b) Un dispositif de financement vertueux à préserver
(1) Un dispositif efficace
Depuis 1946, la politique de soutien au cinéma fonctionne selon un mécanisme vertueux dans lequel une partie des revenus de la diffusion d'oeuvres est prélevée et recyclée pour financer la production de nouvelles oeuvres originales, qui viendront à leur tour alimenter les circuits de diffusion.
Ce mécanisme de soutien automatique , envié par nos partenaires étrangers, présente de nombreux atouts :
- il est mutualiste, puisque les revenus générés par toutes les oeuvres diffusées, y compris étrangères, viennent contribuer au financement des oeuvres françaises, favorisant ainsi le renouvellement de la création et des talents nationaux ;
- il garantit la contribution de tous les acteurs de la chaîne au financement de la création française (y compris les fournisseurs d'accès) ;
- il permet d'assurer que le soutien à la production d'oeuvres françaises reste en phase avec l'évolution économique globale des secteurs soutenus ;
- son autonomie est une garantie fondamentale de l'acceptabilité des prélèvements par les redevables ;
- il permet d'asseoir la solidité économique des professionnels en établissant en quelque sorte une épargne forcée des revenus générés par les oeuvres, qui ne peut être réinvestie que dans de nouvelles créations ;
- il opère de façon mécanique une redistribution entre les oeuvres, de par la dégressivité des coefficients de retour les grands succès y contribuent donc davantage que les autres ;
- il est essentiel au maintien d'un tissu de salles de cinéma dense et moderne car il assure aux exploitants un socle de financement pour la numérisation et la modernisation de leurs salles.
(2) L'article 16 ter du PLF : en l'état, une menace pour le dispositif de soutien du CNC
Rappelons qu'à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2011, l'adoption d'un amendement de notre collègue Philippe Marini, alors rapporteur général du budget avait conduit à prélever 20 millions d'euros sur le budget du CNC.
S'agissant du présent projet de loi de finances pour 2012, l'Assemblée nationale a adopté l'amendement n° 431 rectifié présenté par le Gouvernement, insérant un article 16 ter et ayant pour effet de plafonner le produit de chacune des taxes affectées au CNC, dans le but de limiter ses ressources à 700 millions d'euros, le surplus étant reversé au budget de l'État.
Cette démarche a été dénoncée par tous les professionnels du secteur, qui craignent un grave risque de fragilisation de l'ensemble du dispositif pourtant efficace et vertueux de soutien public au cinéma et à l'audiovisuel.
En effet, elle emporte un fort risque de fragilisation des soutiens automatiques , fondés sur une redistribution mécanique et mutualiste des recettes générées par les oeuvres aux fins de réinvestissement, comme il a été dit précédemment. Ainsi, plus précisément :
- pour la taxe sur les entrées en salles de cinéma ( TSA ) : le niveau des entrées en salles de cinéma génère, par application du taux de 10,72 %, un certain montant de taxes sur les entrées. Pour le CNC, y correspond mécaniquement un certain niveau de dépenses par les soutiens automatiques. En cas de plafonnement de la recette, cette dépense mécanique devra l'être également ;
- il en est de même pour le volet « éditeurs » de la taxe sur la télévision ( TST ) : le chiffre d'affaires des éditeurs est à la fois la base de la taxe et la base de leurs obligations d'investissement dans la production, donc de soutiens automatiques délivrés à la production diffusée par ces chaînes ;
- le même raisonnement vaut pour la taxe sur la vidéo : le chiffre d'affaires des éditeurs vidéo constitue à la fois la base taxée et la base des soutiens automatiques.
En outre, les professionnels étrangers soumis à ces taxes pourraient en contester le bien-fondé si l'essentiel de leurs produits n'était pas dédié à la filière.