C. UN ENJEU DE LA RÉFORME DES MODES D'ORIENTATION DE PLUS EN PLUS PRÉGNANT POUR DES UNIVERSITÉS AUX CAPACITÉS D'ACCUEIL LIMITÉES
Au cours de son audition par votre rapporteure pour avis, la présidente de l'Université Montpellier III - Paul Valéry, Mme Anne Fraïsse, a indiqué que son établissement, exposé à une augmentation significative de ses effectifs étudiants, en particulier boursiers, devait faire face à une pression considérable sur ses capacités d'accueil .
Les dispositions de l'article L. 612-3 du code de l'éducation garantissent la liberté de tout bachelier de s'inscrire dans l'établissement de son choix à partir des voeux exprimés dans le cadre de la procédure admission post-bac (APB) et excluent tout processus de sélection, sauf pour certaines filières ou certains types d'établissement (sections de techniciens supérieurs, instituts, écoles et préparations à celles-ci, grands établissements et établissements dont l'accès est subordonné à un concours national d'entrée).
Lorsque l'effectif des candidatures excède les capacités d'accueil d'un établissement (faute de places, de moyens de fonctionnement et de personnels enseignants en nombre suffisant), l'université a la possibilité de faire constater par le recteur la nécessaire limitation de ces « capacités d'accueil ». Il revient alors au recteur de prononcer, après avis du président de l'établissement, les inscriptions des étudiants « en fonction du domicile, de la situation de famille du candidat et des préférences exprimées par celui-ci ». Néanmoins, en pratique, les inscriptions sont prononcées par la voie du tirage au sort, seul moyen de ne pas établir de processus de sélection entre candidats .
Si le procédé du tirage au sort paraît, pour l'heure, comme le seul moyen de répartir les étudiants en dehors de toute sélection entre les établissements ayant institué des limitations de capacités d'accueil sur le fondement de l'article L. 612-3 précité, il n'en demeure pas moins que les affectations ainsi prononcées peuvent sembler profondément injustes pour un certain nombre d'étudiants, compte tenu de leurs résultats académiques et de leurs motivations.
Il convient, en outre, de rappeler que les capacités d'accueil mises en place par les universités (c'est-à-dire restriction dans le nombre de places disponibles) ne peuvent s'appliquer qu'aux « primo-entrants », c'est-à-dire les étudiants qui s'inscrivent pour la première fois en licence à l'université. Les services du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche ont du reste rappelé aux établissements leur obligation d'inscrire en première année les redoublants, voire parfois les « triplants », alors même que les résultats de certains d'entre eux (des moyennes comprises en 0 et 2 sur 20) et leur assiduité laissent clairement entendre que leur inscription était essentiellement motivée par la volonté de bénéficier des avantages associés au statut d'étudiant (carte d'étudiant, aides sociales, services de documentation...) tout en poursuivant des études ou des activités d'un autre type dans un autre cadre ou dans un autre établissement.
Ainsi, parmi les 5 000 étudiants inscrits en première année de licence, l'Université Montpellier III comptait, en 2013, près de 700 étudiants dont les résultats oscillaient entre 0 et 2 sur 20. En plaçant les universités dans une telle situation, il faut clairement admettre qu'on leur assigne un rôle social d'accueil d'un certain nombre d'étudiants qui n'entendent pas nécessairement obtenir le diplôme correspondant à la formation pour laquelle ils ont été inscrits .
Dans ces circonstances, plusieurs universités ont expérimenté des dispositifs tendant à renforcer la réussite des étudiants en premier cycle à partir d'une meilleure orientation et de la mise en place de passerelles. L'Université de La Rochelle a ainsi mis sur pied un système d'évaluation des étudiants dès la première semaine, les tests devant permettre aux étudiants d'identifier leur niveau et leurs éventuelles lacunes et à l'équipe pédagogique de proposer, le cas échéant, des sessions de tutorat. L'Université de Lorraine a signé, le 16 octobre 2013, un document cadre pour la mise en oeuvre d'un schéma concerté sur le continuum bac - 3/bac + 3 avec le rectorat de l'académie de Nancy-Metz afin d'élever le taux d'accès dans l'enseignement supérieur, en particulier par le renforcement de la cohérence dans l'orientation et la facilitation des passerelles entre voies du supérieur.
Pour rappel, la loi du 22 juillet 2013 a permis d'introduire des dispositions tendant à :
- renforcer l'accès des bacheliers technologiques aux instituts universitaires de technologie et des bacheliers professionnels aux sections de techniciens supérieurs, à partir de pourcentages minimaux correspondant à des places qui leur sont réservées, établis par le recteur en concertation avec les dirigeants des établissements accueillant ces formations supérieures ;
- expérimenter de nouvelles modalités d'accès à la première année commune d'études médicales (PACES). Les établissements qui le souhaitent peuvent ainsi proposer une réorientation aux étudiants non classés en rang utile à l'issue d'épreuves organisées huit mois après le début de leurs études. L'établissement peut décider que ces réorientations sont obligatoires dans la limite d'un pourcentage déterminé par arrêté pris après consultation des organisations représentatives concernées. Au-delà de ce pourcentage, une réorientation facultative peut être proposée aux étudiants ;
- expérimenter des modalités particulières d'admission dans des formations paramédicales sous la forme d'une première année commune à ces formations.