II. CONSOLIDER LA SITUATION FINANCIÈRE DES RÉGIMES DE BASE À L'HORIZON 2020 SANS OBÉRER LA REPRISE
A. LA PARTICIPATION DES ACTIFS ET DES EMPLOYEURS AU REDRESSEMENT DES COMPTES DU SYSTÈME DE RETRAITES
1. Une hausse mesurée des cotisations vieillesse déplafonnées
Le Gouvernement a annoncé, dans le cadre de la présente réforme, une hausse progressive des cotisations vieillesse déplafonnées à partir de 2014 . Les modalités de cette hausse seront fixées par décret, selon les principes suivants pour les salariés du secteur privé :
- une hausse de 0,15 % en 2014 des parts salariales et patronales de cotisation déplafonnée, soit 0,30 % d'augmentation globale de cotisation;
- une hausse de 0,05 % des parts salariales et patronales de cotisation déplafonnée les trois années suivantes , soit 0,30 % d'augmentation globale de cotisation vieillesse entre 2015 et 2017.
Au total, d'ici 2017, les taux de cotisation déplafonnées des actifs et des employeurs seront augmentés de 0,30 % chacun .
La hausse prévue ne s'applique pas aux cotisations vieillesse plafonnées , calculées sur la base du salaire brut dans la limite du plafond annuel fixé par la sécurité sociale 45 ( * ) , mais aux cotisations déplafonnées, qui portent sur la totalité du salaire . Ainsi, les salariés qui perçoivent des rémunérations supérieures au plafond de la sécurité sociale contribueront pleinement à l'effort de redressement des comptes.
Par ailleurs, il convient de rappeler qu'une hausse des cotisations vieillesse plafonnées est intervenue en 2012 (+ 0,20 % répartis à part égale entre le salarié et l'employeur) pour financer l'élargissement des possibilités de départ à la retraite à 60 ans pour carrière longue 46 ( * ) , conformément à l'engagement du Président de la République. Afin de financer l'intégralité de cette mesure, dont le coût est estimé à 3 milliards d'euros à l'horizon 2017, les cotisations vieillesse plafonnées augmenteront de 0,05 % par an entre 2013 et 2016, pour la part salariale comme pour la part patronale. Au total, les taux de cotisation vieillesse plafonnés des actifs et des employeurs auront été augmentés de 0,25 % chacun entre 2012 et 2016 .
Tableau n° 36 : Evolution des taux de cotisation vieillesse du régime général de base
(en % des rémunérations brutes)
Cotisation plafonnée (rémunération sous le PASS) |
Cotisation déplafonnée (sur la totalité des rémunérations) |
|||
Salariale |
Patronale |
Salariale |
Patronale |
|
2012 |
6,65 |
8,30 |
0,10 |
1,60 |
2013 |
6,75 |
8,40 |
0,10 |
1,60 |
2014 |
6,80 |
8,45 |
0,25 |
1,75 |
2015 |
6,85 |
8,50 |
0,30 |
1,80 |
2016 |
6,90 |
8,55 |
0,35 |
1,85 |
2017 |
6,90 |
8,55 |
0,40 |
1,90 |
Source : commission des finances, d'après les données de la CNAV
L'ampleur de la hausse de cotisations annoncée par le Gouvernement est à la fois mesurée pour les actifs et proportionnée aux besoins de financement . L'augmentation de 0,15 % en 2014 ne représentera que 2,15 euros par mois pour une personne rémunérée au SMIC et 3,75 euros pour un salarié gagnant 2 500 euros par mois.
L'application de la hausse de cotisation salariale dans la fonction publique Comme les salariés du secteur privé, les fonctionnaires et les assurés des régimes spéciaux verront leurs cotisations vieillesse augmenter de 0,3 % d'ici 2017 mais selon des modalités différentes. S'agissant des fonctionnaires, la hausse de cotisation salariale sera échelonnée différemment dans le temps. En application de la loi portant réforme des retraites de 2010, il est prévu que les taux de cotisation vieillesse des fonctionnaires augmentent en effet chaque année de 0,27 % par an jusqu'en 2020. De plus, les fonctionnaires sont concernés par l'augmentation de 0,25 % entre 2012 et 2016, prévue par le décret du 2 juillet 2012 instaurant la retraite à 60 ans au titre des carrières longues. Afin de lisser l'impact cumulé de ces augmentations de cotisation sur le pouvoir d'achat des fonctionnaires, le Gouvernement a indiqué que la hausse de 0,3 % entre 2014 et 2017 se décomposerait de la façon suivante pour les fonctionnaires : - une hausse de 0,06 % en 2014 ; - des hausses de 0,08 % les trois années suivantes . Ainsi, le taux de cotisation salariale des fonctionnaires sera de 9,08 % en 2014 et atteindra 10,80 % en 2020 , soit un niveau équivalent à celui des salariés du secteur privé (en tenant compte des cotisations au régime de base et au régime complémentaire obligatoire). S'agissant de l'Etat employeur , celui-ci ne versant pas de cotisation mais une contribution visant à équilibrer le régime de la fonction publique d'Etat, il n'est pas concerné par la hausse de 0,3 %. Selon le projet de loi de finances pour 2014, son taux de contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » s'élèvera à 74,28 % en 2014, soit un taux identique à celui de 2013. |
Tout en ayant un impact limité sur le pouvoir d'achat des actifs et sur les charges des entreprises, cette mesure se traduira par une recette supplémentaire de 2,2 milliards d'euros dès 2014 et de 4,6 milliards d'euros en 2020 pour les régimes de retraite concernés.
Tableau n° 37 : Rendement attendu de la hausse des cotisations vieillesse déplafonnées
(en milliards d'euros 2011)
2014 |
2020 |
2030 |
2040 |
|
Salariés |
1,1 |
2,3 |
2,8 |
3,4 |
Entreprises |
1,1 |
2,3 |
2,8 |
3,4 |
Total |
2,2 |
4,6 |
5,6 |
6,8 |
Source : étude d'impact du projet de loi garantissant l'avenir et la justice du système de retraites
Enfin, le recours aux cotisations présente l'avantage d'être lisible pour les actifs et cohérent avec la logique assurantielle du régime de retraite . Partant de ce constat, la commission pour l'avenir des retraites avait proposé une hausse de 0,1 à 0,2 point par an des cotisations vieillesse déplafonnées pendant quatre ans, répartie à parts égales entre salariés et employeurs.
2. Une hausse de cotisations qui ne dégradera pas la compétitivité des entreprises
Le Premier ministre a annoncé, le 27 août 2013, que la hausse des cotisations vieillesse prévue en 2014 serait compensée afin de ne pas augmenter le coût du travail pour les entreprises. Cette compensation prendra la forme d'une diminution du taux de cotisation patronale versée à la branche famille de la sécurité sociale . Actuellement de 5,40 %, le taux de la cotisation famille devrait être ramené à 5,25 % en 2014, soit une baisse de 0,15 point.
L'article 39 du projet de loi de finances pour 2014 prévoit que la perte de recettes qu'entraîne cette baisse du taux de cotisation pour la branche famille de la sécurité sociale, estimée à 1 050 millions d'euros, sera intégralement compensée par le budget de l'Etat .
Le dispositif proposé par le Gouvernement apparaît doublement pertinent :
- du point de vue économique. L'économie française a enregistré un regain de croissance du PIB au deuxième trimestre 2013 (+ 0,5 %) mais la reprise est encore fragile. Selon l'INSEE, la croissance devrait rester nulle au troisième trimestre puis à nouveau progresser. Dans ce contexte, la neutralisation de la hausse des cotisations vieillesse en 2014 permettra de ne pas peser sur le coût du travail et donc sur l'emploi ;
- du point de vue de l'objectif de clarification du financement de la protection sociale . Dans son rapport d'étape publié en juin 2013, le Haut conseil du financement de la protection sociale a mis en exergue la question du financement de la branche famille. Celui-ci relève la « dissymétrie » existant entre des prestations familiales aujourd'hui ouvertes à toutes les familles résidant en France et une structure de financement reposant à 65 % sur les cotisations sociales des employeurs 47 ( * ) . Le choix de baisser le taux de cotisation famille pour compenser la hausse des cotisations vieillesse apparaît cohérent avec la volonté du Gouvernement de clarifier le financement de la protection sociale dans son ensemble.
Les travaux du Haut conseil du financement de la protection sociale Créé par le décret n° 2012-428 du 29 mars 2012 et placé directement auprès du Premier ministre, le Haut conseil du financement de la protection sociale (HCFi-PS) est chargé de mener « des travaux sur les moyens d'assurer, pour la protection sociale, en cohérence avec les prestations qu'elle couvre, un financement pérenne, favorable au développement et à la compétitivité de l'économie française, compatible avec les impératifs de solidarité et d'équilibre des finances sociales, dans le respect de la trajectoire des finances publiques ». Dans le cadre de son rapport d'étape, publié en juin 2013, le Haut conseil du financement de la protection sociale a présenté trois scénarios de clarification du financement des branches famille et vieillesse de la sécurité sociale : - un premier scénario consistant à procéder à une réduction des cotisations sociales à la charge des employeurs au titre du financement de la branche famille, en contrepartie d'une hausse de ces cotisations aux régimes de retraite de base. Parallèlement, des impôts et taxes aujourd'hui affectés à la CNAV seraient transférés à la CNAF ; - un deuxième scénario consistant à clarifier l'affectation des recettes fiscales entre les branches famille et maladie, mais sans accroître le poids des cotisations sociales dans le financement de cette dernière. Cela pourrait être obtenu en transférant comme dans le scénario précédent des cotisations sociales patronales de la branche famille vers la branche vieillesse, puis des impôts et taxes de la branche vieillesse vers la branche maladie, et en restituant enfin à la CNAF des prélèvements à assiette large et sans visée comportementale aujourd'hui affectés à la branche maladie (CSG et TVA) ; - un troisième scénario consistant à substituer de la CSG aux cotisations sociales à la charge des employeurs dans le financement de la branche famille, sans perte de rémunération nette pour les salariés. Le HCFi-PS remettra son rapport définitif à l'automne 2013. Source : Haut conseil du financement de la protection sociale, « Rapport d'étape sur la clarification et la diversification du financement des régimes de protection sociale », juin 2013 |
* 45 En 2013, le plafond annuel de la sécurité sociale (PASS) s'élève à 3 086 euros bruts par mois.
* 46 Décret n° 2012-847 du 2 juillet 2012 relatif à l'âge d'ouverture du droit à pension.
* 47 Il n'existe pas de part salariale pour la cotisation versée à la branche famille de la sécurité sociale.