INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Votre rapporteur tient d'abord à rendre hommage à ses prédécesseurs, nos collègues Jean-Patrick Courtois, ancien rapporteur des crédits du programme « Administration territoriale », et Gaëtan Gorce, qui rapportait les crédits du programme « Vie politique, cultuelle et associative ».
Depuis 2008, changement de majorité ou pas, l'administration territoriale de l'État vit sous le signe de la réforme permanente. Sous des noms différents (« RéATE 2 ( * ) » pour le gouvernement précédent, « MAP 3 ( * ) » pour le gouvernement actuel), l'objectif est le même : réorganiser, mutualiser, réduire les effectifs. Pour ce qui les concerne, en 8 ans, les services préfectoraux ont perdu 10% de leurs effectifs, passant de 30 228 EPTP en 2007 à 27 143 prévus pour 2015.
Les objectifs de cette politique sont doublement ambigus :
- Optimiser l'affectation des crédits disponibles, améliorer l'efficacité du service public, souci de tout gestionnaire qui se respecte et, en même temps donner la priorité à la réduction des dépenses publiques, ce qui renvoie à un choix politique particulier : bien dépenser versus moins dépenser ;
- Améliorer l'efficacité de l'État gestionnaire de services à la population et assurer la présence de l'État républicain, des symboles et marques d'une République « une et indivisible » sur l'ensemble du territoire : manager versus gouverner. Ce qui pose, comme on le verra la question d'une éventuelle redistribution des sous-préfets sur l'ensemble du territoire et de l'éventuel remplacement du corps des préfets par un cadre d'emploi fonctionnel, ce que souhaite la Cour des comptes.
Contrairement à ce qu'on pourrait croire, un peu vite, dans les faits, la conciliation de ces objectifs, est loin d'aller de soi.
Ainsi, malgré l'évidente bonne volonté des personnels, malgré leur capacité à s'adapter et à innover, le principe selon lequel réduire les crédits c'est mieux les employer, moins de fonctionnaires c'est un service public plus efficace, atteint aujourd'hui ses limites. D'où la suspicion que ne peut pas ne pas susciter chaque réforme nouvelle. Ainsi en va-t-il de la récente création des « maisons de l'État ». Mesure de réorganisation de la localisation des services et regroupement des moyens de bon sens, comme on a pu le constater à Castellane, elle nourrit aussi la crainte de préparer discrètement la disparition des sous-préfets en secteur rural, remplacés par des chefs de bureau.
Force est aussi de constater que l'amélioration de la gestion des services au public dont le gouvernement peut, à juste titre se prévaloir, est parfois, sinon souvent au prix de la mobilisation des moyens sur cet objectif au détriment d'autres. Les indicateurs de performance les ignorent, tel le conseil aux élus, ou sont formulés en termes tels qu'ils ne permettent aucun contrôle réel. Que signifie un taux de contrôle des actes dits prioritaires des collectivités en l'absence d'une définition stricte de la frontière entre ces actes prioritaires et les autres.
De réforme en réforme, réalisée ou annoncée comme celle de la carte des sous-préfectures, de réduction des effectifs en redéploiements, les agents des services déconcentrés, qui se sont adaptés comme ils ont pu, touchent le seuil de saturation. Leur constat est celui de l'inadéquation grandissante entre les moyens alloués à l'administration territoriale au regard de ses missions, nombreuses et diverses puisqu'elles vont de l'appui aux collectivités locales, du conseil aux élus, au contrôle de légalité, en passant par la délivrance des titres ou la coordination des services déconcentrés de l'État sur un territoire parfois vaste.
D'une manière générale, ceux qui gèrent au quotidien l'administration déconcentrée manquent d'une vision claire de l'avenir, et ne peuvent s'appuyer sur le cadre pérenne leur permettant de gérer leurs moyens et leurs missions au moins sur le moyen terme. Ce manque de perspectives stables a vocation à perdurer, avec le lancement dès 2015 d'une nouvelle réforme de l'État, prévoyant notamment le transfert de nouvelles missions vers les administrations déconcentrées.
Côté élus cette fois, on peine aussi à voir le lien entre la réorganisation territoriale version Mapam 4 ( * ) puis NOTRe 5 ( * ) et les réformes successives de l'administration déconcentrée alors qu'une bonne articulation entre les deux est essentielle à la réussite de chacune, plus essentielle en tous cas que la taille des collectivités. L'impression qui domine est celle de réformes parallèles conduites selon leurs logiques propres, quand ce ne sont pas des logiques changeantes comme on a pu le constater s'agissant de la réforme territoriale. Que les parallèles soient appelées à se rejoindre à l'infini n'est pas spécialement rassurant.
I. LES CRÉDITS POUR 2015 DE LA MISSION « ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE L'ÉTAT »
La mission « Administration générale et territoriale de l'État » comprend trois programmes d'inégale importance.
A. LE PROGRAMME « VIE POLITIQUE CULTUELLE ET ASSOCIATIVE »
Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit 302,3 millions d'euros en autorisation d'engagement et 303,1 millions d'euros en crédits de paiement : par rapport à 2014, les moyens consacrés au programme « Vie politique, cultuelle et associative » baissent de 3,2 %.
Évolution des crédits du programme
Vie
politique, cultuelle et associative
(en millions
d'euros)
Exécution 2013 |
LFI 2014 |
PLF 2015 |
Variation 2015/2014 |
|
Autorisations d'engagement |
151,8 |
312,3 |
302,3 |
-3,2 % |
Crédits de paiement |
150,7 |
313,0 |
303,1 |
-3,2 % |
Près de 80 % des crédits de ce programme sont consacrés au financement de l'organisation des élections prévues pour 2015 : l'enveloppe prévue pour les élections départementales et régionales et les élections des assemblées équivalentes outre-mer est établie à 236 millions d'euros.
Par l'article 46 du projet de loi de finances, le Gouvernement envisageait, dans un souci d'économie, de dématérialiser la propagande électorale pour ces élections, mettant en avant une pratique convergente au niveau européen et l'absence d'influence décisive sur la participation électorale. Une telle proposition avait été formulée pour le projet de loi de finances pour 2014 à propos des élections européennes de mai 2014. Restant sur sa position de l'an dernier, l'Assemblée nationale, notamment à l'initiative de sa commission des finances et de sa commission des lois, a supprimé cette disposition.
La réduction des crédits alloués au programme est essentiellement due à la baisse du financement des partis politiques. Pour rappel, l'enveloppe consacrée au financement des partis subit depuis plusieurs années une baisse de ses crédits. Cette année, au regard des efforts des années antérieures, l'Assemblée nationale a décidé, notamment à l'initiative de la commission des lois, de limiter la baisse des crédits.
* 2 Réforme de l'administration territoriale
* 3 Modernisation de l'action publique
* 4 Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles
* 5 Projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, en cours d'examen au Sénat