II. LA PROMOTION DE LA COMMANDE PUBLIQUE ET DE LA SUBVENTION PUBLIQUE COMME OUTILS D'INTERVENTION PUBLIQUE
Le projet de loi s'intéresse aux moyens ouverts à la puissance publique pour intervenir en faveur de l'économie sociale et solidaire, ce qui concerne, d'une part, les subventions publiques accordées par les personnes publiques ou les organismes chargés d'un service public aux personnes morales de droit privé et, d'autre part, la promotion des achats publics socialement responsables dans le cadre de la passation de marchés publics.
S'agissant de la commande publique, qui représente de 10 à 15 % du produit intérieur brut (PIB) en France, le projet de loi a pour objectif d'inciter les pouvoirs adjudicateurs et entités adjudicatrices à « repenser l'acte d'achat, au-delà de la satisfaction immédiate d'un besoin direct, afin de lui donner son plein effet de levier en faveur de l'emploi », ce qui passe essentiellement par l'insertion de clauses sociales dans les marchés publics ou le recours aux marchés réservés aux structures d'insertion.
Certes, un effort indéniable d'information et de formation des pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices pour favoriser l'insertion de clauses sociales a déjà été engagé avec le plan national d'accompagnement de l'offre d'insertion développé par la circulaire du 7 mai 2010 9 ( * ) . Cependant, les ambitions initiales n'ont pas permis d'aboutir aux résultats escomptés puisqu'à titre d'exemple, en 2011, seulement 5,5 % des marchés publics comportaient une clause sociale.
Aussi, certains pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices, dont les collectivités territoriales et leurs établissements publics locaux, auraient désormais l'obligation d'adopter un schéma de promotion des achats publics socialement responsable , dès lors que leur montant annuel d'achats serait supérieur à un montant fixé par décret ( article 9 ). Ce schéma qui serait rendu public aurait vocation à inciter, lors des passations de marchés publics, à utiliser les outils en faveur de l'insertion sociale des personnes les plus défavorisées (clauses sociales, marchés réservés, etc.). Sans emporter d'effets juridiques directs pour la passation des marchés ultérieurs, cette nouvelle obligation permettrait à chaque pouvoir adjudicateur ou entité adjudicatrice de présenter une politique globale et pérenne en ce domaine. Par prudence, le Gouvernement estime toutefois qu' « aucun impact global chiffré ne peut être proposé à ce stade ».
Tout en approuvant dans son principe cette disposition, votre commission a adopté un amendement de son rapporteur rendant applicable cette nouvelle obligation aux collectivités territoriales en fonction d'un seuil démographique - et non plus du montant d'achats réalisés par elles - et l'introduisant, dans un souci de plus grande lisibilité, au sein du code général des collectivités territoriales.
Parallèlement, la subvention est un moyen privilégié par les pouvoirs publics, essentiellement les collectivités territoriales, pour soutenir financièrement les associations. L'étude d'impact annexé au présent projet de loi estime à 500 000 le nombre d'associations bénéficiant chaque année d'au moins une subvention de la part du secteur public. Ce montant reste modique pour plus de la moitié des associations concernées puisque 58 % d'entre elles perçoivent un montant inférieur à 200 euros par an. À l'inverse, comme le relève l'étude d'impact, 67 % des subventions publiques aux associations sont destinées à seulement 2 % d'entre elles. Le montant de ces versements financiers souligne la diversité du monde associatif.
Cependant, le monde associatif enregistre une diminution du nombre de subventions publiques. Entre 2005 et 2011, la fréquence des subventions publiques aurait été réduite de 17 %.
Si cette baisse peut s'expliquer par une raréfaction des ressources publiques, elle trouve également son origine dans un basculement progressif du financement par subvention vers un financement par la voie de la commande publique . Cet effet d'éviction s'explique par la crainte des collectivités territoriales de verser une subvention pouvant être requalifiée en marché public, entraînant le remboursement des sommes versées et la responsabilité personnelle des agents publics ou des élus locaux concernés.
Le recours au marché public est tendanciellement moins favorable aux associations car lorsqu'une collectivité publique opte pour la passation d'un marché public, l'association doit se porter candidate à l'appel d'offres organisé par le pouvoir adjudicateur, ce qui suppose une mise en concurrence entre associations voire avec des entreprises situées dans le champ concurrentiel.
En posant une définition de la subvention ( article 10 ), le Gouvernement espère rendre plus sûr l'usage de la subvention en donnant « un cadre normatif solide au recours à cette dernière ». S'inspirant de l'effort de clarification entrepris par la circulaire du 18 janvier 2010 ayant pour objet de mieux définir les relations entre les pouvoirs publics et les associations, la loi consacrerait un édifice jurisprudentiel visant à encadrer le recours à la subvention dans le respect du droit de l'Union européenne.
Le Gouvernement souhaite favoriser la subvention lorsqu'elle est légalement possible et ainsi éviter le recours systématique à la passation de marchés publics du fait de la seule crainte des pouvoirs publics d'une violation du droit de la commande publique.
Tout en relevant que cette définition n'avait pas vocation à définir l'ensemble des subventions mais seulement celles versées par une personne publique à une personne morale de droit privée, notamment une association, votre commission l'a approuvée dans son principe. À l'initiative de son rapporteur, elle a néanmoins adopté un amendement visant à simplifier et préciser sa rédaction.
* 9 Circulaire du délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle du 7 mai 2010 relatif à la mise en oeuvre du programme national d'accompagnement de l'offre d'insertion.