B. LA MISE EN PLACE DE PARTENARIATS CIBLÉS
1. L'implication de l'Éducation nationale dans la réinsertion des mineurs pris en charge par la PJJ
Depuis la première circulaire conjointe Éducation nationale - Protection judiciaire de la jeunesse du 21 août 1985, qui a formalisé les collaborations existant entre les deux institutions, les partenariats n'ont cessé de se développer et de se diversifier au cours des années afin d'assurer une meilleure réussite scolaire des jeunes, de prévenir l'absentéisme et la déscolarisation, de réinsérer les élèves en rupture de scolarité et de lutter contre la violence au sein des établissements scolaires.
La PJJ intervient aujourd'hui auprès des établissements scolaires selon plusieurs modalités.
Une circulaire du 21 août 2006 a ainsi mis en place des « dispositifs relais » visant à accueillir des élèves de collège, parfois de lycée, entrés dans un processus de rejet de l'institution scolaire.
Les 459 dispositifs qui ont fonctionné en 2011-2012 se répartissent en 312 classes relais et 147 ateliers relais, permettant de prendre en charge plus de 9 000 élèves. L'équipe d'encadrement des élèves est constituée d'enseignants de l'Éducation Nationale, d'éducateurs du conseil général ou de la PJJ et, éventuellement, de personnels associatifs.
72 ETP de la PJJ sont affectés à ce dispositif et oeuvrent dans environ 150 classes relais.
En 2011, parmi les 9 000 élèves inscrits dans ces dispositifs, 31 % faisaient l'objet d'une mesure éducative prescrite par un juge des enfants.
Par ailleurs, à partir de la conclusion d'un accord-cadre entre les ministères de l'Éducation nationale et de la Justice en octobre 2010, les internats dits « établissements de réinsertion scolaire » (ERS) ont connu un développement important.
Au 1 er juillet 2012, 17 ERS étaient en fonctionnement.
Ces établissements ont vocation à accueillir chacun une vingtaine d'élèves de 13 à 16 ans, qui se sont révélés perturbateurs dans leur établissement scolaire d'origine et qui ont été exclus à plusieurs reprises.
La contribution de la PJJ en moyens humains est d'un poste d'éducateur jusqu'à 15 élèves puis de deux personnels à partir de 16 élèves (un poste de cadre et un éducateur). Au 1 er juillet 2012, 17,5 ETP de la PJJ sont répartis dans les 17 ERS existants.
Le ministère de la Justice a fait du renforcement de ces dispositifs l'une de ces priorités pour 2013.
2. Des relations étroites avec les services de police et de gendarmerie impliqués dans les dispositifs de prévention de la délinquance
La PJJ est invitée à s'impliquer, au sein de chaque territoire, dans les différentes instances compétentes en matière de prévention de la délinquance.
Les directeurs territoriaux de la PJJ rencontrent ainsi régulièrement les représentants des forces de police ou de gendarmerie :
- lors des réunions des conseils départementaux de prévention de la délinquance (CDPD) et des comités départementaux de sécurité (CDS) ;
- au niveau des communes, dans les groupes locaux de traitement de la délinquance (GLTD) et des conseils locaux ou intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD, CISPD).
En outre, des contacts sont établis avec les responsables des polices municipales.
Des actions conjointes ou complémentaires peuvent faire l'objet de fiches actions dans le cadre des contrats locaux de sécurité (CLS) afin de construire un partenariat entre les forces de sécurité et les éducateurs de la PJJ pour la mise en oeuvre de mesures judiciaires (stage de citoyenneté ou de formation civique ou mesures de réparation).
Par exemple, un protocole relatif à la création d'un module « police » dans le cadre des mesures de réparations pénales a été signé en janvier 2011 entre la préfecture de police de Paris, la direction territoriale de la PJJ, le procureur de la République et l'association « AAPé ». Le public ciblé est celui de mineurs âgés de 13 ans ou plus, primo-délinquants ou réitérants ayant commis des actes de violence, en particulier sur des personnes exerçant une mission de service public.
En dehors de ces dispositifs, les forces de sécurité participent régulièrement à des actions conjointes de prévention avec des éducateurs de la PJJ dans le cadre de la sécurité routière, d'activités sportives ou de la présentation de l'exposition interactive « 13-18 : questions de justice » dans les établissements scolaires, ainsi que lors du déroulement des opérations « Ville Vie Vacances ».
3. Évaluer et diffuser les solutions innovantes
Lors de sa visite à l'unité éducative de milieu ouvert de Douai, votre rapporteur pour avis a pris connaissance avec le plus grand intérêt des dispositifs innovants de prise en charge que ce service initie et développe à l'heure actuelle.
Ce service prend en charge 200 mineurs en permanence, quasiment exclusivement dans un cadre pénal (à l'exception des mesures d'investigation).
Le caractère éminemment sensible du territoire de Douai, où se concentrent plusieurs types de difficultés et de problématiques, a incité l'ensemble des acteurs qui y sont présents à travailler ensemble à la recherche de solutions éducatives ciblées.
Ainsi ce service a-t-il développé de façon significative le nombre de partenaires avec lesquels mettre en oeuvre la mesure de réparation pénale, qui constitue une part importante de son activité :
- s'agissant de réparations pénales susceptibles d'être exécutées par le mineur individuellement, le Secours catholique, les Restos du Coeur, les municipalités de la région ou le centre de soins et d'accompagnement et de prévention en addictologie, notamment, prennent en charge des mineurs dans ce cadre ;
- quant aux réparations pénales indirectes susceptibles d'être mises en oeuvre de façon collective, les mesures incluent des stages de sensibilisation aux dangers des stupéfiants et de l'alcool, des actions de prévention routière ou font intervenir le service d'incendie et de secours du Nord.
Votre rapporteur pour avis s'est également entretenu avec des représentants de la Brigade de prévention de la délinquance juvénile de la gendarmerie nationale de Valenciennes, qui organisent des sessions adaptées au type de délits commis à destination de petits groupes de mineurs (6 à 10 jeunes en moyenne). L'équipe est composée de sept gendarmes et deux personnels engagés du service civique. Les sessions, qui ont lieu une à deux fois par mois, permettent d'ouvrir un dialogue avec les mineurs et de leur rappeler le cadre légal ainsi que les règles élémentaires de la citoyenneté et de la vie en société. Les actions sont ciblées sur le type d'infractions commises : atteintes aux biens et aux personnes ; infractions à la législation sur les stupéfiants ; infractions au code de la route. 309 jeunes ont été suivis dans ce cadre en 2011. Les premiers retours d'expérience semblent indiquer que ce type de rencontres présente un véritable intérêt, notamment en permettant aux mineurs de dialoguer avec des représentants de l'autorité en dehors de toute confrontation.
Le service territorial de milieu ouvert s'est par ailleurs interrogé sur le moyen d'apporter une réponse à des faits de délinquance sexuelle « peu graves » mais nécessitant une réponse adaptée.
A cette fin, une convention a été conclue entre la PJJ et le centre médicopsychologique de Douai. Deux groupes de parole ont été mis en place :
- un premier groupe de parole dit « à visée éducative » vise à réunir quatre à cinq jeunes autour d'un éducateur et d'un sexologue ;
- un second groupe, destiné à des jeunes en probation, offre une prise en charge plus soutenue et construite dans la durée (une séance de deux heures tous les 15 jours tout au long de l'année) par deux psychologues, permettant d'aborder tous types de questions sur les infractions sexuelles.
Les professionnels rencontrés par votre rapporteur pour avis ont estimé, au vu des premières évaluations, que ces groupes de parole paraissaient offrir de bons résultats en termes de non-récidive.
A la date de la visite de votre rapporteur pour avis, un projet de convention visant à cibler la prise en charge sur la problématique des addictions à l'alcool ou aux produits stupéfiants était à l'étude.
Par ailleurs, les représentants de la PJJ lui ont indiqué que l'implication croissante des collectivités territoriales, notamment des centres d'action sociale, permettait d'avoir une vision globale de la situation des mineurs et ainsi de mieux définir les modalités des prises en charge.
Au total, votre commission ne peut qu'encourager la PJJ à développer et à évaluer ce type d'expériences, et, le cas échéant, à encourager la diffusion de ces pratiques sur l'ensemble des territoires pertinents.
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Au bénéfice de ces observations, votre commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme n° 182 : « protection judiciaire de la jeunesse » de la mission « justice » du projet de loi de finances pour 2013.