même que les incertitudes liées à l'évolution des postes de chacun. Les consultations que nous avons menées montrent que les incertitudes se lèvent progressivement.
Sur les inquiétudes des agences des aires marines, j'en ai conscience, j'ai d'ailleurs tout de suite rencontré les personnes concernées. Je tiens à souligner que deux départements identifiés de l'AFB seront consacrés à ces espaces, le département des milieux marins et le département de l'animation des parcs culturels marins. La mer est clairement identifiée dans l'AFB, nous avons préservé cette spécificité, au point d'ailleurs que certains agents ont considéré que les problématiques maritimes n'ont pas été suffisamment mêlées aux autres. Les organigrammes sont bien sûr évolutifs, et cette organisation sera amenée à évoluer avec le temps. Le délégué à la mer, Loïc Laisné, est d'ailleurs chargé de travailler à mes côtés pour assurer cette transversalité marine.
En ce qui concerne le budget de l'AFB, vous êtes conscients que nous faisons face à un contexte budgétaire contraint, mais même dans ce cadre, l'AFB a été dotée de moyens importants. Il ne s'agit pas d'affirmer qu'il s'agit du budget idéal dans le meilleur des mondes, ce n'est sans doute pas le cas, mais les 50 ETP supplémentaires représentent un vrai plus pour l'agence, et il va falloir que nous les utilisions bien. Il faut avoir une chose en tête : quand on crée un établissement, on assure la continuité de service. Si on nous avait confié un budget excessif, nous n'aurions pas nécessairement su comment l'employer immédiatement, il faut laisser à l'agence le temps de monter en puissance. L'AFB va se saisir de ses missions nouvelles, définir les priorités, et créer des synergies entre les différents acteurs de la biodiversité, afin d'assurer l'efficacité de son action. Je fais le pari du moyen terme et de la montée en puissance de l'AFB, et donc de ses moyens. On a des moyens pour agir aujourd'hui, qu'il va falloir prioriser.
Au sujet de l'ONCFS : oui, nous travaillons avec lui, à deux niveaux. D'abord, en matière de recherche et développement, nous travaillons en commun. L'ONCFS est d'ailleurs membre de l'Aten, qui rejoint l'agence. Ce travail commun sur la gestion et la connaissance qui était déjà engagé avec les établissements publics existants va être maintenu. Ensuite, la question des unités communes a déjà été abordée dans la loi, nous avons reçu une lettre des ministres demandant aux directeurs généraux de l'ONCFS, de l'ONEMA et de l'AFB, de réfléchir à la façon d'avancer vers une mutualisation des services départementaux. Cela ne relève pas de la création de l'AFB en tant que telle, mais c'est une étape suivante dans le calendrier : il faut travailler sur la coordination de la police, laquelle est en réalité déjà faite sous l'autorité des préfets, et elle sera approfondie.
Sur la question précise du rôle de la chasse, j'ai déjà dit dans la presse, et je le répète aujourd'hui, que ma conviction est que des milieux humides ont été sauvés grâce à l'action des chasseurs. Je pense que chacun a un rôle à jouer dans ce domaine. J'ai mouillé ma chemise pour trouver des accords et des convergences avec le monde de la chasse, parce que je crois à l'importance de la biodiversité pour nos sociétés.
Sur la biopiraterie, qui a été plusieurs fois mentionnée, je n'ai pas de réponse très précise à vous apporter. C'est un sujet sur lequel nous n'avons pas encore de compétences, et où d'ailleurs la question se pose du partage de compétences avec la tutelle. C'est un sujet nouveau pour tout le monde, pour nous comme pour le ministère, mais il est sur la table et il existe une volonté de s'y consacrer.
Le soutien à l'économie et à l'innovation est également un enjeu important pour l'AFB, il est d'ailleurs mentionné dans la loi. Il existe des liens importants entre l'économie et la biodiversité, notamment parce que celle-ci favorise l'attractivité des territoires. Les 25 et 26 novembre prochains, nous participons au forum de l'économie et de la biodiversité, que nous avons co-construit avec les acteurs économiques. Il s'agit de trouver des solutions pour les territoires. Par exemple, sur les questions de politique agricole, je pense que nous avons un modèle d'agro-écologie durable à construire. L'AFB n'est pas en prise directe avec ce sujet, mais le monde agricole est représenté au sein de ses instances de gouvernance.
Sur le fait de « restaurer » la biodiversité, c'est vrai que le vocabulaire doit être précis. On peut aussi utiliser le terme de « reconquête », c'est celui de la loi, et un élu local m'a d'ailleurs fait remarquer récemment que ce mot avait une connotation trop guerrière. Mais je tiens au terme de « restaurer » la biodiversité, puisqu'on ne peut se contenter de dire qu'il faut « stopper » l'érosion de la biodiversité, avant tout parce que ce n'est probablement pas suffisant. L'idée c'est d'être proactif, de « reconquérir » de « restaurer » la biodiversité, c'est-à-dire de faire en sorte qu'elle aille mieux. La biodiversité est en évolution par elle-même, et tout le temps, il ne s'agit pas de la restaurer à un état antérieur, mais d'accompagner ses évolutions dans un sens qui lui soit favorable. Il faut restaurer les milieux qui dysfonctionnent, notamment du fait de l'activité humaine : par exemple, nous avons le projet de retirer les pneus au large de Saint-Raphaël pour tester la restauration de l'écosystème côtier, au bénéfice d'ailleurs de tout le monde, y compris de l'activité touristique. La biodiversité relève d'un choix collectif, entre les exigences de l'activité humaine et celles de la protection de la biodiversité.
Les équilibres d'acteurs sont importants pour l'action en faveur de la biodiversité. Il faut marcher sur les trois piliers du développement durable, il n'y en a pas un qui prédomine sur l'autre.
M. Jacques Cornano . - Les quatre piliers du développement durable ! Il ne faut pas oublier la culture.
M. Christophe Aubel . - Les quatre piliers, excusez-moi ! L'intérêt général est donc multiforme, ce n'est pas seulement l'environnement, l'économie aussi relève de l'intérêt général, et il nous faut donc assurer l'équilibre des intérêts généraux. L'enjeu pour moi est de favoriser le dialogue, en lien avec l'ensemble des acteurs. Je souhaite aller sur le terrain, je ne suis pas encore allé partout, mais j'ai vu beaucoup de nos équipes et de nos partenaires.
Sur la police et l'ONEMA, il faut là aussi trouver un équilibre. Je souligne qu'au cours du dernier conseil d'administration de l'ONEMA, auquel j'ai assisté en tant qu'invité, un représentant du monde agricole est intervenu pour souligner à quel point les choses se sont améliorées au cours des derniers mois. Paul Michelet, le directeur général de l'ONEMA, a veillé à renforcer la pédagogie et les explications dans les territoires, et c'est ce qui fait la différence. Il faut trouver l'équilibre, on ne veut pas « faire la police pour faire la police » : il s'agit d'abord de mettre en oeuvre les politiques publiques, de les expliquer, et ensuite de répondre au besoin de police qui apparaît, mais il ne faut pas négliger l'importance du dialogue. Je revendique d'être un homme de dialogue.
Enfin, pour répondre à la question sur la centralisation : personnellement, je suis convaincu que ce n'est pas le cas, que l'AFB n'est pas excessivement centralisée et éloignée des territoires. D'abord parce que géographiquement, nous ne sommes pas centralisés, plus de 800 des 1200 agents de l'AFB sont implantés dans les territoires, et nos trois sites principaux sont situés à Brest, Vincennes et Montpellier. Ma conviction, c'est que si l'on rate les territoires, on rate l'agence. L'échelon local, et notamment l'échelon communal, a un rôle majeur à jouer, et l'AFB le prend en compte. D'ailleurs, au sein des 50 nouveaux postes de l'agence, une part sera consacrée aux parcs marins pour éviter qu'ils ne soient des « parcs de papier », et une autre part sera implantée dans les territoires, justement pour favoriser la dynamique territoriale de l'AFB.
M. Rémy Pointereau , président . - Merci de vos réponses Monsieur le directeur, et bon courage pour mener à bien ces missions complexes et enthousiasmantes. Je retiens de votre intervention votre volonté d'écoute, ce qui me paraît tout à fait important.
II. EXAMEN DU RAPPORT POUR AVIS
Réunie le mercredi 16 novembre 2016, la commission a examiné le rapport pour avis sur les crédits « Biodiversité et transition énergétique » de la mission « Ecologie, développement et mobilité durables »
M. Rémy Pointereau , président. - Nous poursuivons nos travaux avec l'examen du rapport pour avis « Biodiversité et transition énergétique ».
M. Jérôme Bignon , rapporteur. - C'est déjà la troisième fois que je vous présente, dans le cadre du projet de loi de finances, les crédits de trois programmes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » : le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité », le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » et le programme 174 « Énergie, climat et après-mines ».
Ces trois programmes regroupent 1,24 milliard d'euros, soit 12,8% des crédits de l'ensemble de la mission, proportion qui diminue légèrement par rapport à l'exercice précédent.
2016 a été une année marquée par deux temps forts en matière de biodiversité et de climat. Le premier est l'adoption de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages le 8 août 2016, qui a notamment créé l'Agence française pour la biodiversité (AFB), dont nous venons de parler. Le deuxième a été, tout au long de l'année, le processus de ratification de l'accord de Paris. La France l'a ratifié le 15 juin 2016 et l'accord est entré en vigueur le 4 novembre. Qui aurait pu dire, il y a un an, qu'on serait allé aussi vite et aussi loin dans cette démarche fantastique et vitale pour l'avenir de notre planète et de l'humanité ? Nous revenons d'ailleurs de Marrakech où se déroule actuellement la COP 22. Nous en reparlerons lors d'une prochaine réunion de commission.
J'en viens maintenant à l'examen des crédits des trois programmes.
Le programme 113 est marqué cette année, par un événement majeur : la création de l'AFB. L'essentiel des crédits est réservé, à travers trois actions, au financement des actions de gestion et de préservation de la biodiversité, aquatique, marine et terrestre, permettant l'application des directives communautaires sur l'eau et la nature, la mise en oeuvre de la Stratégie nationale pour la biodiversité et des feuilles de route issues des conférences environnementales.
Les crédits de ce programme continuent à progresser de 1,4%, soit 4 millions d'euros supplémentaires par rapport à l'année dernière. Cette augmentation vise notamment à financer diverses mesures sociales au sein des opérateurs du programme.
Je voudrais insister sur trois points en ce qui concerne ce programme.
Le premier, dont je me réjouis, est la hausse de 12% des crédits consacrés aux espaces et aux milieux marins, avec près de 16 millions d'euros dédiés au financement de la mise en oeuvre de la directive cadre stratégie pour le milieu marin, des actions d'aménagement du domaine public maritime naturel et de gestion du trait de côte, des études de connaissance du milieu marin, de lutte contre la pollution marine et de gestion des ressources minérales naturelles.
Le deuxième point concerne les moyens consacrés à la politique de l'eau. Le programme 113 prévoit 13,5 millions d'euros pour financer les actions de police de l'eau, et d'application des directives européennes. En revanche, je regrette fortement que les agences de l'eau soient à nouveau prélevées cette année de 175 millions d'euros sur leur fonds de roulement. Nous avions déjà été nombreux l'année dernière à nous y opposer, mais cette année, cette ponction est d'autant plus injustifiée qu'elle intervient dans un contexte particulier puisque les missions des agences de l'eau ont été étendues à la biodiversité terrestre par la loi que nous avons votée en août.
Les présidents des comités de bassin se sont d'ailleurs opposés au maintien de ce prélèvement lors de la réunion du comité national de l'eau du 4 octobre 2016.
Pour ma part, je suis également favorable à une suppression de ce prélèvement dès cette année, car la situation n'est plus la même qu'en 2015 au moment où cette ponction exceptionnelle, qui pouvait se justifier par une solidarité des opérateurs dans la nécessité de redresser les comptes publics, a été prévue.
Dernier point en ce qui concerne le programme 113, et pas des moindres : la budgétisation de la future Agence française pour la biodiversité. Nous venons d'entendre Christophe Aubel sur ce sujet mais je souhaite vous apporter quelques éléments complémentaires.
Selon les informations qui m'ont été transmises, l'AFB doit bénéficier d'un budget global de 225,5 millions d'euros. Elle devra assurer la continuité des missions des quatre opérateurs fusionnés en son sein et se verra attribuer de nouvelles missions comme par exemple la gestion des trois parcs naturels marins créés en 2015 et 2016. En outre, les parcs nationaux seront rattachés à l'agence.
Géographiquement, elle s'organisera autour de trois pôles à Brest, Montpellier et Vincennes pour les services centraux.
Pour assurer ses missions, l'AFB bénéficiera de deux types de ressources :
- une subvention pour charges de service public versée par l'État à hauteur de 34,5 millions d'euros, qui sera inscrite au programme 113 : ce montant résulte, pour 2017, du transfert des subventions pour charges de service public des quatre opérateurs fusionnés ;
- une contribution des agences de l'eau qui comprend, d'une part, une contribution plafonnée à 150 millions d'euros par an (l'ancienne contribution à l'Onema), d'autre part, un prélèvement annuel sur le produit de la redevance pollutions diffuses perçu par les agences de l'eau, plafonné à 41 millions d'euros et destiné au plan Ecophyto 2018.
Enfin, le plafond d'emplois de l'agence devrait être de 1 227 équivalents temps plein (ETP) en 2017, dont 45 créations de postes, qui seront destinées aux parcs marins récemment créés, comme par exemple le parc marin d'Arcachon, qui ne dispose pour l'instant d'aucun ETP.
J'en viens maintenant aux crédits du programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie ». Alors que l'année dernière, le programme ne comportait que la subvention pour charges de service public versée à l'IGN, son périmètre s'étend aux subventions de deux nouveaux opérateurs cette année, le Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) et Météo-France, qui figurait auparavant dans le programme 170 désormais supprimé.
Ces trois opérateurs, rattachés au programme 159 et placés sous la tutelle de la Direction de la recherche et de l'innovation, ont en commun d'intervenir sur des politiques transversales au service de la transition écologique, en s'appuyant fortement sur l'expertise scientifique et technique et avec une forte dimension territoriale.
Si on compare les crédits alloués à ces trois actions aux crédits alloués aux mêmes postes dans la maquette de l'année dernière, on constate que les crédits du programme baissent légèrement cette année.
J'ai souhaité me pencher un peu plus en détails sur le CEREMA, non seulement parce qu'il devient le poste le plus important du programme, avec 213,19 millions d'euros de subvention, mais aussi parce que je ne connaissais pas bien cet établissement, de même peut-être qu'un certain nombre d'entre vous.
Le CEREMA est un établissement public administratif jeune d'à peine trois années puisqu'il est né le 1 er janvier 2014. La loi le définit comme centre de ressources et d'expertises scientifiques et techniques interdisciplinaires apportant son concours à l'élaboration, la mise en oeuvre et l'évaluation des politiques publiques en matière d'aménagement, d'égalité des territoires et de développement durable.
Pourtant, nous faisons régulièrement le constat d'une vraie inquiétude des territoires, notamment les plus ruraux, face à l'expertise et à l'ingénierie. Et le CEREMA pourrait justement leur apporter une réponse, ce qu'il semble faire aujourd'hui mais de manière encore trop ponctuelle.
Le CEREMA est né de la fusion de onze services de l'État : les huit centres d'études techniques de l'équipement (CETE), le Centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques (Certu), le Centre d'études techniques maritimes et fluviales (Cetmef) et le Service d'études sur les transports, les routes et leurs aménagements (Sétra).
Il est placé sous la double tutelle du ministère en charge du développement durable et des transports et du ministère en charge de l'urbanisme. Sa gouvernance est partagée entre l'État et les collectivités territoriales, au sein d'un conseil d'administration et d'un conseil stratégique.
Le premier projet stratégique de l'établissement, adopté lors du conseil d'administration du 29 avril 2015, a défini neuf champs d'action : l'aménagement et l'égalité des territoires, les villes et stratégies urbaines, la transition énergétique et le changement climatique, la gestion des ressources naturelles, la prévention des risques, la réduction des nuisances, la mobilité, la gestion et la conception des infrastructures et l'habitat et le logement.
Le directeur général, Bernard Larrouturou, m'a indiqué que malgré l'ampleur de ce champ d'intervention et pour éviter le risque de dispersion inhérent à ses missions, deux priorités étaient aujourd'hui sanctuarisées : l'égalité des territoires et la transition énergétique.
Le principal donneur d'ordres de l'établissement est l'État, puisque 90% de ses recettes proviennent de la subvention de l'État, mais le CEREMA travaille également avec les collectivités territoriales, via des appels d'offre mais aussi aujourd'hui par le biais de nouveaux outils juridiques comme les partenariats public-public.
J'ai développé quelques exemples d'actions du CEREMA dans mon rapport écrit. Je trouve qu'ils sont parlants. Je vous en citerai quelques-uns. La DREAL de Lorraine, maître d'ouvrage du projet d'autoroute A31 bis a ainsi sollicité le CEREMA afin de réaliser les études préparatoires au débat public sur ce projet. Le ministère de l'environnement a demandé au CEREMA, dans le cadre de la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte, d'élaborer le premier indicateur national de l'érosion côtière. Autre exemple, la Direction départementale des territoires de la Mayenne a confié au CEREMA le soin de réaliser une étude sur l'opportunité de développer l'urbanisation autour des axes de TER en milieu rural.
La stratégie affichée du CEREMA, qui en est encore à sa phase de construction, est de s'orienter de plus en plus vers les collectivités. Et je crois que nous devrions, en tant que représentants des collectivités territoriales, encourager cette tendance, surtout vers nos territoires ruraux, ce qui implique de donner à l'établissement les moyens de son ambition.
Or, les moyens ne sont pas là et l'établissement paraît véritablement menacé. Il semble qu'il soit déjà né avec deux difficultés patrimoniales majeures : des équipements scientifiques et techniques parfois obsolètes car cela faisait déjà plusieurs années que les services fusionnés sous-investissaient ; et la question de l'immobilier puisque si l'État est resté propriétaire, tous les coûts des bâtiments sont à la charge de l'établissement.
Le scénario envisagé par l'établissement, qui est de passer de 3 100 personnels à 2 600 en 2020, semble possible pour sauver l'établissement mais à condition, d'une part, de freiner le rythme de baisse des effectifs - une diminution de 125 ETP est prévue pour cette année - d'autre part, de freiner la diminution de la subvention pour charges de service public en parallèle (car aujourd'hui elle diminue plus vite que la masse salariale, avec une baisse d'environ 4,5 millions d'euros cette année) et, enfin, d'augmenter les ressources propres. Il y a un vrai enjeu pour le CEREMA de contribuer à une meilleure organisation territoriale, en lien avec les grandes communautés de communes et les communautés d'agglomération.
J'en viens au dernier programme de mon rapport, le programme 174 « Énergie, climat et après-mines », dont les crédits doivent servir de support à la mise en oeuvre de la politique énergétique et à la lutte contre le changement climatique.
Aucun changement de périmètre par rapport à l'année dernière sur ce programme, dont l'essentiel des crédits sert toujours à financer et verser les prestations des retraités ou retraités anticipés des mines fermées et de certaines mines et ardoisières en activité, ainsi que les retraites de certains retraités des industries électriques et gazières. Le budget de l'après-mines s'élève pour 2017 à 424,3 millions d'euros.
Le montant total des crédits du programme 174 s'élève lui à 456,5 millions d'euros, en baisse de 10% principalement du fait de la diminution du nombre d'ayants droit de l'après-mines.
Le programme 174 ne comprend en réalité qu'une petite partie des crédits destinés à la transition énergétique, qui sont éparpillés au sein de ce programme, du programme 345 relatif au « Service public de l'énergie » mais aussi du compte d'affectation spéciale « Transition énergétique ».
Dans le programme 174 à proprement parler, les 27,5 millions d'euros consacrés à la lutte contre la pollution de l'air et le changement climatique paraissent cette année encore insuffisants. En particulier, les associations agréées de surveillance de la qualité de l'air (AASQA) rencontrent des difficultés financières importantes comme l'a montré le récent rapport sénatorial de la commission d'enquête sur la pollution de l'air.
Le Fonds de financement de la transition énergétique, doté de 250 millions d'euros en 2015, n'est pas abondé par des crédits supplémentaires cette année et son exécution demeure opaque.
Des signaux contradictoires sont envoyés lorsque, d'un côté, l'Assemblée nationale adopte un article prévoyant une convergence en 5 ans de la fiscalité du diesel et de celle de l'essence pour les véhicules d'entreprise et que, de l'autre, le Gouvernement abandonne la fixation d'un prix plancher pour le carbone, pourtant annoncée de manière solennelle par le Président de la République.
Enfin, je m'inquiète de la stagnation des moyens alloués au Fonds chaleur, mis en place après le Grenelle de l'environnement afin de soutenir la production de chaleur à partir de sources renouvelables. J'avais déjà évoqué devant vous il y a deux ans l'utilité et l'efficacité de ce fonds, tant du point de vue de l'important « effet levier » de ses investissements que du point de vue du développement de la filière économique forestière. Mais ses crédits n'ont cessé de diminuer. Alors que la Ministre avait annoncé en 2014 un doublement de ce fonds, qui devait être porté à 420 millions d'euros en 2017, les crédits prévus pour l'année prochaine s'élèvent à 221 millions d'euros, soit près de la moitié.
Mes chers collègues, voici pourquoi, je vous proposerai de donner un avis défavorable à l'adoption de ces crédits. J'ai eu l'occasion de le dire, tout comme notre collègue Louis Nègre en tant que rapporteur de la loi de transition énergétique : nous sommes aujourd'hui confrontés aux facettes différentes d'une même « crise » commune - les menaces pesant sur la biodiversité et sur nos ressources naturelles, le réchauffement climatique, le spectre d'une « sixième extinction » - qui imposent une profonde mutation des politiques publiques, et donc des moyens ambitieux pour y parvenir. Ces moyens sont porteurs d'innovations et d'emplois partout où ils sont mobilisés. Nous venons de le voir au Maroc avec le formidable essor des énergies nouvelles et notamment des énergies solaires avec les promesses d'emplois qu'il porte. Notre pays devrait être davantage au rendez-vous, notamment avec des crédits et pas seulement avec des déclarations.
Mme Évelyne Didier . - Je remercie le rapporteur qui nous a fait comme d'habitude un exposé très complet. Mais je ne vais pas lui poser de questions. En effet, nous sommes aujourd'hui dans un exercice un peu irréaliste car nous savons, d'après les rumeurs, que nous n'irons vraisemblablement pas au-delà de ces échanges que nous avons en commission. Cela manque un peu de transparence.
Je voudrais également suggérer au président de la commission de recevoir le directeur du CEREMA car nous n'avions peut-être pas tous en tête l'importance de cet organisme.
Enfin, au moment où nous parlons beaucoup de restrictions budgétaires et de suppressions de postes de fonctionnaires, je note là aussi la contradiction des positions de tous les rapporteurs de cette majorité qui souhaitent plus de moyens alors que nous savons qu'ils réduiront les effectifs. Là encore, j'ai l'impression d'être dans un exercice surréaliste.
M. Rémy Pointereau , président. - Ma chère collègue, pour l'instant, ce ne sont que des rumeurs. Nous verrons le temps venu. Je me méfie des sondages et des rumeurs.
M. Jean-François Rapin . - La présentation du rapporteur m'interpelle sur la question du CEREMA. C'est un organisme dont les dimensions sont importantes et pourtant il est mal connu, alors qu'il nous a apporté à tous, dans nos territoires, de grands services. Je pense notamment au CETMEF sur tous les aspects littoraux. On a toujours besoin d'une ingénierie d'État sur certains dossiers. On ne peut donc pas ne pas réagir en voyant le CEREMA se dégrader sur le plan des moyens humains et financiers. Je ne reviendrai pas sur la stratégie qui consiste à regrouper des organismes, qui étaient efficaces et dont on sait qu'une fois qu'ils sont pléthoriques, il devient plus facile de supprimer des emplois. Lorsque le CEREMA a été créé, j'avais déjà prédit une stratégie future de réduction des effectifs. C'est désolant. Je tiens également à vous dire que le CEREMA essaye de vivre malgré tout, et de lancer à l'attention des collectivités territoriales de l'information pour apporter cette ingénierie d'État qui peut manquer sur les territoires. Je vous précise ainsi que le 1 er et le 2 février, le CEREMA organise une grande manifestation à Paris sur l'ingénierie littorale. Je soutiens donc la position du rapporteur, notamment sur ce point. Et aussi sur la question des moyens des agences de l'eau. On ne peut pas demander en permanence aux agences de l'eau de régler tous les problèmes sur les territoires tout en réduisant leurs crédits.
M. Claude Bérit-Débat . - Je m'inscris pleinement dans le fil des propos tenus par Evelyne Didier. En effet, dans trois quarts d'heure, une conférence de presse aura lieu qui, je pense, confirmera que la position de la majorité sénatoriale sur le rejet du budget n'est pas une rumeur. Je trouve donc moi aussi qu'il est surréaliste de discuter dans ces conditions. Je me retrouve également dans ses propos concernant les suppressions de postes, alors même que vous envisagez demain de supprimer massivement des postes de fonctionnaires.
M. Didier Mandelli . - Je partage en partie les propos qui viennent d'être tenus concernant le CEREMA. Nous avons tous été confrontés à la suppression de l'assistance technique fournie par l'État pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire (ATESAT) qui rendait bien des services aux petites communes. Un certain nombre de collectivités, comme le département de la Vendée, ont créé une société publique locale, avec le soutien d'actionnaires, qui sont en quasi-totalité des collectivités locales, pour constituer une structure capable de répondre à des besoins d'ingénierie en voirie, bâtiment ou autre. Or, nous venons, dans notre département, de confier une mission au CEREMA sur des questions d'organisation de voirie à un carrefour quatre voies. Cela traduit le manque de cohérence et de lien entre les politiques et la vision stratégique de l'État et le manque de concertation avec les collectivités territoriales. Aujourd'hui, on se retrouve dans certains départements, dans une situation de compétition entre un service d'État et des services locaux sur des questions d'ingénierie. Cela me paraît décalé et inutile. Prévoir une contractualisation entre l'État et des structures mises en place par les collectivités me paraît difficile aujourd'hui.
M. Jean-Claude Leroy . - Ma réflexion va dans le même sens sur le CEREMA. On le verra tout à l'heure en évoquant la revitalisation des bourgs où certains programmes prennent du retard en raison d'un déficit d'ingénierie. Je voudrais savoir quels sont les postes de cadres et d'ingénieurs ? Quelle est leur proportion ? Ce serait intéressant de pouvoir les entendre. Certains postes précieux d'encadrement pourraient être parfaitement opérationnels sur le terrain, mis à disposition des territoires par exemple.
Mme Chantal Jouanno . - Je remercie le rapporteur pour sa présentation très claire. J'ai entendu nos collègues qui considèrent qu'il est surréaliste de débattre mais j'aimerais tout de même que l'on parle du fond. En effet, comme l'a bien mis en évidence le rapporteur, il y a eu des déclarations extrêmement ambitieuses tenues par ce gouvernement mais on arrive à la fin du quinquennat avec un constat simple : sur des sujets centraux comme la pollution de l'air, la transition énergétique ou encore la mise en place d'un prix plancher du carbone par exemple, sans parler du Fonds chaleur, les engagements n'ont pas été tenus. J'aimerais donc que l'on réussisse à parler du fond entre nous. Pourquoi n'arrive-t-on pas à abonder le Fonds chaleur alors que l'on sait très bien que c'est l'une des énergies les plus intéressantes et les plus pertinentes en termes de coût du carbone évité ? Pourquoi ne met-on pas en place un prix plancher du carbone ? Pourquoi, sur la pollution de l'air, les AASQA ne sont-elles pas financées suffisamment pour bien fonctionner ? On a le cas en Île-de-France puisque les engagements qui sont contractualisés dans le cadre du contrat de plan État-région ne sont pas tenus. J'aimerais donc que l'on parle un peu du fond plutôt que de se cacher derrière des polémiques politiques immédiates. Débattons du fond et des promesses qui n'ont pas été tenues. C'est le moment où jamais pour en débattre.
M. Claude Bérit-Débat . - Pour débattre du fond, il faut pouvoir débattre. Voilà le problème. Le débat n'aura pas lieu. Je ne suis pas contre les observations du rapporteur sur le budget. Mais ce que je regrette, c'est que nous n'avons pas l'occasion d'entendre vos propositions demain.
M. Rémy Pointereau , président. - Nous avons le débat devant la commission.
Mme Évelyne Didier . - Je n'ai pas pour habitude de ne pas m'exprimer sur le fond.
M. Jérôme Bignon , rapporteur. - Le travail en commission permet de faire le point, y compris si le débat n'a pas lieu en séance pour les raisons que vous évoquez, sur des sujets importants. Nous aurons ainsi pris conscience qu'il faut faire quelque chose pour le CEREMA. Je ne me prononce pas sur le premier sujet.
Pour le reste, il y a indiscutablement un enjeu de notoriété pour le CEREMA. Pourquoi n'a-t-il pas réussi à émerger ? Peut-être précisément parce que la fusion n'est pas allée assez loin ? Peut-être n'aurait-il pas fallu garder des localisations dispersées sur le territoire ? Il y a certainement une réflexion plus approfondie à mener.
Je pense profondément qu'il y a dans l'instrument que constitue cet établissement public une source d'intelligence, de technicité, d'hommes et de femmes de très grande qualité qu'il ne faut ni perdre ni gaspiller. L'ingénierie est au coeur de l'avenir de nos territoires et des changements que nous avons devant nous, que ce soit en matière énergétique, ou encore de transports et de mobilité.
Plus précisément, sur les 3 100 personnels du CEREMA, on compte environ un millier d'ingénieurs, dont un peu plus de 800 ingénieurs des travaux publics de l'État et une centaine d'ingénieurs des ponts et des eaux et forêts (IPEF). Une réflexion, présidée par notre collègue député Philippe Duron, est d'ailleurs en cours sur les IPEF, qui sont environ 3 000 aujourd'hui. Je fais partie de ce groupe de travail qui réfléchit à l'avenir de ce corps d'ingénieurs à l'horizon 2050. Les 2000 agents du CEREMA restants sont essentiellement des techniciens et ouvriers de l'État.
M. Rémy Pointereau , président. - Nous allons donc voter sur l'avis défavorable proposé par le rapporteur.
Mme Évelyne Didier . - Je ne participe pas au vote.
La commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits « Biodiversité et transition énergétique» de la mission « Ecologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2017.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
I. PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS
Mercredi 9 novembre 2016 :
- Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) : M. Bernard Larrouturou, directeur.
II. PAR LA COMMISSION
Mercredi 16 novembre 2016 :
- M. Christophe Aubel , directeur de la phase d'installation de l'agence française pour la biodiversité (AFB).
* 1 Subvention accordée au Centre de documentation, de recherche et d'expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux (CEDRE).
* 2 Directive-cadre stratégie pour le milieu marin 2008/56/CE du 17 juin 2008 (DCSMM).
* 3 Quatre sous-régions marines en France : la Manche-mer du Nord, les mers celtiques, le golfe de Gascogne, la Méditerranée occidentale.
* 4 Dans la LFI 2016, l'action 11 correspond à la subvention dédiée au CEREMA au sein du programme 217.
* 5 Dans la LFI 2016, l'action 13 correspond au programme 170, supprimé dans le périmètre du PLF2017.
* 6 L'UTAC est une société de droit privé, désignée depuis 1991 comme Organisme Technique Central du contrôle technique des véhicules.