F. LES ÎLES WALLIS-ET-FUTUNA

Les îles Wallis-et-Futuna constituent un « archipel » de trois îles avec Wallis distante de près de 250 kilomètres des îles Futuna et Alofi. Rattachées à la France, depuis le traité de protectorat signé par la reine Amalia de Wallis en 1887 puis par ses homologues de Futuna l'année suivante, les îles Wallis-et-Futuna sont partie intégrante du territoire français.

Peuplées par 12 500 personnes, les îles Wallis-et-Futuna souffrent d'un isolement géographique important qui les rend partiellement dépendantes du territoire français le plus proche, la Nouvelle-Calédonie. La desserte aérienne des îles s'est progressivement améliorée sans être totalement parfaite. Depuis 2009, la nouvelle piste de l'aérodrome Futuna Pointe-Vélé est opérationnelle mais, en l'absence de la libération d'emprises foncières, les évacuations sanitaires de nuit et l'atterrissage d'appareils de type ATR42 ne sont toujours pas possible. Un tel agrandissement aéroportuaire permettrait de consolider la liaison actuelle entre Wallis et Futuna et la mise en place d'une liaison avec Fidji. Une prochaine mission de la présidente de l'assemblée territoriale devrait permettre de concrétiser les solutions de libération des terrains qui sont actuellement entrevues. Votre rapporteur estime qu'il est plus que temps de trancher cette question car c'est la sécurité et le développement économique de tous qui sont en cause.

Depuis 1989, la communauté wallisienne est numériquement plus importante en Nouvelle-Calédonie que dans l'archipel lui-même. Depuis 2003, les îles Wallis-et-Futuna ont perdu, du fait essentiellement de l'émigration, 10 % de leur population. Ce déclin démographique se poursuit inexorablement.

1. Une évolution institutionnelle à anticiper

À la suite de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, Wallis-et-Futuna constitue une collectivité d'outre-mer au sens de l'article 74 de la Constitution. A ce titre, une loi organique devrait fixer, après avis de l'assemblée délibérante, son statut pour tenir compte de ses intérêts propres au sein de la République.

Or, les îles Wallis-et-Futuna restent régies par la loi n° 61-814 du 29 juillet 1961 lui conférant le statut de territoire d'outre-mer au terme d'un référendum local ayant marqué l' attachement de la population pour le maintien au sein de la France . Au regard de l'histoire de ce territoire, la loi de 1961 présente donc une valeur symbolique forte, tout à la fois marque de l'appartenance à la communauté nationale et base d'un consensus sur les institutions locales .

Présentation du statut des îles Wallis et Futuna

Au terme de ce statut, l'administrateur supérieur, préfet, représentant de l'État, est chargé des missions de souveraineté. De manière plus inédite, il est également le chef du territoire. A ce titre, il préside le conseil territorial réunissant les chefs traditionnels des trois royaumes qui ont rang de vice-président et trois autres membres désignés par l'administrateur supérieur. Le conseil territorial examine les projets de délibération qui sont soumis à l'assemblée territoriale, instance délibérative de la collectivité comprenant vingt-un membres élus pour cinq ans au scrutin de liste à la représentation proportionnelle.

Le territoire est divisé en trois circonscriptions, l'une à Wallis pour le royaume d'Uvéa et les deux autres à Futuna pour les royaumes d'Alo et de Sigave. Le conseil de circonscription, élu selon les règles coutumières, statue sur les projets présentés par le chef de circonscription, délégué du préfet. La configuration institutionnelle de la circonscription reproduit donc en partie le modèle en vigueur à l'échelle du territoire.

Parallèlement, les trois royaumes disposent d'un monarque, non désigné par voie héréditaire mais élu par les familles aristocratiques, qui désigne son Premier ministre et ses ministres. Chaque roi nomme les chefs de district qui désignent à leur tour les chefs de village.

La forte adhésion au statut actuel ne doit pas masquer les tensions qui peuvent exister sur place quant à la question institutionnelle. Preuve en est la grave crise politique qui a éclaté en 2005 à l'occasion de la condamnation judiciaire pour homicide du petit-fils du roi d'Uvea (royaume de Wallis) qui, pour échapper à la justice, s'est réfugié au palais royal, provoquant de fortes dissensions au sein des familles aristocratiques tiraillées entre le devoir de solidarité familiale et le respect des règles républicaines. Après une tentative de destitution du roi menée par l'administrateur supérieur, un médiateur envoyé par le Gouvernement de la République a opté pour son maintien.

Un autre témoignage récent des spécificités politiques locales est la désignation par le roi de Wallis, le Lavelua, de son nouveau Premier ministre, le Kalae Kivalu, le 12 octobre 2011 à la suite de la démission du prédécesseur. Cette démission visait en réalité à échapper à une tentative de destitution menée par un groupe de notables et de personnalités rénovatrices, partisanes du processus de réconciliation entre les loyalistes et les rénovateurs.

À plusieurs occasions, la réflexion sur l'avenir institutionnel n'a pas abouti, essentiellement à cause des réserves des autorités coutumières sur un possible affaiblissement de la place reconnue à la coutume dans le statut de 1961.

Ainsi, une commission d'études et de propositions, réunie à plusieurs reprises au cours des années 2000 et 2001 sous l'autorité de l'administrateur supérieur, n'a pas débouché sur une véritable évolution statutaire, les autorités coutumières préférant une concertation sur l'application du statut et la répartition de toutes les compétences qu'il prévoit.

De même, les états généraux de l'Outre-mer de 2009 avaient prévu une proposition de réforme visant à instituer une plus grande autonomie de l'assemblée territoriale ainsi que la redéfinition de ses compétences. Cependant, les autorités locales, consultées par le Gouvernement, n'ont pas donné suite à cette proposition d'évolution.

Ce constat rejoint celui de votre rapporteur et de nos collègues Jean-Jacques-Hyest et Simon Sutour à la suite de leur déplacement sur place en 2004 : « dans leur grande majorité, les autorités de Wallis-et-Futuna ne souhaitent pas une remise en cause du statut actuel » car « elles sont particulièrement attachées au rôle des chefferies, garantes de la cohésion de la société insulaire ». Vos rapporteurs relevaient cependant que « plusieurs des interlocuteurs de [la] délégation ont prôné certaines évolutions et notamment le renforcement des compétences territoriales », notamment parce que « l'exercice par l'État de l'exécutif de la collectivité apparaît parfois comme une source de frustrations et de malentendus ».

En effet, le statut de 1961 n'apparaît plus adapté, ne serait-ce qu'en raison de la révision constitutionnelle du 23 mars 2003 qui a conduit à remplacer la notion de territoire d'outre-mer par celle de collectivité d'outre-mer dont les garanties d'autonomie sont consacrées au niveau de la loi organique.

Au regard de ces nouvelles règles constitutionnelles, cette situation institutionnelle n'est pas pleinement satisfaisante et n'est d'ailleurs pas le gage d'une stabilité absolue. Votre rapporteur ne peut que rappeler que son inconstitutionnalité constitue une fragilité qui pourrait être mise en évidence à l'occasion d'une question prioritaire de constitutionnalité. En effet, cette collectivité ne connaît ni les garanties accordées par l'article 74 de la Constitution comme son statut de collectivité d'outre-mer l'exigerait, ni les principes de la décentralisation prévues par l'article 72 de la Constitution puisque la fonction exécutive du territoire est exercée par le représentant de l'État.

Votre rapporteur appelle donc toujours de ses voeux une réflexion sur l'avenir institutionnel des îles Wallis et Futuna, permettant dès à présent d'entamer un travail avec les autorités coutumières sur le statut adéquat pour Wallis-et-Futuna afin de concilier spécificités locales et principes républicains et ce, avant que les autorités de la République ne soient contraintes de réformer ce statut sous le sceau de l'urgence. Il convient en effet d'ouvrir le plus vite possible le dialogue pour se donner le temps d'engager et de mener à son terme une concertation fructueuse et ouverte pour trouver les solutions satisfaisantes pour toutes les parties.

2. Une situation économique connaissant une embellie fragile

L'effort financier de l'État s'avère indispensable au regard de la structure économique particulière des îles Wallis et Futuna. Cette collectivité souffre de plusieurs handicaps économiques structurels avec seulement 53,41 % des personnes en âge de travailler qui possèdent un emploi. Comme pour le reste de l'outre-mer, la problématique de la vie chère a abouti à des mouvements sociaux puis à la signature d'un accord pour une structure de contrôle et de suivi des prix.

L'économie locale repose largement sur le secteur non marchand, qui représente à lui seul 75 % de la valeur ajoutée totale, signe du poids important de la tradition et de l'administration dans l'économie wallisienne. La commande publique est donc vitale pour les entreprises locales. Sans surprise, plus de 70 % de l'emploi salarié déclaré provient de la fonction publique et semi-publique. L'économie wallisienne repose plus que la moyenne sur l'autoconsommation des ménages, évaluée à 26 % de la dépense totale des ménages, et sur les importations, même si les exportations notamment de produits de la mer progressent.

L'économie locale a connu un regain d'activité avec la réalisation du port de commerce et des équipements sportifs nécessaires à l'organisation des mini-jeux du Pacifique. En effet, cette compétition sportive réunissant 22 territoires bordés par l'océan Pacifique autour de 8 disciplines se sont tenus à Mata-Utu du 2 au 12 septembre 2013.

Les îles Wallis-et-Futuna connaissent ainsi une augmentation de l'emploi et des investissements des entreprises, ce qui entraîne une inflation proche de 4 % exacerbée par la fiscalité calédonienne sur les biens importés depuis la Nouvelle-Calédonie. Dans ce contexte, les recettes douanières qui constituent la majorité des ressources fiscales de la collectivité ont augmenté sensiblement de 8 % entre 2012 et 2013.

L'archipel reste cependant marqué par les dégâts causés par le passage de deux cyclones en quelques années : le cyclone Tomas en mars 2010 à Futuna et le cyclone Evan en décembre 2012 à Wallis.

Dans les deux cas, l'État a fait preuve de réactivité et son soutien a été déterminant pour réparer dans les meilleurs délais les séquelles de ces catastrophes naturelles même si elles ont laissé sur le territoire des stigmates.

Les aides mobilisées par l'État sont de trois ordres : tout d'abord, des aides d'extrême urgence, puis de la mise en place d'une aide alimentaire et, enfin, des aides à la reconstruction. Ainsi, l'État a ainsi mobilisé plus de 5 millions d'euros pour les sinistrés du cyclone Tomas et près de 2,3 millions d'euros pour les victimes du cyclone Evan.

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