C. UN PROGRAMME SOUMIS CES DERNIÈRES ANNÉES À UNE FORTE RÉGULATION BUDGÉTAIRE

Si les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour 2014 apparaissent stables par rapport aux crédits inscrits en loi de finances initiale pour 2013, les autorités administratives indépendantes s'inquiètent au regard de l'exécution budgétaire en 2013 qui a vu s'accumuler « gels » et « surgels » en cours d'exercice. Et ce, d'autant qu'elles n'ont pas fini de s'approprier les nouvelles missions que leur a confiées le législateur et qu'elles doivent faire face à une croissance de leur activité.

1. Les dépenses hors titre 2 principalement affectées

En 2012, les crédits du programme n° 308 ont été annulés à hauteur de 3 962 895 euros en autorisations d'engagement et 3 902 492 euros en crédits de paiement, soit respectivement 4,84 % et 4,17 % des crédits inscrits en loi de finances initiale. Pour les dépenses hors titre 2, les niveaux d'annulation s'élèvent toutefois à 8,89 % en autorisations d'engagement et 6,03 % en crédits de paiement.

Consommation des crédits de paiement en 2012 par rapport aux prévisions inscrites en loi de finances (en italique)

N° et intitulé de l'action

Titre 2

Évolution entre prévision et réalisation

Hors titre 2

Évolution entre prévision et réalisation

Total

2

CNIL

11 322 063

5 925 218

17 247 281

10 964 947

-3,2 %

5 469 060

-7,7 %

16 434 007

3

CSA

21 280 381

16 879 314

38 159 695

21 043 873

-1,1 %

15 413 380

-8,7 %

36 457 253

5

CGLPL

3 626 174

835 389

4 461 563

2 961 037

-18,3 %

769 392

-7,9 %

3 730 429

6

Autres autorités indépendantes

1 825 437

982 985

2 808 422

1 566 617

-14,2 %

891 081

-9,3 %

2 457 698

7

Sécurité et protection des libertés

729 670

148 336

878 006

541 566

-25,8 %

109 849

-25,9 %

651 415

9

Défenseur des droits

16 153 314

13 832 912

29 986 226

15 586 886

-3,5 %

13 390 601

-3,2 %

28 977 487

Total des CP prévus en LFI

Total des CP consommés

54 937 039

38 604 154

93 541 193

52 664 926

-4,1 %

36 043 363

-6,6 %

88 708 289

Annulations

- 1 573 979

- 2,9 %

- 2 328 513

- 6,0 %

- 3 902 492

Source : commission des lois à partir du rapport annuel de performance pour 2012

N.B. : Si les écarts entre crédits prévus et crédits consommés ne s'expliquent pas uniquement du fait de l'annulation de crédits, ils permettent tout de même d'apprécier les ordres de grandeur, en tout cas pour les dépenses hors titre 2.

Or, du fait du poids des charges fixes, en particulier des loyers des autorités hébergées dans le parc privé dans leurs dépenses de fonctionnement (33,8 % pour le CSA, 31,7 % pour le CGLPL pour 2012), les mesures de gel en viennent à peser très lourdement sur les autres dépenses de fonctionnement.

2. Un manque de prévisibilité dans la gestion des crédits

Si les autorités concernées ne contestent pas leur nécessaire contribution à l'effort général de maîtrise des dépenses publiques ainsi que le montre la réduction de leurs dépenses hors titre 2, elles regrettent en revanche le manque de prévisibilité de ces mesures de régulation qui nuisent à la bonne gestion de leurs crédits.

En effet, les mesures de régulation ont lieu tout au long de l'exercice, rendant obsolètes certaines options budgétaires prises sur la base des budgets opérationnels de programme revus après promulgation de la loi de finances initiale et publication du décret de répartition.

« Gels » et « surgels » au cours de l'exercice 2012

Le dispositif de mise en réserve initiale en début de gestion 2012 pour le programme 308 a été constitué de trois gels différenciés :

- la réserve de précaution instituée selon l'article 51 - 4° bis de la LOLF, calculée sur la base de 0,5 % des crédits de titre 2 et 6 % des crédits hors titre 2. La mise en réserve s'est ainsi élevée à 274 685 € en titre 2, 1 609 384 € en AE hors titre 2 et 2 312 769 € en CP hors titre 2 ;

- le gel relatif au dispositif « Fonds État exemplaire », d'un montant de 120 000 € hors titre 2 (AE = CP) ;

- le gel relatif au dispositif « Insertion des personnes handicapées dans la fonction publique », d'un montant de 50 000 € en hors titre 2 (AE = CP).

La réserve de précaution a évolué de la manière suivante en 2012 :

- annulation quasi intégrale de la réserve hors titre 2 en loi de finances rectificative du 14 mars 2012 , pour un montant de 1 599 884 € en AE et 2 299 884 € en CP hors titre 2 ;

- surgel au mois de juillet 2012 pour un montant de 700 000 € en AE et en CP hors titre 2 ;

- annulation du reliquat de la réserve de précaution hors compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » dans le cadre du schéma de fin de gestion : 252 136 € en titre 2 dans le cadre du décret d'avance et 709 500 € en AE et 712 885 € en CP hors titre 2 dans le cadre de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2012 ;

- transfert vers le CAS « Pensions », pour 22 549 € en titre 2 du reliquat des crédits de personnel encore en réserve et correspondant aux crédits gelés à partir de la masse salariale budgétée pour les contributions au CAS « Pensions ».

Le gel « Insertion des personnes handicapées dans la fonction publique » a quant à lui fait l'objet d'un dégel à hauteur de 11 905 € en AE et CP hors titre 2. Le reliquat, soit 38 905 € en AE et CP hors titre 2, a été reporté sur la gestion 2013.

Source : rapport annuel de performance pour 2012.

3. Des conséquences sur l'exercice des missions

En outre, ces mesures de régulation budgétaire conduisent les autorités à reporter d'un exercice sur l'autre certaines de leurs actions, voire à y renoncer. Cela peut même être le cas concernant certaines de leurs missions.

Si la CNIL et le CGLPL, en réponse au questionnaire budgétaire, n'ont eu à déplorer pour 2013 que le report de marchés pour une exécution budgétaire en 2014 ou la renonciation à ceux-ci, le Défenseur des droits indique pour sa part que « certaines actions en lien avec les missions opérationnelles du Défenseur des droits ont été obérées par les mesures de gel et de surgel, les dépenses liées à la localisation sur deux sites (loyers, charges, fonctionnement courant) restant incompressibles . »

La CNCIS fait état, quant à elle, de la nécessité dans laquelle elle s'est trouvée de reporter sur des exercices ultérieurs, voire de supprimer, des inspections sur place et sur pièce, les objectifs de contrôle des services et des sites d'exploitation des communications électroniques prévus pour l'année 2013 ayant été revus à la baisse de près de 20 %.

La CADA enfin, qui connaîtra pourtant en 2014 une baisse de ses ressources budgétaires, regrette que « l'animation du réseau des PRADA [personnes responsables de l'accès aux documents administratifs et des questions relatives à la réutilisation des informations publiques] et les actions de formation portant sur l'accès et la réutilisation [soient] en deçà des attentes et des besoins, faute de moyens suffisants susceptibles d'être consacrés à ces activités ». Elle signale que la mise en réserve d'une partie de ses crédits a été compensée par le produit de la redevance de réutilisation de ses avis et conseils acquittée par un éditeur juridique pour un montant de 5 000 euros par an. Un rapport remis le 5 novembre dernier par M. Mohammed Adnène Trojette au Premier ministre sur l'ouverture des données publiques, préconise toutefois la suppression de cette redevance.

Bien que conçu pour conforter l'indépendance financière des autorités administratives indépendantes, le programme n° 308 démontre ainsi les limites de l'exercice, relançant la question de la garantie de l'autonomie budgétaire des autorités administratives indépendantes.

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