Avis n° 169 (2015-2016) de M. Jean-Yves ROUX , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 19 novembre 2015
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AVANT-PROPOS
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I. 2015, UNE ANNÉE MARQUÉE PAR DE
PROFONDES ÉVOLUTIONS DANS LE SECTEUR DES TRANSPORTS ROUTIERS
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II. UN ENGAGEMENT MAINTENU POUR LE FINANCEMENT DES
INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT
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III. LA PRÉSENTATION DES CRÉDITS DU
PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2016 DESTINÉS AU TRANSPORT ROUTIER
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I. 2015, UNE ANNÉE MARQUÉE PAR DE
PROFONDES ÉVOLUTIONS DANS LE SECTEUR DES TRANSPORTS ROUTIERS
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TRAVAUX EN COMMISSION
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LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
N° 169
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016
Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2015 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi de finances pour 2016 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
TOME VI
ÉCOLOGIE, DÉVELOPPEMENT ET MOBILITÉ DURABLES :
TRANSPORTS ROUTIERS
Par M. Jean-Yves ROUX,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : M. Hervé Maurey , président ; MM. Guillaume Arnell, Pierre Camani, Gérard Cornu, Ronan Dantec, Mme Évelyne Didier, M. Jean-Jacques Filleul, Mme Odette Herviaux, MM. Louis Nègre, Rémy Pointereau, Charles Revet , vice-présidents ; Mme Natacha Bouchart, MM. Jean-François Longeot, Gérard Miquel , secrétaires ; MM. Claude Bérit-Débat, Jérôme Bignon, Mme Annick Billon, M. Jean Bizet, Mme Nicole Bonnefoy, MM. Patrick Chaize, Jacques Cornano, Michel Fontaine, Alain Fouché, Benoît Huré, Mme Chantal Jouanno, MM. Jean-Claude Leroy, Philippe Madrelle, Didier Mandelli, Jean-François Mayet, Pierre Médevielle, Louis-Jean de Nicolaÿ, Cyril Pellevat, Hervé Poher, David Rachline, Michel Raison, Jean-Yves Roux, Mme Nelly Tocqueville, MM. Michel Vaspart, Paul Vergès. |
Voir les numéros :
Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 3096, 3110 à 3117 et T.A. 602
Sénat : 163 , 164 à 168 et 170 (2015-2016)
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
L'année 2015 a été une année particulièrement riche pour les transports routiers, qui ont fait l'objet de plusieurs réformes d'ampleur.
Dans le secteur autoroutier, le Gouvernement a conclu un protocole d'accord avec les sociétés d'autoroutes dites « historiques ». Cet accord permet la mise en oeuvre du plan de relance autoroutier, qui représente près de 3,3 milliards d'euros d'investissements, et s'accompagne d'un rééquilibrage des relations contractuelles entre l'État et ces sociétés. La loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a par ailleurs établi de nouvelles règles dans ce domaine et étendu les pouvoirs de l'autorité de régulation des activités ferroviaires (Araf) à ce secteur. Il s'agit là d'une réforme d'ampleur, très attendue depuis la publication, à l'automne 2014, de l'avis de l'Autorité de la concurrence dénonçant la rentabilité exceptionnelle de ces sociétés.
La libéralisation du transport par autocar, prévue par la même loi « Macron », doit quant à elle permettre de développer une nouvelle offre de transport collectif, et combler ainsi les insuffisances de l'offre actuelle, par exemple dans les endroits mal desservis par le transport ferroviaire. En ce qui concerne les transports conventionnés, en application de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, cette compétence sera unifiée, à partir de 2017, à l'échelle des régions, pour plus de cohérence et de synergies.
Enfin, notre pays s'est engagé plus avant dans la voie de la transition énergétique et le choix de modes de transports plus durables. Cela s'est notamment traduit par la mise en place d'une « prime à la conversion », octroyée lorsque l'achat d'un véhicule propre s'accompagne de la mise au rebut d'un véhicule polluant ancien.
Votre rapporteur salue ces évolutions positives pour le transport routier.
Sur le plan budgétaire, l'impact de la résiliation du contrat signé avec Écomouv' sur le budget de l'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) a heureusement pu être limité, puisqu'il s'est traduit par une réduction de son budget d'intervention d'une cinquantaine de millions d'euros à peine.
En 2016, l'AFITF disposera d'un budget d'intervention en augmentation, qui devrait lui permettre d'assumer ses engagements, en particulier dans le secteur des transports routiers. Votre rapporteur souligne cet effort, même s'il conviendra, pour les années suivantes, de trouver des recettes supplémentaires pour abonder le budget de cette agence.
Pour ces raisons, lors de la réunion de votre commission du 4 novembre 2015, votre rapporteur avait proposé d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du projet de loi de finances pour 2016 consacrés aux transports routiers. Le vote sur ces crédits avait néanmoins été reporté après l'audition, par la commission, du secrétaire d'État aux transports, Alain Vidalies, qui s'est tenue le 12 novembre 2015.
Lors de sa réunion du 18 novembre 2015, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits du projet de loi de finances pour 2016 consacrés aux transports routiers.
I. 2015, UNE ANNÉE MARQUÉE PAR DE PROFONDES ÉVOLUTIONS DANS LE SECTEUR DES TRANSPORTS ROUTIERS
A. UNE RÉGULATION ACCRUE DU SECTEUR AUTOROUTIER
1. La prise de conscience de la nécessité d'une régulation accrue du secteur
Deux rapports ont mis en cause la régulation du secteur autoroutier, le rapport de la Cour des comptes de juillet 2013 sur les relations entre l'État et les sociétés concessionnaires d'autoroutes et l'avis de l'Autorité de la concurrence du 17 septembre 2014 sur le secteur des autoroutes après la privatisation des sociétés concessionnaires. Ces deux rapports concernaient en premier lieu les sociétés s'autoroutes dites « historiques », qui bénéficient de conditions d'exploitation plus avantageuses que les sociétés créées à partir des années 2000 pour exploiter des segments autoroutiers moins étendus et moins rentables que les premières concessions autoroutières.
Ces rapports ont analysé en particulier la pratique des contrats de plan signés entre l'État et les concessionnaires d'autoroutes pour permettre la réalisation de travaux non prévus dans les contrats de concession initiaux, en contrepartie d'une augmentation des péages revenant aux sociétés d'autoroutes ou d'un allongement de la durée des concessions. Après que la Cour des comptes a souligné la compensation excessive des sociétés d'autoroutes dans le cadre de ces contrats de plan, l'Autorité de la concurrence s'est interrogée sur la rentabilité de ces sociétés et sur les clauses du « plan de relance autoroutier », appellation désignant un ensemble de contrats de plan négociés avec les concessionnaires d'autoroutes, que le Gouvernement s'apprêtait à signer.
La réaction parlementaire n'a pas tardé. Au Sénat, votre commission a mis en place un groupe de travail, coprésidé par Jean-Jacques Filleul et Louis-Jean de Nicolaÿ, qui a remis ses conclusions en décembre 2014.
Les conclusions du groupe de travail sur les concessions autoroutières Le groupe de travail a identifié trois pistes d'action : - renforcer la transparence et la régulation du secteur, en améliorant la communication des données relatives aux sociétés d'autoroutes, en élargissant les compétences de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires au secteur autoroutier, et en renforçant le contrôle des marchés passés par ces sociétés ; - changer de modèle pour les contrats de plan , afin d'éviter une compensation excessive des concessionnaires, au détriment de l'État et des usagers ; - avancer sur le chemin d'une reprise en main, par l'État, des concessions autoroutières , en particulier en cas d'échec de la renégociation du plan de relance autoroutier. |
Dans le même temps, une mission d'information sur la place des autoroutes dans les infrastructures de transport, présidée par Betrand Pancher, et dont le rapporteur était Jean-Paul Chanteguet, président de la commission du développement durable de l'Assemblée nationale, a proposé une piste plus radicale, consistant à dénoncer les contrats de concession en cours.
Le Gouvernement a, de son côté, et à la demande du Premier ministre, Manuel Valls, mis en place un groupe de travail, comprenant des parlementaires, pour examiner ces différentes propositions.
Il a ensuite agi de deux façons, en s'appuyant sur les recommandations de ce groupe de travail :
- en insérant dans le projet de loi pour la croissance et l'activité déposé par le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, un volet consacré à la régulation du secteur autoroutier ;
- en renégociant les conditions du plan de relance autoroutier.
2. La réponse législative : la loi « Macron »
Les articles 13 et 15 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, considérablement enrichis lors du débat parlementaire, prévoient ainsi :
- l'extension des activités de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (Araf), désormais dénommée Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), à la régulation du secteur autoroutier . L'Arafer émettra un avis sur les contrats de plan signés entre l'État et les sociétés d'autoroutes, et collectera les informations relatives au secteur autoroutier pour les rendre publiques ;
- de nouvelles règles concernant la passation des marchés des sociétés d'autoroutes et les installations annexes sur les autoroutes concédées ;
- l'interdiction de tout nouvel allongement de la durée des concessions sans l'accord du Parlement ,
- l'introduction d'un dispositif de modération des péages et/ou de réduction de la durée de la concession , qui s'appliquera lorsque les revenus des péages ou les résultats financiers excèderont les prévisions initiales.
3. La renégociation du plan de relance autoroutier
Après plusieurs mois de négociations, le Gouvernement a conclu le 9 avril 2015 un protocole d'accord avec les sociétés d'autoroutes historiques. Cet accord remplit trois objectifs :
- rééquilibrer les contrats de concession dans l'intérêt des usagers et de l'État ;
- dégager des ressources nouvelles pour le financement des infrastructures de transport ;
- contribuer à la relance de l'activité économique et à la création d'emploi dans le secteur des travaux publics, par la conclusion du « plan de relance autoroutier », d'un montant de 3,27 milliards d'euros.
Ce plan de relance autoroutier permettra la réalisation des opérations suivantes :
Société |
Opérations |
APRR |
Aménagement à 2x3 voies de l'A75 au sud de Clermont-Ferrand Dispositif d'échanges entre l'A6, l'A406 et la RN79 (Mâcon) Dispositif d'échanges entre l'A71 et la RN79 (Montmarault) Dispositif d'échanges entre l'A36, la RN1019 et la RD437 (Sévenans) |
AREA |
Mise à niveau des autoroutes A48 et A480 entre St-Egrève et Claix, notamment aménagement à 2x3 voies de l'A480 au droit de Grenoble |
ASF |
Aménagement à 2x3 voies de l'A9 entre Le Boulou et l'Espagne Aménagement à 2x3 voies de l'A63 entre Ondres et Saint-Geours-de-Maremne Aménagement à 2x3 voies de l'A61 entre A66 et Narbonne (1ère phase) Aménagements environnementaux |
Cofiroute |
Aménagement à 2x4 voies de l'A10 entre la bifurcation A10/A19 et la bifurcation A10/A71 Aménagement à 2x3 voies de l'A10 entre la bifurcation A10/A85 et Sainte-Maure-de-Touraine Aménagements environnementaux |
Escota |
Achèvement de l'itinéraire autoroutier A50 - A57 à Toulon |
SANEF |
Aménagement ponctuel de l'A4, Contournement nord-est de Metz Aménagement autoroutier des extrémités de la RN42 à St Omer (A26) et à Boulogne (A16) Achèvement de l'A29 (création de bande d'arrêt d'urgence) Aménagements environnementaux Aménagements des aires d'arrêt Réaménagement de l'échangeur A4 / A35 / A355 Complément de l'échangeur de Bailly-Romainvilliers (A4) Mise en accessibilité des postes d'appel d'urgence |
SAPN |
Aménagement à 2x3 voies de l'A13 entre Pont l'Evêque et Dozulé Aménagement d'échangeurs et de diffuseurs suivants A13 - Échangeur de Pont l'Évêque - Aménagement de la bretelle de Lisieux (14) A13 - Desserte de Pont-Audemer (27) : Création des demi-diffuseurs de Toutainville et de Bourneville A13 - Création du diffuseur des Graviers (78) A13 - Complément du diffuseur de La Haie-Tondue (14) A13 - Complément du diffuseur de Maison Brûlée (76) A13 - Complément du diffuseur de Chambourcy (78) A14 - Sécurisation des tunnels |
Source : direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM)
Les premiers travaux débuteront fin 2015, pour une mise en service des ouvrages s'échelonnant entre 2018 et 2024.
En contrepartie de ces travaux, les contrats ont été allongés de la manière suivante :
Société |
Date de fin avant le plan de relance |
Date de fin après le plan de relance |
APRR |
31/12/2032 |
31/01/2035 |
AREA |
31/12/2032 |
30/09/2036 |
ASF |
31/12/2033 |
30/04/2036 |
Cofiroute |
31/12/2031 |
20/06/2034 |
Escota |
31/12/2027 |
29/02/2032 |
SANEF |
31/12/2029 |
31/12/2031 |
SAPN |
31/12/2029 |
31/08/2033 |
Les avenants aux contrats de concession qui traduisent ce plan de relance comportent également les dispositions suivantes, qui vont dans le sens d'un rééquilibrage des contrats de concession :
- la restitution systématique de l'avantage financier éventuel résultant d'un décalage dans le temps des travaux ;
- un mécanisme de modulation des évolutions tarifaires en cas de dépassement d'une chronique de chiffres d'affaires contractuelle, destiné à éviter toute surcompensation des investissements réalisés dans le cadre du plan de relance autoroutier ;
- un mécanisme de réduction de la durée de la concession en cas de dépassement d'un seuil contractuellement défini, afin de plafonner la rentabilité des concessions.
Ils prévoient également un renforcement de la visibilité et de la stabilité des relations entre l'État et les sociétés d'autoroutes sur le plan fiscal et des dispositions tarifaires, notamment la compensation de la hausse de la redevance domaniale intervenue en 2013.
En ce qui concerne la participation des sociétés d'autoroutes au financement des infrastructures de transport, les sociétés d'autoroutes historiques se sont engagées à verser chaque année à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), pendant 20 ans, une contribution volontaire de 60 millions d'euros, indexée sur l'inflation, non répercutée sur les péages, soit un total d'environ 1 milliard d'euros sur la durée des concessions. Ce versement a été porté à 100 millions d'euros les trois premières années de mise en place du dispositif, pour accélérer le versement de cette somme.
Les sociétés se sont aussi engagées à verser collectivement 200 millions d'euros pour la constitution d'un fonds d'investissement durable, fonctionnant sur un modèle similaire au fonds européen pour les instruments stratégiques, dit « plan Juncker ».
Le protocole prévoit également que les concessionnaires mettent en place des mesures commerciales pour les jeunes, le covoiturage et les voitures écologiques d'ici fin 2015. Ils se sont enfin engagés à définir des mesures d'accompagnement de la circulation et de l'accueil des autocars sur leurs réseaux pour prendre en compte la libéralisation de ce mode de transport autorisée par la loi « Macron ».
B. LA LIBÉRALISATION DU TRANSPORT PAR AUTOCAR
L'article 5 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques autorise désormais la création de services réguliers de transport par autocar de façon libre , alors qu'auparavant, ils n'étaient autorisés que dans le cadre d'un conventionnement avec une autorité organisatrice de transport (État, régions ou départements), ou dans le cadre d'un cabotage sur un trajet international. Dans ce dernier cas, le service de transport proposé devait obligatoirement être interrégional et rester accessoire par rapport au service international, ce qui obligeait les sociétés d'autocars à respecter certains seuils en termes de chiffre d'affaires produit ou de passagers transportés dans ce cadre.
L'objectif de la libéralisation du transport par autocar est de développer une nouvelle offre de transport collectif, plus adaptée à certains territoires (mal desservis par le transport ferroviaire) ou à certains publics (en raison de son coût plus réduit), afin de diminuer le recours à la voiture individuelle.
Pour protéger les transports conventionnés existants, les liaisons inférieures à 100 kilomètres pourront faire l'objet d'une interdiction ou de limitations (en termes de fréquence par exemple) de la part des autorités organisatrices de transport. Pour cela, elles devront saisir l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) de leur intention, et seront liées par l'avis qu'elle rendra.
Par ailleurs, l'article 2 de la loi a imposé des normes d'émission de polluants atmosphériques aux autocars circulant dans ce cadre . L'arrêté du 22 septembre 2015 pris en application de cet article 1 ( * ) prévoit que ces véhicules devront être conformes au minimum aux normes d'émissions Euro 5 jusqu'au 31 décembre 2017, puis aux normes d'émissions Euro 6 à partir du 1 er janvier 2018.
En application de l'article 12, une ordonnance est attendue dans les six mois suivant la promulgation de la loi pour définir le régime des gares routières de voyageurs et des autres points d'arrêt routier . Les règles d'accès à ces infrastructures seront précisées par l'Arafer, qui en contrôlera le respect et pourra être saisie en cas de différend. Il est en effet important que la collecte et la dépose des passagers puisse se faire dans des conditions de sécurité satisfaisantes, et que les conditions d'une concurrence loyale puissent être assurées.
En près d'un mois, la libéralisation du transport par autocar a permis à 250 000 passagers de voyager par ce mode de transport, qui dessert 75 villes différentes, et a engendré la création de 700 emplois directs.
C. L'UNIFICATION DE LA COMPÉTENCE DES TRANSPORTS NON URBAINS À L'ÉCHELLE DES RÉGIONS
L'article 15 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République a transféré aux régions les compétences des départements en matière d'organisation des services de transport routier, y compris scolaires 2 ( * ) , à compter de 2017 , sauf lorsque cette compétence est exercée par un syndicat mixte de transports à la date de promulgation de la loi. La région pourra toutefois confier par convention l'organisation de tout ou partie des transports scolaires au département ou à d'autres entités.
Ce faisant, la loi a unifié la compétence des services non urbains au niveau régional, alors qu'elle était auparavant partagée entre deux échelons, le département et la région, tout en préservant les marges de manoeuvre des territoires pour s'organiser de façon souple. Outre des économies d'échelle, ce transfert doit permettre une meilleure articulation entre les différents modes de transport, routier et ferroviaire.
Si la compétence des départements en matière de voirie a été préservée, l'article 19 de la loi permet aux régions de contribuer , malgré la suppression de la clause de compétence générale , au financement des voies et axes routiers d'intérêt régional identifiés dans le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires.
D. LE CHOIX DE MODES DE TRANSPORTS PLUS DURABLES
Le titre III de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte , intitulé « développer les transports propres pour améliorer la qualité de l'air et protéger la santé », comporte plusieurs dispositions de nature à favoriser le recours à des transports plus durables. Pour ne citer que quelques exemples, son article 37 fixe des obligations en termes d'achat de véhicules à faibles niveaux d'émissions pour le renouvellement des flottes automobiles et l'article 41 impose des obligations en matière d'installation de bornes de recharge électriques.
L'année 2015 a donc été marquée par des évolutions très positives dans le domaine des transports routiers, dont votre rapporteur se félicite.
II. UN ENGAGEMENT MAINTENU POUR LE FINANCEMENT DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT
A. LE BUDGET DE L'AGENCE DE FINANCEMENT DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT DE FRANCE (AFITF) EN 2015
Le budget de l'AFITF a dû être modifié en cours d'année 2015, pour que l'agence puisse assumer les frais résultant de la résiliation du contrat signé avec la société Ecomouv' pour la mise en oeuvre de la taxe poids lourds puis du péage de transit poids lourds, aujourd'hui abandonnés. Mais l'impact de cette prise en charge est resté limité sur le budget d'intervention de l'agence, qui est passé d'1,9 milliard à 1,844 milliard d'euros, pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, les frais de résiliation du contrat, de 969 millions d'euros 3 ( * ) , ont pu être échelonnés sur plusieurs années. L'AFITF a ainsi dû prendre en charge 528 millions d'euros en 2015, essentiellement pour verser l'indemnité due à la société Ecomouv', et devra ensuite assumer, chaque année, moins de 50 millions d'euros pour le remboursement des « créances Dailly » détenues par les établissements de crédit sur Ecomouv' et désormais prises en charge par l'État.
Par ailleurs, si la résiliation du contrat a créé une nouvelle dépense, elle en a supprimé une autre, le règlement des loyers que l'AFITF aurait dû verser chaque année à la société Ecomouv' si le contrat n'avait pas été résilié. 286 millions d'euros de dépenses étaient ainsi inscrits à ce titre dans le budget initial de l'agence pour l'année 2015.
Ensuite, l'agence a bénéficié d'une recette nouvelle, la contribution volontaire des sociétés d'autoroutes, qui a représenté 100 millions d'euros. Elle a aussi eu recours à son fonds de roulement, à hauteur de 63 millions d'euros, et reporté le remboursement d'une avance que lui avait faite l'Agence France Trésor.
B. LA SOLUTION RETENUE POUR ABONDER LE BUDGET DE L'AFITF DE FAÇON PÉRENNE
Pour combler le manque à gagner résultant de l'abandon du péage de transit poids lourds en octobre 2014, le Gouvernement avait décidé, pour 2015, d'augmenter la fiscalité sur le gazole, de 2 centimes pour les véhicules particuliers et de 4 centimes pour les poids lourds, et d'en affecter le produit à l'AFITF, soit 1,139 milliard d'euros.
En parallèle, un groupe de travail destiné à trouver une recette pérenne pour l'AFITF avait été mis en place. Deux options étaient alors envisagées : le maintien de la hausse de la fiscalité sur le gazole ou l'instauration d'une vignette sur les poids lourds. Ce groupe de travail a pu s'appuyer sur un rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable, réalisé par Michel Pinet et Marc d'Aubreby.
Ce rapport indique notamment que le prix du gazole en France, après prise en compte des accises applicables (y compris après l'augmentation de 4 centimes) reste l'un des moins chers d'Europe, seuls le Luxembourg et l'Espagne ayant des prix plus faibles. Dans ce cadre, le risque que cette augmentation se traduise par une incitation, pour les poids lourds étrangers, à faire leur plein hors du territoire, reste assez limité. Par ailleurs, ce rapport rappelle que l'instauration d'une vignette engendre des frais de gestion importants.
À l'issue de ces travaux, le maintien de l'augmentation de la fiscalité sur le gazole a donc été préféré à l'instauration d'une vignette .
Par ailleurs, comme évoqué plus haut, les négociations avec les sociétés d'autoroutes ont permis l'affectation d'une recette nouvelle pour l'AFITF, de 100 millions d'euros les premières années, puis 60 millions d'euros jusqu'à la fin des concessions.
C. UN BUDGET D'INTERVENTION PRÉSERVÉ POUR 2016
L'article 14 du projet de loi de finances réduit la part du produit de TICPE affectée à l'AFITF à 715 millions d'euros. Le budget d'intervention prévisionnel de l'AFITF devrait toutefois être préservé pour l'année 2016 , puisqu'il est estimé à 1,926 milliard d'euros, en augmentation de plus de 4 % par rapport à celui de l'année 2015. Cette augmentation se traduit concrètement par une augmentation des crédits de l'AFITF consacrés aux transports routiers 4 ( * ) .
Votre rapporteur se félicite de la préservation des crédits d'intervention de l'AFITF pour 2016, compte tenu du contexte actuel de rareté de la ressource budgétaire. Ce budget devrait notamment permettre le déblocage de crédits affectés aux transports routiers dans les contrats de plan État-régions 2015-2020.
Il reconnaît néanmoins que le financement de l'agence devra, à l'avenir, faire l'objet d'une vigilance particulière, compte tenu de ses engagements passés et à venir.
III. LA PRÉSENTATION DES CRÉDITS DU PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2016 DESTINÉS AU TRANSPORT ROUTIER
A. LES CRÉDITS DU PROGRAMME 203
Les crédits consacrés au transport routier figurent dans le programme 203 « Infrastructures et services de transports » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », en particulier dans les actions suivantes :
- l'action n° 01 « Développement des infrastructures routières » ;
- l'action n° 12 « Entretien et exploitation du réseau routier national » ;
- l'action n° 13 « Soutien, régulation, contrôle et sécurité des services de transports terrestres » ;
- l'action n° 15 « Stratégie et soutien », qui regroupe les dépenses transversales du programme.
L'action n° 01 « Développement des infrastructures routières » a pour objet la modernisation du réseau routier national concédé et non concédé existant et son développement. Elle est intégralement financée par des fonds de concours versés par l'AFITF et les collectivités territoriales , qui cofinancent certaines opérations dans le cadre des plans de modernisation des itinéraires routiers (PDMI).
L'objectif explicite de l'État est de limiter strictement l'augmentation de capacité du réseau routier au traitement des points de congestion, des problèmes de sécurité ou de besoins d'intérêt local en limitant les impacts sur l'environnement.
Le montant de ces fonds est évalué pour 2016 à un total de 671 millions d'euros en crédits de paiement (CP) , 393 millions provenant de l'AFITF et 277 millions des collectivités territoriales. Il est évalué à 691 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE). Mais il s'agit d'une estimation, le budget de l'AFITF pour 2016 devant être arrêté en décembre.
D'après le projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances, ces crédits doivent permettre la poursuite du financement des opérations en cours et l'engagement de nouvelles opérations de développement et de sécurité dans le domaine routier.
Une liste des principales mises en services prévues en 2016, ainsi que des opérations en cours de travaux ou susceptibles d'être lancées durant cette année, figure ci-dessous.
L'action n° 12 « Entretien et exploitation du réseau routier national » regroupe les crédits destinés à l'exploitation, à l'entretien courant et préventif des 12 023 kilomètres du réseau routier national non concédé, aux opérations de réhabilitation et de régénération, aux aménagements de sécurité (sur les tunnels routiers notamment), à la gestion du trafic et à l'information routière des usagers.
Ils s'élèvent à 324 millions d'euros en crédits de paiement et 318 millions d'euros en autorisations d'engagement, soit des montants proches de ceux adoptés en loi de finances initiale pour 2015, qui étaient respectivement de 329 millions d'euros et 323 millions d'euros.
CRÉDITS DU BUDGET GÉNÉRAL POUR
L'ACTION 12
(en millions d'euros)
Action 12 : entretien et exploitation du réseau routier national |
Autorisations d'engagement 2016 |
Crédits de paiement 2016 |
Chaussées : entretien préventif et grosses réparations |
106,5 |
106,5 |
Entretien courant et exploitation |
126,3 |
126,3 |
Réhabilitation des ouvrages d'art |
40,6 |
40,6 |
Immobilier, radios et matériels techniques |
28,2 |
34 |
Maintenance des équipements dynamiques |
16,6 |
16,6 |
TOTAL |
318,1 |
323,9 |
Cette légère diminution n'est donc pas problématique, surtout dans le contexte actuel de maîtrise de la dépense budgétaire. Il conviendra toutefois de veiller, à l'avenir, à ne pas baisser davantage cette enveloppe qui permet tout juste de maintenir en l'état notre patrimoine routier.
L'état du patrimoine routier Le suivi de l'état du patrimoine est assuré par deux démarches qualité : - la démarche IQRN (image qualité du réseau national) pour les chaussées ; - la démarche IQOA (image qualité des ouvrages d'art) pour les ponts et les murs. 85 % des chaussées étaient considérées, de 2010 à 2012, en état correct (note supérieure ou égale à 12). Mais ce taux a commencé à baisser en 2013, pour atteindre 84,5 %, puis 83,8 % en 2014. La note globale moyenne du réseau, qui s'élevait à 16,4 en 2012, a été réduite à 16,2 en 2013 et 16,1 en 2014. 87,7 % des ponts et 83,5 % des murs sont, en 2014, considérés comme étant dans un état satisfaisant, soit 0,5 point de moins pour les ponts et 0,6 point de plus pour les murs par rapport à 2013. 35 % des ponts et 26% des murs nécessitent un entretien spécialisé assez urgent pour prévenir à terme le développement de problèmes structurels, soit une baisse de 1,4 point pour les ponts et de 0,3 point pour les murs par rapport à 2013. 12,3 % des ponts et 16,5 % des murs sont affectés au niveau structurel (soit une hausse de 0,4 point pour les ponts et une baisse de 0,6 point pour les murs), dont 1,3 % des ponts et 7,1 % des murs de manière grave (soit une baisse de 0,3 point pour les ponts et de 0,3 point pour les murs, toujours par rapport à 2013). |
Ces crédits devraient être complétés par 328 millions d'euros de fonds de concours et d'attributions de produits en crédits de paiement, en augmentation de 37 % par rapport à ce qui était annoncé en loi de finances initiale pour 2015.
Ces crédits, dont 323 millions devraient provenir de l'AFITF, contribueront au financement des programmes d'investissement de mise en sécurité des tunnels, d'équipements dynamiques, de régénération des chaussées, des ouvrages d'art et équipements, d'aménagements de sécurité et d'extension d'aires poids lourds du réseau national non concédé.
L'action n° 13 « Soutien, régulation, contrôle et sécurité des services de transports terrestres » est transversale aux différents modes de transports terrestres puisqu'elle vise à soutenir le report modal, à assurer un fonctionnement concurrentiel équitable des secteurs de transport, à soutenir les mesures de prévention contre les accidents et à accompagner les professions en difficulté. Ses crédits s'élèvent à 47,9 millions d'euros en CP et 42,9 millions d'euros en AE 5 ( * ) , auxquels devraient s'ajouter des fonds de concours et attributions de produits, à hauteur de 37 millions en AE et 32,7 millions en CP.
Parmi les crédits de l'État, 2,6 millions d'euros en AE et CP sont destinés aux dépenses nécessaires aux contrôles routiers (2,1 millions d'euros pour l'équipement des services de contrôle routier et 500 000 euros pour l'équipement des agents chargés de ce contrôle). 1,7 million d'euros en AE comme en CP est prévu au titre du soutien économique et social au transport routier, dont 1,3 million pour le fonctionnement du Conseil national routier (CNR), lieu d'échanges et de réflexion pour la profession des transporteurs routiers. 400 000 euros en AE et CP correspondent à des soutiens aux actions de mutation et d'évolution du transport routier comme la réduction du dioxyde de carbone, ainsi qu'aux formations économiques et sociales des acteurs sociaux. 500 000 euros en AE et CP sont par ailleurs prévus pour prendre en compte le transfert, depuis le 1 er janvier 2015, de la compétence de gestion du registre des entreprises des véhicules de VTC du ministère chargé du tourisme vers le ministère des transports.
L'action n° 15 « Stratégie et soutien » comprend les dépenses transversales au programme « Infrastructures et services de transport ». Ses crédits de paiement sont fixés à 16,6 millions d'euros, en diminution de 6,7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015. Elle regroupe, d'une part, les dépenses d'études générales et de prospective (8,1 millions d'euros), d'autre part, les dépenses de logistique de la DGITM ou de services qui lui sont rattachés (8,5 millions d'euros).
B. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « AIDES À L'ACQUISITION DE VÉHICULES PROPRES »
Le dispositif du bonus-malus automobile a été mis en place en 2007, à la suite du Grenelle de l'environnement, pour encourager l'achat de véhicules neufs peu émetteurs de dioxyde de carbone. Il a fait l'objet d'ajustements au fil des ans, pour prendre en compte les évolutions technologiques et pour assurer son équilibre budgétaire.
Le compte d'affectation spéciale bénéficie des recettes du malus automobile, régi par l'article 1011 bis du code général des impôts.
LE BARÈME DU MALUS AUTOMOBILE
Le barème du malus applicable depuis 2014 est maintenu pour 2016 . Les prévisions de recettes correspondantes, de 266 millions d'euros, sont plus proches de celles retenues pour l'année 2014 (270 millions) que de celles retenues pour l'année 2015 (242 millions d'euros), celles-ci s'étant avérées sous-évaluées.
En ce qui concerne les dépenses, le compte d'affectation spéciale retrace les crédits consacrés au bonus automobile et à la prime à la conversion .
Le barème du bonus automobile était fixé par le décret n° 2007-1873 du 26 décembre 2007 instituant une aide à l'acquisition des véhicules propres, régulièrement modifié 6 ( * ) , jusqu'à son remplacement par le décret n° 2014-1672 du 30 décembre 2014 instituant une aide à l'acquisition et à la location des véhicules peu polluants.
Outre qu'il permet l'octroi d'un bonus en cas de location de longue durée, ce décret recentre le bonus sur les véhicules les plus vertueux , électriques et hybrides rechargeables, comme cela avait été annoncé. Ainsi, les bonus accordés aux véhicules thermiques, dont le montant était symbolique (150 euros) ont été supprimés, et le bonus versé pour les véhicules full hybride a été réduit de 3 300 à 2 000 euros.
Un nouveau recentrage du bonus devrait avoir lieu en 2016. La maturité des véhicules hybrides étant plus avancée sur le marché que celle des véhicules électriques, le montant de leur bonus sera à nouveau diminué.
LE NOUVEAU BARÈME DU BONUS AUTOMOBILE
Taux d'émission |
Montant du bonus |
Montant du bonus |
Montant du bonus |
de CO 2 |
au 1 er novembre 2013 |
au 1 er janvier 2015 |
au 1 er janvier 2016 |
(en grammes par kilomètre) |
(en euros) |
(en euros) |
(en euros) |
0 à 20 g (véhicules électriques) |
6 300 (dans la limite de 27 % du coût d'acquisition) |
6 300 (dans la limite de 27 % du coût d'acquisition) |
6 300 (dans la limite de 27 % du coût d'acquisition) |
21 à 60 g (véhicules hybrides rechargeables) |
4 000 (dans la limite de 20 % du coût d'acquisition) |
4 000 (dans la limite de 20 % du coût d'acquisition) |
1000 |
61 à 90 g (véhicules thermiques) |
150 |
- |
- |
Moins de 110 g, pour un véhicule hybride électrique (dit full hybride) |
3 300 (dans la limite de 8,25 % du coût d'acquisition) |
2 000 (dans la limite de 5 % du coût d'acquisition) |
750 |
Le décret n° 2014-1672 du 30 décembre 2014 a également institué une prime à la conversion , aussi appelée « superbonus » ou « prime à la casse », cumulable avec le bonus automobile, qui est accordée lorsque l'acquisition ou la location de longue durée d'un véhicule propre est effectuée en remplacement d'un véhicule ancien polluant de quinze ans au moins.
Le principe de cette prime figure à l'article 48 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Par rapport au bonus-malus automobile qui ne concerne que l'achat des véhicules neufs, cette mesure possède l'avantage d'agir sur le parc automobile en circulation. Ce sont en effet les véhicules les plus anciens, qui répondent aux normes européennes d'émissions de polluants Euro 1 et 2, qui ont l'impact le plus néfaste sur la qualité de l'air, en particulier les véhicules à motorisation diesel sans filtre à particules. Comme l'indique l'étude d'impact annexée au projet de loi de transition énergétique, « les véhicules 1* et 2* (groupe 1*, voitures essence ou diesel mises en circulation avant le 1er janvier 1997 ou groupe 2*, voitures diesel mises en circulation entre le 1er janvier 1997 et le 31 décembre 2000) représentent 19 % du parc de véhicules particuliers et contribuent à 23 % des émissions de PM 10 et à 20 % des émissions de NOx du parc de véhicules particuliers. Les véhicules 5* (mis en circulation après janvier 2011) représentant 10 % du parc de véhicules particuliers et contribuent quant à eux à 6 % des émissions de PM10 et à 13 % des émissions de NOx du parc de véhicules particuliers. »
L'article 48 de la loi de transition énergétique dispose que cette prime à la conversion peut être attribuée dans des conditions définies par voie réglementaire, en fonction de critères sociaux ou géographiques, l'un des objectifs étant d'aider les ménages les plus modestes à remplacer leur véhicule ancien, ceux-ci pouvant être pénalisés par une autre mesure contenue au même article 48 de la loi de transition énergétique : la mise en place de mesures de restriction de la circulation en cas de mauvaise qualité de l'air.
Cette prime à la conversion, initialement fixée à 200 euros par le décret n° 2014-1672 du 30 décembre 2014, a été augmentée par le décret n° 2015-361 du 30 mars 2015. Son barème est désormais le suivant :
Montant de la prime à la conversion Pour l'ensemble des ménages : - 3 700 euros pour l'acquisition ou la location longue durée d'un véhicule électrique, la somme du bonus et de la prime à la conversion atteignant ainsi 10 000 euros ; - 2 500 euros pour l'acquisition ou la location longue durée d'un véhicule hybride rechargeable, la somme du bonus et de la prime à la conversion atteignant ainsi 6 500 euros ; Pour les ménages non imposables au titre de l'impôt sur le revenu : - 500 euros pour l'acquisition ou la location longue durée d'un véhicule neuf respectant la norme euro 6 et émettant entre 61 et 110 g de CO 2 par kilomètre ; - 500 euros pour l'acquisition ou la location longue durée d'un véhicule d'occasion, qu'il soit électrique, hybride rechargeable ou respectant la norme euro 6 et émettant entre 61 et 110 g de CO 2 par kilomètre. |
Il est encore trop tôt pour dresser un bilan de ce dispositif, entré en vigueur au 1 er avril 2015, l'enregistrement des demandes de versement ayant été ouvert au mois de juillet seulement. On observe en outre un délai de plusieurs mois entre la date de commande du véhicule et celle de son immatriculation, qui permet l'enregistrement de la demande de versement. Il conviendra de dresser ce bilan lorsque davantage de données seront disponibles. Votre rapporteur considère néanmoins que ce dispositif, qui agit sur le parc le plus ancien et comporte des mesures à destination des personnes les plus fragiles, va dans le bon sens.
Le montant des dépenses au titre du bonus et de la prime à la conversion est estimé à 266 millions d'euros pour 2016, ainsi répartis :
- 236 millions d'euros pour le financement du bonus automobile ;
- 30 millions d'euros pour la prime à la conversion.
Ce montant s'élevait à 242 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2015, dont 214 millions pour le bonus et 28 millions pour la prime à la conversion.
Le Gouvernement envisage néanmoins de renforcer le dispositif de la prime à la conversion, en augmentant son montant à 1 000 euros et en élargissant son assiette à la mise au rebut de tous les véhicules diesel de plus de dix ans 7 ( * ) . Pour l'application de cette dernière mesure, il a déjà fait adopter à l'Assemblée nationale un amendement qui augmente de 30 millions d'euros les autorisations d'engagement et crédits de paiement pour la prime à la conversion 8 ( * ) , portant à 296 millions d'euros le montant du budget du compte d'affectation spéciale.
Votre rapporteur approuve cette démarche, qui constitue un signal supplémentaire donné en faveur de la transition énergétique dans les transports, en phase avec l'engagement du Gouvernement pour la réussite de la COP 21.
TRAVAUX EN COMMISSION
I. AUDITION DE M. ALAIN VIDALIES, SECRÉTAIRE D'ETAT CHARGÉ DES TRANSPORTS, DE LA MER ET DE LA PÊCHE.
Réunie le jeudi 12 novembre 2015, la commission a entendu M. Alain Vidalies, secrétaire d'Etat chargé des transports, de la mer et de la pêche, auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, et de l'énergie.
M. Hervé Maurey , président. - Monsieur le secrétaire d'État, nous sommes heureux que vous soyez venu répondre à un certain nombre de questions sur le budget de la mission Ecologie.
On observe en effet une diminution globale des crédits de cette mission, une baisse des autorisations de programme supérieure à 8 %, et une baisse des crédits de paiement de l'ordre de 1,9 %. Nous sommes certes dans une période d'efforts budgétaires, mais on a du mal à comprendre comment cet effort est conciliable avec les priorités que le Gouvernement affiche en matière de transition énergétique, de climat, de politique de l'eau, de croissance verte, de mobilité durable, de sécurisation des infrastructures, de qualité de l'air.
Comment fait-on toujours mieux avec toujours moins de crédits ? Ces priorités ne nécessiteraient-elles pas d'être mieux hiérarchisées ? Tout ceci ne manque-t-il pas d'un peu de cohérence ?
Notre commission est également très attachée à la question de la fiscalité écologique, à propos de laquelle on ne voit guère d'évolutions - c'est peu de le dire ! Tout au long de l'examen du projet de loi sur la transition énergétique, on a souligné l'absence d'une telle fiscalité, que l'on n'imagine évidemment pas punitive, bien au contraire ! On nous a répondu qu'on aborderait ce sujet au moment de la loi de finances ; or, on ne voit toujours rien venir sur ce volet. Sans doute pourrez-vous nous apporter des éléments sur ce point.
Monsieur le secrétaire d'État, vous avez souhaité que l'on vous interroge essentiellement sur le volet transport de la mission. Même si cela limite le champ des questions que nous aurons à vous poser, les sujets ne manquent pas. Nous entendions, il y a une semaine, le président d'Air France. Il y aura peut-être aussi des questions à ce sujet.
La question de la privatisation des aéroports - Toulouse, demain Nice et Lyon -, la question de l'écotaxe, les trains d'équilibre du territoire (TET), la situation de la SNCF, le prélèvement sur le dividende de la SNCF Mobilité qui n'est pas conforme à ce qui était prévu, le plan de relance autoroutier, le canal Seine-Nord et, bien sûr, la mobilité durable constituent autant de sujets sur lesquels vous serez amené à vous exprimer.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. - Il y a un an, j'avais présenté trois priorités de la politique des transports du Gouvernement : la sécurité et la qualité des infrastructures et des services, le rééquilibrage entre les modes de transport et le respect des règles économiques et sociales, notamment la lutte contre le dumping social.
Ces trois priorités demeureront les nôtres en 2016 et, avant de vous présenter les principales orientations des budgets qui sont soumis à votre examen, je veux revenir sur ces priorités.
Tout d'abord, le vieillissement de nos infrastructures ferroviaires et fluviales ainsi que des chaussées et des ouvrages d'art routiers demeure une problématique principale. J'y ai accordé la plus grande importance cette année. Cela s'est traduit notamment par deux actions.
Un comité de suivi de la sécurité ferroviaire a été instauré et s'est réuni au printemps et à l'automne, où a été notamment engagé un travail sur la mise oeuvre renforcée des recommandations du Bureau enquêtes accidents des transports terrestres (BEA-TT), en lien avec les acteurs concernés.
J'ai également demandé à SNCF Réseau d'assurer d'ici début 2016, vis-à-vis des usagers, une transparence complète sur les opérations de maintenance réalisées au quotidien sur le réseau.
S'agissant de l'entretien de la régénération des réseaux routier et fluvial, j'ai annoncé au printemps la mobilisation de 100 millions d'euros supplémentaires sur le budget de l'AFITF pour des travaux de maintenance et de régénération. Ces travaux, commencés cet été, sont réalisés pour la plupart par des PME des travaux publics.
La deuxième priorité concerne le rééquilibrage des modes de transport. Il est aujourd'hui toujours plus nécessaire d'optimiser l'utilisation de nos infrastructures et de mieux organiser la complémentarité entre les modes de transport. Il y a plusieurs chantiers en cours.
Une Conférence nationale sur la logistique s'est tenue en juillet dernier et a rassemblé près de 300 acteurs. Ses travaux ont été présidés par le député François-Michel Lambert, et ont permis d'impulser une politique mobilisatrice dans un secteur qui, je le rappelle, contribue à 10 % du PIB et emploie près de 1,8 million de personnes. À sa suite, une stratégie nationale, dénommée « France Logistique 2025 », est en cours de préparation.
Un soutien spécifique est apporté au mode fluvial à travers la modernisation de la flotte - un plan d'aide a été autorisé par la Commission européenne à hauteur de 22,5 millions d'euros - et à travers une expérimentation menée depuis septembre 2015 par les acteurs du port de Dunkerque pour mutualiser les coûts de manutention entre les modes ferroviaire, routier et fluvial.
Plus largement, les travaux de la conférence du fret fluvial, que j'ai réunie récemment, ont bien progressé. Un plan d'action en faveur de cette filière devrait être finalisé à la mi-2016 autour des deux axes structurant que sont la compétitivité, l'innovation et la sécurité, d'une part, le développement commercial du transport fluvial, d'autre part.
En troisième lieu, les acteurs du fret ferroviaire sont mobilisés deux fois par an depuis 2013 dans le cadre de la conférence périodique pour le fret ferroviaire, afin de construire et de suivre un programme d'actions concrètes et pragmatiques, et d'engager le fret ferroviaire dans un processus de reconquête effective de parts de marché vis-à-vis des autres modes de transport.
La troisième priorité s'attache au respect des règles économiques et sociales. Les conditions de travail, la sécurité des salariés, comme celle des usagers, les conditions de concurrence sont autant de sujets qui nécessitent notre plus grande attention pour assurer un fonctionnement de nos transports efficace et respectueux des enjeux économiques, sociaux et environnementaux.
À titre d'exemple, je voudrais souligner que dans le transport routier de marchandises, la France a renforcé son arsenal législatif en matière de lutte contre le dumping social par les lois du 10 juillet 2014 et du 6 août 2015 qui encadrent l'application de la directive européenne sur le détachement. Des actions judiciaires sont engagées contre les entreprises ne respectant pas ces règles.
Permettez-moi à présent de vous présenter les principales orientations des budgets pour l'année 2016. Ces budgets s'inscrivent dans la stratégie du Gouvernement et allient la maîtrise des dépenses publiques et les priorités que je viens de rappeler.
Le budget des « infrastructures et services de transport », en baisse de moins de 0,5 %, est maintenu à un niveau comparable à celui de 2015.
Les crédits d'entretien routier sont en baisse de 1 % à 324 millions d'euros, comme cela a été le cas en 2015 avec le programme exceptionnel de travaux que j'ai déjà mentionné.
Les dépenses de l'AFITF pourront consacrer en 2016 un effort plus important à la régénération routière en lien avec la contribution des sociétés concessionnaires d'autoroutes.
Les crédits de la subvention accordée à VNF, qui sont consacrés pour leur plus grande partie au paiement de la masse salariale de l'opérateur, sont en baisse modérée de 2,5 %. Le Gouvernement poursuivra en 2016 ses travaux visant à la consolidation des ressources parafiscales de VNF.
S'agissant de l'AFITF, le Gouvernement s'était engagé à assurer un niveau de dépenses opérationnelles de 1,9 milliard d'euros en 2015, 2016 et 2017. Ce niveau sera pratiquement atteint en 2015, de même qu'en 2016, avec un montant de dépenses opérationnelles prévisionnel de 1,855 milliard d'euros.
Les recettes de l'AFITF sont en 2016 notamment assurées par l'affectation d'une fraction de la TICPE sur le gazole. Un groupe de travail, rassemblant les professionnels du transport routier de marchandises et les chargeurs, s'est réuni entre octobre 2014 et juin 2015 et, à l'issue de ses travaux, le Gouvernement a décidé de maintenir la mesure adoptée en 2015 d'augmentation de 4 centimes de la TICPE pour les poids lourds.
Les recettes de l'AFITF seront également assurées en 2016 par une contribution de 100 millions d'euros des sept principales sociétés concessionnaires d'autoroutes, en application de l'accord conclu le 9 avril dernier entre l'État et ces dernières.
Au-delà de 2016, alors que certains engagements de l'AFITF viendront porter leurs effets, je souhaite vous indiquer que le Gouvernement assumera ses engagements.
S'agissant des infrastructures et services de transport, je voudrais mentionner plus particulièrement quatre chantiers ou projets.
À la suite de la remise, le 26 mai dernier, du rapport de la commission présidée par Philippe Duron, le Gouvernement a défini en juillet dernier une feuille de route concernant les TET.
Une mission a été confiée au préfet Philizot pour mener une concertation sur les évolutions à mettre en place concernant l'offre TET. Cette concertation ne pourra être utilement menée à bien qu'après la mise en place des exécutifs des nouvelles grandes régions.
Le Gouvernement s'est par ailleurs engagé en faveur du fait que le parc de matériel roulant des lignes structurantes de l'offre TET soit entièrement renouvelé d'ici 2025, pour un montant d'investissement d'environ 1,5 milliard d'euros. Je vous confirme qu'une décision sera prise d'ici la fin de l'année sur les modalités d'achat de ce nouveau matériel.
Concernant le canal Seine-Nord Europe, la société de projet devrait être opérationnelle dans le courant du premier semestre 2016. Le projet d'ordonnance créant la société de projet est actuellement à la consultation des collectivités territoriales. L'enquête publique préalable à la DUP des modifications du tracé du canal a lieu du 7 octobre au 20 novembre de cette année. L'horizon d'obtention de la DUP est fixé début 2017, pour un début des travaux la même année, et une mise en service en 2023.
Une convention concrétisant l'engagement financier de l'Europe dans le projet de liaison Seine-Escaut, à hauteur de 980 millions d'euros, devrait être signée par la France et les partenaires européens du projet.
Le projet Lyon-Turin est aujourd'hui déclaré d'utilité publique à la fois en France et en Italie. TELT, le nouveau promoteur chargé de conduire les travaux, a été mis en place. Le dossier de demande de crédits européens a obtenu une réponse positive, 814 millions d'euros ont été attribués par l'Europe pour couvrir les investissements à réaliser d'ici l'année 2019.
Par ailleurs, le Gouvernement a signé avec l'Italie, en février 2015, un nouvel accord pour permettre le lancement des travaux définitifs. La perspective d'engagement de ces travaux se situe en 2017.
S'agissant des transports urbains, le Gouvernement a tenu ses engagements en faveur du développement des projets de mobilité durable. Les subventions du troisième appel à projets seront délivrées par l'AFITF après conventionnement des opérations avec les maîtres d'ouvrage.
Concernant l'ouverture du marché du transport par autocar, l'offre de mobilité a connu un développement significatif en un mois seulement. Le décret encadrant l'ouverture du marché a été publié le 14 octobre dernier pour s'assurer que les nouvelles lignes d'autocars ne portent pas atteinte à l'équilibre des services publics.
L'enjeu est maintenant d'accompagner la croissance du secteur en développant les arrêts et gares routières pour assurer un bon maillage du territoire et un traitement optimal de l'intermodalité. Le travail est en cours.
Enfin, dans le cadre du plan d'actions pour les mobilités actives de 2014, plus de 80 % des vingt-cinq mesures s'appliquent d'ores et déjà ou sont engagées.
Dans le domaine de la mer et de la pêche, les crédits du programme « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture » sont maintenus, avec une baisse de 1 %, à 183,4 millions d'euros, à un niveau préservant les moyens du programme.
Un amendement du Gouvernement visant à attribuer à la SNSM une subvention exceptionnelle de 1,4 million d'euros en 2016 a été adopté jeudi dernier par l'Assemblée nationale.
Le programme porte de nombreuses missions régaliennes de sécurité maritime et de mise en oeuvre de la politique commune des pêches. Le programme conduira, pour ce qui concerne la sécurité et la signalisation maritimes, à des actions ciblées pour réaliser des investissements porteurs d'économies pour le futur :
- la modernisation des systèmes d'information des CROSS ;
- le renouvellement d'un baliseur pour l'armement des phares permettant d'ici deux ans le retrait du service de deux anciens baliseurs dont l'exploitation est devenue difficile ;
- la modernisation technologique dans le domaine de la surveillance des pêches dans la zone exclusive des terres australes françaises.
Les dépenses en faveur d'un bon fonctionnement de l'enseignement maritime secondaire et supérieur sont maintenues constantes.
Les exonérations de charges, qui améliorent la compétitivité de la flotte soumise à concurrence internationale, continueront à être prises en charge par le programme.
En matière de sauvetage en mer, comme je l'ai indiqué, l'État a pris ses responsabilités en contribuant à assurer le financement de la SNSM, acteur majeur du sauvetage en mer : outre la subvention annuelle de 2,1 millions d'euros, qui est maintenue, 1,4 million d'euros seront dégagés en 2016 pour le financement des investissements et, à terme, 5 % de la taxe éolienne devront être affectés à la SNSM.
L'économie maritime occupe une place essentielle dans l'activité de la France : 310 000 emplois directs et un chiffre d'affaires de 69 milliards d'euros.
Le Gouvernement a pris des engagements importants lors du dernier comité interministériel à la mer, réuni le 22 octobre à Boulogne-sur-Mer sous la présidence du Premier ministre.
Je retiendrai parmi ces annonces le renforcement de la compétitivité des grands ports maritimes français et la mise en place de mesures afin d'assurer le renouvellement de la flotte de commerce pour s'adapter aux conditions du marché mondial.
Pour l'accompagnement des secteurs de la pêche et de l'aquaculture dans la mise en oeuvre de la nouvelle politique commune des pêches, le programme mobilisera les moyens budgétaires nécessaires pour appeler le nouveau fonds européen, le FEAMP, dont la mise en oeuvre effective commencera en 2016. Le commissaire européen m'a confirmé la semaine dernière que le programme opérationnel de la France serait bien validé officiellement d'ici la fin de l'année.
Enfin, le Comité interministériel de la mer (CIMer) a permis de mettre en avant la nécessité de valoriser le potentiel considérable des espaces maritimes ultramarins, en assurant le renouvellement les moyens maritimes permettant leur surveillance et en soutenant la mise en place d'une stratégie spécifique pour nos ports d'outre-mer.
Dans le domaine aérien, le budget annexe contrôle et exploitation aériens (BACEA) pour l'année 2016 permet d'atteindre les objectifs fixés tant en termes d'investissement que de désendettement.
Les ressources du BACEA sont en hausse de 1 % par rapport à 2015 et s'établissent à 2 milliards d'euros. Ce niveau de ressources est notamment atteint par une légère augmentation des redevances, qui reste néanmoins la moins chère des pays limitrophes.
La DGAC poursuit par ailleurs sa politique de réduction des coûts structurels au moyen d'une redéfinition de l'implantation géographique de ses services et d'une optimisation de leurs dépenses de fonctionnement. Ce niveau de ressources et de performance permettra en 2016 de réaliser 252 millions d'euros de dépenses d'investissement, montant qui assure la poursuite de l'engagement de la DGAC dans la construction du ciel unique européen.
Le budget 2016 de l'aviation civile permet par ailleurs d'accélérer le désendettement de la DGAC et de l'État. Le désendettement net du BACEA s'établira à 107 millions d'euros en 2016, après 57 millions d'euros en 2015, permettant d'abaisser le stock de dette à 1,117 milliard d'euros
M. Hervé Maurey , président. - La parole est aux rapporteurs.
M. Louis Nègre , rapporteur pour avis « Transports ferroviaires ». - Monsieur le secrétaire d'État, j'ai écouté avec attention ce que vous avez dit. Vos objectifs sont d'améliorer la qualité ferroviaire, de rééquilibrer les modes de transports, d'améliorer les conditions matérielles, sociales et économiques. On ne peut y être que favorable.
L'autre bonne nouvelle concerne le renouvellement du matériel des TET pour 1,5 milliard d'euros ; vous avez précisé que les modalités d'achat seraient fixées dès la fin de l'année. C'est un problème extrêmement préoccupant pour l'industrie française. Je souhaiterais donc en savoir plus sur les discussions actuellement menées concernant l'achat sur étagère ou par appel d'offres.
Vous avez dit maîtriser les dépenses. C'est incontestable ! Vous avez d'ailleurs vous-même reconnu la baisse des crédits dans le secteur des transports, des infrastructures routières, et des voies navigables. En outre, 400 millions d'euros manquent à l'appel pour l'AFITF, qui ne bénéficiera plus du montant total de la TICPE, tel que cela avait été prévu l'an dernier !
Par ailleurs, 26 millions d'euros sont prévus dans les crédits consacrés au soutien, à la régulation, à la sécurité, et aux transports terrestres pour compenser les tarifications sociales, et 15 millions d'euros seulement sont dédiés au soutien au transport combiné ferroviaire, soit 1,4 million de moins que l'année dernière.
Le budget des transports fluviaux est en baisse de 4 % et 7 millions d'euros sont consacrés au transport combiné fluvial, soit un million de moins que l'an passé.
Je ne reviendrai pas sur l'écotaxe, que vous avez supprimée, alors qu'elle permettrait d'alimenter le financement de l'AFITF, mais rappellerai plutôt qu'il y a quasiment un an jour pour jour, le 29 octobre 2014, devant notre commission, vous affirmiez que les montants de l'indemnité due à Écomouv' ne seraient pas ponctionnés sur le budget de l'AFITF. Je vous cite : « Les recettes consacrées au financement des infrastructures sont non seulement fléchées, mais sécurisés pour l'année 2015. Quoi qu'il arrive, ce n'est pas sur ce budget qu'on viendra ponctionner les sommes nécessaires au paiement d'une indemnité ». Vous avez été malheureusement démenti par les faits - et je le regrette profondément !
Vous indiquez que le plan de relance autoroutier représente 3,27 milliards d'euros. On a confié aux sociétés historiques la réalisation de nouveaux investissements en contrepartie d'un allongement de la durée de concession. Ce projet sera-t-il tenu ?
Sur le compte d'affectation spéciale des services nationaux de transport conventionné de voyageurs, vous avez dit que l'on renvoyait ce sujet à la concertation. Philippe Duron, président de la commission sur l'avenir des TET, a lui-même proposé une ouverture à la concurrence ! J'aurais souhaité connaître votre position sur ce point, alors que la Commission européenne renvoie l'ouverture de celle-ci à 2026 ! Nous croyons quant à nous qu'il s'agit du seul moyen de sauver la SNCF et de la faire évoluer positivement.
Par ailleurs, quand dégagerez-vous le milliard et demi d'euros en faveur du matériel roulant ? Notre plan de charge industriel s'effondre. 2017 et 2018 seront des années extrêmement difficiles à passer. Il ne faut pas attendre 2025 pour agir : ce sera alors trop tard.
Vous avez augmenté de cinq ETP les moyens de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), ce qui constitue une bonne nouvelle. Toutefois, l'Inspection générale des finances, généralement très peu généreuse, avait prévu que, compte tenu de l'augmentation des compétences de l'Autorité, il aurait fallu en prévoir au minimum quinze. Que va-t-il se passer ? Arrivera-t-on à faire face à la demande ? En quoi l'Arafer sera-t-elle crédible si elle n'a pas les moyens de sa politique ?
La politique du Gouvernement m'échappe. D'un côté, vous nous refusez, le 4 août 2014, l'ouverture à la concurrence du ferroviaire et, quelques mois après, vous décidez d'ouvrir celle-ci à l'autocar, à la surprise générale. Où est la cohérence ?
Je reviens sur un sujet qui m'est cher, celui du traitement de la dette. Vos objectifs sont fort louables, mais on ne traite à aucun moment de la dette, alors qu'on est dans le projet de loi de finances et qu'on aurait pu penser qu'il y avait quelque chose de positif à faire dans ce domaine. Cette dette plombe la SNCF, qu'il s'agisse de la partie mobilité ou du réseau. On remet donc la poussière sous le tapis, et on n'en parle pas !
Je regrette cette absence de vision à moyen et long termes, qui ne permet pas à l'industrie française - la troisième du monde - d'avoir un plan de charge lissé sur les cinq à dix ans à venir. C'est une industrie lourde : vous ne pouvez pas lui faire faire du yoyo !
Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à l'adoption des crédits du PLF sur les transports.
M. Jean-Yves Roux , rapporteur pour avis « Transports routiers ». - Je suis bien sûr très favorable à ce projet de budget - vous vous en doutez ! S'agissant du programme 203, les crédits de l'AFITF sont stables et, comme vous l'avez indiqué, monsieur le secrétaire d'État, les dépenses opérationnelles également, conformément aux engagements du Gouvernement. On peut donc être satisfait.
Quant aux crédits en faveur du transport routier, ceux-ci sont quasiment identiques à ceux de l'année dernière. Cette augmentation est liée à la prise en compte du plan de relance autoroutier, qui fournit 100 millions d'euros de recettes à l'AFITF, et qui permettra de réaliser des travaux, mais aussi de développer l'emploi dans les infrastructures routières. C'est un élément important, car on se bat tous aujourd'hui pour développer l'emploi. Cet engagement témoigne de l'action du Gouvernement pour sortir de la crise et améliorer l'emploi.
Concernant la mise en oeuvre de la libéralisation du transport par autocar, quel est le nombre de passagers transportés un mois après la mise en place de la loi, et quels en sont surtout les effets sur le transport ferroviaire ?
M. Charles Revet , rapporteur pour avis « Transports maritimes ». - Monsieur le secrétaire d'État, je ne me prononcerai pas sur ce budget, réservant mon avis pour la commission du développement durable, la semaine prochaine.
Vous avez affirmé que le Gouvernement prendrait des mesures pour renforcer la compétitivité des grands ports maritimes. Quelles sont-elles ? Ce sujet me paraît important, étant rapporteur des sujets touchant aux ports depuis quelques années.
Vous avez en second lieu évoqué le canal Seine-Nord et l'avancée de ce dossier. Je suis élu de la région havraise. Les trois grands ports qui se complètent, le Havre, Rouen et Paris, vont dans le même sens. Or, le canal Seine-Nord donne quelques inquiétudes aux habitants de ma région, qui craignent fort que les trafics ne viennent pas chez nous mais partent vers le nord, la situation actuelle étant peu reluisante.
J'ai souvent dit que la France disposait des ports maritimes les mieux placés de l'Europe du nord et du sud. Cependant, Anvers, à lui seul, fait plus que tous les ports Français réunis. Anvers est finalement le premier port de France et de Paris ! Cela démontre bien que nous ne savons pas prendre les dispositions nécessaires. Que je sache, la France dispose de la plus grande zone économique maritime, juste derrière les États-Unis. Nous avons donc beaucoup d'atouts.
Beaucoup d'entreprises utilisent le port d'Anvers pour des questions de récupération de TVA. Elles gagnent ainsi six mois. Où en est-on à ce sujet ? Va-t-il y avoir des avancées ?
J'en viens plus spécifiquement au port du Havre, dont je suis voisin. Un centre multimodal y a été construit, mais il ne fonctionne pas jusqu'à preuve du contraire - ou très peu - tout simplement parce que son utilisation augmente les coûts du fait de la manutention, et ceci fait perdre de la compétitivité aux entreprises, notamment fluviales.
Par ailleurs, pourquoi n'avance-t-on pas plus vite en matière d'électrification de la ligne Serqueux-Gisors ? Cela ne représente pourtant pas des sommes importantes et pourrait être un atout fabuleux pour la desserte franco-française, mais aussi pour l'Europe du centre.
Lorsque j'ai rédigé mon rapport sur les grands ports maritimes, j'ai indiqué qu'il était possible de réaliser une « chatière » pour avoir un lien direct entre la Seine et le grand port maritime du Havre. Aujourd'hui, il faut passer par l'estuaire et, même si certains bateaux peuvent le faire, on ne gagne que 50 % à 60 % de temps. Va-t-on avancer dans ce domaine ? La chatière constituerait une économie importante pour le trafic fluvial. On prétend que cela va coûter 150 millions d'euros, alors qu'elle a été chiffrée à 50 millions d'euros. Cela me paraît surprenant. Peut-être faudrait-il revoir les modalités d'attribution. L'État a la possibilité, du point de vue juridique, de recourir à un appel d'offres auprès de grandes entreprises. Cela permettrait des économies de temps et d'argent. Pourquoi n'avance-t-on pas plus vite ?
M. Hervé Maurey , président. - Monsieur le secrétaire d'État, vous avez la parole.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État - S'agissant de l'achat des matériels TET annoncé par le Gouvernement pour 1,5 milliard d'euros, et de l'option que nous devons prendre, soit par achat sur étagère, dans le cadre du marché passé par les régions - qui permettrait d'aller très vite et d'avoir une commande industriellement opérationnelle et plus intéressante - soit par appel d'offres, la problématique est juridique et sérieuse.
L'achat sur étagère est-il aujourd'hui possible ou juridiquement hasardeux ? Vous en connaissez les règles. Lorsqu'on veut faire un achat sur étagère, il convient de déterminer s'il s'agit ou non de modifications substantielles du marché initial pouvant entraîner une réaction des concurrents évincés à l'origine ou potentiels.
Il semble évident que des trains conçus pour aller à 160 kilomètres à l'heure peuvent, en théorie, monter à 200 kilomètres à l'heure, mais du point de vue technique, ce n'est pas si simple. Nous sommes donc face à une véritable difficulté. Les différents ministères sont en train de comparer leurs expertises juridiques. Nous ferons connaître notre décision avant la fin de l'année, mais je ne prendrai aucun risque. Nous rendrons le débat public le moment venu, assorti des analyses juridiques.
S'agissant de l'AFITF, je suis en désaccord avec Louis Nègre à propos de son interprétation du compte rendu de la séance de l'année dernière. Lui-même a d'ailleurs été obligé d'admettre, en toute honnêteté, lors de votre dernière réunion de commission - dont j'ai lu attentivement le compte rendu - que malgré la réduction, l'AFITF devrait retrouver un budget d'intervention de l'ordre de 1,9 milliard d'euros, ainsi que je m'y étais engagé depuis le début ! Personne ne peut dire ici que l'indemnité payée via le budget de l'AFITF a réduit les engagements. On pouvait croire, au début de l'intervention de Louis Nègre, que les 520 millions payés pour Écomouv' avaient amputé les 1,9 milliards d'euros sur lesquels nous nous étions engagés. Louis Nègre a lui-même reconnu que c'était faux. C'est le budget de l'AFITF qui devait le supporter, mais les engagements que nous avons pris ont été tenus, et ils le seront également cette année.
Ceci n'enlève rien à la question principale, sur laquelle nous sommes d'accord, qui demeure celle de la trajectoire. Je veux être clair : nous pouvons assurer nos engagements pour 2016 avec la somme de 1,9 milliard d'euros. Nous retomberons ensuite sur les projections de la commission Mobilité 21, ainsi que sur les engagements pris dans le cadre des contrats de plan État-Région (CPER), et sur les grands projets que j'ai évoqués par ailleurs, que l'État devra payer.
Même si la fourchette sera finalisée en 2016, il faut évidemment que les moyens de l'AFITF, au-delà des 1,9 milliard d'euros qui sont suffisants pour 2016, soient probablement augmentés de 500 à 700 millions d'euros par an à partir de 2017 pour tenir nos engagements. L'État les tiendra : c'est une réalité car si, en 2017, nous n'avons pas ces sommes supplémentaires dans le budget de l'AFITF, il faudra remettre les programmes en cause. Nous sommes parfaitement d'accord avec le diagnostic.
La trajectoire est tenue et nous respecterons nos engagements. Comment ? Vous êtes des spécialistes : lorsqu'on considère les recettes de l'AFITF et ce qui lui est véritablement affecté, notamment à partir d'une fiscalité dédiée, il n'est point besoin de beaucoup d'imagination pour trouver les recettes - sauf dans une discussion serrée avec le budget mais, dès lors que les centimes additionnels représentent 1,1 milliard d'euros et qu'on retrouve 700 millions d'euros dans le budget de l'AFITF, il existe une base de discussion.
Pour ce qui est des autoroutes, nous avons passé un contrat avec les autorités concessionnaires pour plus de 3 milliards d'euros de travaux. Les engagements seront-ils tenus ? La question s'adresse plus aux sociétés autoroutières qu'à l'État. Pour l'instant, oui.
Concernant les moyens de l'Arafer, il ne s'agit pas, selon moi, d'une discussion majeure et irréversible. Dans le projet de budget, nous avons porté les plafonds d'emploi de 63 à 68 ETP. Certains, dont le président de l'Arafer, estiment qu'il faut au moins 70 à 75 ETP. Aujourd'hui, ils sont cinquante. Il nous a semblé que permettre le recrutement de dix-huit personnes permettait d'avoir une certaine marge de manoeuvre. Le Gouvernement n'a aucunement l'intention de limiter les moyens de l'Arafer ; s'il faut donner des moyens supplémentaires, nous le ferons, mais il nous semble que ce que nous avons proposé est suffisant.
M. Revet a posé des questions importantes. Je suppose que vous avez eu connaissance du compte rendu du CIMer. Je ne vais pas reprendre ici l'ensemble des dispositions. Le Gouvernement a pris des décisions importantes pour le transport maritime, notamment sur le champ industriel. On appelle ce système la COFACE inversée : l'État s'engage à donner la même garantie que ce qu'un constructeur obtiendrait auprès d'un autre pays. Quatre paquebots du Ponant vont être mis en chantier : cette décision était très attendue par la profession.
Vous avez évoqué la question de la TVA. Nous avons fait des annonces en matière d'auto-liquidation. Celle-ci a fait l'objet d'une expérimentation positive, et le Premier ministre en a annoncé la généralisation, ainsi que je l'ai dit lors des assises de la mer, à Marseille, la semaine passée.
S'agissant de la problématique du Havre et de la plate-forme multimodale, vous avez raison de dire qu'on ne peut envisager le canal si on ne parle pas de Serqueux-Gisors. Je confirme que ceci a été pour nous une priorité que nous avons inscrite dans le contrat de plan. L'enquête publique sera diligentée à partir du début de l'année prochaine. C'est une question de semaines. Les travaux seront engagés dans le temps prévu.
Reconnaissez avec moi que le renversement d'appréciation des grands élus locaux a été assez subit. Il y a quelques années, certains élus du Havre soutenaient ce projet, pensant qu'il était indispensable. Ils avaient raison mais on a assisté, au moment où on a annoncé que cela allait se faire, à une remise en cause. Ce n'est pas une bonne approche. Certes, il faut avoir des exigences. Serqueux-Gisors en est une, mais c'est un grand projet pour l'ensemble du bassin de la Seine.
Vous avez évoqué le centre multimodal. Je voudrais vous faire part de mon extrême préoccupation à ce sujet. Il s'agit de la mise en place d'un transit de la mer vers le fluvial et le ferroviaire, construit à travers un montage juridique assez particulier, avec une société propriétaire des installations, dans laquelle le grand port du Havre est actionnaire à 49 %, mais qui garantit les emprunts à hauteur de 80 %, l'actionnaire majoritaire étant une filiale du Crédit agricole, qui a elle-même porté le dossier. On est là sur des investissements essentiellement publics de l'ordre de 140 millions d'euros à 150 millions d'euros.
Une société de gestion a ensuite été mise en oeuvre, mais le démarrage n'a pas eu lieu une fois les travaux finis. La société de gestion a déposé le bilan.
Heureusement, certains des actionnaires dans la société de gestion sont des actionnaires de référence. Cette affaire me préoccupe beaucoup. J'ai rencontré le PDG de CGM et les responsables de la SNCF, en leur disant que c'était maintenant à eux, acteurs principaux, en liaison avec le port, d'essayer de trouver une solution. Un montage a été fait : il faut l'assumer.
Nous ne sommes pas aujourd'hui dans l'alternative de la chatière : nous cherchons à faire fonctionner ce qui a été financé par des fonds publics. Je crois la chose possible. Cela va demander un effort de chacun. Nous y travaillons et je suis optimiste, dans la mesure où les partenaires que j'ai sensibilisés à cette question sont à la recherche d'une solution.
Enfin, M. Roux, au mois d'octobre, depuis l'ouverture des lignes, 250 000 passagers ont fréquenté les autocars libéralisés ; soixante-dix villes sont concernées.
Le dispositif pour prémunir cette initiative des conséquences éventuellement fâcheuses sur le transport ferroviaire est dans la loi. À ce stade, il serait présomptueux de dire qu'on a le recul suffisant pour savoir si les précautions prises par la loi et l'intervention de l'Arafer et des collectivités territoriales fonctionnent. Je ne veux pas tirer d'enseignements définitifs de façon prématurée.
J'ai présenté en juillet dernier la feuille de route relative aux TET. Vous conviendrez que nous sommes dans une situation quelque peu singulière du point vue institutionnel, du fait des élections régionales et du redécoupage des régions. Il m'a semblé démocratiquement difficile de tirer des enseignements des rencontres réalisées par le préfet Philizot, sans que celui-ci n'ait fait un tour de table avec les nouveaux exécutifs.
D'autant que, pour un certain nombre de lignes, la configuration est différente, certaines lignes de TET qui couvrent plusieurs régions devant, demain, se trouver à l'intérieur d'une seule région. La question de la complémentarité entre ces lignes TET et les lignes TER, qui peut arriver à un partage des responsabilités ou des initiatives entre les régions, mérite d'être vérifiée avant de prendre des décisions.
Dans tous les cas, je n'attendrai pas la fin de l'année pour prendre des décisions. Le calendrier que le Gouvernement a en tête, c'est la mise en place des exécutifs, afin de pouvoir annoncer, fin février, les décisions qui viendront à la suite du rapport Duron et de la feuille de route.
M. Hervé Maurey , président. - La parole est aux commissaires.
M. Gérard Cornu . - Monsieur le secrétaire d'État, Ségolène Royal s'était engagée à ce que les installations liées à l'écotaxe soient réutilisées à d'autres fins. Où en est-on ?
M. Alain Fouché . - Monsieur le secrétaire d'État, la loi Duflot a obligé la SNCF à vendre des terrains à des prix relativement bas aux collectivités pour leur permettre de construire des logements HLM.
Or, la SNCF, faisant fi d'une bonne gestion, a préféré abandonner ou raser certaines gares plutôt que les vendre.
Quel pouvoir avez-vous dans ce domaine ? Aujourd'hui encore, des collectivités veulent acheter des terrains à la SNCF, qui leur en propose des prix exorbitants. Cela représente une perte d'argent pour la SNCF.
Où en est-on de la ligne Poitiers-Limoges, très chère au Président de la République ?
Enfin, la Cour des comptes, tous les deux ou trois ans, rédige un rapport sur le coût exorbitant des aiguilleurs du ciel. Si les collectivités suivent les recommandations des chambres régionales des comptes, l'État ne suit pas quant à lui celles de la Cour des comptes. Comment faire pour que ce corps fonctionne à des coûts moins élevés, tout en restant aussi efficace ?
M. Michel Vaspart . - Monsieur le secrétaire d'État, vous avez parlé d'opacité de SNCF Réseau, que vous appelez à plus de transparence. C'est un voeu que nous pouvons partager, car il est excessivement compliqué d'avoir des informations fiables.
Vous avez changé les clefs de répartition des financements des rénovations des lignes secondaires en appelant les collectivités locales et territoriales à davantage de financement lorsqu'il faut rénover les lignes.
Cela pose un certain nombre de difficultés, car trouver 20 % de financement auprès des collectivités locales et territoriales n'est pas aisé, alors qu'il s'agit d'un réseau indispensable pour l'aménagement du territoire.
Je ne veux pas parler uniquement du barreau Nord Bretagne, mais nous avons un sérieux problème dans cette région.
Vous avez évoqué la mise en place des régions. La nôtre n'a pas bougé dans ses limites ; cependant, certains réseaux ferroviaires sont à cheval sur deux départements, et si quelques départements acceptent de participer à la rénovation de la ligne, ce n'est pas le cas de tous. Quel pouvoir l'État peut-il avoir en matière d'aménagement du territoire s'agissant de la rénovation de ces lignes ?
Vous avez, en outre, annoncé une extension des lignes LGV, notamment dans le sud-ouest. Cela ne se fera-t-il pas au détriment de la rénovation des lignes secondaires, indispensables à l'aménagement du territoire ?
M. Jean-Jacques Filleul . - Je me félicite de la qualité de votre intervention et des réponses que vous avez apportées aux rapporteurs. On est là dans un vrai dialogue entre un secrétaire d'État et des parlementaires.
Les crédits du programme 203 sont stabilisés, ce qui apparaît positif.
Vous vous êtes engagés sur la feuille de route relative au rapport TET, auquel j'ai participé, en particulier à propos de la somme de 1,5 milliard d'euros consacrée au renouvellement des matériels. Cette somme pourrait venir abonder le programme d'Alstom, à moins qu'il n'y ait appel d'offres. Les inquiétudes à ce sujet se dissipent toutefois, le PDG venant d'annoncer qu'Alstom en avait pour cinq années de travail et que l'entreprise sortait renforcée de l'épreuve qu'elle a vécue. Pouvez-vous nous le garantir ?
Je me félicite également de l'engagement du Gouvernement dans la régénération des lignes d'Île-de-France, qui en avaient vraiment besoin.
Le Premier ministre a confirmé la modification des seuils du versement de transport, qui devrait être complètement compensée. Pouvez-vous en attester ?
Il faudrait également que les petites entreprises de travaux publics puissent participer au plan de relance autoroutier au moins à 55 % des travaux, ainsi que le prévoit la convention.
Par ailleurs, l'autoroute ferroviaire Atlantique est semble-t-il relancée. Pouvez-vous le confirmer ?
Je souhaite enfin, s'agissant des deux lignes LGV Sud-Ouest, que la mobilisation financière soit différente de la ligne Sud Europe Atlantique actuelle, qui est une véritable catastrophe.
M. Jean Bizet . - Je voudrais évoquer le transport aérien, le contrat de régulation économique (CRE), ainsi que le niveau élevé des taxes aéroportuaires pour le pavillon national.
On sait que l'État participe dans ce domaine à des hauteurs différentes, tant dans ADP que dans Air France, mais je ne vois pas où se situe la stratégie de l'État en matière de transport aérien. J'invite donc le Gouvernement à ne pas rester dans l'inaction.
J'ai déposé un certain nombre d'amendements l'an passé à ce sujet, et j'ai fait de même cette année. Ils sont à chaque fois refusés. J'aimerais donc comprendre.
M. Rémy Pointereau . - Monsieur le secrétaire d'État, vous avez évoqué le rapport Duron, qui préconisait un coup d'arrêt des lignes LGV au moins jusqu'en 2030 - dont Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax - pour tout miser sur le renouvellement des voies existantes et la maintenance du matériel roulant. Qu'en est-il exactement ?
Mon collègue ayant évoqué la ligne Poitiers-Limoges, j'évoquerai à mon tour la ligne Paris-Orléans-Clermont-Ferrand-Lyon (POCL). Où en sont ces deux dossiers ?
Vous avez rappelé que la mise en place des investissements relatifs aux TET serait assurée par l'exécutif des nouvelles grandes régions. Ne pensez-vous pas que ces investissements risquent de connaître un certain retard dans leur mise en place, compte tenu du fait qu'il va falloir revoir tout l'organigramme et la direction de ces régions ?
Pouvez-vous nous dire où en sont les discussions avec les sociétés d'autoroute au sujet de l'éventuelle renégociation de la gestion de celles-ci, et ce qu'il en est de la contribution éventuelle complémentaire qui pourrait leur être demandée ? Un rapport avait été réalisé il y a quelque moi à ce sujet. Or, tout le monde s'interroge sur le devenir de cette gestion. L'État doit-il reprendre la main, allonger les délais de gestion ou les raccourcir ?
Enfin, pouvez-vous nous apporter quelques compléments d'information sur la ligne Lyon-Turin ?
M. Hervé Poher . - Il existe une grande quantité de camions sur l'autoroute A1. C'est pourquoi nous avons considéré l'idée des autoroutes ferroviaires d'un oeil bienveillant. La semaine dernière, la ville de Calais a inauguré le premier terminal d'autoroute ferroviaire d'un genre nouveau.
Deux autoroutes ferroviaires qui pouvaient intéresser le nord de la France étaient prévues à l'origine. La première allait de Calais jusqu'au Boulou, à côté de Perpignan. Le trafic était estimé entre 30 000 et 50 000 remorques. Cela représentait une économie de 50 000 tonnes de CO 2 minimum, et permettait de capter le flux du transport britannique.
Une deuxième autoroute appelée « autoroute ferroviaire Atlantique », allant de Dourges, entre Lille et Lens, jusqu'à Tarnos, à côté de Bayonne, par laquelle transitent environ 85 000 camions, permettait de capter les flux d'Europe du Nord.
En mars dernier, vous avez annoncé que le projet Tarnos était arrêté. Il y a quinze jours, vous avez annoncé qu'il était remis en selle. Ce qui intéresse la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, c'est de savoir si ce projet est confirmé, et si le Gouvernement imagine d'autres axes d'autoroutes ferroviaires, essentiels en matière de développement durable et de transition énergétique.
M. Michel Raison . - M. le secrétaire d'État, je reviendrai à mon tour sur le rapport Duron que vous semblez vouloir exécuter à la lettre, ce qui peut d'ailleurs inquiéter, car cela voudrait dire que l'autorité organisatrice qu'est l'État considère que, lorsqu'une ligne n'est pas satisfaisante, la seule solution est de s'en débarrasser.
Pour ce faire, vous avez dit attendre des élections régionales. Cela peut paraître normal mais allez-vous « fourguer » ces lignes aux régions en leur donnant de quoi les faires vivre ? Derrière tout cela, il faut respecter la Constitution : toute délégation de compétences et de services transférée par l'État aux différentes collectivités doit être accompagnée de son financement.
Un TER, ce n'est pas un TET. Ce n'est pas le même service. On en perd donc un de toute façon.
D'autre part, si on veut aider les régions, en dehors du financement qui pourrait sembler nécessaire, il faut traiter de la libéralisation de la SNCF. On ne peut continuer ainsi ! On a entendu le président de La Poste il y a quelques jours dans cette même salle. La Poste a aujourd'hui des positions fortes dans un certain nombre de pays, est première en Pologne et dans d'autres pays, deuxième en Allemagne. La SNCF, qui est une entreprise dont nous sommes tous fiers, qui bénéficie d'un savoir-faire inégalé par rapport à d'autres pays sur le plan technologique, voit ce savoir-faire s'éroder largement en matière de rentabilité. Le seul moyen de sauver la SNCF, c'est de la stimuler. Si on laisse le monopole perdurer, elle finira par mourir, d'autant qu'on l'y aide en lui adjoignant des bus, et en supprimant ses lignes. Il faut donc absolument réagir, monsieur le secrétaire d'État !
Mme Nelly Tocqueville . - Je reviens sur le sujet du canal Seine Nord, étant moi aussi élue de la Seine-Maritime.
Ce projet, qui fait l'objet de beaucoup d'interventions, a soulevé des inquiétudes légitimes, au Havre en particulier. Une réunion a réuni à ce sujet un ensemble d'acteurs et d'élus à la préfecture, il y a quelque temps.
On sait combien ce canal est indispensable pour le raccordement direct des grands ports du Nord avec l'Île-de-France, combien il est essentiel au bassin de la Seine et combien il serait contre-productif de refuser cet aménagement.
Je me félicite donc de la réponse que vous avez apportée à propos du tronçon Serqueux-Gisors, indissociable de ce projet. Cependant, pouvez-vous nous préciser comment s'exprime cette priorité dans l'enquête publique en termes d'échéance de réalisation des travaux de ce tronçon ?
D'autre part, pouvez-vous nous préciser comment s'expriment les garanties de compétitivité dans le temps de la plate-forme multimodale et de ses aménagements, sans oublier les ports de Rouen et de Cherbourg ?
Mme Annick Billon . - Monsieur le secrétaire d'État, beaucoup sont déjà intervenus au sujet du rapport Duron. Ayant participé à ces travaux avec Jean-Jacques Filleul, je me devais d'intervenir pour le sud Vendée. Je pense que Didier Mandelli soutient également cette remarque.
Certaines décisions ont été prises pour éviter la suppression de l'arrêt de Luçon, avec des investissements sur les infrastructures et le matériel. Des inquiétudes persistent cependant, ces travaux risquant d'engendrer des temps de trajet extrêmement longs et de déplacer une clientèle existante vers d'autres modes de transport.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. - M. Cornu est intervenu à propos du sort des portiques Ecomouv'. Nous discutons avec les douanes et la police pour étudier les conditions dans lesquelles ceux-ci sont intéressés par leur utilisation, avec un aspect juridique quelque peu compliqué par des questions autour des droits des logiciels de Thalès.
Par ailleurs, nous avons lancé un marché public pour démonter et stocker les équipements déployés pour la perception de l'écotaxe. Ce marché public devrait être mis en oeuvre dans les prochaines semaines pour protéger le matériel actuellement installé, dont la réutilisation dépendra de l'aboutissement des discussions en cours.
M. Fouché, concernant les ventes de terrain de la SNCF aux collectivités territoriales, il est vrai que des décotes sont normalement prévues dans les périmètres identifiés par les préfets. Je partage votre préoccupation, le Premier ministre également. Le Président de la République a demandé que le comité de suivi se réunisse courant 2015. C'est chose faite et nous avons demandé à la SNCF d'accélérer la libération du foncier dans l'attente d'un accord avec les opérateurs locaux. La réunion destinée à faire le point a eu lieu le 24 juin dernier à l'Élysée. Je partage votre exigence à ce sujet.
En ce qui concerne les aiguilleurs du ciel, on pourrait déduire de votre question que vous avez le sentiment que leur coût exorbitant obérerait notre compétitivité dans ce domaine. Ce n'est pas vrai ! J'ai lu comme vous les rapports de la Cour des comptes, mais le coût horaire de vol contrôlé est aujourd'hui de 101 euros en Suisse, 87 euros au Royaume-Uni, 78 euros en Italie, 75 euros en Allemagne, 72 euros en Espagne, et 65 euros en France. Il ne faut donc pas engager le débat sur une idée fausse. J'ajoute que le temps de travail et les rémunérations sont parfaitement défendables par rapport à ce qu'est aujourd'hui la situation du contrôle aérien.
Certes, il existe des revendications et des mouvements à répétition, mais il faut savoir sur quelle base on est. Il n'y a là aucune situation inadmissible à laquelle il faudrait mettre fin. Le dialogue social existe. Il est de qualité, parfois un peu aigu, menée par le directeur de la DGAC et par nous-mêmes, et il se poursuit.
Un nouveau préavis de grève a été annoncé. Le dernier s'est arrêté après une discussion positive avec nos services. J'espère que celui-là sera abandonné au profit d'une discussion constructive.
Sur la ligne Poitiers-Limoges, vous connaissez la situation : la déclaration d'utilité publique a eu lieu. Il existe des recours devant le Conseil d'État. Je ne vais pas faire de commentaires sur des procédures en cours. Le Gouvernement a pris ses responsabilités. On attend l'avis du Conseil d'État.
S'agissant du versement transport, oui, le Gouvernement confirme que la perte de recettes pour les collectivités, du fait du passage de neuf à onze salariés pour les entreprises concernées par le versement obligatoire, sera intégralement compensée.
Je vous confirme également que, dans l'accord passé avec les sociétés autoroutières, 55 % des travaux doivent être attribués aux PME n'ayant aucun lien direct avec les sociétés en question. Ce ne sont donc pas des PME, filiales majoritaires des entreprises qui doivent en bénéficier.
Sur les autoroutes ferroviaires, il existe aujourd'hui deux questions. La première concerne l'équilibre financier du produit. Vous le savez, au départ, un certain nombre de ces autoroutes ferroviaires ont été mises en place avec une subvention d'équilibre de l'État voire, dans certains cas, de l'Europe. Cela peut s'entendre dans le cadre du démarrage, mais on ne va pas encourager un modèle qui générerait du déficit.
On n'est pas loin de réussir. C'est la longueur du train qui fait l'équilibre. On est parti sur des trains de 750 mètres On en a expérimenté de 850 mètres. Cette modification semble démontrer que l'on arrive à un équilibre en 2015, ce qui est très important. On étudie maintenant ce que cela peut donner avec des trains de 1 000 mètres.
Pourquoi ai-je arrêté l'autoroute ferroviaire Atlantique ? Je n'étais pas contre, mais ce dossier était voué à l'échec. La contestation locale, à Tarnos, était en effet considérable, cette commune se trouvant en pleine zone urbaine. Les passages à niveau auraient dû être fermés seize fois par jour durant sept minutes. Compte tenu de la longueur des trains, on réussissait l'exploit de fermer en même temps deux passages à niveau se trouvant sur des routes de circulation en agglomération allant de Bayonne à Tarnos.
Après avoir étudié ce dossier de très près, j'en suis arrivé à la conclusion qu'on allait avoir beaucoup de difficultés auprès des tribunaux administratifs, compte tenu de la façon dont le dossier avait été mis en oeuvre.
Il n'empêche que j'ai relancé le dossier. Je me suis rendu compte que les Espagnols avaient le même projet, à Victoria, d'une plate-forme multimodale. J'ai rencontré Ana Pastor, ma collègue espagnole, fin juillet. Je lui ai proposé de le faire ensemble, ce qu'elle a accepté. Cela nous a permis de donner un label européen à cette démarche. J'ai donc réuni la semaine dernière, à Bordeaux, les Espagnols et les responsables du corridor pour en faire un projet européen.
Les Espagnols sont d'accord. Les Portugais s'y intéressent également, car cela peut leur permettre de se rattacher à un projet de même nature. Le projet est donc relancé. Nous travaillons dans l'idée de faire d'une plateforme commune à Victoria. Certes, on aura pris un peu de retard, mais un grand projet européen sur cet axe, qui intéresse l'ensemble de la France, me paraît très intéressant.
S'agissant du grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO), les discussions aujourd'hui en cours sont extrêmement difficiles. Le montage financier qui a été envisagé au départ dans le cadre d'un partenariat public-privé, avec un financement par 68 collectivités territoriales, se révèle être une usine à gaz peu ordinaire. On est dans une situation très compliquée.
Pour la suite, il faudra tirer les leçons de cette affaire. Soit on est capable d'avoir un financement public à la hauteur de ce qui a été fait pour les autres grands investissements, soit on ne l'est pas. Avec 70 % de financements publics, le fonctionnement peut s'équilibrer, mais croire que l'on va ainsi rembourser l'investissement n'est pas vrai, que ce soit chez nous ou ailleurs. Il faut rester lucide !
S'agissant du transport aérien, du CRE et d'Air France, c'est un secteur qui se développe. Le pavillon français a cependant perdu dix points en dix ans au profit du low cost , secteur émergent.
On peut faire le procès du low cost , mais c'est le consommateur qui choisit. Si le low cost remporte le succès qu'il connaît, c'est parce que des millions de gens peuvent aujourd'hui voyager à des prix auxquels ils n'avaient pas accès jusqu'alors, à la seule condition, émise par tous les gouvernements, de respecter les règles sociales. Le low cost ne peut toutefois fonctionner sur le dumping social. Il doit recourir à un modèle très particulier -recours à un seul avion, gains sur les rotations, utilisation d'aérodromes de province.
Il existe certaines limites : les compagnies low cost ne peuvent faire payer les collectivités locales - l'Europe a répondu : ce n'est pas un bon modèle - ni utiliser le dumping social, d'où les actions que nous avons introduites. Ryanair a fait l'objet d'une condamnation sévère, et une information est actuellement en cours à son encontre.
Il nous faut également mettre en oeuvre un modèle low cost chez Air France. C'est ce qui a été fait par le biais de Transavia, qui va passer à trente-sept avions. Le principal opérateur sur les aéroports franciliens sera rapidement Transavia, dont le développement constitue une bonne réponse au problème.
Pour ce qui est de la concurrence des compagnies du Golfe, j'ai pris l'initiative - et les Allemands nous ont suivis - de demander un mandat commun à la Commission européenne. Des négociations bilatérales ne servent à rien. Le principe a été acté et le contenu sera formalisé au début de l'année prochaine afin de négocier les conditions d'une concurrence loyale. Est-ce un voeu pieu ? Je ne le crois pas. On vient de passer un accord bilatéral avec Oman, le mandat n'étant pas encore signé. Ce sont donc des choses tout à fait possibles. Nous ne refusons pas la concurrence ; encore faut-il qu'elle soit loyale. Or, on a là-dessus des interrogations, tout comme les Américains.
Reste la question de la compétitivité, au sens de la comparaison avec les entreprises de même nature, comme Lufthansa. Le déficit existe. C'est toute la discussion qui est menée chez Air France. Des efforts ont déjà été faits par les salariés dans le cadre du premier plan. Est-il possible d'arriver à un accord ? Celui-ci doit être signé en février. Cela laisse suffisamment de temps pour que le dialogue social l'emporte. La marche n'est pas impossible à franchir.
Le Gouvernement préfère avoir des gains de compétitivité sans suppression d'emplois. Il appartient aujourd'hui aux syndicats de négocier avec la direction.
L'État, l'année dernière, a diminué de 50 % la redevance pour les passagers en transit ; cela représente 90 millions d'euros de moins. Air France, par rapport à ses concurrents, bénéficie en outre du CICE, soit 63 millions d'euros chaque année. Ce n'est pas rien ! Il faut mettre ces sommes en rapport avec l'objectif annoncé par le PDG d'Air France, qui avait indiqué qu'il fallait parvenir à un résultat autour de 740 millions d'euros. Ce n'est pas irréaliste. Des efforts doivent être réalisés ; les salariés en ont déjà faits, et nous demeurons très attentifs, quoi qu'il arrive, à la sauvegarde du pavillon français.
S'agissant de POCL, le Gouvernement a décidé d'avancer sur ce dossier ; les conventions sur Nevers, Lyon et la partie francilienne sont en train d'être finalisées. 30 millions d'euros sont prévus au CPER pour le projet portant sur la partie centrale du tracé. Le préfet coordonnateur reprendra la concertation avec les nouveaux exécutifs.
M. Raison demande si l'on va « fourguer » les lignes TET déficitaires aux régions. Si l'on pose ainsi le problème, on voit bien où est la solution ! Quelle est la problématique des TET, sans caricaturer ce dossier ? C'est très simple : 200 millions d'euros de déficits en 2010-2011, 400 à 430 millions d'euros annoncés pour 2015-2016.
Mon problème n'est pas de rendre les TET bénéficiaires mais, défendant les intérêts de l'État, autorité organisatrice, de maîtriser le déficit et de revenir à 200 millions d'euros, compte tenu des sujétions de service public. Le but n'est pas de laisser dériver le déficit.
Comment y arriver ? Certains ont des solutions simples, qui consistent à fermer les lignes, dont quelques-unes présentent des particularités, où la subvention par voyageur et par jour s'élève à 238 euros. Quand on est responsable, on en discute !
Nous allons donc parler avec les régions. Nous acceptons de partager une partie du fardeau, du fait des objectifs d'aménagement du territoire. Dans les discussions qui sont menées par M. Philizot, on s'aperçoit qu'il existe une certaine rationalité du TET par rapport au TER. Vous verrez que la discussion est possible. Cela ne réglera bien sûr pas tous les problèmes, comme celui des trains de nuit. Ces questions feront l'objet d'une réponse spécifique.
Mon objectif est d'arriver à maîtriser les déficits. Il peut être partagé et il serait souhaitable que tout le monde y souscrive.
Nous sommes en désaccord avec Michel Raison et Louis Nègre au sujet de l'ouverture à la concurrence. Il n'est pas inutile d'essayer de partager nos expériences communes. L'ouverture à la concurrence sans préparation, comme pour le fret ferroviaire, m'amène à la prudence. La part de la SNCF dans le fret ferroviaire est tombée à 10 % du fait d'une ouverture à la concurrence non préparée. Je suis donc attentif à cette situation.
Le quatrième paquet ferroviaire a fait l'objet d'un accord avec le Parlement européen. Certes, il n'est pas définitif et demeure en discussion. L'idée est d'ouvrir les lignes commerciales à la concurrence en 2020, et le reste en 2026, étant précisé qu'on pourra alors avoir le choix entre un appel à la concurrence et l'attribution directe.
Je remercie Louis Nègre de nous attribuer le mérite d'avoir réussi à convaincre les gouvernements allemand et espagnol. On prétend pourtant souvent que la France a peu d'influence.
Certains, s'agissant du paquet ferroviaire, disent qu'on a bradé le service public ; d'autres estiment qu'on a préservé un système archaïque. La vérité est probablement entre les deux. Ma démarche a consisté à apporter la réponse équilibrée que je défends. C'est aujourd'hui une position de l'ensemble des pays européens.
Concernant Le Havre, nous avons plusieurs problèmes. Les mêmes qui soutenaient ce dossier ont changé d'opinion ! Ce n'est pas interdit, mais c'est un peu déstabilisant. Alors que chacun semblait partager les mêmes idées, on a assisté à une bataille entre les territoires qui ne me paraît pas fondée et qui fragilise notre position vis-à-vis de l'Europe - même si les décisions sont acquises.
Il convient de discuter du Serqueux-Gisors. L'enquête publique va être lancée début janvier. Les travaux sont inscrits au CPER et seront réalisés dans les temps prévus.
Vous avez également évoqué l'affaire de la plateforme multimodale ; mon objectif est de trouver une solution avec tous les acteurs, que j'ai trouvés plutôt positifs et impliqués. Ceci me laisse optimiste.
En ce qui concerne les questions de Mme Billon au sujet de la mission de M. Philizot, j'ai déjà apporté une partie de la réponse. Je ne vais pas la rendre publique, puisque nous en sommes encore au stade exploratoire. L'ensemble des lignes n'a pas aujourd'hui reçu de réponse, mais on voit bien que l'idée de la complémentarité entre TET et TER, à propos de laquelle je suis en désaccord avec M. Raison, est spontanément abordée par quelques présidents de région s'agissant de certains circuits. C'est une question de réalité physique. Il peut donc y avoir une discussion constructive à ce sujet.
Vous avez raison - et c'est une des difficultés de nos rapports avec nos concitoyens - concernant le fait que le réseau est vieillissant. Je l'ai dit en introduction : il faut procéder à des travaux de régénération du réseau ferroviaire. Plus on retarde ces travaux, plus on doit faire de la maintenance quotidienne, parfois dans des conditions de sécurité difficiles. C'est tout le travail qui a été mené à l'occasion de la conférence ferroviaire sur la sécurité.
Quand peut-on procéder à la restructuration ? Il existe plusieurs solutions. On peut le faire systématiquement la nuit. Il n'existe parfois pas d'autres moyens, comme en Ile-de-France, par exemple. On peut également le faire vite ; cela coûte moins cher, mais les travaux eux-mêmes génèrent des inconvénients pour les voyageurs. Vous vous en faites souvent l'écho auprès de moi.
C'est une situation difficile, et il faut faire preuve d'une grande solidarité entre élus sur ces questions. Il n'y a pas de recettes miracles, mais il existe une ligne directrice : il faut consacrer les crédits nécessaires à la restructuration du réseau.
Pour l'avenir, les moyens dont on dispose pour restructurer ce réseau, à hauteur de 2,6 milliards d'euros, sont-ils suffisants ? Je ne le pense pas. Dans les années à venir, il faudra faire un effort, quels que soient ceux qui sont aux responsabilités. Il nous faut rénover le réseau et le remettre à niveau. Nous nous y sommes engagés. C'est la seule voie à suivre, et il faudra le faire avec les moyens nécessaires.
II. EXAMEN DU RAPPORT
Réunie le mercredi 4 novembre 2015, la commission a examiné le rapport pour avis sur les crédits « Transports routiers » du projet de loi de finances pour 2016.
M. Jean-Yves Roux , rapporteur pour avis . - J'aurai un discours beaucoup plus optimiste sur les crédits consacrés aux transports routiers que mon collègue sur les transports ferroviaires.
L'année 2015 a été marquée par de profondes évolutions, très positives, dans le secteur des transports routiers. Des avancées majeures ont été obtenues dans le domaine de la régulation du secteur autoroutier. Notre commission avait été l'une des premières à réagir, à l'automne dernier, à la publication de l'avis de l'Autorité de la concurrence qui dénonçait la rentabilité exceptionnelle des sociétés d'autoroutes dites « historiques ». La commission avait alors créé un groupe de travail, conduit par Jean-Jacques Filleul et Louis-Jean de Nicolaÿ, qui avait appelé à une transparence accrue dans ce domaine, et à une renégociation du plan de relance. C'est bien la direction qu'a prise le Gouvernement. Puisqu'il s'est attaché à renégocier le plan de relance qu'il s'apprêtait à signer avec ces sociétés, en s'appuyant sur un groupe de travail mis en place par le Premier ministre, auquel participaient nos deux collègues. Un protocole d'accord a ainsi été signé le 9 avril 2015 avec les sociétés d'autoroutes. Il permet la réalisation du plan de relance autoroutier, mais avec plusieurs garde-fous destinés à plafonner le bénéfice que pourraient en tirer ces sociétés. Par exemple, une fois un certain seuil de rentabilité dépassé, la durée de la concession autoroutière pourra être réduite.
Les sociétés d'autoroutes ont par ailleurs accepté de reverser une part de leurs profits au bénéfice du financement des infrastructures de transport, en versant 1 milliard d'euros à l'AFITF sur l'ensemble de la durée des concessions. Les premières années, cela se traduira par une recette supplémentaire de 100 millions d'euros pour l'AFITF. Elles donneront aussi collectivement 200 millions d'euros pour la création d'un fonds d'investissement durable, et ont mis en place des actions commerciales pour les jeunes, le covoiturage et les voitures écologiques.
Il faut se réjouir de l'équilibre qui a été trouvé sur ce dossier complexe. La réalisation de ce plan de relance autoroutier permettra en effet de mobiliser 3,27 milliards d'euros pour la relance des travaux publics, avec, à la clef, près de 10 000 emplois directs ou indirects. Les sociétés d'autoroutes se sont d'ailleurs engagées à ce que plus de la moitié des travaux réalisés le soient par des PME et des PMI non liées aux grands groupes autoroutiers.
L'autre réponse a été législative. La loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques a considérablement renforcé la régulation de ce secteur, en étendant les activités de l'autorité de régulation du secteur ferroviaire au domaine autoroutier. L'autorité de régulation des activités ferroviaires et routières ou ARAFER émettra un avis sur les avenants aux contrats de concession et aura pour mission de collecter et rendre publiques les informations relatives au secteur autoroutier. La loi Macron fixe également de nouvelles règles, plus contraignantes, pour la passation des marchés des sociétés d'autoroutes, conformément au souhait du groupe de travail de notre commission. Enfin, elle introduit un dispositif de modération des péages ou de réduction de la durée des concessions en cas de profits supérieurs aux estimations, et interdit l'allongement de la durée des concessions sans accord du Parlement. Il s'agit là de progrès majeurs dans la régulation du secteur autoroutier, qui auront des répercussions budgétaires certaines pour les usagers.
L'autre bonne nouvelle, c'est le développement d'une nouvelle offre de transport collectif, qui répond à une demande aujourd'hui non satisfaite, à savoir la libéralisation du transport par autocar, autorisée par la même loi Macron. Cette offre permettra de répondre aux besoins de mobilité non satisfaits par le transport ferroviaire, soit pour des raisons de desserte, soit pour des raisons de coût, et de réduire le recours à la voiture individuelle. Là aussi, des créations d'emplois sont attendues. La note de France Stratégie évoquait le chiffre de 22 000 emplois. En un peu plus d'un mois, 700 emplois ont déjà été créés. Ces autocars doivent répondre à des normes d'émissions de polluants atmosphériques strictes - la norme Euro 5 jusqu'à la fin 2017, et la norme Euro 6 ensuite.
Pour ce qui est des transports conventionnés, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République a unifié cette compétence à l'échelle des régions à partir de 2017, afin de favoriser l'intermodalité entre les modes ferroviaire et routier notamment.
Enfin, pour rester dans le domaine du verdissement des transports, nous pouvons nous féliciter des avancées permises par la loi de transition énergétique, qui pose des obligations en matière de renouvellement des parcs automobiles ou d'installation de bornes de recharge électriques et prévoit la mise en place d'une prime à la conversion octroyée en échange de la mise à la casse d'un véhicule polluant ancien. Nous savons bien que c'est le parc diesel en circulation le plus ancien qui est le plus nocif, même si le scandale Volkswagen nous invite à une certaine prudence sur les véhicules les plus récents.
Pour l'année 2016, le Gouvernement s'est attaché à résoudre la question de la compensation des recettes de l'écotaxe, à la suite de son abandon. Pour mémoire, nous avons augmenté l'année dernière de 2 centimes la TICPE sur le gazole pour les véhicules particuliers, et de 4 centimes celle applicable aux transporteurs routiers de marchandises. Cette solution avait alors été présentée comme provisoire, le temps qu'un groupe de travail créé à ce sujet rende ses conclusions. Celui-ci a d'ailleurs pu s'appuyer sur un rapport du conseil général de l'environnement et du développement durable.
À l'issue de ces travaux, il apparaît que la solution d'une taxation supplémentaire sur le gazole, déjà mise en place pour 2015, est préférable à la création d'une vignette pour les transporteurs routiers. Outre qu'elle amorce le rapprochement tant attendu des fiscalités de l'essence et du gazole, cette mesure permet de collecter un montant considérable, sans générer de frais de collecte ou d'obligations déclaratives pour les entreprises, ce qui n'est pas le cas d'une vignette. L'augmentation de la fiscalité sur le diesel est en outre supportable, à l'heure où les prix des carburants sont très bas. Les entreprises de transport routier peuvent répercuter cette hausse sur leurs tarifs. Enfin, le risque d'un « effet d'éviction », suivant lequel cette augmentation du prix du gazole conduirait les poids lourds étrangers à faire leur plein à l'étranger, est dans les faits limité. L'augmentation de la fiscalité sur le gazole est donc maintenue pour 2016, et ne sera pas remplacée par la mise en place d'une vignette.
Le rapprochement entre les deux fiscalités se poursuit même, pour les véhicules légers, avec l'adoption à l'Assemblée nationale d'un amendement du Gouvernement qui augmente d'un centime la TICPE sur le gazole et diminue du même montant celle de l'essence. La part du produit de TICPE affectée à l'AFITF est moins importante que l'année dernière, mais son budget d'intervention, estimé à 1,9 milliard d'euros, reste non négligeable, et supérieur à celui de l'année dernière. Il faudra prévoir, à l'avenir, des moyens supplémentaires pour que l'agence puisse effectivement remplir ses engagements et rembourser ses dettes. Pour 2016, et dans le contexte actuel de maîtrise des dépenses, je ne serai pas aussi alarmiste que mon collègue.
Concernant les crédits consacrés au transport routier dans le projet de loi de finances pour 2016, ceux-ci se divisent entre les crédits inscrits au programme budgétaire 203 intitulé « Infrastructures et services de transport » et les crédits de l'AFITF.
Le développement des infrastructures routières a la particularité d'être exclusivement financé par des fonds de concours versés par l'AFITF et par les collectivités territoriales. Ils sont aujourd'hui évalués à 671 millions d'euros en crédits de paiement, dont 394 millions proviendront de l'AFITF. Cette somme servira notamment à financer les volets routiers des contrats de plan État-régions 2015-2020. Le financement des infrastructures routières a en effet été réintégré à ces contrats, contrairement à la génération précédente des contrats de projets. C'est un choix qui me semble pertinent, dans une perspective multimodale mais aussi parce que dans certains territoires, le transport routier est le seul mode de transport possible et ne doit donc pas être négligé.
Pour l'entretien et l'exploitation du réseau routier national, une enveloppe de 324 millions d'euros de crédits de l'État est prévue, soit un montant proche de celui adopté en loi de finances initiale pour 2015. Cette enveloppe devrait être complétée par 328 millions d'euros de fonds de concours provenant de l'AFITF, en hausse de 38 % par rapport à l'année dernière. C'est encore une bonne nouvelle, car les montants consacrés à l'entretien et l'exploitation du réseau routier national ne sauraient être inférieurs à ces montants, faute de quoi le réseau serait amené à se détériorer et deviendrait de plus en plus cher à entretenir.
Enfin, 48 millions d'euros sont prévus pour les actions de soutien et de régulation du secteur des transports terrestres, et 17 millions seront destinés aux dépenses de prospective et de logistique de la DGITM.
Concernant le compte d'affectation spéciale intitulé « aides à l'acquisition de véhicules propres », qui sert à financer le bonus automobile et la prime à la conversion, le barème du malus applicable depuis 2014 est maintenu pour 2016, et devrait rapporter 266 millions d'euros. Du côté des dépenses, le recentrage du bonus automobile sur les véhicules les plus propres, déjà entamé en 2015, devrait se poursuivre, avec la diminution au 1 er janvier 2016 du bonus versé pour un véhicule full hybride de 2 000 euros à 750 euros, le bonus versé pour un hybride rechargeable étant quant à lui réduit de 4 000 à 1 000 euros. Le bonus accordé en faveur des véhicules électriques, de 6 300 euros, sera en revanche préservé. Au total, le bonus automobile devrait engendrer 236 millions d'euros de dépenses.
Le compte d'affectation spéciale finance également la prime à la conversion, accordée pour la mise au rebut d'un véhicule diesel immatriculé avant le 1 er janvier 2001, soit avant l'entrée en vigueur de la norme Euro 3, pour l'achat d'un véhicule plus propre. Cette prime à la conversion, ou prime à la casse, est cumulable avec le bonus automobile, et s'élève aujourd'hui à 3 700 euros pour l'achat d'un véhicule électrique, ce qui porte à 10 000 euros la somme du bonus et de la prime à la conversion, et à 2 500 euros pour l'achat d'un véhicule hybride rechargeable.
Pour les ménages non imposables au titre de l'impôt sur le revenu, une prime à la conversion de 500 euros peut être obtenue pour l'achat d'un véhicule thermique neuf respectant la norme Euro 6 et émettant entre 61 et 110 grammes de CO 2 par kilomètre, ou pour l'achat d'un véhicule d'occasion, qu'il soit de cette même catégorie, électrique ou hybride. Le Gouvernement envisage de renforcer ce dispositif, en augmentant son montant à 1 000 euros et en élargissant son assiette à la mise au rebut de tous les véhicules diesel de plus de dix ans. Cette mesure sera financée par une part du produit de la hausse de 1 centime de la fiscalité sur le gazole. Si le dispositif est en vigueur depuis le 1 er avril 2015, il n'est pas encore possible d'en dresser un bilan solide, car il existe un délai de plusieurs mois entre la commande d'un véhicule et son immatriculation, qui ouvre droit à cette prime. Le fait d'agir sur le parc automobile existant, dont on sait qu'il est le plus polluant, et en prévoyant des mesures spécifiques en faveur des publics les plus défavorisés, me semble aller dans le bon sens.
Je ne suis donc pas aussi réservé que mon collègue sur les crédits consacrés aux transports routiers. Je ne doute pas que le secrétaire d'État aux transports répondra le 12 novembre à toutes les interrogations qui resteront à la suite de nos échanges d'aujourd'hui. Je vous proposerai ensuite, lorsque nous devrons nous prononcer à ce sujet, un avis favorable sur ces crédits.
M. Hervé Maurey , président . - Concernant l'État et les sociétés d'autoroutes, nous avons saisi le Premier ministre à plusieurs reprises pour avoir copie des accords. Nous n'avons jamais eu de réponse. Nous recevrons le ministre de l'économie, Emmanuel Macron, le 1 er décembre. J'espère qu'il sera en mesure de nous communiquer enfin la teneur de ces accords.
M. Jean-Jacques Filleul . - Sur l'avenir de la SNCF et du système ferroviaire, il est important de pouvoir faire une évaluation constructive : ce système est rongé par l'endettement et nous devons trouver des solutions, en faveur d'une entreprise de service public avec une part de concurrence, certes, mais qui apporte aux voyageurs les services qu'ils attendent.
Concernant les transports routiers, inutile de noircir le trait. Le rapporteur a montré que le budget se tasse. Globalement cependant, le budget pour les routes va permettre de franchir l'année 2016 dans de bonnes conditions. Nous avons désormais le plan de relance autoroutier. L'accord passé entre l'État et les sociétés d'autoroutes a été présenté par le ministre. 100 millions d'euros seront versés par les compagnies autoroutières. 55 % des marchés devraient être réservés aux entreprises extérieures à ces groupements majoritaires. Tout cela va dans le bon sens. Les contrats de plan apporteront par ailleurs, d'ici à 2020, des moyens importants pour le réseau routier.
La situation n'est pas catastrophique. Nous apportons donc notre soutien aux crédits proposés.
M. Pierre Médevielle . - Je félicite le rapporteur pour son optimisme... Je me réjouis qu'il ne soit plus question de reprise des concessions autoroutières. Avec réalisme, Emmanuel Macron a privilégié un plan de relance dans le cadre d'un contrat avec ces sociétés. Je rappellerai simplement que les concessions autoroutières reversent tous les ans 3,5 milliards d'euros à l'État, ce qu'on ne dit pas assez souvent.
Nous pouvons également nous féliciter que les PME et les PMI aient désormais accès à ce marché. Je serai en revanche plus pessimiste pour nos régions du Sud de la France, où il n'y a plus de PME et de PMI capables de répondre à ces appels d'offres et d'assumer ces travaux. Le marché y restera donc fermé.
Concernant la circulation des autocars, les chiffres sont encourageants sur certaines lignes. En revanche, en matière de sécurité et d'émissions de polluants, je ne suis pas certain que la multiplication des autocars et des poids lourds sur les routes soit une bonne chose.
M. Charles Revet . - Nous pourrons évoquer le développement du parc d'autocars lors de l'audition à venir du ministre. Disposons-nous déjà d'un premier état des lieux du dispositif ? À l'heure de la COP 21, il me paraît en contradiction avec l'orientation générale de protection de l'environnement et de diminution du trafic sur les routes. J'ai le sentiment que c'est en raison de notre incapacité à financer ce qui devrait être fait sur le réseau ferroviaire qu'on a mis en place ce palliatif.
Je suis pour le tram-train. La France a un maillage ferroviaire extraordinaire. Le tram-train s'est développé dans d'autres pays. Il permet de relier jusqu'au coeur des villes. Nous aurions dû retenir cette orientation avec ainsi la possibilité de diminuer le nombre de véhicules automobiles et donc la pollution.
M. Michel Raison . - J'indiquerai pour commencer que l'excessivité que l'on reproche à notre opposition n'a d'égale que l'excessivité de votre soutien au gouvernement.
Nous sommes favorables au fait de créer de l'emploi par le développement des autocars. Il ne faut cependant pas que cela conduise à affaiblir le service offert aux voyageurs, les autocars n'ayant pas le même confort sur une certaine distance qu'un voyage en train. Il ne faut pas non plus que cela serve d'alibi à la SNCF pour oublier d'améliorer sa gestion.
Concernant les autoroutes, la question de la liaison manquante entre Vesoul et Langres perturbe la liaison entre l'Atlantique et la Suisse. C'est un tronçon d'autoroute non rentable. Nous avons l'autorisation de l'Europe pour qu'il y ait une aide de l'État pour financer cette autoroute. L'aide de l'État se fait sous forme de deux déviations routières de deux fois deux voies. L'une est en cours de construction ; pour l'autre, les études se terminent. Pourquoi cette autoroute, sous prétexte qu'il y a insuffisamment de véhicules par jour, a-t-elle été reléguée en toute dernière priorité au niveau national ? Ce territoire a besoin d'être irrigué pour sa survie. Le montage financier était accordé. Nous sommes dans une crise de centralisation, contraire à l'esprit transversal de l'aménagement du territoire.
M. Alain Fouché . - J'ai siégé à RFF pendant trois ans. J'ai pu voir comment cela fonctionnait, avec le pouvoir aux mains de hauts fonctionnaires et un désintérêt de ce qui se passe sur les territoires. Je n'ai pas eu le sentiment d'une grande proximité.
Concernant les marchés autoroutiers, il sera désormais demandé que 50 % de l'entretien soit réalisé par des entreprises extérieures au groupe concessionnaire. Il y a eu un échec total sur la ligne LGV Atlantique qui va de Tours à Bordeaux. Il était prévu que l'entreprise délègue un certain nombre de marchés aux entreprises locales : cela n'a pas été le cas. Un seul pont a été délégué ; tout le reste a été donné à ses filiales. Il faudra donc un contrôle très strict.
M. Jean-François Longeot . - Dans le rapport sur les crédits routiers comme dans le rapport sur les crédits ferroviaires, même si les conclusions ne sont pas les mêmes, se pose le problème du financement. Le rapporteur a tenté d'expliquer que l'augmentation du prix du gazole compense la suppression de l'écotaxe. Je suis dubitatif. L'augmentation du prix du gazole n'est supportée que par nos concitoyens. Le pouvoir d'achat du contribuable français se trouve grevé.
Je suis prêt à comprendre le développement des autocars dans les secteurs où il n'y a pas de liaisons ferroviaires. Mais ne disons pas qu'ils ont été mis en place parce qu'une catégorie de nos concitoyens ne peut pas prendre le train à cause des tarifs trop élevés. Cela revient à dire à nos concitoyens : « dites-moi ce dont vous avez besoin je vous expliquerai comment vous en passer »... Ce n'est pas un argument et c'est recréer la troisième classe de la SNCF qui existait il y a encore quelques années.
Mme Chantal Jouanno . - Je suis très favorable à la libéralisation des systèmes de transports. Néanmoins, en ce qui concerne les autocars, permettez-moi de penser que cela ne va pas nécessairement dans le sens d'un meilleur bilan environnemental. Nous n'avons pas immédiatement imposé les meilleures normes aux véhicules, alors même que nous savons aujourd'hui que nous sommes dans l'incapacité de respecter les normes. Cela a été reconnu par la récente décision de la Commission européenne. En zone non dense, lorsque les autocars ne sont pas remplis, le bilan carbone par passager est très mauvais. Il aurait sans doute été préférable de plus mettre l'accent sur l'auto-partage ou le covoiturage qui se développent très bien dans ces zones.
Nous avions eu un débat assez intéressant avec Ségolène Royal sur l'écotaxe. Dans le cadre des élections régionales, il n'aura échappé à personne qu'en Île-de-France, tous les candidats, y compris socialistes, se réclament d'une écotaxe régionale. Il y a une vraie contradiction : sauf erreur de ma part, le marché de démantèlement des portiques est toujours en cours. Le gouvernement n'a fait aucune proposition pour permettre la mise en place par les régions d'écotaxes régionales et pour éviter d'assumer une double charge. Nous allons payer pour le démantèlement des portiques actuels et payer à nouveau pour mettre en place un nouveau système d'écotaxe régionale.
M. Louis Nègre . - Le rapporteur a démontré par sa présentation sa capacité à voir le verre à moitié plein... Pour ma part, je persiste et signe sur le centime de baisse de l'essence. C'est contradictoire avec ce que nous essayons de faire. J'ai été favorable aux avancées contenues dans la loi pour la transition énergétique. Cette baisse sur l'essence est un signal politique que je ne comprends pas. Il en va de la cohérence de l'action politique.
Sur les crédits routiers du CPER de la région Provence-Alpes-Côte-D'azur, où sont les crédits affectés aux Alpes-Maritimes ? Je n'ai pas vu grand-chose malgré cette augmentation mirifique de la ligne budgétaire que vous évoquez.
L'Allemagne a développé le système de concurrence par autocar. Dans un premier temps, cela a conduit à une augmentation considérable des passagers, au détriment, pour un tiers, de la Deutsche Bahn . Un tiers avait abandonné la voiture au profit de l'autocar. Soyons donc prudents. Après quelques années, on constate une concurrence tellement forte que la plupart des petites entreprises disparaissent au profit de quelques-unes. En Grande-Bretagne, on peut constater une double avancée, dans le ferroviaire et dans les autocars. La concurrence y est très libérale. Elle permet de développer le transport par autocar et parallèlement le train. Nous avions pris ici position, comme au GART, pour limiter la concurrence au-delà de 200 kilomètres entre deux points d'arrêt. Le seuil de 100 kilomètres nous a malheureusement été imposé. Cela va porter atteinte à nos transporteurs locaux.
Sur la vignette, une excellente étude a été réalisée par le Conseil général de l'environnement et du développement durable et rendue publique. Après une étude comparée en Europe, il ressort que le système de la vignette est parfait dans la mesure où personne ne passe à travers mais il est très coûteux. Sur le nombre élevé de poids lourds étrangers qui traversent la France, près de 30 %, certains préfèrent prendre leur gazole en France. Le gazole italien ou britannique est plus cher. Il y a donc certainement une forme de compensation qu'il faudrait étudier de manière très fine. L'association syndicale des transporteurs OTRE a souhaité qu'on en reste à l'augmentation de la TICPE. C'est signe qu'il y a là une possibilité de réguler et d'encourager le transfert modal.
Dernière remarque : on ne parle que d'argent ce matin. Nous sommes face à des choix politiques. France Stratégie a récemment démontré que la France dépense 7 points de PIB de plus que l'Allemagne en dépenses sociales. Cela représente 140 milliards d'euros chaque année. Je suis persuadé qu'avec une simple baisse de 10 % de ces dépenses, on pourrait résorber les problèmes de financement dans les transports.
M. Jean-Yves Roux , rapporteur pour avis . - Concernant la sécurité, une analyse a montré qu'il valait mieux utiliser les autocars que les véhicules individuels. C'est moins accidentogène et moins polluant. Les trains qui ne sont pas en surcharge sont deux fois plus polluants que les autocars, comme cela a été vérifié par l'Ademe.
Les créations d'emplois que je vous indiquais, au nombre de 700, ont été décomptées depuis le vote de la loi Macron. D'ici à la fin de l'année 2015, on espère la création de 100 lignes supplémentaires.
Les dépenses opérationnelles de l'AFITF restent stables : 1,856 milliard en 2012, 1,9 milliard en 2013, 1,7 milliard en 2014, 1,844 milliard en 2015 et 1,855 milliard prévu pour 2016. Les dépenses sont donc vraiment identiques.
Les sociétés d'autoroutes sont engagées dans le cadre du protocole d'accord comme je l'ai évoqué.
En matière de sécurité, beaucoup est fait pour la formation des chauffeurs afin de réduire les risques d'accidents. Aujourd'hui, les accidents les plus fréquents restent ceux en deux-roues et en véhicule individuel.
Globalement les crédits sont stables, en légère baisse de 0,4 %. C'est pour cette raison que je suis plus positif que Louis Nègre et que je défendrai ce budget avec mes collègues.
Réunie le mercredi 18 novembre 2015, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits du projet de loi de finances pour 2016 consacrés aux transports routiers.
LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
Mardi 20 octobre 2015 :
- Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) : M. François Poupard , directeur général, Mmes Christine Bouchet et Nancy Canoves-Fuster .
Mardi 27 octobre 2015 :
- Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF ) : MM. Philippe Duron , président, Loïc Guinard , secrétaire général, et Dominique Etienne , secrétaire général adjoint.
* 1 Arrêté du 22 septembre 2015 fixant les normes d'émission de polluants atmosphériques des véhicules assurant des services réguliers interurbains de transport public routier de personnes librement organisés.
* 2 À l'exception des services de transport spécial des élèves handicapés vers les établissements scolaires.
* 3 Ces frais incluent l'indemnité versée à la société Ecomouv' et à certaines sociétés habilitées de télépéage, le montant des « créances Dailly » détenues par les établissements de crédit sur Ecomouv' et pris en charge par l'État, et le coût des mesures relatives aux dispositifs de collecte de la taxe (serveurs et portiques).
* 4 Cf. infra.
* 5 En loi de finances initiale pour 2015, ces montants s'élevaient respectivement à 52,7 et 47,7 millions d'euros.
* 6 Pour la dernière fois par le décret n° 2013-971 du 30 octobre 2013.
* 7 Exposé de l'amendement n° I-818 déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale sur le projet de loi de finances, adopté.
* 8 Amendement n° II-495 déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale sur le projet de loi de finances et adopté.