Article 27 octies - (art. L. 7122-3, L. 7122-9, L. 7122-10, L. 7122-11 et L. 7122-16 du code du travail) - Mise en oeuvre de la directive « services » pour les agences de mannequins
Objet : Cet article, ajouté en commission par l'Assemblée nationale, vise à transposer la directive « services » au secteur des agences de mannequins et à alléger les règles d'incompatibilités pesant sur les personnes travaillant pour ces agences .
I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale
Cet article tend à apporter plusieurs modifications au chapitre du code du travail consacré aux « mannequins et agences de mannequins » (articles L. 7123-1 à L. 7123-32).
En vertu de l'article L. 7123-11 du code du travail, le placement de mannequins à titre onéreux ne peut être réalisé que par des personnes titulaires d'une licence d'agence de mannequins.
Cette règle s'applique aux agences établies en France mais aussi à celles établies dans un autre Etat membre de la Communauté européenne ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen (EEE), ce qui n'est pas conforme à la directive « services ». Afin de donner toute sa portée au principe de la libre prestation de services, cette directive autorise en effet les Etats membres à soumettre les prestataires de services établis dans un autre Etat membre à des formalités déclaratives mais pas à un régime d'autorisation, qui risquerait d'être redondant avec les obligations auxquelles ils sont déjà soumis dans leur Etat d'origine.
Pour mettre le code du travail en conformité avec la directive, le 1° propose une nouvelle rédaction de l'article L. 7123-11 du code du travail : le principe selon lequel le placement de mannequins peut être réalisé à titre onéreux serait réaffirmé ; puis il serait indiqué qu'une personne établie sur le territoire national qui exerce l'activité de placement de mannequins à titre onéreux doit être titulaire d'une licence ; enfin, il serait précisé que les agences de mannequins légalement établies dans un autre Etat membre de la Communauté, ou dans un Etat partie à l'accord sur l'EEE, peuvent exercer leur activité en France de façon temporaire et occasionnelle, sous réserve d'une simple déclaration préalable de leur activité.
Le 2° propose ensuite d'alléger le régime des incompatibilités prévu à l'article L. 7123-15 du code du travail. En vertu de cet article, une licence d'agences de mannequins ne peut être accordée à une personne qui exerce l'une des activités suivantes :
- production ou réalisation d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles ;
- distribution ou sélection pour l'adaptation d'une production ;
- organisation de cours ou de stages de formation payants pour mannequins ou comédiens ;
- agence de publicité ;
- éditeur ;
- organisateur de défilés de mode ;
- photographe.
Trois activités seraient supprimées de cette liste : la production ou réalisation d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles ; l'activité d'éditeur ; l'activité de photographe. Il deviendrait alors possible d'exercer ces activités tout en exploitant une agence de mannequins.
Enfin, le 3° de l'article propose une nouvelle rédaction pour l'article L. 7123-16 du code du travail, qui précise à qui s'appliquent les incompatibilités qui viennent d'être présentées : sont actuellement concernés les dirigeants sociaux et l'ensemble des associés lorsque l'agence de mannequins a la forme sociétaire, ainsi que les salariés de l'agence de mannequins.
La nouvelle rédaction proposée indique que ces incompatibilités concerneraient les dirigeants sociaux, les associés et les salariés des agences de mannequins établies sur le territoire. En revanche, elles ne s'appliquent pas aux agences de mannequins mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 7123-11 du code du travail, c'est-à-dire établies dans un autre Etat membre de la Communauté européenne ou de l'EEE qui exerce temporairement et occasionnellement son activité en France.
Le 4° de l'article comporte enfin une mesure de coordination à l'article L. 7123-27 du code du travail, qui fixe les peines applicables en cas d'infraction à ces règles d'incompatibilités (six mois d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende).
II - La position de votre commission
Comme à l'article précédent, votre commission estime préférable de procéder à la transposition de la directive « services » au secteur des agences de mannequins dans le cadre de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques, dont l'article 8 concerne cette profession, plutôt que dans le cadre de cette proposition de loi.
Elle observe notamment qu'il est envisagé de modifier le régime des incompatibilités applicables aux exploitants d'agence de mannequins, alors qu'une telle adaptation n'apparaît pas indispensable au regard des exigences de la directive.
Si elle n'est pas hostile, par principe, à un toilettage de ces dispositions, votre commission juge indispensable d'associer à la réflexion les représentants de la profession. Or ceux-ci n'ont pas été consultés sur la version du texte figurant dans le projet de loi, qui diffère pourtant sensiblement de celle adoptée dans le cadre de la proposition de loi.
Comme cela a été indiqué, il est envisagé, dans la proposition de loi, de supprimer certaines incompatibilités. Dans le projet de loi, il est proposé de supprimer entièrement la liste des incompatibilités au profit d'un principe général selon lequel « les agences de mannequins prennent toutes mesures nécessaires pour garantir la défense des intérêts des mannequins qu'elles emploient et éviter les situations de conflit d'intérêt » .
Votre commission redoute que le flou de cette formule soit source d'insécurité juridique : à partir de quel moment un exploitant d'agence de mannequins sera-t-il sûr d'avoir pris « toutes » les mesures nécessaires ?
A l'évidence, ce sujet appelle une réflexion plus approfondie, qu'il n'a pas été possible de mener à bien à l'occasion de l'examen de cette proposition de loi qui traite de mille et un sujets, sans lien les uns avec les autres.
Pour ces raisons, votre commission demande à la commission saisie au fond de supprimer cet article , afin que cette question puisse être abordée plus sérieusement ultérieurement.