N° 398

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2011-2012

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 février 2012

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , de finances rectificative pour 2012 ,

Par M. Yves DAUDIGNY,

Sénateur,

Rapporteur général

(1) Cette commission est composée de : Mme Annie David , président ; M. Jacky Le Menn, Mme Catherine Génisson, MM. Jean-Pierre Godefroy, Claude Jeannerot, Alain Milon, Mme Isabelle Debré, MM. Jean-Louis Lorrain, Jean-Marie Vanlerenberghe, Gilbert Barbier , vice-présidents ; Mmes Claire-Lise Campion, Aline Archimbaud, Catherine Deroche, M. Marc Laménie, Mme Chantal Jouanno , secrétaires ; Mmes Jacqueline Alquier, Natacha Bouchart, Marie-Thérèse Bruguière, MM. Jean-Noël Cardoux, Luc Carvounas, Mme Caroline Cayeux, M. Bernard Cazeau, Mmes Karine Claireaux, Laurence Cohen, M. Yves Daudigny, Mme Christiane Demontès, MM. Gérard Dériot, Jean Desessard, Mme Muguette Dini, M. Jean-Léonce Dupont, Mme Odette Duriez, MM. Guy Fischer, Michel Fontaine, Mme Samia Ghali, M. Bruno Gilles, Mmes Colette Giudicelli, Christiane Hummel, M. Jean-François Husson, Mme Christiane Kammermann, MM. Ronan Kerdraon, Georges Labazée, Claude Léonard, Jean-Claude Leroy, Hervé Marseille, Mmes Michelle Meunier, Isabelle Pasquet, M. Louis Pinton, Mmes Gisèle Printz, Catherine Procaccia, MM. Gérard Roche, René-Paul Savary, Mme Patricia Schillinger, MM. René Teulade, Michel Vergoz, André Villiers, Dominique Watrin.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

4332 , 4338 , 4339 et T.A. 860

Sénat :

389 et 390 (2011-2012)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La commission des affaires sociales s'est saisie pour avis de deux articles du projet de loi de finances rectificative pour 2012 :

- l'article 1 er , intitulé « dispositions fiscales améliorant la compétitivité des entreprises », qui comporte la mesure dite « TVA sociale » et tous les ajustements qui lui sont liés ; cet article modifie en effet directement le mode de financement actuel de la protection sociale, en particulier de sa branche famille ;

- l'article 8 , relatif à la contribution supplémentaire à l'apprentissage, dont le barème est augmenté pour les entreprises de plus de deux cents cinquante salariés qui ne respectent pas un quota d'alternants, lui-même en augmentation.

L'examen approfondi de ces deux séries de mesures a conduit la commission à en proposer le rejet, tant du fait de son opposition à la démarche suivie qu'en raison du contenu même de ces deux mesures.

C'est pourquoi, elle a décidé de s'associer à la motion, adoptée par la commission des finances, tendant à opposer la question préalable à ce projet de collectif budgétaire.

I. LE REFUS DE LA MÉTHODE EMPLOYÉE PAR LE GOUVERNEMENT

A deux mois exactement d'une échéance politique majeure pour notre pays, le Gouvernement demande au Parlement de voter - en urgence - une réforme de grande ampleur, qu'il dit déterminante pour l'avenir de l'économie et la compétitivité de nos entreprises, touchant à la fois la structure des prélèvements obligatoires et le mode de financement de notre système de protection sociale.

Or, le moment choisi pour engager une telle réforme paraît peu opportun.

En effet, soit il fallait faire cette réforme au cours des années précédentes et il est difficile alors de ne pas évoquer les rapports Besson et Lagarde de la fin 2007 qui n'étaient clairement pas favorables à la mise en place d'une telle mesure ; soit il convient d'en faire aujourd'hui l'un des éléments phares et prioritaires du programme présidentiel et donc d'en prévoir la mise en place après les échéances électorales du printemps.

A l'Assemblée nationale d'ailleurs, tant Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires sociales, que Gilles Carrez, rapporteur général du budget, ont vigoureusement soutenu à la tribune que, selon eux, il s'agit là d'une réforme de début de législature. Jean Arthuis a soutenu la même position lors de son audition devant votre commission.

Deux autres points encore paraissent particulièrement contestables en termes de méthode :

- l'urgence dans laquelle le Parlement doit débattre

Le projet de collectif a été adopté en Conseil des ministres le 8 février. La commission des finances de l'Assemblée nationale l'a examiné le jour même, ce qui n'est pas de nature à permettre un travail réellement approfondi sur l'ensemble du projet de loi.

De la même manière, dès le vote définitif du texte par l'Assemblée nationale, la commission des finances du Sénat a examiné le projet de loi, puis le lendemain votre commission des affaires sociales, quelques heures seulement avant d'entamer la discussion en séance publique ...

La suite du calendrier est elle aussi déjà arrêtée. Au total, le Parlement aura donc adopté, en à peine trois semaines, un texte aux conséquences très loin d'être négligeables pour l'ensemble de nos concitoyens . Quel parlementaire, quelle que soit son appartenance politique, peut décemment accepter un tel passage en force ? Et qui plus est, sur des sujets aussi importants ? Ce sont les fondements même de notre démocratie que l'on remet en question : les Parlements n'ont-ils pas été créés précisément pour examiner et voter en toute indépendance et sérénité les lois budgétaires des Etats ?

- les dates d'entrée en vigueur des réformes qu'il est demandé au Parlement d'adopter

La mesure « TVA sociale » est prévue pour s'appliquer à compter du 1 er octobre 2012 : comment dès lors justifier l'urgence d'un vote avant les élections ? Sauf bien sûr à croire son promoteur qui attend un rebond de consommation du seul fait de l'annonce de la mesure... alors que, dans le même temps, il se dit persuadé qu'aucune hausse des prix n'interviendra après l'augmentation de la TVA !

Il en va de même pour la mesure apprentissage : l'article 8 prévoit de relever à 5 % le quota d'alternants dans l'effectif de l'entreprise à compter des rémunérations versées en 2015 , c'est-à-dire pour le calcul de la taxe payée en 2016 ! Comment comprendre, là encore, l'urgence de la réforme ?

Ces motifs pourraient à eux seuls justifier le rejet du collectif et le dépôt d'une question préalable, ce qu'a fait hier soir la commission des finances.

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