C. UN APPROFONDISSEMENT EN COURS DE LA POLITIQUE COMMUNE DE L'ASILE
Au-delà de l'adaptation du dispositif « Dublin II », le Pacte européen sur l'immigration et l'asile , adopté sous présidence française de l'Union européenne en octobre 2008, a prévu d'instaurer, au plus tard en 2012, une procédure d'asile unique comportant des garanties communes et d'adopter des statuts uniformes pour les réfugiés comme pour les bénéficiaires de la protection subsidiaire. Il prévoit, en outre, la mise en place d'un Bureau européen d'appui en matière d'asile, ainsi qu'un renforcement de la solidarité entre les États membres au profit de ceux « dont le régime d'asile national est soumis à des pressions spécifiques et disproportionnées », par la mise en place de transferts de réfugiés entre États.
Le Bureau européen d'appui en matière d'asile , créé en mai 2010, a été installé à Malte en juin 2011. Il s'agit d'une agence de régulation dénuée de toute compétence décisionnelle en matière d'asile mais exerçant des activités d'appui et de coordination ; elle peut également formuler des propositions. Ce Bureau est chargé de trois missions :
- l'appui à la coopération pratique en matière d'asile (facilitation de l'échange de bonnes pratiques, collecte d'informations sur les pays d'origine, appui à la coopération entre les États membres pour la mise en oeuvre du mécanisme « Dublin II », appui aux opérations de réinstallation intra-communautaire) ;
- l'assistance aux États membres soumis à des pressions particulières en matière d'asile avec la création d'équipes d'appui en matière d'asile ;
- enfin, la mise en oeuvre du régime d'asile européen commun par la collecte et l'échange d'informations ainsi que la préparation de rapports.
Parallèlement, des programmes de transferts intracommunautaires de réfugiés (de « relocation ») ont été mis en oeuvre. En 2009 puis en 2010, la France a ainsi accueilli sur son territoire un peu moins de 200 personnes bénéficiant d'une protection internationale (statut de réfugié ou protection subsidiaire) à Malte.
La mise en oeuvre du régime d'asile européen commun dépend désormais de la définition d'un accord entre le Conseil et le Parlement européen sur les différents textes composant le « paquet asile » présenté en deux temps par la Commission européenne en décembre 2008 et octobre 2009.
L'état des discussions de chacun de ces textes est le suivant :
- la refonte de la directive 2004/83/CE dite directive « qualification » a fait l'objet d'un accord politique en juillet 2011 entre le Parlement européen et le Conseil et devrait être définitivement adoptée avant la fin de l'année 2011 : ce texte harmonise notamment le contenu des statuts de protection internationale, ce qui devrait contribuer à limiter les mouvements secondaires de demandeurs d'asile au sein de l'Union européenne ;
- pour la refonte du règlement « Dublin II », le point majeur de blocage porte sur l'introduction d'une clause de suspension temporaire des transferts entre États membres, soutenu par la Commission et le Parlement européen mais rejeté par une majorité d'États membres (voir supra ) ;
- en ce qui concerne la refonte du règlement EURODAC, un accord a été trouvé à l'exception de la question de l'accès des forces de police à la base de données (voir supra ) ;
- la refonte de la directive 2003/9/CE dite directive « accueil » achoppe sur plusieurs points, notamment la définition des membres de la famille, l'accès au marché du travail, le niveau des prestations sociales et la rétention ;
- enfin, la refonte de la directive 2005/85/CE dite directive « procédures » suscite des réserves chez certains États membres tenant notamment aux coûts administratifs et financiers de certaines dispositions visant à accroître les garanties procédurales offertes aux demandeurs d'asile ainsi qu'à l'absence de dispositions permettant de traiter efficacement les détournements de procédure.
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En conclusion, votre commission des lois considère que les moyens mis en oeuvre par le Gouvernement en matière d'asile soulèvent des difficultés majeures :
- d'une part, en dépit d'un effort notable, les crédits prévus par le projet de loi de finances pour 2012, inférieurs à l'activité exécutée en 2010 alors même que le nombre de demandeurs d'asile n'a cessé de croître depuis, seront de toute évidence insuffisants pour permettre à notre pays d'honorer ses engagements internationaux, conduisant en cela votre commission à s'interroger sur leur conformité au principe de sincérité budgétaire inscrit dans la LOLF ;
- d'autre part, le recours excessif aux procédures prioritaires et la gestion erratique des dispositifs d'accueil et d'hébergement des demandeurs d'asile compromet la faculté de ces derniers à exercer leurs droits dans des conditions satisfaisantes.
Pour ces raisons, votre commission a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés à l'asile par le projet de loi de finances pour 2012.