2. Radio France Internationale : le fils maudit ?
Lors d'une audition de M. Alain de Pouzilhac, président-directeur général, et de Mme Christine Ockrent, directrice générale déléguée de la société Audiovisuel extérieur de la France, organisée par la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat le mercredi 10 mai 2009, sur la situation de Radio France Internationale, le tableau dépeint par les deux dirigeants était apparu particulièrement sombre .
Mme Christine Ockrent relevait ainsi que, même en Afrique francophone, RFI est en perte de vitesse significative : « si le nombre de ses auditeurs y a légèrement augmenté en valeur absolue, sa part de marché est passée de 19,3 % en 2004 à 17,2 % en 2008, alors que la zone connaissait dans le même temps une croissance démographique de 14,7 %. Le constat est identique pour la grande majorité des zones géographiques couvertes par RFI, tant en Amérique du Nord et du Sud qu'au Proche et Moyen-Orient ou en Europe. Seule l'Afrique non francophone présente un maintien de l'audience de RFI à un niveau stable ».
Selon elle, les performances décevantes de RFI en termes de parts de marché traduisaient l'incapacité structurelle de la station à s'adapter aux évolutions démographiques et géopolitiques de son environnement international. Elle insistait sur le fait que « les faiblesses de RFI sont d'autant plus criantes que ses principaux concurrents jouissent d'un dynamisme exceptionnel, notamment la BBC qui continue de battre régulièrement des records d'audience. La station radiophonique britannique s'est appuyée notamment sur une politique d'adaptation de ses effectifs et de ses compétences aux besoins du marché : après avoir supprimé 7 400 postes en quatre ans, elle a procédé récemment à l'embauche de personnels en leur offrant une formation spécifique à l'usage des nouvelles technologies de l'information et de la communication »
M. Alain de Pouzilhac, président-directeur général de la société Audiovisuel extérieur de la France, avait, quant à lui, insisté sur la nécessité pour RFI de rattraper son retard de compétitivité sur le plan technologique.
Depuis, probablement grâce à l'inventivité déployée par les dirigeants, RFI semble se porter beaucoup mieux . Les réponses au questionnaire budgétaire révèlent que 37,6 millions d'auditeurs écoutent RFI chaque semaine dont 24,3 millions en Afrique francophone, 8,2 millions en Afrique non francophone et 5,1 millions dans le reste du monde. Cette progression tient en partie à l'explosion de la langue haoussa qui, quatre ans après son lancement, totaliserait près de 7 millions d'auditeurs pour le seul Nigéria.
En Afrique, le groupe veut « conserver une position de radio dominante aussi bien auprès des élites que du grand public dans la partie francophone du continent, tout en profitant de cette image pour gagner des parts de marché dans le reste du continent ». Sur une moyenne de 15 pays, RFI est en tête des radios internationales, tant en notoriété qu'en audience hebdomadaire. En audience veille, RFI arrive en tête à Abidjan (36 %), à Libreville (45 %), à Kinshasa (21 %) et à Brazzaville (40 %). Elle est deuxième à Yaoundé, Douala, Bamako et Nouakchott.
Ces positions seraient maintenues « grâce à une ligne éditoriale fondée sur la confrontation des points de vue, une information internationale, française et africaine de qualité, mais aussi des émissions de société qui concernent les auditeurs, des émissions interactives, doublées d'opérations de délocalisation sur le terrain ».
Votre rapporteure estime quant à elle que l'impact de RFI en Afrique n'est plus à démontrer et que la modernisation de la radio est en bonne voie : ainsi a été récemment mise en place une rédaction unique multilingue et multimédias (Internet et radio), articulée autour de deux responsables éditoriaux, l'un en charge de toutes les diffusions vers l'Afrique, quelle que soit la langue et le support, l'autre en charge du reste du monde.
Elle est en revanche plus sceptique sur certains des moyens avancés afin de « faciliter » cette modernisation.
Le plan de sauvegarde de l'emploi mis en oeuvre à RFI en 2008 sous forme de plan de départs volontaires a entrainé la suppression de 206 postes, avec pour l'IGF un effet contrasté : le coût du PSE a ainsi été élevé (41,3 millions d'euros contre 30,2 millions d'euros) du fait « d'une mauvais appréciation de l'âge des partants, d'un décalage du calendrier et du coût des litiges mis en oeuvre ». La mission de l'IGF se prononce au demeurant contre un nouveau plan social dans l'AEF qui concernerait en fait RFI. Votre rapporteure partage pleinement le point de vue tendant à considérer que ces pratiques sont coûteuses, ont un effet néfaste sur les relations sociales, et ne peuvent « se substituer à une véritable gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences ».
De même, la suppression à très court terme de la diffusion en ondes courtes et moyennes n'est pas forcément la panacée, au vu de la perte d'audience massive qu'elle entrainerait.