II. À BUDGET CONSTANT, LES MARGES DE MANOEUVRE SUCEPTIBLES DÊTRE DÉGAGÉES PAR REDÉPLOIEMENT SONT TRÈS LIMITÉES MAIS RÉELLES

Partant de l'idée que si la coopération française veut avoir une action significative dans ces zones prioritaires et veut honorer les engagements pris à l'égard des Objectifs du Millénaire pour le Développement de lutte contre le réchauffement climatique, il faut trouver, selon les ambitions que l'on se fixe, 200 à 500 millions d'euros. Vos rapporteurs ont étudié la possibilité de trouver ces financements par redéploiement de crédits afin de ne pas aggraver les déficits publics.

A. COMPTE TENU DU RYTHME DES RECONSTITUTIONS DES FONDS MULTILATÉRAUX, LES MARGES DE MANoeUVRE SUR L'AIDE MULTILATÉRALE SONT À COURT TERME ÉTROITES

La première solution consisterait à réduire nos contributions multilatérales. Dans le droit-fil du rééquilibrage entre les contributions bilatérales et multilatérales, il s'agirait de trouver plusieurs centaines de millions d'euros dans les actions multilatérales des programmes 110 et 209.

Or, l'examen de ces contributions nous a montré que les marges de manoeuvre étaient étroites.

En effet, sur le programme 110, la majeure partie des fonds multilatéraux ont déjà fait l'objet de reconstitution, de sorte que nos engagements courent jusqu'en 2013, voire au-delà . Ainsi, la France a participé à la 16 e reconstitution de la Banque mondiale qui nous engage jusqu'en 2014. De même la France a participé à la 12 e reconstitution du Fonds africain de développement qui nous engage jusqu'en 2013.

Une réduction homothétique sur les différents fonds sectoriels du programme 110 permettrait, années après années, de dégager des marges de manoeuvre.

Vos rapporteurs sont d'avis qu'un prélèvement de 10 millions, répartis de façon homothétique sur le programme 110, sur les fonds multilatéraux, et notamment les fonds spécialisés tels que le Fonds fiduciaires au profit de pays sortant de crise, le Fonds fiduciaire LAB/LAT, le METAC, l'AFRITAC, l'Initiative pour l'alimentation en eau et l'assainissement en milieu rural en Afrique, le Fonds du sarcophage de Tchernobyl et le Compte pour la Sûreté nucléaire, le FIAS, le Fonds fiduciaire de la Facilité euro-méditerranéenne d'investissement et de partenariat (FEMIP), la facilité pour le Partenariat oriental, ou le Fonds Doha, en regardant notamment le taux de consommation de ces crédits, permettrait d'amorcer un redressement de la ligne aide projet du programme 209.

C'est pourquoi, ils ont proposé à la commission qui l'a adopté un amendement transférant du programme 110 au programme 209, 10 millions d'euros à destination de l'aide-projet.

S'agissant du Fonds européen de développement, certes, la nouvelle clef de répartition des contributions a permis de dégager de nouveaux crédits pour l'aide bilatérale. En outre, la diminution de la consommation des crédits du FED aurait dû permettre de redéployer vers l'aide projet.

Mais votre commission n'a pas les moyens de restituer par voie d'amendement ces crédits sur le programme 209 sans créer de dépenses nouvelles, ce qui lui est interdit par la LOLF.

Vos rapporteurs regrettent que cela ne soit pas le cas.

En ce qui concerne nos contributions à des fonds multilatéraux, les récentes réductions ont fragilisé la participation de la France aux instances de programmation, voire aux conseils d'administration, comme c'est déjà le cas dans certaines institutions de l'ONU.

Poursuivre dans cette voie pourrait conduire la France à perdre son siège dans des institutions auxquelles elle a toujours participé et dans lesquelles elle pèse de tout son poids pour que la programmation soit conforme à ses priorités géographiques.

Dans ce contexte contraint, la seule marge de manoeuvre serait la contribution au FMSTP. Il serait contradictoire de diminuer notre contribution, quelque temps après l'avoir augmentée, en septembre dernier, de plus de 60 millions d'euros financés par la taxe sur les billets d'avion.

Toutefois, compte tenu des difficultés du fonds à décaisser les financements obtenus, une réduction de notre contribution ne se traduirait pas forcément par une diminution des actions menées et permettrait sans doute de dégager des financements substantiels.

Là encore, la LOLF ne permet pas à votre commission de réallouer les fonds au sein du programme 209.

C'est pourquoi votre commission a procédé autrement.

Elle a adopté un amendement annexé au présent rapport qui tend à réallouer 10 millions d'euros de crédits du programme 110, action n° 01 Aide économique et financière multilatérale au profit de l'action n° 2 Coopération bilatérale du programme 209.

Cet amendement prélève 10 millions sur les 673 millions de crédits de paiements de l'action multilatérale du programme 110 vise à amorcer, à budget constant, un rééquilibrage en faveur de l'aide bilatérale et au sein de l'aide bilatérale au profit des subventions aux projets de coopération destinées aux 17 pays pauvres prioritaires.

B. UN NOUVEL ARBITRAGE ENTRE BONIFICATION ET SUBVENTION AURAIT DES CONSÉQUENCES DISCUTABLES

Une autre voie consisterait à rééquilibrer le montant respectif des autorisations de programme des crédits de bonification du programme 110 et des crédits de subvention du programme 209 au profit de ce dernier.

Les crédits de bonification qui permettent à l'AFD de faire des prêts concessionnels ont augmenté ces dernières années de façon importante pendant que ceux consacrés aux subventions ont diminué, comme l'illustre le graphique suivant :

Source : Sénat sur la base des chiffres du COM et de l'AFD

Si on considère les autorisations de programme prévues dans le contrat d'objectifs et de moyens de l'AFD, en 2013, comparées à celles de 2008, les bonifications ont augmenté de 21 % quand les subventions ont diminué de 22 %.

1. Une façon de réorienter l'aide vers les pays prioritaires ?

Nous avons vu que ces deux instruments ne permettent pas d'atteindre les mêmes pays ni les mêmes secteurs.

Un rééquilibrage, à terme, au profit des zones prioritaires pourrait, en apparence, être obtenu, en loi de finances, par un abondement des crédits de subvention du programme 209 qui, à budget constant, pourrait être pris aux crédits de bonification du programme 110.

Cependant, en matière de bonification, les crédits de paiement correspondent aux engagements de prêts pris. Une diminution de ces crédits entraînerait une baisse des bonifications des nouveaux prêts qui ne se ferait sentir qu'à moyen terme.

2. Des conséquences discutables

Les conséquences d'un transfert de 100 millions d'euros issus du programme 110 consacré aux bonifications vers le programme 209 au profit des dons/projets méritent d'être analysées de façon approfondie.

L'impact sur la capacité d'intervention de l'AFD d'une telle mesure serait important puisque, pour un euro de subvention en plus, il y aura 9 euros de prêts en moins en raison de l'effet de levier des prêts par rapport au « coût Etat ». Autrement dit, pour faire bénéficier l'Afrique subsaharienne de 100 millions de plus de subventions, le redéploiement conduit in fine à une diminution de 900 millions de prêts pour des destinations qui sont, il est vrai, souvent différentes.

L'impact, en termes d'APD déclarée, sera également, à court terme, négatif. En effet, dans le cas du don, le montant d'APD déclaré au CAD est égal au montant de la subvention. Dans le cas du prêt, le montant d'APD est égal au montant du versement de capital déduit des remboursements. Le montant d'APD produit est initialement plus élevé, mais il est ultérieurement intégralement annulé par les remboursements.

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