EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. LE MONOPOLE DES LOIS FINANCIÈRES EN MATIÈRE DE PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES : UN OUTIL DE RÉDUCTION DES DÉFICITS BUDGÉTAIRES ?
Avec une dette publique de près de 1 600 milliards d'euros et un déficit public, encore accru par la crise économique de 2008, qui a atteint 7 % du produit intérieur brut (PIB) en 2010, nul ne saurait ignorer la nécessité de faire preuve de créativité pour adopter des règles contraignantes contribuant à mettre fin à la dérive budgétaire.
Les deux mesures principales prévues par le présent projet de loi constituent à cet égard à l'évidence des innovations majeures dans notre ordre constitutionnel. Mais répondent-elles toutes les deux à l'objectif visé ?
Si votre commission pour avis approuve totalement la création des lois-cadres d'équilibre, elle estime en revanche que le monopole n'est pas de nature à répondre efficacement au problème soulevé .
A. LES LOIS-CADRES, INSTRUMENT ESSENTIEL DU RETOUR À L'ÉQUILIBRE DES COMPTES PUBLICS
1. De nouvelles obligations fixées aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale
À la suite de la conférence sur le déficit qui s'est tenue le 28 janvier 2010, un groupe de travail présidé par M. Michel Camdessus, gouverneur honoraire de la Banque de France, a été chargé de réfléchir à l'amélioration de la gouvernance budgétaire et aux conditions de réalisation de l'objectif constitutionnel d'équilibre des finances publiques, inscrit à l'article 34 de la Constitution depuis la révision du 23 juillet 2008.
Reprenant la principale préconisation du rapport issu de ses travaux 1 ( * ) , l'article 1 er du projet de loi constitutionnelle prévoit la création d'une nouvelle catégorie de lois : les lois-cadres d'équilibre des finances publiques, qui remplaceront les actuelles lois de programmation des finances publiques.
Ce faisant, il s'inscrit dans un contexte global d'institution de règles budgétaires contraignantes rappelées par la commission des lois de l'Assemblée nationale dans son rapport sur le présent texte 2 ( * ) . Celui-ci observe à ce sujet que l'inscription des règles budgétaires à un niveau constitutionnel reste relativement rare puisque, parmi les 160 règles budgétaires recensées par le FMI dans 90 pays en 2009, seules sept d'entre elles 3 ( * ) relèvent de ce niveau.
Au terme de l'article 1 er du texte transmis au Sénat, ces lois-cadres détermineront, pour au moins trois années , les orientations pluriannuelles , les normes d'évolution et les règles de gestion des finances publiques . Elles fixeront, pour chaque année , un objectif constitué d'un maximum de dépenses et d'un minimum de recettes qui s'imposera aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale . Celles-ci feront l'objet d'un examen systématique par le Conseil Constitutionnel , qui devra se prononcer sur leur conformité à la loi-cadre d'équilibre.
* 1 « Réaliser l'objectif constitutionnel d'équilibre des finances publiques », rapport du groupe de travail présidé par M. Michel Camdessus, Gouverneur honoraire de la Banque de France, 21 juin 2010.
* 2 Rapport n° 3333 fait au nom de la commission des lois par M. Jean-Luc Warsmann, p. 12 à 14.
* 3 Dans les pays suivants : Allemagne, Brésil, Comores, Pologne et Suisse.