B. LA DIFFICILE AMÉLIORATION DU NIVEAU DE SÉCURITÉ DES FORCES ET DU PATRIMOINE INDUSTRIEL ET ÉCONOMIQUE LIÉ À LA DÉFENSE

La mission de contre-ingérence de la DRSD repose sur deux activités complémentaires : l'acquisition de renseignement de sécurité et l'application de mesures de protection, dans le but d'assurer et de maintenir au meilleur niveau la sécurité des forces armées et des acteurs industriels liés à la défense. Son action s'exerce de manière préventive.

Deux indicateurs ont été mis en place pour apprécier la performance de la DRSD dans l'exécution de ses missions d'enquête en vue de l'habilitation des personnels de la défense nationale, d'une part, d'inspections des sites militaires sensibles et industriels liés à la défense, d'autre part.

1. La mission d'enquête en vue de l'habilitation : des difficultés devant l'afflux des demandes d'avis en vue d'une habilitation que montre clairement l'indicateur retenu

Cette fonction enquêtrice est exercée au titre de la protection du secret de la défense nationale. L'instruction interministérielle générale n° 1300 48 ( * ) organise cette protection qui concerne tous les domaines d'activité relevant de la défense et de la sécurité nationale.

La DRSD est le service enquêteur du ministère de la défense. À ce titre, elle conduit les enquêtes de sécurité et émet les avis de sécurité permettant aux autorités compétentes de prendre les décisions d'habilitations. Elle agit de même pour le contrôle élémentaire, enquête administrative simplifiée, sollicitée par l'autorité d'emploi et destinée à s'assurer de l'intégrité d'une personne. Il garantit que le degré de confiance qu'il est possible d'accorder à cette personne est compatible avec la fonction, l'affectation ou le recrutement pour lequel elle est pressentie ou lui permet d'avoir accès à certaines zones protégées.

Taux d'avis émis dans les délais prescrits

(en %)

2013 (réalisation)

2014 (réalisation)

2015 (réalisation)

2016 (prévision)

2016 (prévision actualisée)

2017 (prévision)

96,3

96

77,7

94

80

80

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Cible

94

96

98

Réalisation et prévision actualisée (2016)

92,6

88,7

95,5

96,3

96

77,7

80

Source : PAP de la mission « Défense » annexés aux PLF 2015, PLF 2016 et PLF 2017

Cet indicateur mesure la performance de la fonction « habilitation et contrôles », en additionnant toutefois des procédures très différentes : contrôle élémentaire et habilitations aux niveaux « confidentiel défense », « secret défense » et « très secret défense » (via des enquêtes d'un niveau d'approfondissement croissant). Le bénéfice attendu des efforts consacrés à l'optimisation de la chaîne d'acquisition et d'exploitation du renseignement de sécurité et notamment le déploiement du logiciel SOPHIA s'est matérialisé par la réalisation en 2014 d'un objectif de performance élevé à 96 %.

Les décisions prises au début de l'année, suite aux attentats, visant à renforcer la protection du territoire national, ont conduit à un accroissement très sensible des demandes de contrôles élémentaires et d'habilitations. Le nombre de procédures a ainsi augmenté de 47,5% en juillet 2016 par rapport à la même époque en 2015. Les projections pour l'année 2016 anticipent un total d'environ 300 000 procédures. La prise en compte graduelle de ce surcroît de demandes s'est traduite par une baisse du taux d'avis émis dans les délais prescrits.

Les effets des mesures prises pour assurer le traitement de ce volume supplémentaire d'activité, comme le renforcement des effectifs de cette fonction jusqu'en 2019, grâce à l'appel à la réserve opérationnelle du service, et l'optimisation des processus, s'inscrivent dans la durée. Pour 2017, la prévision actualisée est reconduite à 80%.

Cet indicateur, parfois contesté 49 ( * ) , permet effectivement de mesurer la capacité du service à répondre aux besoins dans un contexte de crise et montre très clairement les efforts à consentir pour lui permettre de faire face à un accroissement des demandes.

2. La mission d'inspection des sites : un sous-dimensionnement du service que l'indicateur retenu ne permet pas de percevoir

Les inspections conduites par la DRSD permettent de s'assurer que les sites militaires sensibles et industriels liés à la défense sont maintenus au meilleur niveau de sécurité. Un catalogue de sites, avec des fréquences d'inspection associées, est ainsi défini, dans une programmation annuelle. Cette programmation est la résultante, d'une part, de l'application stricte de la réglementation et de directives nationales et, d'autre part, d'une coordination avec d'autres organismes de contrôle du ministère de la défense.

Le contrôle de la protection du secret de la défense et du patrimoine industriel et scientifique est assuré par le centre du conseil, de la prévention et des inspections (CCPI) qui dispose d'officiers inspecteurs spécialisés en sécurité économique et industrielle.

Le nombre des entreprises contrôlées évolue chaque année en fonction, d'une part, des nouvelles entreprises liées à la défense par des contrats avec détention et accès à des informations ou supports classifiés, et, d'autre part, à la sortie d'entreprises du périmètre à la suite de fins de contrats, dépôts de bilan ou regroupements.

Le catalogue des sites et la périodicité des inspections sont des données sensibles qui ne peuvent faire l'objet d'une communication publique.

L'intrusion, le 7 juillet 2015, dans l'enceinte de l'établissement de munitions régional, a mis en exergue la vulnérabilité de certains sites et de certaines entreprises. Cet évènement a rappelé la nécessité pour les forces armées, mais aussi pour les entreprises de défense, d'assurer un niveau maximal de protection, qui commence par le respect des procédures et la mise en oeuvre des mesures requises et, pour les services en charge de les contrôler, d'assurer leur mission avec vigilance et efficacité.

La performance mesurée de la DRSD repose sur deux leviers : l'évolution du besoin d'inspection et la ressource en inspecteurs.

Vos rapporteurs ont pu constater que cette capacité se situe depuis 2014 en dessous de la cible et que cette situation s'est même dégradée en 2016. En effet, le nombre de sociétés à inspecter suit une évolution tendancielle à la hausse alors que le nombre d'inspections réalisées chaque année dépend du nombre d'officiers inspecteurs affectés au CCPI, formés et en mesure de conduire une inspection. Le recours à des officiers inspecteurs de réserve permet d'ajuster en partie cette capacité.

Vos rapporteurs en déduisent que la capacité d'inspection pour assurer la protection du secret de la défense et du patrimoine industriel et scientifique devient insuffisante et qu'il convient d'urgence de redresser cette situation. Vos rapporteurs ont pris acte de la programmation par la DRSD du renforcement en organisation et en effectif du CCPI. Compte tenu des délais de recrutement et de la durée nécessaire à la formation des officiers inspecteurs, la stabilisation du taux de sites inspectés à son niveau de 2016 sera un objectif réaliste mais insatisfaisant.

L'indicateur, « taux des sites du domaine militaire et des sites industriels et économiques liés à la défense inspectés dans les délais prescrits » montre un effort significatif de la DRSD sans toutefois parvenir à atteindre les 100%.

Taux des sites inspectés dans les délais prescrits

(en %)

2013 (réalisation)

2014 (réalisation)

2015 (réalisation)

2016 (prévision)

2016 (prévision actualisée)

2017 (prévision)

91,9

93

96

97

96

96

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Cible

96

96

98

Réalisation et prévision actualisée (2016)

63

76,7

91,9

94

93

96

96

Source : PAP de la mission « Défense » annexés aux PLF 2015, PLF 2016 et PLF 2017

Dans le cas de l'intrusion dans l'enceinte de l'établissement de munitions régional de Miramas qui avait été inspecté par la DPSD en 2007 et fait l'objet de plusieurs visites régulières annuelles depuis 2009, la régularité des inspections et la pertinence des rapports produits n'étaient pas en cause, mais bien plutôt la mise en oeuvre de leurs recommandations.

La mise en place d'une direction de la protection des installations, dont les crédits figurent aux programmes 212 « Soutien à la politique de la défense » permettra peut-être de progresser en ce domaine. Elle ne suffira pas sans une clarification des responsabilités de chacune des entités concernées et un renforcement de la gouvernance.

Quoiqu'il en soit, outre la refonte de l'indicateur de performance de la DRSD pour le rendre plus réaliste, vos rapporteurs invitent une nouvelle fois le ministère du budget, le ministère de la défense et le SGDSN à une réflexion sur la perfectibilité de cet indicateur pour assurer l'information des parlementaires concernant le suivi de la mise en oeuvre des rapports d'inspection de la DRSD. Un indicateur sur le taux de suivi des recommandations des rapports d'inspection serait sans doute approprié pour mesurer la performance effective de cette politique publique.

En outre, ils demandent que la DRSD bénéficie de créations supplémentaires de postes d'inspecteurs et qu'une réflexion soit menée pour examiner la possibilité d'employer, pour ces missions de contrôle de sites industriels, des personnels civils habilités, qualifiés et formés. En effet, sans mettre en cause la qualité des personnels militaires, l'extension du nombre de sites d'entreprises à contrôler et la prise en compte, au-delà de la sécurité physique des sites, de la numérisation croissante des informations à protéger, requiert des compétences nouvelles dans le domaine de la sécurité informatique que l'on retrouve dans les administrations et dans les entreprises, et pourraient permettre d'accroître le vivier de recrutement.


* 48 http://circulaire.legifrance.gouv.fr/pdf/2011/12/cir_34288.pdf

* 49 Dans son rapport spécial sur les crédits de la mission défense pour 2016, le député François Cornut-Gentille estimait que cet indicateur n'est, pour la représentation nationale, d'aucune utilité (n° 3110 annexe 11 - Rapport de M. François Cornut-Gentille sur le projet de loi de finances pour 2016 (n° 3096) http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2016/b3110-tIII-a11.asp#P963_128139

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